Lot Essay
Réalisé par l’une des figures de proue du symbolisme belge, cet impression ensemble de quatre études féminines sur papier légèrement bleuté et disposées par deux (chaque paire enchâssée dans un passe-partout doré) a été réuni dans un large cadre orné en bois doré dès 1892 par Fernand Khnopff lui-même. La même année, l’œuvre est montrée comme telle pour la première fois lors de l’Exposition d’Aquarelles, Pastels, Dessins et Gravures des membres de la Société Royale Belge des Aquarellistes.
Deux études pour une Sphinge
Dans le premier visage en haut à gauche, Khnopff accentue le regard puissant et hypnotique de cette tête de Sphinge au cou démesurément long et dont la finesse des traits du visage contrastent avec la chevelure presque absente grâce au travail d’estompe du graphite. Cette technique du cadrage resserré au maximum autour du visage se retrouve dans une étude dessinée circulaire (coll. part, New York ; Delevoy, de Croës, Ollinger-Zinque, op. cit., n° 274) préparatoire au tableau Des Caresses, conservé aux musées royaux des beaux-arts de Belgique à Bruxelles (inv. 6768 ; Delevoy, de Croës, Ollinger-Zinque, op. cit., n° 275).
Le second dessin tout en hauteur reprend l’élégant profil d’une sculpture en marbre d’une jeune femme réalisée par l’italien Francesco Laurana à la fin du XVe siècle, aujourd’hui conservé au musée du Louvre et dont Khnopff possédait probablement une copie dans son atelier (fig. 1 ; inv. MR 2597 ; J. Howe, Fernand Khnopp. Two studies for A Sphinx. Two studies for Victoria, Bruxelles, New York, Patrick Derom Gallery, p. 15 note 28). Cette même sculpture inspirera Khnoppf à plusieurs reprises tout au long de sa carrière et se retrouve notamment à l’arrière-plan d’un portait peint à l’huile représentant Eugénie Verhaeren (coll. part. ; Delevoy, de Croës, Ollinger-Zinque, op. cit., n° 107).
Deux études pour Victoria
Dans le premier dessin de la paire de droite, Khnopff représente un visage aux traits précis qui contraste avec une chevelure à peine esquissée et des yeux clos : la jeune femme semble plongée dans un monde onirique. Le visage donne une impression de masque immobile, intemporel et, selon Véronique Coomans-Cardon, l’artiste a dû le copier d’après un buste en plâtre qu’il avait en sa possession (op. cit., 2004, p. 179). Ce visage a également été rapproché d’un portrait peint ‘Beata Beatrix’ (1874) du préraphaélite Dante Gabriel Rossetti (1828-1882) en hommage à son épouse décédée Elizabeth Siddal (fig. 2 ; Londres, Tate Gallery ; inv. N01279). Dans le tableau, la femme apaisée est représentée au moment de son passage dans l’au-delà, acceptant l’invisible baiser de la Mort qui vient la chercher, ayant également été interprétée comme un désir d’abandon amoureux.
Dans le second dessin de cette paire, représentant un chevalier du Moyen-Age en armure, la notion de figure androgyne cher à l’artiste est pleinement évoquée. La composition fait échos au pastel plus abouti titré Victoria. Comme des flammes les longs cheveux roux en référence sans doute à un poème dont les vers sont inscrit sur le passe-partout de l’œuvre conservée en collection particulière (fig. 3; Delevoy, de Croës, Ollinger-Zinque, op. cit., n° 211). Le chevalier androgyne en armure est également représenté dans le premier polyptique de Khnopff, L’Isolement réalisé entre 1890 et 1894, constitué de trois œuvres : Acrasia et Britomart (Liège, musée d’Art Modern et d’Art contemporain) et Solitude (Gingins, Foundation Neuman ; Delevoy, de Croës, Ollinger-Zinque, op. cit., n° 164a-c). Ici, selon Michel Draguet, ‘l’appel à la sensualité répond à l’affirmation virginale du corps enchâssé dans l’armure’ (op. cit., 2018, p. 137) et le chevalier personnifie la solitude face au désir.
Longtemps oublié, il faudra attendre les années 1970 et la première rétrospective de son œuvre en 1979 à Paris, Bruxelles et Hambourg pour voir Fernand Khnopff mis à l’honneur aux côtés des artistes symbolistes de son temps. Cet ensemble de quatre études dans un imposant écrin telles de véritables icônes de la Renaissance italienne a ainsi participé au renouveau de l’artiste en figurant dans cette exposition de 1979 avant d’être à nouveau exposé lors de la grande rétrospective organisée aux musées royaux des beaux-arts de Bruxelles en 2004.
Fig. 1 F. Laurana, Buste de jeune femme, marbre (Paris, musée du Louvre)
Fig. 2 D.G. Rossetti, Beata Beatrix, huile sur toile (Londres, Tate Gallery)
Fig.3 F. Khnopff, Victoria, pastel (coll. part)
Deux études pour une Sphinge
Dans le premier visage en haut à gauche, Khnopff accentue le regard puissant et hypnotique de cette tête de Sphinge au cou démesurément long et dont la finesse des traits du visage contrastent avec la chevelure presque absente grâce au travail d’estompe du graphite. Cette technique du cadrage resserré au maximum autour du visage se retrouve dans une étude dessinée circulaire (coll. part, New York ; Delevoy, de Croës, Ollinger-Zinque, op. cit., n° 274) préparatoire au tableau Des Caresses, conservé aux musées royaux des beaux-arts de Belgique à Bruxelles (inv. 6768 ; Delevoy, de Croës, Ollinger-Zinque, op. cit., n° 275).
Le second dessin tout en hauteur reprend l’élégant profil d’une sculpture en marbre d’une jeune femme réalisée par l’italien Francesco Laurana à la fin du XVe siècle, aujourd’hui conservé au musée du Louvre et dont Khnopff possédait probablement une copie dans son atelier (fig. 1 ; inv. MR 2597 ; J. Howe, Fernand Khnopp. Two studies for A Sphinx. Two studies for Victoria, Bruxelles, New York, Patrick Derom Gallery, p. 15 note 28). Cette même sculpture inspirera Khnoppf à plusieurs reprises tout au long de sa carrière et se retrouve notamment à l’arrière-plan d’un portait peint à l’huile représentant Eugénie Verhaeren (coll. part. ; Delevoy, de Croës, Ollinger-Zinque, op. cit., n° 107).
Deux études pour Victoria
Dans le premier dessin de la paire de droite, Khnopff représente un visage aux traits précis qui contraste avec une chevelure à peine esquissée et des yeux clos : la jeune femme semble plongée dans un monde onirique. Le visage donne une impression de masque immobile, intemporel et, selon Véronique Coomans-Cardon, l’artiste a dû le copier d’après un buste en plâtre qu’il avait en sa possession (op. cit., 2004, p. 179). Ce visage a également été rapproché d’un portrait peint ‘Beata Beatrix’ (1874) du préraphaélite Dante Gabriel Rossetti (1828-1882) en hommage à son épouse décédée Elizabeth Siddal (fig. 2 ; Londres, Tate Gallery ; inv. N01279). Dans le tableau, la femme apaisée est représentée au moment de son passage dans l’au-delà, acceptant l’invisible baiser de la Mort qui vient la chercher, ayant également été interprétée comme un désir d’abandon amoureux.
Dans le second dessin de cette paire, représentant un chevalier du Moyen-Age en armure, la notion de figure androgyne cher à l’artiste est pleinement évoquée. La composition fait échos au pastel plus abouti titré Victoria. Comme des flammes les longs cheveux roux en référence sans doute à un poème dont les vers sont inscrit sur le passe-partout de l’œuvre conservée en collection particulière (fig. 3; Delevoy, de Croës, Ollinger-Zinque, op. cit., n° 211). Le chevalier androgyne en armure est également représenté dans le premier polyptique de Khnopff, L’Isolement réalisé entre 1890 et 1894, constitué de trois œuvres : Acrasia et Britomart (Liège, musée d’Art Modern et d’Art contemporain) et Solitude (Gingins, Foundation Neuman ; Delevoy, de Croës, Ollinger-Zinque, op. cit., n° 164a-c). Ici, selon Michel Draguet, ‘l’appel à la sensualité répond à l’affirmation virginale du corps enchâssé dans l’armure’ (op. cit., 2018, p. 137) et le chevalier personnifie la solitude face au désir.
Longtemps oublié, il faudra attendre les années 1970 et la première rétrospective de son œuvre en 1979 à Paris, Bruxelles et Hambourg pour voir Fernand Khnopff mis à l’honneur aux côtés des artistes symbolistes de son temps. Cet ensemble de quatre études dans un imposant écrin telles de véritables icônes de la Renaissance italienne a ainsi participé au renouveau de l’artiste en figurant dans cette exposition de 1979 avant d’être à nouveau exposé lors de la grande rétrospective organisée aux musées royaux des beaux-arts de Bruxelles en 2004.
Fig. 1 F. Laurana, Buste de jeune femme, marbre (Paris, musée du Louvre)
Fig. 2 D.G. Rossetti, Beata Beatrix, huile sur toile (Londres, Tate Gallery)
Fig.3 F. Khnopff, Victoria, pastel (coll. part)