Lot Essay
Sur une mer calme, une grande barge à deux mâts sans voiles, et dont le pont avant est bâché, est vue dans toute sa longueur, remplissant la page entière. La dimension de cette grande barcasse est signifiée par la petite silhouette d'un homme et par une petite barque au premier plan. Dans la partie supérieure, les mâts et les cordes en diagonale créent une géométrie dynamique, tandis qu'à droite, un grand mât avec des cordes n'est qu'esquissé au crayon.
Les vues de ports, parfois agrémentées de sujets historiques, ont beaucoup fait pour la gloire de Claude et les nombreux bateaux qui y sont figurés ont depuis longtemps suscité l'admiration par leur élégance, leur variété et la précision de leur description. Pourtant, les études dessinées de bateaux sont relativement rares, pas plus d'une dizaine sur un total de plus de 1100 dessins connus (voir M. Roethlisberger, Claude Lorrain The Drawings, Berkeley et Los Angeles, 1968, nos. 50, 83, 140, 159, 281, 282, 286, 396-399). Ces dessins sont de deux sortes : des représentations de larges navires dans une mer souvent agitée et des études de bateaux plus modestes, à l'ancre ou accostés à un pont. Les premiers (voir, par exemple, Roethlisberger, op. cit., nos. 282, 396 et 397) sont considérés comme des copies d'après des modèles (gravures ou tableaux) d'artistes plus anciens, tandis que les seconds - un groupe auquel appartient le présent dessin inédit - ont été dessinés d'après nature. Parfois, l'artiste, une fois de retour dans son atelier, les reprend au pinceau et lavis brun. Ici, l'artiste avait dans un premier temps dessiné sur la droite, à la craie noire, un troisième mât, mais au moment d'agrémenter son dessin d'un riche lavis brun, il a préféré représenter une bâche couvrant la partie avant de la barge.
Ce dessin, tout comme une grande partie des autres études de bateaux, peut être daté de la deuxième partie de la décennie 1630, et plus précisément, selon Marcel Roethlisberger, des années 1638-40. Il a pu être réalisé au port de Ripa Grande, situé sur la rive droite du Tibre, face à l'Aventin et l'un des lieux de Rome préférés des paysagistes aux 17ème et 18ème siècles (Brueghel, Breenbergh, van Wittel, Pannini et Piranèse furent parmi ceux qui le représentèrent). Deux vues du port dessinées par Claude (Roethlisberger, op. cit., nos. 280 et 286) montrent de larges barques à deux ou trois mâts fort comparables à celle représentée ici.
Tout comme les autres dessins de bateaux de Claude, celui-ci ne peut être directement mis en rapport avec un tableau. L'artiste semble avoir voulu se constituer une sorte de répertoire de formes qu'il utilisa ensuite dans ses peintures en les modifiant sensiblement. Par exemple, la barcasse du présent dessin est assez similaire à celle représentée sur la gauche d'un Paysage côtier avec un artiste dessinant, daté de 1639 et aujourd'hui conservé au Cincinnati Art Museum (M. Roethlisberger, Claude Lorrain The Paintings, New York, 1979, no. 26; cat. expo. Claude Lorrain 1600-1682, Washington, 1982, no. 25). Il est d'ailleurs tentant de rapprocher les deux figures rapidement esquissées à la sanguine au verso du présent dessin de celles de deux voyageurs figurés vers la gauche du tableau de Cincinnati. Des études de figures, pour la même oeuvre, également à la sanguine et rapidement tracées, sont dessinées au verso d'une Vue du Tibre avec une tour sur la rive opposée (Francfort, Staedel Museum; Roethlisberger, 1979, op. cit, no. 359; cat. expo. Claude Lorrain The Enchanted Landscape, Oxford, Ashmolean Museum, 2011-12, no. 23) où se distingue une large barge...
L'inscription " io so uno omo quando ci voglio andare in qualche loco no le fo capire a nissuno " (je suis un homme quand je veux aller quelque part je ne le fais savoir à personne), à la plume et encre brune au verso, est quelque peu ambigüe et intrigue. Marcel Roethlisberger n'est pas certain qu'elle soit de la main de Claude.
Avec sa mise en page très resserrée, le jeu géométrique créé par les mâts et cordes, les forts rapports d'ombre et de lumière laissant une grande partie du bateau dans l'obscurité, ce dessin frappe par sa modernité et la mer, comme brossée au lavis, n'est pas sans évoquer Victor Hugo ou même Henri Michaux.
Nous remercions Monsieur Marcel Roethlisberger d'avoir confirmé l'attribution de ce dessin à partir d'une photographie (communication écrite du 20 décembre 2011) et de son aide apportée à la rédaction de cette notice.
Les vues de ports, parfois agrémentées de sujets historiques, ont beaucoup fait pour la gloire de Claude et les nombreux bateaux qui y sont figurés ont depuis longtemps suscité l'admiration par leur élégance, leur variété et la précision de leur description. Pourtant, les études dessinées de bateaux sont relativement rares, pas plus d'une dizaine sur un total de plus de 1100 dessins connus (voir M. Roethlisberger, Claude Lorrain The Drawings, Berkeley et Los Angeles, 1968, nos. 50, 83, 140, 159, 281, 282, 286, 396-399). Ces dessins sont de deux sortes : des représentations de larges navires dans une mer souvent agitée et des études de bateaux plus modestes, à l'ancre ou accostés à un pont. Les premiers (voir, par exemple, Roethlisberger, op. cit., nos. 282, 396 et 397) sont considérés comme des copies d'après des modèles (gravures ou tableaux) d'artistes plus anciens, tandis que les seconds - un groupe auquel appartient le présent dessin inédit - ont été dessinés d'après nature. Parfois, l'artiste, une fois de retour dans son atelier, les reprend au pinceau et lavis brun. Ici, l'artiste avait dans un premier temps dessiné sur la droite, à la craie noire, un troisième mât, mais au moment d'agrémenter son dessin d'un riche lavis brun, il a préféré représenter une bâche couvrant la partie avant de la barge.
Ce dessin, tout comme une grande partie des autres études de bateaux, peut être daté de la deuxième partie de la décennie 1630, et plus précisément, selon Marcel Roethlisberger, des années 1638-40. Il a pu être réalisé au port de Ripa Grande, situé sur la rive droite du Tibre, face à l'Aventin et l'un des lieux de Rome préférés des paysagistes aux 17ème et 18ème siècles (Brueghel, Breenbergh, van Wittel, Pannini et Piranèse furent parmi ceux qui le représentèrent). Deux vues du port dessinées par Claude (Roethlisberger, op. cit., nos. 280 et 286) montrent de larges barques à deux ou trois mâts fort comparables à celle représentée ici.
Tout comme les autres dessins de bateaux de Claude, celui-ci ne peut être directement mis en rapport avec un tableau. L'artiste semble avoir voulu se constituer une sorte de répertoire de formes qu'il utilisa ensuite dans ses peintures en les modifiant sensiblement. Par exemple, la barcasse du présent dessin est assez similaire à celle représentée sur la gauche d'un Paysage côtier avec un artiste dessinant, daté de 1639 et aujourd'hui conservé au Cincinnati Art Museum (M. Roethlisberger, Claude Lorrain The Paintings, New York, 1979, no. 26; cat. expo. Claude Lorrain 1600-1682, Washington, 1982, no. 25). Il est d'ailleurs tentant de rapprocher les deux figures rapidement esquissées à la sanguine au verso du présent dessin de celles de deux voyageurs figurés vers la gauche du tableau de Cincinnati. Des études de figures, pour la même oeuvre, également à la sanguine et rapidement tracées, sont dessinées au verso d'une Vue du Tibre avec une tour sur la rive opposée (Francfort, Staedel Museum; Roethlisberger, 1979, op. cit, no. 359; cat. expo. Claude Lorrain The Enchanted Landscape, Oxford, Ashmolean Museum, 2011-12, no. 23) où se distingue une large barge...
L'inscription " io so uno omo quando ci voglio andare in qualche loco no le fo capire a nissuno " (je suis un homme quand je veux aller quelque part je ne le fais savoir à personne), à la plume et encre brune au verso, est quelque peu ambigüe et intrigue. Marcel Roethlisberger n'est pas certain qu'elle soit de la main de Claude.
Avec sa mise en page très resserrée, le jeu géométrique créé par les mâts et cordes, les forts rapports d'ombre et de lumière laissant une grande partie du bateau dans l'obscurité, ce dessin frappe par sa modernité et la mer, comme brossée au lavis, n'est pas sans évoquer Victor Hugo ou même Henri Michaux.
Nous remercions Monsieur Marcel Roethlisberger d'avoir confirmé l'attribution de ce dessin à partir d'une photographie (communication écrite du 20 décembre 2011) et de son aide apportée à la rédaction de cette notice.