Lot Essay
Dés son plus jeune âge, Rembrandt Bugatti, fils du créateur Carlo Bugatti et frère du célèbre constructeur automobile Ettore Bugatti, va fixer les bases de toute son œuvre : un engagement existentiel marginal à la recherche d’un idéal de perfection, un dialogue intense entre lui et ses modèles, un face à face permanent. Bugatti a choisi le modelage à main libre sans repère ni mesure, sans esquisse préparatoire, la voie la plus spontanée, la plus primitive et la plus forte pour traduire la nature, le vivant, en trois dimensions.
Pendant ses quinze années de création ininterrompue, exécutée dans l’ivresse, au pas de course, dans la plus grande solitude, jusqu’à l’épuisement, Bugatti va créer une œuvre unique, puissante et dynamique, universelle et intemporelle, authentique, telle que définie par Walter Benjamin : « ce qui fait l’authenticité d’une chose est tout ce qu’elle contient de transmissible de par son origine, de sa durée matérielle à son pouvoir de témoignage historique ».
Avec les années sa vision de l’animal évoluera : d’une saisie extrêmement rapide, fougueuse et directe des formes, des sonorités, des attitudes, des caractères, des mouvements dans toute leur richesse sensorielle, elle aboutira à une finalité très structurée, eurythmique, synthétique, à la fois précise et complexe. Le modèle Deux Léopards, l’un derrière l’autre en est la plus parfaite expression : les deux pattes avant à l’arrêt, la femelle léopard se tient devant le mâle,
qui lui se tient à distance en une posture d’attente, la queue en l’air. C’est le temps de la séduction avant l’accouplement.
Le sculpteur Rembrandt Bugatti a vingt ans quand il rencontre son fondeur-éditeur et mécène Adrien Aurélien Hébrard. La création de l’Édition originale Rembrandt Bugatti commence dès leur rencontre en 1904. Hébrard sera son premier collectionneur tout en étant son marchand et son éditeur exclusif jusqu’en 1934. Pour la première fois, les tirages en bronze sont en nombre limités et numérotés, et marqués du cachet « Cire Perdue A.-A. Hébrard » placé à côté de la signature de Rembrandt Bugatti. Ainsi « la reproductibilité » devient une propriété essentielle de l’œuvre sans qu’elle ne perde son « aura », son caractère organique, original et authentique.
Adrien-Aurélien Hébrard nous dévoile lui-même son propre sentiment dans l’introduction de son catalogue d’exposition : « Ce fut d’abord la méfiance que m’inspira ce joli nom ronflant, évocateur de trop de gloire et de trop d’art, alors qu’un ami m’engageait vivement à voir les travaux du jeune artiste. Au lieu du petit Italien adroit de ses mains, je trouvais un véritable artiste. Ce grand garçon, maigre, rougissant, imberbe et silencieux que les habitués du Muséum appellent “L’Américain” fit défiler sous mes yeux, sans un mot, la plastiline modelée qui représentait son travail d’une année.
Ce sont ces choses que je présente aux amateurs d’art. Ils y trouveront le frisson de vie qui agite les œuvres sincères […].»
Véronique Fromanger, avril 2024
From a very young age, Rembrandt Bugatti, son of the creator Carlo Bugatti and brother of the famous automobile manufacturer Ettore Bugatti, laid the foundations of all his work: a marginal existential commitment in search of an ideal of perfection, an intense dialogue between himself and his models, a permanent face-to-face encounter. Bugatti chose freehand modeling with no reference points or measurements, without preparatory sketches, the most spontaneous, primitive, and powerful way of translating nature, the living, into three dimensions. During his fifteen years of uninterrupted creation, carried out breathlessly, at breakneck speed, in the greatest solitude and to the point of exhaustion, Bugatti created a unique work, powerful and dynamic, universal and timeless, authentic and unmistakable, such as depicted by Walter Benjamin: “what makes something authentic is everything it contains that is transmissible by its origin, from its material duration to its power as a historical testimony”. Over the years, his vision of the animal evolved from an extremely rapid, spirited, and direct grasp of forms, sounds, attitudes, characters, and movements in all their sensory richness, to a highly structured, eurhythmic, synthetic finality that is both precise and complex. The Deux Léopards, l’un derrière l’autre, is the most perfect expression of this: with both front legs stationary, the female leopard stands in front of the male, who stands at a distance in a waiting posture, tail in the air. This is the time of seduction before mating.
The sculptor Rembrandt Bugatti was twenty years old when he met his founder-publisher and patron Adrien Aurélien Hébrard. The creation of the l’édition originale Rembrandt Bugatti began when they first met in 1904. Hébrard was his first collector, and his exclusive dealer and publisher until 1934. For the first time, bronze prints were were limited, numbered, and stamped “Cire Perdue A.-A. Hébrard” next to Rembrandt Bugatti's signature. Consequently, “reproducibility” becomes an essential property of the work, without losing its “aura”, its organic, original, and authentic character.
Adrien-Aurélien Hébrard himself unveils his own sentiment in the introduction to his exhibition catalogue: « At first, this pretty, snooty name, evocative of too much glory and artistry only inspired me distrust, as a friend urged me to see the young artist's work. Instead of the dexterous little Italian, I found a true artist. This tall, skinny, blushing, beardless, silent boy, known to Museum regulars as “The American”, paraded before my eyes, without a word, the shaped plastiline that represented his year's work. These are the things I present to art lovers. They will find in them the thrill of life that stirs sincere works [...]. »
Véronique Fromanger, April 2024
Pendant ses quinze années de création ininterrompue, exécutée dans l’ivresse, au pas de course, dans la plus grande solitude, jusqu’à l’épuisement, Bugatti va créer une œuvre unique, puissante et dynamique, universelle et intemporelle, authentique, telle que définie par Walter Benjamin : « ce qui fait l’authenticité d’une chose est tout ce qu’elle contient de transmissible de par son origine, de sa durée matérielle à son pouvoir de témoignage historique ».
Avec les années sa vision de l’animal évoluera : d’une saisie extrêmement rapide, fougueuse et directe des formes, des sonorités, des attitudes, des caractères, des mouvements dans toute leur richesse sensorielle, elle aboutira à une finalité très structurée, eurythmique, synthétique, à la fois précise et complexe. Le modèle Deux Léopards, l’un derrière l’autre en est la plus parfaite expression : les deux pattes avant à l’arrêt, la femelle léopard se tient devant le mâle,
qui lui se tient à distance en une posture d’attente, la queue en l’air. C’est le temps de la séduction avant l’accouplement.
Le sculpteur Rembrandt Bugatti a vingt ans quand il rencontre son fondeur-éditeur et mécène Adrien Aurélien Hébrard. La création de l’Édition originale Rembrandt Bugatti commence dès leur rencontre en 1904. Hébrard sera son premier collectionneur tout en étant son marchand et son éditeur exclusif jusqu’en 1934. Pour la première fois, les tirages en bronze sont en nombre limités et numérotés, et marqués du cachet « Cire Perdue A.-A. Hébrard » placé à côté de la signature de Rembrandt Bugatti. Ainsi « la reproductibilité » devient une propriété essentielle de l’œuvre sans qu’elle ne perde son « aura », son caractère organique, original et authentique.
Adrien-Aurélien Hébrard nous dévoile lui-même son propre sentiment dans l’introduction de son catalogue d’exposition : « Ce fut d’abord la méfiance que m’inspira ce joli nom ronflant, évocateur de trop de gloire et de trop d’art, alors qu’un ami m’engageait vivement à voir les travaux du jeune artiste. Au lieu du petit Italien adroit de ses mains, je trouvais un véritable artiste. Ce grand garçon, maigre, rougissant, imberbe et silencieux que les habitués du Muséum appellent “L’Américain” fit défiler sous mes yeux, sans un mot, la plastiline modelée qui représentait son travail d’une année.
Ce sont ces choses que je présente aux amateurs d’art. Ils y trouveront le frisson de vie qui agite les œuvres sincères […].»
Véronique Fromanger, avril 2024
From a very young age, Rembrandt Bugatti, son of the creator Carlo Bugatti and brother of the famous automobile manufacturer Ettore Bugatti, laid the foundations of all his work: a marginal existential commitment in search of an ideal of perfection, an intense dialogue between himself and his models, a permanent face-to-face encounter. Bugatti chose freehand modeling with no reference points or measurements, without preparatory sketches, the most spontaneous, primitive, and powerful way of translating nature, the living, into three dimensions. During his fifteen years of uninterrupted creation, carried out breathlessly, at breakneck speed, in the greatest solitude and to the point of exhaustion, Bugatti created a unique work, powerful and dynamic, universal and timeless, authentic and unmistakable, such as depicted by Walter Benjamin: “what makes something authentic is everything it contains that is transmissible by its origin, from its material duration to its power as a historical testimony”. Over the years, his vision of the animal evolved from an extremely rapid, spirited, and direct grasp of forms, sounds, attitudes, characters, and movements in all their sensory richness, to a highly structured, eurhythmic, synthetic finality that is both precise and complex. The Deux Léopards, l’un derrière l’autre, is the most perfect expression of this: with both front legs stationary, the female leopard stands in front of the male, who stands at a distance in a waiting posture, tail in the air. This is the time of seduction before mating.
The sculptor Rembrandt Bugatti was twenty years old when he met his founder-publisher and patron Adrien Aurélien Hébrard. The creation of the l’édition originale Rembrandt Bugatti began when they first met in 1904. Hébrard was his first collector, and his exclusive dealer and publisher until 1934. For the first time, bronze prints were were limited, numbered, and stamped “Cire Perdue A.-A. Hébrard” next to Rembrandt Bugatti's signature. Consequently, “reproducibility” becomes an essential property of the work, without losing its “aura”, its organic, original, and authentic character.
Adrien-Aurélien Hébrard himself unveils his own sentiment in the introduction to his exhibition catalogue: « At first, this pretty, snooty name, evocative of too much glory and artistry only inspired me distrust, as a friend urged me to see the young artist's work. Instead of the dexterous little Italian, I found a true artist. This tall, skinny, blushing, beardless, silent boy, known to Museum regulars as “The American”, paraded before my eyes, without a word, the shaped plastiline that represented his year's work. These are the things I present to art lovers. They will find in them the thrill of life that stirs sincere works [...]. »
Véronique Fromanger, April 2024