Lot Essay
"Il est certain que les masques Dan, Géré, Wobé et Gio ont, depuis ces vingt dernières années, attirés l'attention des chercheurs, des amateurs et des collectionneurs. Les célèbres ventes aux enchères de Ratton à Drouot, le goût de Paris, les odes lyriques et dithyrambiques consacrées à ces masques par les artistes avant-gardistes et les critiques, n'ont fait qu'accroître leurs réputations". Frans Olbrechts (1939).
Cette citation du célèbre universitaire belge nous rappelle que, depuis le début du siècle dernier, le masque Dan a été reconnu comme étant l'une des formes les plus emblématiques de l'art africain, ayant permis une véritable diffusion de tout l'art sub-saharien. Les plus beaux masque Dan, comme celui de Ciolkowska, affichent des caractéristiques contradictoires: douceur/force, surface/volumétrie, séduction/appréhension, naturalisme /abstraction.
Clairement sculpté par un grand maître, le masque de Ciolkowska est d'une forme particulièrement voluptueuse, rarement atteinte à ce degré, notamment visible au niveau des yeux aux lourdes paupières, dont les parties inférieures et supérieures forment une demi-sphère encadrée par des pommettes pyramidales et répondant aux lèvres saillantes particulièrement sensuelles, tous ces éléments étant regroupés autour d'un nez tubulaire et surplombés d'un front légèrement bombé. Basé sur une comparaison stylistique de masques Dan figurant des traits similaires, tels que de lourdes paupières, des pommettes triangulaires, des lèvres charnues, une surface polie, l'origine de ce masque peut être identifiée parmie les Dan méridionaux, résidant aux abords de la frontière ouest de la Côte d'Ivoire et au Liberia. Certains des masques dan les plus somptueux et dynamiques, pouvant être attribués aux Dan, mais aussi aux Wé, sont originaires de cette région (voir Vandenhoute, 1948 et Marie-Noëlle Verger-Fèvre, 1993 pour une discussion plus approfondie sur les styles dan du nord et du sud). Cette région compte plusieurs sous-groupes Dan dont les Uamé, qui vivent dans le Haut-Cavally, et a été le lieu de production de certains des masques dan les plus célèbres et le lieu de naissance d'artistes talentueux, comme par exemple Zlan du village Wé de Béléwalé. Voir, par exemple, un masque collecté par Vandengoute en 1939 dans le Haut-Cavally présentant le même expressionisme contenu que le masque de Ciolkowska (Petridis [ed.], 2001, cat. no.97) et Himmelheber (1960, p.139, #119) pour une beauté expressionniste envoûtante, un masque anthropo-zoomorphe, sculpté par Zlan, avec des lèvres saillantes et un front en pente douce.
Marie-Ange Ciolkowska eu une place unique dans le monde de l'art tribal. Née au début du siècle dernier, elle fut une figure marquante de la scène artistique tribale durant plus d'un demi-siècle, jusqu'à sa mort au début des années 1990. "Mariée à un artiste polonais qui mourut jeune, son fils unique, un brillant photographe, fut tué dans un accident d'avion dans sa vingtième année. Collectionneuse passionnée d'exotisme, elle se finançait en fournissant des marchands auxquels elle vendait également des bijoux tribaux. Son appartement au 26 rue Jacob était un lieu de rencontre pour les intellectuels ainsi que les artistes et Breton, Eluard et Madelaine Rousseau étaient parmi ceux qui dînaient à sa table dans une pièce où les murs étaient recouverts de tapa des Samoa. Parmi ses amis les plus proches, il y avait John Hewett et Peter Wilson, avec lesquels elle avait l'habitude de se retrouver. Un été, il y eu un problème dans un restaurant, elle courut au alors à Ramatuelle, Peter Wilson devint le sommelier et George Ortiz, un serveur afin de l'aider. Les pièces phares de sa collection sont la figure Nukuoro de Hooper que Ken Webster lui céda, et qui fut acquise plus tard par George Ortiz, et le superbe tambour du détroit de Torres qui fut acheté chez Christie's par Marcia et John Friede (Christie's, Paris 20 juin 2006, lot 277). Elle parvint à récupérer des oeuvres provenant de musées allemands après la Seconde Guerre mondiale, dont la plupart furent envoyés à New York pour J.J. Klejman" (Hermione Waterfield, communication personnelle, octobre 2012). Elle passait l'automne et l'hiver à Paris et le printemps et l'été à Ramatuelle, c'est là qu'elle acquis cet exquis masque dan, un peu avant 1983.
Cette citation du célèbre universitaire belge nous rappelle que, depuis le début du siècle dernier, le masque Dan a été reconnu comme étant l'une des formes les plus emblématiques de l'art africain, ayant permis une véritable diffusion de tout l'art sub-saharien. Les plus beaux masque Dan, comme celui de Ciolkowska, affichent des caractéristiques contradictoires: douceur/force, surface/volumétrie, séduction/appréhension, naturalisme /abstraction.
Clairement sculpté par un grand maître, le masque de Ciolkowska est d'une forme particulièrement voluptueuse, rarement atteinte à ce degré, notamment visible au niveau des yeux aux lourdes paupières, dont les parties inférieures et supérieures forment une demi-sphère encadrée par des pommettes pyramidales et répondant aux lèvres saillantes particulièrement sensuelles, tous ces éléments étant regroupés autour d'un nez tubulaire et surplombés d'un front légèrement bombé. Basé sur une comparaison stylistique de masques Dan figurant des traits similaires, tels que de lourdes paupières, des pommettes triangulaires, des lèvres charnues, une surface polie, l'origine de ce masque peut être identifiée parmie les Dan méridionaux, résidant aux abords de la frontière ouest de la Côte d'Ivoire et au Liberia. Certains des masques dan les plus somptueux et dynamiques, pouvant être attribués aux Dan, mais aussi aux Wé, sont originaires de cette région (voir Vandenhoute, 1948 et Marie-Noëlle Verger-Fèvre, 1993 pour une discussion plus approfondie sur les styles dan du nord et du sud). Cette région compte plusieurs sous-groupes Dan dont les Uamé, qui vivent dans le Haut-Cavally, et a été le lieu de production de certains des masques dan les plus célèbres et le lieu de naissance d'artistes talentueux, comme par exemple Zlan du village Wé de Béléwalé. Voir, par exemple, un masque collecté par Vandengoute en 1939 dans le Haut-Cavally présentant le même expressionisme contenu que le masque de Ciolkowska (Petridis [ed.], 2001, cat. no.97) et Himmelheber (1960, p.139, #119) pour une beauté expressionniste envoûtante, un masque anthropo-zoomorphe, sculpté par Zlan, avec des lèvres saillantes et un front en pente douce.
Marie-Ange Ciolkowska eu une place unique dans le monde de l'art tribal. Née au début du siècle dernier, elle fut une figure marquante de la scène artistique tribale durant plus d'un demi-siècle, jusqu'à sa mort au début des années 1990. "Mariée à un artiste polonais qui mourut jeune, son fils unique, un brillant photographe, fut tué dans un accident d'avion dans sa vingtième année. Collectionneuse passionnée d'exotisme, elle se finançait en fournissant des marchands auxquels elle vendait également des bijoux tribaux. Son appartement au 26 rue Jacob était un lieu de rencontre pour les intellectuels ainsi que les artistes et Breton, Eluard et Madelaine Rousseau étaient parmi ceux qui dînaient à sa table dans une pièce où les murs étaient recouverts de tapa des Samoa. Parmi ses amis les plus proches, il y avait John Hewett et Peter Wilson, avec lesquels elle avait l'habitude de se retrouver. Un été, il y eu un problème dans un restaurant, elle courut au alors à Ramatuelle, Peter Wilson devint le sommelier et George Ortiz, un serveur afin de l'aider. Les pièces phares de sa collection sont la figure Nukuoro de Hooper que Ken Webster lui céda, et qui fut acquise plus tard par George Ortiz, et le superbe tambour du détroit de Torres qui fut acheté chez Christie's par Marcia et John Friede (Christie's, Paris 20 juin 2006, lot 277). Elle parvint à récupérer des oeuvres provenant de musées allemands après la Seconde Guerre mondiale, dont la plupart furent envoyés à New York pour J.J. Klejman" (Hermione Waterfield, communication personnelle, octobre 2012). Elle passait l'automne et l'hiver à Paris et le printemps et l'été à Ramatuelle, c'est là qu'elle acquis cet exquis masque dan, un peu avant 1983.