Lot Essay
UN MASQUE DAN
par Bertrand Goy
La beauté et le grand âge du masque dan de la collection Périnet ont satisfait les exigences et comblé les désirs de ses propriétaires successifs, prestigieux collectionneurs dont l’histoire de l’art a unanimement salué le discernement.
Son visage, figuratif, inscrit dans un ovale idéal, se prolonge vers l’arrière, sur toute sa périphérie, d’un méplat de quelques centimètres de large ; ce plateau étroit, percé d’orifices de fixation rectangulaires - autre gage de grande ancienneté, si sa riche patine pouvait en faire douter - servait de support à une manière de diadème en perles et cauris ou à un volumineux bandeau de coton. L’artiste n’a négligé aucun aspect de sa création, dotant son revers d’une élégante courbure exécutée à la perfection ; la vue de profil, toute aussi séduisante, permet d’apprécier le contraste entre la finesse du nez et des lèvres charnues, nettement dessinées de la lippe au philtrum, révélant une sensualité autrefois éclipsée par la férocité des dents de métal ou d’animal dont la bouche fut un jour armée. Un angle obtus oppose le front, rehaussé en son milieu d’une ligne chéloïde, à la partie inférieure du visage gravée de scarifications à hauteur des joues et des arcades sourcilières ; leur disposition, très rare et particulière, rappelle celle de l’exceptionnel masque de la fondation Dapper provenant de l’ancienne collection René Mendès-France1.
Outre ces quelques traits distinctifs, les yeux étirés du masque de Michel Périnet sont susceptibles de nous éclairer sur son lieu de naissance. S’il est difficile de trouver un équivalent - d’un point de vue purement esthétique - à la sculpture présentée ici, aussi impressionnante par sa taille que par la puissance qu’elle dégage, on peut toutefois en identifier de semblables chez les Dan méridionaux ou les Gio. Si l’on ignore l’origine de celui, très voisin, présenté par Paul Guillaume à la Valentine Gallery de New York en avril 1930 et vendu au collectionneur anglais, le professeur Michael Sadler2, en revanche on sait que le peintre Alfred Tulk acquit le sien au Libéria lors de son séjour dans le comté de Nimba de 1931 à 1933.
Le masque de Michel Périnet est une des plus remarquables créations des talentueux sculpteurs exerçant leur art dans cet étroit territoire artistique sans frontières entre Côte d’Ivoire et Liberia.
1Berjonneau , G. et Sonnery, J.-L., Rediscovered Masterpieces of African Art, Paris, 1987, p. 143
2Sadler, M.-E., également l’auteur de Arts of West Africa, Londres, 1935
A DAN MASK
by Bertrand Goy
The beauty and old age of the Dan mask from the Périnet collection have satisfied the requirements and fulfilled the desires of its successive owners, all prestigious collectors whose discernment is unanimously lauded by art historians.
Its figurative face, which appears in an idealised oval, is extended backwards along the entire periphery by a flat surface a few centimetres wide. This narrow expanse, pierced with rectangular fixation orifices, is further proof of its old age, if the rich patina leaves any room for doubt. Indeed, the surface might have been used as a support for some type of bead-and-cowrie-shell tiara, or a thick cotton band. The artist did not leave any aspect of his creation to chance, adorning the back with an elegant, perfectly executed curve. The side view, just as attractive, makes it possible to appreciate the contrast between the finesse of the nose and the fleshy lips. They are clearly delineated from the lower lip to the philtrum, revealing a sensuousness that had once been overshadowed by metal or animal teeth which lined the mouth. An obtuse angle juxtaposes the forehead - adorned in the middle with a keloid line - with the lower part of the face, where the cheeks and eyebrow arches are engraved with scarifications. Their rare, specific arrangement evokes that of the Dapper Foundation’s exceptional mask, which was once part of the René Mendès- France collection1.
In addition to these distinctive features, the drawn-out eyes of the Michel Périnet mask can also shed light on its place of origin. While it is difficult to find an equivalent to the sculpture presented here, speaking in purely aesthetic terms - one that is as impressive in size as in the power that emanates from it -, it is possible to identify comparable ones from the southern Dan or Gio cultures. The very similar one presented by Paul Guillaume at the Valentine Gallery of New York City in April 1930 and sold to the British collector Professor Michael Sadler2 is of unknown origin. However, we know that the painter Alfred Tulk purchased his object in Liberia during his stay in Nimba County from 1931 to 1933.
The Michel Périnet mask is one of the most remarkable creations by the talented sculptors who ply their trade in this narrow, unbounded artistic territory between Ivory Coast and Liberia.
1Berjonneau , G. and Sonnery, J.-L., Rediscovered Masterpieces of African Art, Paris, 1987, p. 143
2Sadler, M.-E., also author of Arts of West Africa, London, 1935
par Bertrand Goy
La beauté et le grand âge du masque dan de la collection Périnet ont satisfait les exigences et comblé les désirs de ses propriétaires successifs, prestigieux collectionneurs dont l’histoire de l’art a unanimement salué le discernement.
Son visage, figuratif, inscrit dans un ovale idéal, se prolonge vers l’arrière, sur toute sa périphérie, d’un méplat de quelques centimètres de large ; ce plateau étroit, percé d’orifices de fixation rectangulaires - autre gage de grande ancienneté, si sa riche patine pouvait en faire douter - servait de support à une manière de diadème en perles et cauris ou à un volumineux bandeau de coton. L’artiste n’a négligé aucun aspect de sa création, dotant son revers d’une élégante courbure exécutée à la perfection ; la vue de profil, toute aussi séduisante, permet d’apprécier le contraste entre la finesse du nez et des lèvres charnues, nettement dessinées de la lippe au philtrum, révélant une sensualité autrefois éclipsée par la férocité des dents de métal ou d’animal dont la bouche fut un jour armée. Un angle obtus oppose le front, rehaussé en son milieu d’une ligne chéloïde, à la partie inférieure du visage gravée de scarifications à hauteur des joues et des arcades sourcilières ; leur disposition, très rare et particulière, rappelle celle de l’exceptionnel masque de la fondation Dapper provenant de l’ancienne collection René Mendès-France1.
Outre ces quelques traits distinctifs, les yeux étirés du masque de Michel Périnet sont susceptibles de nous éclairer sur son lieu de naissance. S’il est difficile de trouver un équivalent - d’un point de vue purement esthétique - à la sculpture présentée ici, aussi impressionnante par sa taille que par la puissance qu’elle dégage, on peut toutefois en identifier de semblables chez les Dan méridionaux ou les Gio. Si l’on ignore l’origine de celui, très voisin, présenté par Paul Guillaume à la Valentine Gallery de New York en avril 1930 et vendu au collectionneur anglais, le professeur Michael Sadler2, en revanche on sait que le peintre Alfred Tulk acquit le sien au Libéria lors de son séjour dans le comté de Nimba de 1931 à 1933.
Le masque de Michel Périnet est une des plus remarquables créations des talentueux sculpteurs exerçant leur art dans cet étroit territoire artistique sans frontières entre Côte d’Ivoire et Liberia.
1Berjonneau , G. et Sonnery, J.-L., Rediscovered Masterpieces of African Art, Paris, 1987, p. 143
2Sadler, M.-E., également l’auteur de Arts of West Africa, Londres, 1935
A DAN MASK
by Bertrand Goy
The beauty and old age of the Dan mask from the Périnet collection have satisfied the requirements and fulfilled the desires of its successive owners, all prestigious collectors whose discernment is unanimously lauded by art historians.
Its figurative face, which appears in an idealised oval, is extended backwards along the entire periphery by a flat surface a few centimetres wide. This narrow expanse, pierced with rectangular fixation orifices, is further proof of its old age, if the rich patina leaves any room for doubt. Indeed, the surface might have been used as a support for some type of bead-and-cowrie-shell tiara, or a thick cotton band. The artist did not leave any aspect of his creation to chance, adorning the back with an elegant, perfectly executed curve. The side view, just as attractive, makes it possible to appreciate the contrast between the finesse of the nose and the fleshy lips. They are clearly delineated from the lower lip to the philtrum, revealing a sensuousness that had once been overshadowed by metal or animal teeth which lined the mouth. An obtuse angle juxtaposes the forehead - adorned in the middle with a keloid line - with the lower part of the face, where the cheeks and eyebrow arches are engraved with scarifications. Their rare, specific arrangement evokes that of the Dapper Foundation’s exceptional mask, which was once part of the René Mendès- France collection1.
In addition to these distinctive features, the drawn-out eyes of the Michel Périnet mask can also shed light on its place of origin. While it is difficult to find an equivalent to the sculpture presented here, speaking in purely aesthetic terms - one that is as impressive in size as in the power that emanates from it -, it is possible to identify comparable ones from the southern Dan or Gio cultures. The very similar one presented by Paul Guillaume at the Valentine Gallery of New York City in April 1930 and sold to the British collector Professor Michael Sadler2 is of unknown origin. However, we know that the painter Alfred Tulk purchased his object in Liberia during his stay in Nimba County from 1931 to 1933.
The Michel Périnet mask is one of the most remarkable creations by the talented sculptors who ply their trade in this narrow, unbounded artistic territory between Ivory Coast and Liberia.
1Berjonneau , G. and Sonnery, J.-L., Rediscovered Masterpieces of African Art, Paris, 1987, p. 143
2Sadler, M.-E., also author of Arts of West Africa, London, 1935