CONSOLE D'EPOQUE RESTAURATION
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CONSOLE D'EPOQUE RESTAURATION

ATTRIBUEE A LOUIS-FRANCOIS BELLANGE, VERS 1820 - 1822

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CONSOLE D'EPOQUE RESTAURATION
ATTRIBUEE A LOUIS-FRANCOIS BELLANGE, VERS 1820 - 1822
En placage d’amarante, plaques de porcelaine de Paris, ornementation de bronze ciselé et doré, le dessus de marbre griotte restauré, la ceinture ayant pu former jardinière et présentant un décor de branchages de feurs et de fruits dans des réserves encadrant un enfant, les montants antérieurs à cannelures et chapiteau corinthien, les montants postérieurs en pilastres cannelés peutêtre modifés, le plateau d’entretoise à fond de glace, les pieds en toupie, avec une estampille apocryphe sur la traverse arrière J.H.REISENER (sic), avec une petite étiquette ovale à bordure rouge 27333, une autre étiquette ‘81069’ et avec une étiquette sous le marbre THE PANTECHNICON / G. SALOMON ESQ. / 1ST CON. / HEATHFIELDS TERRACE, W[...]

Hauteur: 86,5 cm. (34 in.) ; Largeur: 91,5 cm. (36 in.) ; Profondeur: 36 cm. (14¼ in.)
Provenance
Ancienne collection Salomon, Londres ;
Ancienne collection Dalva, New York ;
Vente Christie's, Londres, 23 mars 1972, lot 119 ;
Ancienne collection Plowden ;
Vente Sotheby's, Londres, 2 décembre 1983, lot 126
Special notice
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Further details
A RESTAURATION ORMOLU-MOUNTED AMARANTH AND PARIS PORCELAIN CONSOLE, ATTRIBUTED TO LOUIS-FRANCOIS BELLANGE, CIRCA 1820-1822

Lot Essay

LOUIS-FRANCOIS BELLANGE
Louis-François Bellangé naît à Paris le 19 décembre 1759. Les archives le concernant sont rares avant la Restauration, mais on le trouve mentionné en 1811 parmi la liste des ébénistes parisiens sollicités par le Mobilier impérial dans le cadre des commandes de soutien à l’artisanat parisien. La relative modestie de sa situation jusqu’en 1815 semble céder la place, après la chute de l’Empire, à une période faste marquée par des travaux pour une clientèle aristocratique française et britannique désireuse d’enrichir leurs collections d’objets d’art français anciens et modernes. L’atelier Bellangé, installé au 41, rue du Faubourg Saint-Martin jusqu’en 1818, puis au 33, rue des Marais, se spécialise dans la production de meubles dits de curiosité, objets de grand luxe ornés de décors de panneaux de pierres dures, de laques ou de plaques de porcelaine.
Bellangé et le mobilier de porcelaine autour de 1820 : un moment rare dans l’histoire du goût.
Spécialisé dans la production d’un genre bien particulier d’ébénisterie de luxe, Louis-François Bellangé fait figure de cas à part dans le mobilier du premier tiers du XIXe siècle. Peu de meubles furent produits, et très peu sont encore localisés de nos jours. Parmi ces objets rares de facture XIXe mais à tonalité XVIIIe, les meubles à décor de plaques de porcelaine occupent chez Bellangé la première place. Le marchand de curiosité Alexis Delahante (1767-1837) semble ainsi avoir joué un rôle fondamental auprès de Bellangé, fournissant à son atelier les matériaux les plus précieux mais aussi à de très prestigieux clients, français ou britanniques. Le couple d’amateurs le plus célèbre de ce type de meubles fut sans doute le roi d’Angleterre George IV et sa maîtresse, la marquise Conyngham, pour lequel l’association Delahante-Bellangé livre en 1821 et 1822 un ensemble composé de deux paires de torchères et d’une somptueuse console semi-circulaire à figures d’enfants joueurs.
On remarquera la délicatesse des bronzes dorés, notamment les chapiteaux, bases de colonnes et les pieds en toupie. Ces modèles se retrouvent habituellement d’un meuble à l’autre dans l’oeuvre de Bellangé. La production de ces bronzes revenait à l’atelier du bronzier Toussaint Monvoisin, qui maria son fils et successeur Jean-Toussaint à la fille de l’ébéniste en 1825.

LA PROVENANCE LAPEYRIERE
Plusieurs indices concordent pour reconnaître dans la présente console un meuble commandé à Bellangé dans les premières années de la décennie 1820 de la part du financier Pierre-Augustin Lapeyrière, l’un des collectionneurs français les plus ambitieux du XIXe siècle. Né en 1779, fils d’un receveur des contributions de la Seine, Lapeyrière succède à son père dans ses fonctions en 1810. Lapeyrière accumule la plus importante fortune recensée à Paris au tournant de 1820. Il n’en profitera pas longtemps.
Après d’importants investissements dans le quartier de la Chaussée d’Antin, et notamment dans la Nouvelle Athènes qu’il contribua à créer, il subit de plein fouet les effets de la crise financière de 1823. Déclaré en faillite en février 1831, il dut quitter ses fonctions et mourut quelques mois plus tard. En 1819, du temps de sa splendeur, Lapeyrière fait l’acquisition de l’hôtel de Rohan-Monbazon, sur le faubourg Saint-Honoré, qu’il fait aménager à grand frais. En matière d’objets d’art et de mobilier, le collectionneur avait su réunir un ensemble impressionnant de chefs-d’oeuvre : commode en laque de René Dubois aujourd’hui conservée à la Wallace Collection de Londres, table de bois pétrifié par Anton Domanock, de l’ancienne collection de Marie-Antoinette (Versailles, musée national du château), commodes à tableaux de pietra dura de Carlin (Londres, collection de Sa Majesté la reine d’Angleterre) et de Weisweiler (Los Angeles, J. Paul Getty Museum). Lapeyrière, probablement sous l’influence de Delahante, avait aussi commandé plusieurs meubles modernes à l’atelier de Louis-François Bellangé. Leur liste nous est connue grâce au catalogue de l’une des ventes de sa collection, organisée à Paris le 19 avril 1825. Le nom de Bellangé était déjà cité dans le catalogue d’une précédente vente Lapeyrière, le 9 octobre 1823, comme responsable de « l’ameublement complet d’un grand salon, belle chambre à coucher, boudoir et grand cabinet de travail » de l’hôtel de Rohan-Monbazon. Le catalogue de 1825 mentionne, parmi les lots 97 à 101 :
97. Charmant secrétaire de dame, fait de bois d’amaranthe, à abattant, avec embellissement de porcelaine et de bronzes dorés (…). Sur l’abattant, au milieu d’un panneau de porcelaine fond bleu lapis, est un tableau de fruits qu’encadre une légère bordure, accompagnée de rubans et d’une branche de laurier. (…)98. Autre secrétaire de dame, semblable au précédent, à cela près que lepanneau de l’abattant est de porcelaine fond vert (…). Ces deux jolis meubles charment par leur extrême élégance, et sont exécutés avec autant de précisio que de solidité.
99. grande console, sans dessus, faite de plaques de porcelaine, bordée de bois d’amaranthe et de moulures de bronze doré. Elle est soutenue par deux pieds et deux pilastres soutenant une frise et posant sur une base où l’on a enclavé une glace. Hauteur 33 pouces, largeur 42, profondeur 18. Trois médaillons à figures relèvent la frise de cette console ; sur toutes les autres pièces sont peintes des couronnes et des guirlandes de fleurs. Les pieds, en façon de gaine, sont couronnés de chapiteaux à têtes de bélier. Une seconde glace remplit l’intervalle qui sépare les pilastres.
100. deux consoles de porcelaine, montées en bronze, ouvrage inachevé. Les porcelaines restées en blanc sont destinées à être peintes, les bronzes ne sont point encore dorés.
101. Deux torchères de porcelaine montées en bronze (…).
Au fil du temps, les différents meubles de cet ensemble somptueux refont surface. Le premier secrétaire, aux plaques à fond bleu, fut acquis par la famille de Cambacérès, qui le conserva jusqu’en 1938. Vendu cette année-là à J. Paul Getty, il fut conservé au Getty Museum jusqu’en 1996, puis proposé en vente publique (…). Le second secrétaire, d’aspect très proche mais orné de plaques à fond vert, fut adjugé à la duchesse de Berry. La belle-fille de Charles X le conserva dans son exil européen après la Révolution de 1830, avant de le mettre en vente à Paris en 1865. Propriété du collectionneur Edouard Larcade au début du XXe siècle, il passa au collectionneur René Fribourg en 1951.
La grande console fut acquise par le célèbre expert et collectionneur Thomas Henry (1766-1836). Elle passa peu de temps après dans la collection d’un aristocrate européen et est encore conservée aujourd’hui par ses descendants.
Les deux torchères du lot 101 ne sont pas localisées. C’est parmi la paire de consoles du lot 100 que nous proposons de reconnaître le présent meuble. Plusieurs éléments viennent soutenir cette hypothèse.
On ne connaît en effet pas d’autre exemple de petite console à plaques de porcelaine dans l’oeuvre de Bellangé, les autres modèles étant tous plus volumineux. Ensuite, certaines inscriptions au revers des plaques la décrivent comme petite console à colonnes, formulation qui laisse à penser qu’elle se trouvait associée, au moment de la disposition de son décor de porcelaine, à une ou plusieurs autres consoles, que l’on suppose plus grandes, et pourvues, elles, de piètement sans colonnes. Or c’était précisément le cas de l’ensemble des consoles Lapeyrière : celle proposée sous le lot 99 possédait un piètement composé de deux pieds avant en gaine de section carrée à décor de têtes de béliers en bronze doré. Elle est décrite comme grande ce qui permet de supposer que les deux consoles suivantes (lot 100), moins précisément décrites, étaient plus petites.
Un autre argument en faveur d’une provenance Lapeyrière tient à la couleur verte des fonds du décor de porcelaine, qui l’associe au vert du secrétaire du lot 98. On devait ainsi pouvoir distinguer, parmi l’ensemble des meubles Lapeyrière, deux groupes associant secrétaires et console(s), l’un bleu (le secrétaire de l’ancienne collection Getty et la grande console), l’autre vert (le secrétaire de l’ancienne collection Larcade et la paire de petites consoles). On rappellera, en outre, la correspondance du décor de bronze doré (chapiteaux, bases de colonnes, pieds en toupies, bordures) entre tous ces meubles. Le degré d’inachèvement des consoles au moment de leur mise en vente nous renseigne sur la date de réalisation de ces meubles, qui étaient encore en cours de fabrication chez Bellangé au moment où Lapeyrière se vit contraint de liquider son patrimoine. On constate cependant que le travail d’ébénisterie était terminé, l’ensemble attendant encore le décor peint sur les plaques de porcelaine, avant d’entamer la dorure des bronzes. Compte tenu de la chronologie de la faillite de Lapeyrière, il est probable que les sept meubles furent commandés du temps de sa splendeur, c’est à dire entre 1819, année de l’acquisition de l’hôtel de Rohan-Monbazon, et 1823, début des difficultés financières du collectionneur. Le fait que plusieurs meubles de cet ensemble n’étaient toujours pas terminés en avril 1825 en dit long sur le temps nécessaire pour satisfaire ce genre de commandes. On ne sait pas qui fit l’acquisition de la paire de consoles ou si elles restèrent la propriété du financier à l’issue des enchères. Elles n’étaient cependant plus en sa possession au moment de son décès, et ne sont pas mentionnées dans son inventaire après décès établi le 19 décembre 1831.
Sylvain Cordier, historien de l’art, est l’auteur de “Bellangé, ébénistes : Une histoire du goût au XIXe siècle”, Paris, 2012.

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