POULIE GOURO
A GURO HEDDLE PULLEY
POULIE GOUROA GURO HEDDLE PULLEY

CÔTE D'IVOIRE

Details
POULIE GOURO
A GURO HEDDLE PULLEY
CÔTE D'IVOIRE
L'avant du socle porte une étiquette bleue sur laquelle est inscrit en blanc le numéro "122".
Annotés sous le socle, à l'encre bleue, respectivement sur deux étiquettes : "36" et "92".
Une étiquette mentionne "Collection Morris Pinto", et une autre "Docteur Audouin".
Sur la dernière est inscrite la date de vente Loudmer "5.12.87".
Hauteur : 17 cm. (6 ¾ in.)
Provenance
Collection Dr. Jean Audouin (1900-1983), Paris
Rheims-Laurin, Palais Galliera, Paris, "Collection particulière du Docteur Audouin", 24 mai 1972, lot 69
Charles Ratton, Paris
Sotheby's, New York, 29 novembre 1984, lot 193
Collection Morris J. Pinto (1925-2009), New York
Loudmer, Paris, "Arts Primitifs", 5 décembre 1987, lot 122
Collection privée française

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Susan Kloman
Susan Kloman

Lot Essay

Une collection privée française
De l’objet nègre comme objet de vertu

Autrefois dans les bonnes maisons, un espace généralement une vitrine, était réservé à l’exposition de petits objets précieux, boîtes en or, tabatières, et autres objets rares ou curieux, appelés objets de vertu (Lawrence Durrell, 1974). De fortes personnalités, classiques mais tout autant avant-gardistes, préféraient aux objets de vertu habituels des objets moins conformistes, comme des objets d’art africain de petite taille mais infiniment rares et désirables. C’est le cas de la collection de Madame X que nous présentons ici, constituée en toute discrétion pendant trente ans.

Le privilège de l’âge fait que je me souviens très bien de cette dame élégante qui acheta plusieurs pièces à la vente Loudmer de décembre 1987 où j’étais expert. Je les retrouve ici avec bonheur, accompagnées d’autres petites merveilles dont je ne connaissais l’existence que par les catalogues de très anciennes ventes célèbres. Les provenances de ces objets nous font voyager dans le temps et dans le gotha de l’art africain, une époque reculée où déjà les beaux objets déchaînaient les passions. Madame X avait un œil sûr comme les anciens possesseurs de ses acquisitions, quel équipage de collectionneurs prestigieux : Paul Guillaume, Charles Ratton, André Lefèvre, Geneviève Rodier, Jean Audouin, Morris Pinto, Lecorneur Roudillon, et d’autres dont hélas le nom ne nous est pas parvenu. La qualité de ces objets est, s’il en était besoin, confirmée par les soins qui leur furent attachés : presque tous sont soclés par le fameux socleur japonais Kichizô Inagaki (1876-1951), actif dans les années 1920/1950, auquel fut confiée la fine fleur des arts sauvages par l’élite des collectionneurs et des marchands. Lui seul, maître en son art, savait mettre en beauté les objets confiés à sa main sûre et à son génie de l’équilibre ; les bois les plus précieux, vieillis dans son atelier, chaussaient avec une rare élégance, poulies, cuillères et autres peignes.

Nous savons presque tout de ces personnages illustres qui ont forgé par leur passion le monde de l’art africain en Europe et outre atlantique. Paul Guillaume (1891-1934) le prince des marchands, jeune émule de Guillaume Apollinaire, donna aux arts modernes alliés à l’art africain leurs lettres de noblesse. Charles Ratton (1895-1986), non moins prince en son domaine, régnant sur le marché de l’art sans limites, de l’antiquité à la haute époque en passant par le royaume du Bénin. André Lefèvre (1883-1963) financier de talent, qui dès sa quarantième année cessa ses activités pour se consacrer uniquement à l’art moderne et à l’art premier dans sa galerie parisienne, la Galerie Percier, ouverte en 1922, dirigée par le non moins fameux André Level (1863-1947). Le docteur Jean Audouin (1900-1983), ami des arts, collectionneur d’art contemporain, de Fontana à Hundertwasser, de bronzes du Bénin et du Luristan, et de beaux objets africains, éditeur d’art aussi.

Moins connue des amateurs, sinon par le catalogue de sa vente du 31 mai 1972, chez les commissaires-priseurs Ader Picard Tajan à Drouot, assistés de Charles Ratton expert, Geneviève Rodier, née Pichard, a joué un rôle important comme collectionneuse d’objets raffinés. Selon la notice en préambule du catalogue rédigée par Ratton, la plupart des objets, poulies et marteau à musique, furent récoltées avant 1935 en Côte d’Ivoire par le Dr Hans Himmelheber et le collectionneur résident sur place Roger Bédiat. Geneviève Rodier avait aussi participé à la vente de la collection Georges de Miré et fit partie des prêteurs de l’exposition du Théâtre Edouard VII, La Sculpture des Noirs de l’Afrique, à laquelle elle confia 12 objets (communication de Jean-Louis Paudrat du 07/09/2018).

Le collectionneur Morris Pinto (1925-2009) fut très actif en galerie et dans les ventes dès 1960, c’était un homme exigeant et attentif au moindre détail, sans doute une habitude souvenir de sa profession de banquier et de financier. Parmi ses coups d’éclats, on se souvient qu’il avait acheté en bloc l’exposition de Jean Roudillon présentant la collection René Mendès-France, dans sa galerie du boulevard Saint-Germain en 1975. Tout le monde de l’art premier se souvient de son goût et de sa forte personnalité.

De ce tableau de quelques grandes figures de notre milieu de l’art africain, malheureusement incomplet, on peut retenir que la passion des beaux objets précieux et rares ne s’éteint jamais, et que comme autrefois, tout commence à Drouot et tout revient à Drouot, en l’espèce chez Christie’s aujourd’hui, et que les objets vont en changeant de main, continuer leur vie.

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