STATUE MUMUYE
STATUE MUMUYE
STATUE MUMUYE
2 More
STATUE MUMUYE

NIGERIA

Details
STATUE MUMUYE
NIGERIA
Haut. 86.5 cm (34 in.)
Provenance
Jacques Kerchache (1942-2001), Paris
Collection Comte Baudouin de Grunne (1917-2011), Wezembeek-Oppem, Belgique
Collection Michel Périnet (1930-2020), Paris, acquis en 1989
Literature
Kerchache, J., Paudrat, J.-L. et Stephan, L., L'art africain, Paris, 1988, p. 185, n° 125
Kerchache, J., Paudrat, J.-L. et Stephan, L., Art of Africa, New York, 1993, p. 185, n° 125
de Grunne, B., Masterhands. Afrikaanse beeldhouwers in de kijker. Mains de maîtres. A la découverte des sculpteurs d'Afrique, Bruxelles, 2001, p. 89, n° 21
Herreman, F., Mumuye. Sculpture from Nigeria. The Human figure reinvented, Milan, 2016, p. 50, n° 26
Exhibited
Bruxelles, Espace Culturel BBL, Masterhands. Afrikaanse beeldhouwers in de kijker. Mains de maîtres. A la découverte des sculpteurs d'Afrique, 22 mars - 24 juin 2001
Further details
MUMUYE FIGURE, NIGERIA

Brought to you by

Alexis Maggiar
Alexis Maggiar International Head, African & Oceanic Art, Vice Chairman of Christie's France

Lot Essay

“THE FORCE IS STRONG WITH THIS ONE”
OU LA PUISSANCE DE LA STATUE MUMUYE PÉRINET
par Bernard De Grunne

Suite à l’enthousiasme provoqué par la découverte des talents incroyables des grands sculpteurs d’Afrique noire lors de l’exposition Le Primitivisme dans l’art du 20e siècle au MoMA de New York, Michael Brenson journaliste du New York Times, suggéra que la statue Mumuye de la collection Jack Naiman (vendue ensuite à Ernst Beyeler) fut la source d’inspiration pour la tête casquée de Darth Vader dans la trilogie Star Wars créée par Georges Lucas1. Cette affinité stylistique d’une tête casquée dont les yeux sont ombragés par la visière du heaume fut hélas démentie par Georges Lucas lui-même qui expliqua qu’il s’était plutôt inspiré des casques d’armures de samouraïs japonais2. Cette connexion avec l’art des maîtres ferronniers japonais n’avait pas échappé à Jack Naiman, qui possédait également une très belle collection d’armures japonaises que j’ai pu admirer dans sa maison de San Diego.

J’ai toujours été fasciné par cette magnifique statue de la collection Périnet. Celui-ci qui ne prêtait jamais les objets de sa collection, avait néanmoins très génereusement fait une exception pour moi et a accepté de me la confier lors de mon exposition Mains de Maîtres a Bruxelles en 2001.

Le maître sculpteur de cette statue remarquable se distingue par deux caractéristiques stylistiques : le traitement des bras qui partent sous le nombril, tire le regard derrière la colonne vertébrale pour le ramener au sommet du buste et la stylisation étonnante de la tête en forme de pyramide tronquée, les yeux enfoncés dans une sorte de coiffure casquée d’où émerge un long nez pointu. Les yeux sont placés de manière très curieuse sur la paroi interne du casque annulant par là toute délimitation entre le visage et la coiffure.

Dans mon étude sur la statuaire Mumuye, j’avais inclus cette statue dans ce que j’ai appelé le style « trapu ». Ce style, qui compte une vingtaine de statues sur un corpus total de 140 sculptures inventoriées, est caracterisé par un rapport spécifique de trois à un entre la hauteur du torse et celle des jambes. Ce style est clairement le canon le plus iconique et classique au sens de l’histoire de l’art de la statuaire grecque classique vers 480-430 av. J.-C. durant l’âge d’or des sculpteurs Phidias et Polyclète3.

Bien sûr, on se souvient de Polyclète comme d’un pionnier défenseur du principe de symétrie, « la commensurabilité des parties » en art. Comme les artistes Mumuye, il décomposait ainsi organiquement le corps humain en torse, membres et parties de membres et essayait ensuite de déterminer comment ces parties se rattachaient les unes aux autres pour former un tout. Quoiqu’il ne subsiste pas d’oeuvres de la main même de Polyclète, ses principes étaient si bien appliqués qu’on peut aisément « sentir » la présence de son concept d’harmonie dans maintes reproductions de son travail executées à l’époque romaine.

Les styles Mumuye se sont developpés sans doute sur une périodisation courte entre 1860 et 1960 car la date d’acquisition la plus ancienne pour une statue remonte à 1921 et des sculpteurs de qualité étaient encore actifs en 19654. De plus, leur statuaire ne présente pas des oeuvres dans un bois pétrifié d’ancienneté d’autres styles de l’Est Nigerian comme les M’Boye, les Jukun, les M’Bembe ou les Oron. Cette périodisation courte pourrait expliquer non seulement le nombre restreint de grandes « mains » mais également que l’artiste qui a sculpté la statue Périnet, contrairement a Polyclète, n’a pas pu exercer une influence marquante sur l’évolution de ces styles étonnants.

Les chercheurs Richard Fardon et Frank Herreman publièrent des études récentes plus approfondies sur l’art Mumuye5. Ils conclurent que la statue Périnet fut sculptée par un artiste différent que celui que j’avais identifié comme le Maître de Pantisawa, créateur de la statue de la Fondation Beyeler ainsi que celle de l’ancienne collection Tishman6. Ces deux chercheurs font remarquer que la coiffe en forme de casque ne présente pas la double crête et la forme des bras est différente car, dans la statue Périnet, les bras se terminent en pointe, n’ont pas de mains et doigts indiqués et sont décorés d’encoches et de dentelures sur les avant-bras7.
Cette coiffe à crête sagittale est sans doute a rapprocher des casques des guerriers Mumuye avec de longues oreillettes qui furent photographiés par la chercheuse danoise Mette Bovin en 19648. Deux autres statues avec ce type de coiffe/casque similaire sont connues : celle de la collection Benenson au musée de la Yale University Art Gallery et celle de la collection Jean-Claude Binoche9.

Les ouvertures créés par ce Polyclète nigérian libèrent donc les bras et les jambes afin qu’on puisse les voir dans leur intégralité d’une pleine tridimensionnalité et comme entourés d’air. Grâce aux bras aplatis de section courbe, cette courbure fait écho à celle de la surface du torse et fait circuler et l’air et le regard à l’intérieur vers l’extérieur de la sculpture. Cet artiste a su se servir admirablement de l’ombre et de la lumiere. Comme le notait déjà Jean Laude, « les grands artistes africains sont capables de penser directement avec des formes dans les formes et de faire des jeux de formes comme nous faisons des jeux de mots. »

1Brenson, M., “Discovering the Heart of Modernism” in The New York Times, New York, 28 octobre 1984
2Fardon, R., “The Quick and the Dead: Versatile Wooden Figures from the Middle Benue” in Berns, M. et al., Central Nigeria Unmasked: Arts of the Benue River Valley, Los Angeles, 2011, pp. 270 et 573 et Stelzig, C., “Masterpieces of Sculpted Form: Mumuye Figures” in Wick, O. et Denner, A., Visual Encounters: Africa, Oceania and Modern Art, Riehen, 2009, section VIII
3Grunne (de), B., « Une main de maître de l’est du Nigeria » in Mains de Maîtres. A la découverte des sculpteurs d’Afrique, Bruxelles, 2001, p. 87
4Les deux statuettes du British Museum acquises par E.S. Liley dans le village de Binyeri. Cf. Fardon, R., 2011, pp. 260-261, n° 8.39 et 8.40
5Cf. Herreman, F., Mumuye. Sculptures du Nigeria, Milan, 2014, p. 50 et Fardon, R., 2011, p. 258
6The Metropolitan Museum of Art, inv. n° 1983.189. Cf. Vogel, S., For Spirits and Kings. African Art from the Paul and Ruth Tishman Collection, New York, 1981, pp. 156-157
7Herreman, F., Mumuye. Sculptures du Nigeria, Milan, 2014, p. 50 et Fardon, R., 2011, p. 258
8Cf. Fardon, R., 2011, n° 8.50 et 10.13
9Wick, O. et Denner, A., Visual Encounters: Africa, Oceania and Modern Art, Riehen, 2009, section VIII, n° 10 et Lamp, F. et al., Accumulating Histories. African Art from the Charles B. Benenson Collection at the Yale University Art Gallery, New Haven, 2012, p. 146

“THE FORCE IS STRONG WITH THIS ONE”
OR THE POWER OF PÉRINET’S MUMUYE STATUE
by Bernard De Grunne

The discovery of the incredible talent of great Sub-Saharan African sculptors garnered enthusiasm at the "Primitivism" in 20th Century Art exhibition at the MoMA of New York City. Michael Brenson, a journalist for the New York Times, suggested that the Mumuye statue of the Jack Naiman collection (sold afterwards to Ernst Beyeler) inspired the helmeted head of Darth Vader in the Star Wars trilogy by Georges Lucas1. The stylistic affinity with a helmeted head, eyes shaded by the helmet’s visor, was unfortunately contradicted by Georges Lucas himself, who explained that the inspiration actually came from the armour of Japanese samurai2. This connection with the art of Japanese master wrought iron craftsmen did not escape the notice of Jack Naiman, who also possessed a fabulous collection of Japanese armoury that I had the opportunity to admire at his San Diego home.

I have always been fascinated by this magnificent statue from the Périnet collection. Although he never loaned the objects of his collection, he nevertheless very generously made an exception for me, agreeing to entrust it to me for my exhibition Mains de Maîtres, held in Brussels in 2001.

The master sculptor of this remarkable statue is distinctive for two stylistic characteristics: the rendering of the arms, which lead under the navel, draw the eye behind the backbone and then back up to the top of the bust; and the surprising stylisation of the head in a truncated pyramid shape, the eyes sunken into a sort of helmet headdress from which a long pointed nose emerges. The eyes are positioned in a very curious way on the internal surface of the helmet, cancelling out any demarcation between the face and the helmet.

In my study on Mumuye statues, I included this statue in what I called the “squat” style. The style, which includes some twenty statues of a total of 140 listed sculptures, is characterised by a specific three-to-one ratio between the height of the torso and that of the legs. This style is clearly the most iconic, classical canon in terms of the history of the art of classic Greek statues circa 480-430 B.C. during the golden age of the sculptors Phidias and Polykleitos3.

Of course, Polykleitos remains memorable as a pioneer defender of the principle of symmetry, the “commensurability of all the parts to one another” in art. Like the Mumuye artists, he thus broke the human body down into a torso, members, and parts of members, before then attempting to determine how these parts relate to each other to form a whole. While there are no remaining works by the actual hand of Polykleitos, his principles were so well applied that it is easy to “feel” the presence of his concept of harmony in the many reproductions of his work executed during Roman times.

The Mumuye styles probably developed over a short period, from 1860 to 1960, since the oldest date of purchase for such a statue dates back to 1921, and gifted sculptors were still producing work in 19654. Moreover, their statues do not include works in petrified wood like other traditional styles from eastern Nigeria such as the M’Boye, Jukun, M’Bembe and Oron styles. This short period of production could explain the limited number of great talents, but also the fact that the artist who sculpted the Périnet statue, unlike Polykleitos, was not able to exert a notable influence on the development of these surprising styles.

The researchers Richard Fardon and Frank Herreman published recent studies delving more deeply into Mumuye art5. They concluded that the Périnet statue was sculpted by a different artist than the one that I had identified as the Master of Pantisawa, creator of the statue of the Beyeler Fondation as well as that of the former Tishman collection6. The two researchers point out that the helmet-shaped headdress does not feature a double crest, and that the arm shape is different: in the Périnet statue, the arms are pointed, with no clear hands or fingers, and the forearms are decorated with notches and indentations7.
This sagittal crest headdress is probably comparable to the helmets of Mumuye warriors, with long ear-flaps, which were photographed by the Danish researcher Mette Bovin in 19648. We know of two other statues with this type of headdress/helmet: the one from the Benenson collection held at the Yale University Art Gallery and the one from the Jean-Claude Binoche collection9.

The works created by this Nigerian Polykleitos release the arms and legs to display them in their entirety, in three full dimensions, as if surrounded by air. Thanks to the flattened arms with a curved cross-section, this rounded line echoes the contour of the torso, allowing air to circulate along with the eye, moving from the interior to the exterior of the sculpture. This artist made admirable use of shadow and light. As Jean Laude already noted, “The great African artists are able to think directly with shapes within shapes, and to play on shapes like we play on words.”

1Brenson, M., “Discovering the Heart of Modernism” in The New York Times, New York, 28 October 1984
2Fardon, R., “The Quick and the Dead: Versatile Wooden Figures from the Middle Benue” in Berns, M. et al., Central Nigeria Unmasked: Arts of the Benue River Valley, Los Angeles, 2011, pp. 270 and 573 and Stelzig, C., “Masterpieces of Sculpted Form: Mumuye Figures” in Wick, O. and Denner, A., Visual Encounters: Africa, Oceania and Modern Art, Riehen, 2009, section VIII
3Grunne (de), B., “Une main de maitre de l’est du Nigeria” in Mains de Maîtres. A la découverte des sculpteurs d’Afrique, Brussels, 2001, p. 87
4The two statuettes of the British Museum purchased by E.S. Liley in the village of Binyeri. Cf. Fardon, R., 2011, pp. 260-261, no. 8.39 and 8.40
5Cf. Herreman, F., Mumuye. Sculptures du Nigeria, Milan, 2014, p. 50 and Fardon, R., 2011, p. 258
6The Metropolitan Museum of Art, inv. no. 1983.189. Cf. Vogel, S., For Spirits and Kings. African Art from the Paul and Ruth Tishman Collection, New York, 1981, pp. 156-157
7Herreman, F., Mumuye. Sculptures du Nigeria, Milan, 2014, p. 50 and Fardon, R., 2011, p. 258
8Cf. Fardon, R., 2011, no. 8.50 and 10.13
9Wick, O. and Denner, A., Visual Encounters: Africa, Oceania and Modern Art, Riehen, 2009, section VIII, no. 10 and Lamp, F. et al., Accumulating Histories. African Art from the Charles B. Benenson Collection at the Yale University Art Gallery, New Haven, 2012, p. 146

More from Collection Michel Périnet

View All
View All