Lot Essay
« Tout mon corps est impliqué dans mon travail, et mes bras sont largement ouverts. C’est avec des gestes que j’écris dans l’espace offert par le rythme, par les battements. » - Judit Reigl
Des traînées désordonnées de pigments noirs et rouges s’effleurent sur une vaste toile monochrome. Nous sommes ici en présence d’une œuvre créée au moyen de la méthode mise au point par Judit Reigl. Celle-ci consistait à gratter d’épais dépôts de peinture au centre de toiles blanches à l’aide d’une variété d’outils improvisés : couteaux à palette, tringles à rideaux torsadées, bâtons de bois, un bouchon d’un flacon de Chanel n° 5, et aussi ses mains nues. L'artiste avait expérimenté cette technique en 1955 dans sa série de peintures Outburst, puis elle a passé la décennie suivante à affiner son langage artistique via un ensemble de peintures à grande échelle. Véritables explosions de couleurs, ces œuvres semblent se contorsionner sous l’effet de la force centrifuge. Reigl les qualifie d’ailleurs comme une « écriture de masse ».
Née à Kapuvár, en Hongrie, en 1923, la jeune femme a étudié la peinture à l’Académie des beaux-arts de Budapest. Après huit tentatives infructueuses, elle parvient à passer le rideau de fer en 1950 et s’installe à Paris, où elle rejoint un milieu d’artistes d’origine hongroise, qui compte notamment Simon Hantaï.
Reigl fait alors la connaissance d’André Breton, fer de lance du groupe surréaliste, qui expose ses peintures à la galerie À Étoile Scellée en 1954. Bien qu’elle ait par la suite pris ses distances avec ce mouvement, ses méthodes automatiques n’étaient pas sans rappeler les techniques de transfert, de frottage et de grattage mises au point par des artistes surréalistes tels que Max Ernst afin de produire des images aléatoires, qui ne résultent pas de choix esthétiques conscients. Évoquant des ruptures, des déchirures et des abrasions, les motifs abstraits de Reigl possèdent une dimension psychanalytique qui s’intensifiera lors de la révolution hongroise de 1956 à Budapest.
Les années 1955-1960 constituent une période charnière dans la carrière de l’artiste hongroise, car c’est là qu’elle se forge son propre territoire sur la scène artistique parisienne. À cette époque, elle expose aux côtés d’autres peintres européens – Simon Hantaï, Georges Mathieu, Jean Degottex et de géants de l’expressionnisme abstrait américain comme Sam Francis.
En 1957, Jean Fournier organise une importante exposition intitulée L’exemplaire dans l’aventure picturale des dix dernières années où se confrontent pour la première fois artistes américains et français.
Elle synthétise notamment dans son propre travail quelques éléments de l’approche « all-over » de ces artistes américains.
Reigl compte parmi les premières femmes artistes à utiliser son propre corps comme « outil pictural ». On peut d’ailleurs établir un parallèle littéraire avec sa contemporaine et écrivaine Hélène Cixous, qui a inventé le terme « écriture féminine » dans son texte fondateur « Le rire de la Méduse » (1975). L’autrice met en avant un nouveau genre d’écriture féminine, plus transgressif, qui s’écarte des structures linguistiques traditionnellement masculines pour privilégier l’expression de l’expérience féminine incarnée.
Dans le présent tableau, de vibrants éclats de pigments rouges apparaissent sous de grandes formes noires horizontales, comme « balayées ».
Dans cette « écriture de masse » de Reigl, le geste, la forme et la couleur se fondent en un maelström sensuel.
Des traînées désordonnées de pigments noirs et rouges s’effleurent sur une vaste toile monochrome. Nous sommes ici en présence d’une œuvre créée au moyen de la méthode mise au point par Judit Reigl. Celle-ci consistait à gratter d’épais dépôts de peinture au centre de toiles blanches à l’aide d’une variété d’outils improvisés : couteaux à palette, tringles à rideaux torsadées, bâtons de bois, un bouchon d’un flacon de Chanel n° 5, et aussi ses mains nues. L'artiste avait expérimenté cette technique en 1955 dans sa série de peintures Outburst, puis elle a passé la décennie suivante à affiner son langage artistique via un ensemble de peintures à grande échelle. Véritables explosions de couleurs, ces œuvres semblent se contorsionner sous l’effet de la force centrifuge. Reigl les qualifie d’ailleurs comme une « écriture de masse ».
Née à Kapuvár, en Hongrie, en 1923, la jeune femme a étudié la peinture à l’Académie des beaux-arts de Budapest. Après huit tentatives infructueuses, elle parvient à passer le rideau de fer en 1950 et s’installe à Paris, où elle rejoint un milieu d’artistes d’origine hongroise, qui compte notamment Simon Hantaï.
Reigl fait alors la connaissance d’André Breton, fer de lance du groupe surréaliste, qui expose ses peintures à la galerie À Étoile Scellée en 1954. Bien qu’elle ait par la suite pris ses distances avec ce mouvement, ses méthodes automatiques n’étaient pas sans rappeler les techniques de transfert, de frottage et de grattage mises au point par des artistes surréalistes tels que Max Ernst afin de produire des images aléatoires, qui ne résultent pas de choix esthétiques conscients. Évoquant des ruptures, des déchirures et des abrasions, les motifs abstraits de Reigl possèdent une dimension psychanalytique qui s’intensifiera lors de la révolution hongroise de 1956 à Budapest.
Les années 1955-1960 constituent une période charnière dans la carrière de l’artiste hongroise, car c’est là qu’elle se forge son propre territoire sur la scène artistique parisienne. À cette époque, elle expose aux côtés d’autres peintres européens – Simon Hantaï, Georges Mathieu, Jean Degottex et de géants de l’expressionnisme abstrait américain comme Sam Francis.
En 1957, Jean Fournier organise une importante exposition intitulée L’exemplaire dans l’aventure picturale des dix dernières années où se confrontent pour la première fois artistes américains et français.
Elle synthétise notamment dans son propre travail quelques éléments de l’approche « all-over » de ces artistes américains.
Reigl compte parmi les premières femmes artistes à utiliser son propre corps comme « outil pictural ». On peut d’ailleurs établir un parallèle littéraire avec sa contemporaine et écrivaine Hélène Cixous, qui a inventé le terme « écriture féminine » dans son texte fondateur « Le rire de la Méduse » (1975). L’autrice met en avant un nouveau genre d’écriture féminine, plus transgressif, qui s’écarte des structures linguistiques traditionnellement masculines pour privilégier l’expression de l’expérience féminine incarnée.
Dans le présent tableau, de vibrants éclats de pigments rouges apparaissent sous de grandes formes noires horizontales, comme « balayées ».
Dans cette « écriture de masse » de Reigl, le geste, la forme et la couleur se fondent en un maelström sensuel.