Lot Essay
Une réapparition importante
Jusqu’à présent, l’existence de notre tableau n’était connue que par sa description dans le catalogue de la vente de la collection de la duchesse de Berry en 1865 ; par plusieurs copies de qualités picturales très inférieures et par la publication d’une photographie noire et blanche dans la monographie sur Bernardino Luini de l’historien d’art Ottino Della Chiesa, éditée en 1956. L’œuvre que nous avons le privilège de présenter aujourd’hui n’a pas été vue depuis 1865, date de sa dernière exposition publique à Paris. Sa réapparition constitue un véritable événement.
Par la force de son image, l’intensité charismatique de la figure de sainte à mi-corps, la grande finesse picturale et la qualité de conservation, cette œuvre saisit par sa présence. Bernardino Luini est certainement l’un des tous meilleurs artistes contemporains du grand maître milanais Léonard de Vinci. Ce panneau est l’une des plus belles œuvres à apparaitre sur le marché de l’art depuis plusieurs décennies.
L’œuvre est ample et délicate. Elle dégage une grande force qui séduit immédiatement le spectateur. Elle s’impose et dans le même temps, par son format (un délicat panneau de dimensions restreintes), l’artiste parvient à créer une intimité évidente qui rend immédiatement accessible la féminité presque humaine de la Sainte ici, représentée à mi-corps.
Bernardino Luini, le plus célèbre des « Leonardeschi »
Rares sont les informations précises sur la vie de Bernardino Luini et même le célèbre biographe du XVIème siècle Giorgio Vasari ne donne que peu de détails. Il le nomme tout de même comme élève de Léonard de Vinci. Il s’avère que Luini fut même très proche du génie milanais. Peu d’information sur sa vie mais par contre un corpus d’œuvres d’une très grande cohérence. Bernardino Luini a fait l’objet d’une monographie importante publiée en 1956 mais n’a, depuis lors, et ce, très injustement, pas fait l’objet d’actualisation de cette dernière remettant légitimement en valeur la grande personnalité picturale du maître, notre tableau en étant un exemple d’une clarté évidente.
Luini est certainement l’un des maîtres qui sera, parmi l’ensemble des artistes du groupe dit des « Leonardeschi » comme Giovanni Antonio Boltraffio, Giovanni Pietro Rizoli dit Le Giampetrino ou encore Gian Giacomo Caprotti dit Salaï ; celui qui saura à la fois suivre le plus rigoureusement les préceptes et les exemples de Léonard et qui, dans le même temps, saura conserver sa propre et parfaitement distincte personnalité.
Ses nombreuses Vierge à l’Enfant ont fait sa popularité et il développera également des programmes beaucoup plus ambitieux et savants au travers de grands cycles de fresques à la fois sacrées et profanes surtout dans les années 1520. Citons pour exemple les fresques du Sanctuario della Beata Virgine Dei Miracoli à Saronno.
Luini a su inventer son style pictural, parfaitement identifiable, sa personnalité d’artiste, forte des fondements initiés par Léonard en associant, parfois aussi, une douceur proche du Corrège. Bernardino Luini est, très certainement, l’artiste qui aura su, avec le plus de finesse et d’intelligence porter à son apogée dans l’histoire de l’art la prolongation de l’esthétique Léonardesque.
Le « Léonard de Vinci » de la duchesse de Berry
Ce charmant panneau, très certainement destiné à une dévotion religieuse privée à ses origines garde malheureusement quelques mystères quant à sa provenance ancienne. Comme de nombreuses œuvres de cette époque nous ne parvenons pas à remonter avec certitude l’intégralité de l’historique mais seulement jusqu’au milieu du XIXème siècle. De cette époque jusqu’à nos jours, il a eu de prestigieux propriétaires, érudits et fins collectionneurs. Cette provenance vient, bien entendu, renforcer la légitimité de cette œuvre au rang de Chef d’œuvre.
Le travail de recherches en tableaux anciens est, presqu’un travail d’enquêteur et, bien souvent c’est l’œuvre elle-même qui nous donne des informations. Ainsi, l’analyse de l’arrière du panneau nous donne de précieux éléments comme ce très beau et large cachet surmonté d’une couronne au tampon encré rouge révélant l’appartenance de cette œuvre à la collection de la duchesse de Berry à Venise.
Marie Caroline de Bourbon, duchesse de Berry, grande collectionneuse d’art avisée, avait rassemblé un formidable ensemble d’œuvres dans le Palais venant compléter l’ensemble meublant déjà le bâtiment avant l’acquisition en 1844. On peut d’ailleurs imaginer que notre tableau pouvait provenir avant cette date des collections du palais amassées par la lignée Vendramin. Les désordres politiques liés au Risorgimento, période de troubles de l’unification italienne allaient contraindre Son Altesse Royale la duchesse de Berry à quitter l’Italie, rejoindre le château de Brünnsee en Autriche, vendre le Palais et son mobilier, aux enchères, à Paris en 1865.
L’histoire de l’art au XIXème n’était pas encore véritablement née, elle débutera avec le XXème siècle. Ainsi, nombre d’artistes de périodes anciennes avaient sombré dans l’oubli. Il est donc normal de retrouver dans la vente de la collection de la duchesse de Berry, à Paris, le 19 avril 1865 sous le numéro 184, notre tableau décrit comme une œuvre de Léonard de Vinci. La personnalité de Bernardino Luini étant à cette époque totalement occultée, une œuvre de cette qualité picturale ne pouvait être considérée que comme une œuvre autographe du grand maître milanais.
L’œuvre fut acquise à cette vente par Monsieur Laneuville, marchand d’art de l’époque et expert de la vacation qui en fit l’acquisition très probablement par souci de discrétion, pour le compte du comte Tanneguy Duchâtel.
Tanneguy Duchâtel, homme politique et collectionneur
Le comte Charles-Marie Tanneguy Duchâtel (1803–1867) fut un éminent personnage politique de la seconde moitié du XIXème siècle. Il fait partie des membres fondateurs du journal Le Globe et s’occupe des articles économiques. Il est nommé député de Charente-Inferieure (1833), ministre du commerce (1834), ministre des finances (1836) puis ministre de l’intérieur (1839 et 1840). Il s’occupera notamment de l’acquisition de l’hôtel de Cluny, préfigurant la création de l’actuel musée de Cluny et de la translation des cendres de Napoléon Ier.
Grand-Croix de la Légion d’Honneur il fut membre de l’Académie des sciences morales et politiques et membre de l’Académie des Beaux-Arts. Il se retire de la vie politique après son retour d’exil lié à la révolution de 1848. Collectionneur de livres et tableaux anciens, plusieurs œuvres de sa collection sont maintenant dans des collections de musées prestigieux dont Sainte Casilde de Francisco de Zurbaran provenant de l’ancienne collection du maréchal Soult maintenant au musée national Thyssen-Bornemisza à Madrid. Sa veuve léguera au Louvre cinq œuvres importantes dont les célèbres Œdipe et le Sphinx et La Source de Jean Auguste Dominique Ingres. Le musée du Louvre comporte une salle portant son nom.
Une réapparition importante
Jusqu’à présent, l’existence de notre tableau n’était connue que par sa description dans le catalogue de la vente de la collection de la duchesse de Berry en 1865 ; par plusieurs copies de qualités picturales très inférieures et par la publication d’une photographie noire et blanche dans la monographie sur Bernardino Luini de l’historien d’art Ottino Della Chiesa, éditée en 1956. L’œuvre que nous avons le privilège de présenter aujourd’hui n’a pas été vue depuis 1865, date de sa dernière exposition publique à Paris. Sa réapparition constitue un véritable événement.
Par la force de son image, l’intensité charismatique de la figure de sainte à mi-corps, la grande finesse picturale et la qualité de conservation, cette œuvre saisit par sa présence. Bernardino Luini est certainement l’un des tous meilleurs artistes contemporains du grand maître milanais Léonard de Vinci. Ce panneau est l’une des plus belles œuvres à apparaitre sur le marché de l’art depuis plusieurs décennies.
L’œuvre est ample et délicate. Elle dégage une grande force qui séduit immédiatement le spectateur. Elle s’impose et dans le même temps, par son format (un délicat panneau de dimensions restreintes), l’artiste parvient à créer une intimité évidente qui rend immédiatement accessible la féminité presque humaine de la Sainte ici, représentée à mi-corps.
Bernardino Luini, le plus célèbre des « Leonardeschi »
Rares sont les informations précises sur la vie de Bernardino Luini et même le célèbre biographe du XVIème siècle Giorgio Vasari ne donne que peu de détails. Il le nomme tout de même comme élève de Léonard de Vinci. Il s’avère que Luini fut même très proche du génie milanais. Peu d’information sur sa vie mais par contre un corpus d’œuvres d’une très grande cohérence. Bernardino Luini a fait l’objet d’une monographie importante publiée en 1956 mais n’a, depuis lors, et ce, très injustement, pas fait l’objet d’actualisation de cette dernière remettant légitimement en valeur la grande personnalité picturale du maître, notre tableau en étant un exemple d’une clarté évidente.
Luini est certainement l’un des maîtres qui sera, parmi l’ensemble des artistes du groupe dit des « Leonardeschi » comme Giovanni Antonio Boltraffio, Giovanni Pietro Rizoli dit Le Giampetrino ou encore Gian Giacomo Caprotti dit Salaï ; celui qui saura à la fois suivre le plus rigoureusement les préceptes et les exemples de Léonard et qui, dans le même temps, saura conserver sa propre et parfaitement distincte personnalité.
Ses nombreuses Vierge à l’Enfant ont fait sa popularité et il développera également des programmes beaucoup plus ambitieux et savants au travers de grands cycles de fresques à la fois sacrées et profanes surtout dans les années 1520. Citons pour exemple les fresques du Sanctuario della Beata Virgine Dei Miracoli à Saronno.
Luini a su inventer son style pictural, parfaitement identifiable, sa personnalité d’artiste, forte des fondements initiés par Léonard en associant, parfois aussi, une douceur proche du Corrège. Bernardino Luini est, très certainement, l’artiste qui aura su, avec le plus de finesse et d’intelligence porter à son apogée dans l’histoire de l’art la prolongation de l’esthétique Léonardesque.
Le « Léonard de Vinci » de la duchesse de Berry
Ce charmant panneau, très certainement destiné à une dévotion religieuse privée à ses origines garde malheureusement quelques mystères quant à sa provenance ancienne. Comme de nombreuses œuvres de cette époque nous ne parvenons pas à remonter avec certitude l’intégralité de l’historique mais seulement jusqu’au milieu du XIXème siècle. De cette époque jusqu’à nos jours, il a eu de prestigieux propriétaires, érudits et fins collectionneurs. Cette provenance vient, bien entendu, renforcer la légitimité de cette œuvre au rang de Chef d’œuvre.
Le travail de recherches en tableaux anciens est, presqu’un travail d’enquêteur et, bien souvent c’est l’œuvre elle-même qui nous donne des informations. Ainsi, l’analyse de l’arrière du panneau nous donne de précieux éléments comme ce très beau et large cachet surmonté d’une couronne au tampon encré rouge révélant l’appartenance de cette œuvre à la collection de la duchesse de Berry à Venise.
Marie Caroline de Bourbon, duchesse de Berry, grande collectionneuse d’art avisée, avait rassemblé un formidable ensemble d’œuvres dans le Palais venant compléter l’ensemble meublant déjà le bâtiment avant l’acquisition en 1844. On peut d’ailleurs imaginer que notre tableau pouvait provenir avant cette date des collections du palais amassées par la lignée Vendramin. Les désordres politiques liés au Risorgimento, période de troubles de l’unification italienne allaient contraindre Son Altesse Royale la duchesse de Berry à quitter l’Italie, rejoindre le château de Brünnsee en Autriche, vendre le Palais et son mobilier, aux enchères, à Paris en 1865.
L’histoire de l’art au XIXème n’était pas encore véritablement née, elle débutera avec le XXème siècle. Ainsi, nombre d’artistes de périodes anciennes avaient sombré dans l’oubli. Il est donc normal de retrouver dans la vente de la collection de la duchesse de Berry, à Paris, le 19 avril 1865 sous le numéro 184, notre tableau décrit comme une œuvre de Léonard de Vinci. La personnalité de Bernardino Luini étant à cette époque totalement occultée, une œuvre de cette qualité picturale ne pouvait être considérée que comme une œuvre autographe du grand maître milanais.
L’œuvre fut acquise à cette vente par Monsieur Laneuville, marchand d’art de l’époque et expert de la vacation qui en fit l’acquisition très probablement par souci de discrétion, pour le compte du comte Tanneguy Duchâtel.
Tanneguy Duchâtel, homme politique et collectionneur
Le comte Charles-Marie Tanneguy Duchâtel (1803–1867) fut un éminent personnage politique de la seconde moitié du XIXème siècle. Il fait partie des membres fondateurs du journal Le Globe et s’occupe des articles économiques. Il est nommé député de Charente-Inferieure (1833), ministre du commerce (1834), ministre des finances (1836) puis ministre de l’intérieur (1839 et 1840). Il s’occupera notamment de l’acquisition de l’hôtel de Cluny, préfigurant la création de l’actuel musée de Cluny et de la translation des cendres de Napoléon Ier.
Grand-Croix de la Légion d’Honneur il fut membre de l’Académie des sciences morales et politiques et membre de l’Académie des Beaux-Arts. Il se retire de la vie politique après son retour d’exil lié à la révolution de 1848. Collectionneur de livres et tableaux anciens, plusieurs œuvres de sa collection sont maintenant dans des collections de musées prestigieux dont Sainte Casilde de Francisco de Zurbaran provenant de l’ancienne collection du maréchal Soult maintenant au musée national Thyssen-Bornemisza à Madrid. Sa veuve léguera au Louvre cinq œuvres importantes dont les célèbres Œdipe et le Sphinx et La Source de Jean Auguste Dominique Ingres. Le musée du Louvre comporte une salle portant son nom.
Jusqu’à présent, l’existence de notre tableau n’était connue que par sa description dans le catalogue de la vente de la collection de la duchesse de Berry en 1865 ; par plusieurs copies de qualités picturales très inférieures et par la publication d’une photographie noire et blanche dans la monographie sur Bernardino Luini de l’historien d’art Ottino Della Chiesa, éditée en 1956. L’œuvre que nous avons le privilège de présenter aujourd’hui n’a pas été vue depuis 1865, date de sa dernière exposition publique à Paris. Sa réapparition constitue un véritable événement.
Par la force de son image, l’intensité charismatique de la figure de sainte à mi-corps, la grande finesse picturale et la qualité de conservation, cette œuvre saisit par sa présence. Bernardino Luini est certainement l’un des tous meilleurs artistes contemporains du grand maître milanais Léonard de Vinci. Ce panneau est l’une des plus belles œuvres à apparaitre sur le marché de l’art depuis plusieurs décennies.
L’œuvre est ample et délicate. Elle dégage une grande force qui séduit immédiatement le spectateur. Elle s’impose et dans le même temps, par son format (un délicat panneau de dimensions restreintes), l’artiste parvient à créer une intimité évidente qui rend immédiatement accessible la féminité presque humaine de la Sainte ici, représentée à mi-corps.
Bernardino Luini, le plus célèbre des « Leonardeschi »
Rares sont les informations précises sur la vie de Bernardino Luini et même le célèbre biographe du XVIème siècle Giorgio Vasari ne donne que peu de détails. Il le nomme tout de même comme élève de Léonard de Vinci. Il s’avère que Luini fut même très proche du génie milanais. Peu d’information sur sa vie mais par contre un corpus d’œuvres d’une très grande cohérence. Bernardino Luini a fait l’objet d’une monographie importante publiée en 1956 mais n’a, depuis lors, et ce, très injustement, pas fait l’objet d’actualisation de cette dernière remettant légitimement en valeur la grande personnalité picturale du maître, notre tableau en étant un exemple d’une clarté évidente.
Luini est certainement l’un des maîtres qui sera, parmi l’ensemble des artistes du groupe dit des « Leonardeschi » comme Giovanni Antonio Boltraffio, Giovanni Pietro Rizoli dit Le Giampetrino ou encore Gian Giacomo Caprotti dit Salaï ; celui qui saura à la fois suivre le plus rigoureusement les préceptes et les exemples de Léonard et qui, dans le même temps, saura conserver sa propre et parfaitement distincte personnalité.
Ses nombreuses Vierge à l’Enfant ont fait sa popularité et il développera également des programmes beaucoup plus ambitieux et savants au travers de grands cycles de fresques à la fois sacrées et profanes surtout dans les années 1520. Citons pour exemple les fresques du Sanctuario della Beata Virgine Dei Miracoli à Saronno.
Luini a su inventer son style pictural, parfaitement identifiable, sa personnalité d’artiste, forte des fondements initiés par Léonard en associant, parfois aussi, une douceur proche du Corrège. Bernardino Luini est, très certainement, l’artiste qui aura su, avec le plus de finesse et d’intelligence porter à son apogée dans l’histoire de l’art la prolongation de l’esthétique Léonardesque.
Le « Léonard de Vinci » de la duchesse de Berry
Ce charmant panneau, très certainement destiné à une dévotion religieuse privée à ses origines garde malheureusement quelques mystères quant à sa provenance ancienne. Comme de nombreuses œuvres de cette époque nous ne parvenons pas à remonter avec certitude l’intégralité de l’historique mais seulement jusqu’au milieu du XIXème siècle. De cette époque jusqu’à nos jours, il a eu de prestigieux propriétaires, érudits et fins collectionneurs. Cette provenance vient, bien entendu, renforcer la légitimité de cette œuvre au rang de Chef d’œuvre.
Le travail de recherches en tableaux anciens est, presqu’un travail d’enquêteur et, bien souvent c’est l’œuvre elle-même qui nous donne des informations. Ainsi, l’analyse de l’arrière du panneau nous donne de précieux éléments comme ce très beau et large cachet surmonté d’une couronne au tampon encré rouge révélant l’appartenance de cette œuvre à la collection de la duchesse de Berry à Venise.
Marie Caroline de Bourbon, duchesse de Berry, grande collectionneuse d’art avisée, avait rassemblé un formidable ensemble d’œuvres dans le Palais venant compléter l’ensemble meublant déjà le bâtiment avant l’acquisition en 1844. On peut d’ailleurs imaginer que notre tableau pouvait provenir avant cette date des collections du palais amassées par la lignée Vendramin. Les désordres politiques liés au Risorgimento, période de troubles de l’unification italienne allaient contraindre Son Altesse Royale la duchesse de Berry à quitter l’Italie, rejoindre le château de Brünnsee en Autriche, vendre le Palais et son mobilier, aux enchères, à Paris en 1865.
L’histoire de l’art au XIXème n’était pas encore véritablement née, elle débutera avec le XXème siècle. Ainsi, nombre d’artistes de périodes anciennes avaient sombré dans l’oubli. Il est donc normal de retrouver dans la vente de la collection de la duchesse de Berry, à Paris, le 19 avril 1865 sous le numéro 184, notre tableau décrit comme une œuvre de Léonard de Vinci. La personnalité de Bernardino Luini étant à cette époque totalement occultée, une œuvre de cette qualité picturale ne pouvait être considérée que comme une œuvre autographe du grand maître milanais.
L’œuvre fut acquise à cette vente par Monsieur Laneuville, marchand d’art de l’époque et expert de la vacation qui en fit l’acquisition très probablement par souci de discrétion, pour le compte du comte Tanneguy Duchâtel.
Tanneguy Duchâtel, homme politique et collectionneur
Le comte Charles-Marie Tanneguy Duchâtel (1803–1867) fut un éminent personnage politique de la seconde moitié du XIXème siècle. Il fait partie des membres fondateurs du journal Le Globe et s’occupe des articles économiques. Il est nommé député de Charente-Inferieure (1833), ministre du commerce (1834), ministre des finances (1836) puis ministre de l’intérieur (1839 et 1840). Il s’occupera notamment de l’acquisition de l’hôtel de Cluny, préfigurant la création de l’actuel musée de Cluny et de la translation des cendres de Napoléon Ier.
Grand-Croix de la Légion d’Honneur il fut membre de l’Académie des sciences morales et politiques et membre de l’Académie des Beaux-Arts. Il se retire de la vie politique après son retour d’exil lié à la révolution de 1848. Collectionneur de livres et tableaux anciens, plusieurs œuvres de sa collection sont maintenant dans des collections de musées prestigieux dont Sainte Casilde de Francisco de Zurbaran provenant de l’ancienne collection du maréchal Soult maintenant au musée national Thyssen-Bornemisza à Madrid. Sa veuve léguera au Louvre cinq œuvres importantes dont les célèbres Œdipe et le Sphinx et La Source de Jean Auguste Dominique Ingres. Le musée du Louvre comporte une salle portant son nom.
Une réapparition importante
Jusqu’à présent, l’existence de notre tableau n’était connue que par sa description dans le catalogue de la vente de la collection de la duchesse de Berry en 1865 ; par plusieurs copies de qualités picturales très inférieures et par la publication d’une photographie noire et blanche dans la monographie sur Bernardino Luini de l’historien d’art Ottino Della Chiesa, éditée en 1956. L’œuvre que nous avons le privilège de présenter aujourd’hui n’a pas été vue depuis 1865, date de sa dernière exposition publique à Paris. Sa réapparition constitue un véritable événement.
Par la force de son image, l’intensité charismatique de la figure de sainte à mi-corps, la grande finesse picturale et la qualité de conservation, cette œuvre saisit par sa présence. Bernardino Luini est certainement l’un des tous meilleurs artistes contemporains du grand maître milanais Léonard de Vinci. Ce panneau est l’une des plus belles œuvres à apparaitre sur le marché de l’art depuis plusieurs décennies.
L’œuvre est ample et délicate. Elle dégage une grande force qui séduit immédiatement le spectateur. Elle s’impose et dans le même temps, par son format (un délicat panneau de dimensions restreintes), l’artiste parvient à créer une intimité évidente qui rend immédiatement accessible la féminité presque humaine de la Sainte ici, représentée à mi-corps.
Bernardino Luini, le plus célèbre des « Leonardeschi »
Rares sont les informations précises sur la vie de Bernardino Luini et même le célèbre biographe du XVIème siècle Giorgio Vasari ne donne que peu de détails. Il le nomme tout de même comme élève de Léonard de Vinci. Il s’avère que Luini fut même très proche du génie milanais. Peu d’information sur sa vie mais par contre un corpus d’œuvres d’une très grande cohérence. Bernardino Luini a fait l’objet d’une monographie importante publiée en 1956 mais n’a, depuis lors, et ce, très injustement, pas fait l’objet d’actualisation de cette dernière remettant légitimement en valeur la grande personnalité picturale du maître, notre tableau en étant un exemple d’une clarté évidente.
Luini est certainement l’un des maîtres qui sera, parmi l’ensemble des artistes du groupe dit des « Leonardeschi » comme Giovanni Antonio Boltraffio, Giovanni Pietro Rizoli dit Le Giampetrino ou encore Gian Giacomo Caprotti dit Salaï ; celui qui saura à la fois suivre le plus rigoureusement les préceptes et les exemples de Léonard et qui, dans le même temps, saura conserver sa propre et parfaitement distincte personnalité.
Ses nombreuses Vierge à l’Enfant ont fait sa popularité et il développera également des programmes beaucoup plus ambitieux et savants au travers de grands cycles de fresques à la fois sacrées et profanes surtout dans les années 1520. Citons pour exemple les fresques du Sanctuario della Beata Virgine Dei Miracoli à Saronno.
Luini a su inventer son style pictural, parfaitement identifiable, sa personnalité d’artiste, forte des fondements initiés par Léonard en associant, parfois aussi, une douceur proche du Corrège. Bernardino Luini est, très certainement, l’artiste qui aura su, avec le plus de finesse et d’intelligence porter à son apogée dans l’histoire de l’art la prolongation de l’esthétique Léonardesque.
Le « Léonard de Vinci » de la duchesse de Berry
Ce charmant panneau, très certainement destiné à une dévotion religieuse privée à ses origines garde malheureusement quelques mystères quant à sa provenance ancienne. Comme de nombreuses œuvres de cette époque nous ne parvenons pas à remonter avec certitude l’intégralité de l’historique mais seulement jusqu’au milieu du XIXème siècle. De cette époque jusqu’à nos jours, il a eu de prestigieux propriétaires, érudits et fins collectionneurs. Cette provenance vient, bien entendu, renforcer la légitimité de cette œuvre au rang de Chef d’œuvre.
Le travail de recherches en tableaux anciens est, presqu’un travail d’enquêteur et, bien souvent c’est l’œuvre elle-même qui nous donne des informations. Ainsi, l’analyse de l’arrière du panneau nous donne de précieux éléments comme ce très beau et large cachet surmonté d’une couronne au tampon encré rouge révélant l’appartenance de cette œuvre à la collection de la duchesse de Berry à Venise.
Marie Caroline de Bourbon, duchesse de Berry, grande collectionneuse d’art avisée, avait rassemblé un formidable ensemble d’œuvres dans le Palais venant compléter l’ensemble meublant déjà le bâtiment avant l’acquisition en 1844. On peut d’ailleurs imaginer que notre tableau pouvait provenir avant cette date des collections du palais amassées par la lignée Vendramin. Les désordres politiques liés au Risorgimento, période de troubles de l’unification italienne allaient contraindre Son Altesse Royale la duchesse de Berry à quitter l’Italie, rejoindre le château de Brünnsee en Autriche, vendre le Palais et son mobilier, aux enchères, à Paris en 1865.
L’histoire de l’art au XIXème n’était pas encore véritablement née, elle débutera avec le XXème siècle. Ainsi, nombre d’artistes de périodes anciennes avaient sombré dans l’oubli. Il est donc normal de retrouver dans la vente de la collection de la duchesse de Berry, à Paris, le 19 avril 1865 sous le numéro 184, notre tableau décrit comme une œuvre de Léonard de Vinci. La personnalité de Bernardino Luini étant à cette époque totalement occultée, une œuvre de cette qualité picturale ne pouvait être considérée que comme une œuvre autographe du grand maître milanais.
L’œuvre fut acquise à cette vente par Monsieur Laneuville, marchand d’art de l’époque et expert de la vacation qui en fit l’acquisition très probablement par souci de discrétion, pour le compte du comte Tanneguy Duchâtel.
Tanneguy Duchâtel, homme politique et collectionneur
Le comte Charles-Marie Tanneguy Duchâtel (1803–1867) fut un éminent personnage politique de la seconde moitié du XIXème siècle. Il fait partie des membres fondateurs du journal Le Globe et s’occupe des articles économiques. Il est nommé député de Charente-Inferieure (1833), ministre du commerce (1834), ministre des finances (1836) puis ministre de l’intérieur (1839 et 1840). Il s’occupera notamment de l’acquisition de l’hôtel de Cluny, préfigurant la création de l’actuel musée de Cluny et de la translation des cendres de Napoléon Ier.
Grand-Croix de la Légion d’Honneur il fut membre de l’Académie des sciences morales et politiques et membre de l’Académie des Beaux-Arts. Il se retire de la vie politique après son retour d’exil lié à la révolution de 1848. Collectionneur de livres et tableaux anciens, plusieurs œuvres de sa collection sont maintenant dans des collections de musées prestigieux dont Sainte Casilde de Francisco de Zurbaran provenant de l’ancienne collection du maréchal Soult maintenant au musée national Thyssen-Bornemisza à Madrid. Sa veuve léguera au Louvre cinq œuvres importantes dont les célèbres Œdipe et le Sphinx et La Source de Jean Auguste Dominique Ingres. Le musée du Louvre comporte une salle portant son nom.