Georges Seurat (1859-1891)
Ancienne collection Huguette BérèsC’est un honneur pour Christie’s proposer une sélection de tableaux et d’oeuvres sur papier provenant de l’ancienne collection Huguette Bérès. «A renowned connoisseur dealer» selon la phrase de Souren Melikian, le grand critique du New York Times. Elle fut une collectionneuse d’une rare audace, libérée de toute convention. Huguette Bérès a été célébrée tout au long de sa carrière pour son goût précis, élégant et très juste. Située 25 quai Voltaire, la Galerie Bérès a vu le jour en 1951. Pendant les soixante années qui suivirent, la galerie Huguette Bérès se concentra essentiellement sur les estampes Japonaises gravées sur bois dites du mouvement Ukiyo-e et la peinture des avant-gardes de l’art français de la fin du XIXe et du début XXe siècle et plus particulièrement les œuvres sur papier. Aux neuf tableaux figurant dans ce catalogue s’ajoutent une sélection de quatre œuvres sur papier et un paravent de Bonnard qui seront présentés lors de la vente d’Œuvres Modernes sur Papier le 22 mars prochain à Paris. Cet ensemble, couronné par le tableau d’Édouard Vuillard, Madame Vuillard épluchant des légumes (lot 258), illustre parfaitement la passion d’Huguette Bérès pour l’art français au tournant du XXe siècle. Peint en 1895, cette huile est considérée comme un merveilleux exemple du style intimiste typique de l’artiste, décrit par Jean Clair comme une «apothéose de la lumière du jour avant la tyrannie de l’électricité» (J. Clair, Autoportrait au visage absent, Paris, 2008, p. 36). La lumière est également le sujet principal du tableau de Georges Seurat, Le Mouillage à Grandcamp (lot 257), dans lequel l’artiste inonde son paysage marin d’une clarté scintillante et d’une charmante touche pointilliste et miroitante. Les recherches d’Huguette Bérès sur Georges Seurat ainsi que les expositions de ses œuvres à la Galerie, dont cette délicate huile sur panneau de 1885, ont contribué à la renommée internationale de cet immense peintre et dessinateur trop tôt disparu. L’exposition récente du Grand Palais à Paris consacrée à Gauguin l’alchimiste a également été l’occasion de mettre l’accent sur l’importance de la recherche technique et de l’innovation comme moteur créatif chez l’artiste. Le monotype Tête de Tahitienne (lot 55 de la vente du 22 mars) constitue ainsi un aperçu de la manière dont Gauguin utilise ses expérimentations pour créer une image chargée d’exotisme. L’on retrouve enfin dans la Maison près d’un pont de Paul Cézanne (lot 54 de la vente du 22 mars) la finesse toute poétique d’une esquisse où l’utilisation du papier blanc met en valeur la palette vive et raffinée de l’artiste. Si chacune de ces œuvres constitue un témoignage émouvant de ces quatre grands maîtres de l’art moderne français, elles reflètent surtout l'œil intelligent et sensible autant que la quête constante de qualité d’Huguette Bérès dans l’édification de sa collection. Christie’s is honoured to present for sale a selection of paintings and works on paper from the former collection of Huguette Bérès. In the words of respected New York Times critic Souren Melikian, “A renowned connoisseur dealer”. She was a particularly bold collector who defied convention. All through her career, Huguette Bérès was celebrated for her defined taste, which was elegant and very discerning. The Galerie Bérès at 25, quai Voltaire opened in 1951. In the sixty years that followed, the Galerie Huguette Bérès specialised mainly in Japanese woodblock prints in the Ukiyo-e style and late 19th century and early 20th century French avant-gardist paintings, particularly works on paper. In addition to the nine paintings featured in this catalogue, we have a selection of four works on paper and the Bonnard screen which will be presented at the Works on Paper sale taking place in Paris on 22 March 2018. This set of works, complete with Édouard Vuillard’s superb Madame Vuillard épluchant des légumes (lot 258), is a perfect illustration of Huguette Bérès’ passion for French art at the turn of the 20th century. Dating from 1895, this oil painting is considered a wonderful example of the artist’s characteristically intimate style, described by Jean Clair as the “apotheosis of daylight before the tyranny of electricity” (J. Clair, Autoportrait au visage absent, Paris, 2008, p. 36). Light is also the main subject of Georges Seurat’s, Le Mouillage à Grandcamp (lot 257), in which the artist floods his seascape with a shimmering light, with a delightful gleaming, pointillist touch. The research that Huguette Bérès carried out on Georges Seurat and her exhibitions of his works at the Gallery, including this delicate oil on board from 1885, contributed to the international renown of this outstanding painter and draughtsman, who died very young. The recent Gauguin the alchemist exhibition at the Grand Palais in Paris was an opportunity to highlight the importance of technical research and innovation as a creative driving force for the artist. The monotype Tête de Tahitienne (lot 55 in the 22 March sale), for example, gives us an insight into how Gauguin used his experiments to create an image charged with exoticism. And again in Paul Cézanne’s Maison près d’un pont (lot 54 in the 22 March sale) we see the quite poetic finesse of a sketch in which the use of the white paper highlights the artist’s vivid, refined palette. Not only is each of these works a moving testament to these four masters of French modern art, they are also a reflection of Huguette Bérès’ clever and sensitive eye, and her constant quest for quality when it came to building up her collection.
Georges Seurat (1859-1891)

Le mouillage à Grandcamp

Details
Georges Seurat (1859-1891)
Le mouillage à Grandcamp
huile sur panneau
15.8 x 25 cm.
Exécuté vers 1885

oil on panel
6 ¼ x 9 7/8 in.
Executed circa 1885
Provenance
Atelier de l’artiste.
Emile Seurat, Paris (par descendance).
Félix Fénéon, Paris.
Alfred Vallotton, Paris.
Léon Marseille, Paris.
Georges Lévy, Paris.
Collection particulière, New York; vente, Parke-Bernet, New York, 6 février 1947, lot 63.
Antoine Salomon, Paris.
Huguette Bérès, Paris (acquis auprès de celui-ci, dans les années 1960).
Puis par descendance au propriétaire actuel.
Literature
G. Coquiot, Seurat, Paris, 1924, p. 119.
H. Dorra et J. Rewald, Seurat, L'œuvre peint, Biographie et catalogue critique, Paris, 1959, p. 169, no. 142 (illustré).
C. M. de Hauke, Seurat et son œuvre, Paris, 1961, vol. I, p. 98, no. 146 (illustré, p. 99).
F. Minervino, Tout l’œuvre peint de Seurat, Paris, 1973, p. 103, no. 146 (illustré, p. 102).
Exhibited
Paris, La Revue blanche, Georges Seurat, Œuvres peintes et dessinées, mars-avril 1900, no. 18 (titré 'Rade de Grand-Camp').
Paris, Grandes Serres de la Ville de Paris, XXIe Salon des Artistes Indépendants, mars-avril 1905, p. 14, no. 15.
Paris, Galerie Bernheim-Jeune, Rétrospective Georges Seurat, décembre 1908-janvier 1909, no. 52.
Paris, Galerie Bernheim-Jeune, Georges Seurat, janvier 1920, no. 17.
Paris, Galerie Paul Rosenberg, Seurat, février 1936, no. 43 (titré 'La plage de Grandcamp').
Paris, Galeries Nationales du Grand Palais, Seurat, avril-août 1991, p. 277, no. 158 (illustré en couleurs).
Further details
Au cours de l'été 1885, Seurat interrompt son travail sur La Grande Jatte (1884-85 ; Art Institute of Chicago) et part pour Grandcamp. Dans ce petit port de pêche situé le long de la côte normande, l'artiste exécute une douzaine d'œuvres dont la présente œuvré issue de la prestigieuse collection d’Huguette Bérès, Le mouillage à Grandcamp. Les paysages côtiers et plus particulièrement la Normandie et les bords de la Manche auront les faveurs des plus grands paysagistes, de Corot à Monet en passant par Boudin. Mais si certains de ces peintres ont pu s'intéresser au traitement de mers tumultueuses, Seurat s'attache quant à lui à retranscrire des eaux calmes, dans une clarté lumineuse et des coloris harmonieux.
Le mouillage à Grandcamp semble être une esquisse préparatoire pour le chef-d’œuvre pointilliste datant de l’été 1885 à Grandcamp, Soir à Grandcamp (MoMa, New York). En comparant les deux œuvres, la contribution unique de Seurat, du Divisionnisme à la peinture avant-gardiste française, inspirée par la théorie scientifique sur les couleurs complémentaires de Michel-Eugène Chevreul, est particulièrement palpable. Le mouillage à Grandcamp illustre cette étape expérimentale de Seurat, en représentant la mer par une mosaïque d’amples touches bleues-vertes et oranges, la terre et le ciel définis par un contraste de rose pâle et de bleus, et la végétation constituée de touches d’un vert-bleu foncé et d’un orange profond. Soir à Grandcamp incarne le résultat de ces recherches et leur application à la technique minutieuse et novatrice du pointillisme élaborée par Seurat, afin de produire l’effet scintillant de la scène au crépuscule.
Cette période de créativité très libre et très moderne à Grandcamp, marquera un tournant dans l'œuvre de Seurat, puisque de retour à Paris, l'artiste retravaillera, en tirant profit des enseignements de son séjour en Normandie, l'un de ses plus grands chef-d’œuvres pointillistes, la Grande Jatte.

In the summer of 1885, Seurat interrupted his work on La Grande Jatte (1884-85; Art Institute of Chicago) and left for Grandcamp. In this small fishing port on the coast of Normandy, the artist painted around twelve works, including the present oil from Huguette Bérès’ collection, Le mouillage à Grandcamp. The coastal landscapes, more specifically those of Normandy and the banks of the English Channel, were in favour with the greatest landscape artists, from Corot to Monet and Boudin. Although some of these painters focused on depicting turbulent seascapes, Seurat was fond of calm waters, with their luminous clarity and harmonious tones.
Le mouillage à Grandcamp appears to be a preparatory study for Seurat’s pointillist masterpiece produced during the summer of 1885 in Grandcamp, Soir à Grandcamp (MoMa, New York). By comparing the two works, Seurat’s unique contribution of Divisionism to French avant-garde painting, inspired by Michel-Eugène Chevreul’s scientific theory on complementary colours, becomes particularly clear. Le mouillage à Grandcamp illustrates Seurat’s experimental stage depicting the sea with a mosaic of loose blue-green and orange touches, the land and sky defined by variations of light pinks contrasting with blues, and the bushes made up of dark green/blue opposing a deep orange pigment. Soir à Grandcamp incarnates the result from these experiments and their application to Seurat’s ground-breaking, intricate pointillist technique, to create the scintillating effect of the scene’s twilight.
This period of utterly free and modern creativity in Grandcamp would mark a turning point in Seurat's body of work, since, once back in Paris, enriched by the lessons he learned in Normandy, the artist would resume work on one of his greatest pointillist masterpieces, La Grande Jatte.

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Adélaïde Quéau
Adélaïde Quéau

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