Jesús Rafael Soto (1923-2005)
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Jesús Rafael Soto (1923-2005)

Collage and Vibration

Details
Jesús Rafael Soto (1923-2005)
Collage and Vibration
signé, titré et daté '"COLAGE ET VIBRATION'' Soto 1959⁄60' (au dos)
huile, tissu, clous et fils de fer sur panneau
71.5 x 121 x 13 cm.
Réalisé en 1959-1960.

signed, titled and dated '"COLAGE ET VIBRATION" Soto 1959⁄60' (on the reverse)
oil, fabric, nails and metal wires on panel
28 1⁄8 x 47 5⁄8 x 5 1⁄8 in.
Executed in 1959-1960.
Provenance
Galerie Schoeller, Düsseldorf
Collection Helga et Edzard Reuter, Stuttgart (acquis auprès de celle-ci en 1999)
Exhibited
Sienne, Palazzo Delle Papesse, ZERO, 1958-1968, Germania-Italia, mai-septembre 2004.
Further Details
Cette œuvre a été authentifiée par Le Comité Soto et est accompagnée d'un certificat d'authenticité du Comité Soto.

Brought to you by

Josephine Wanecq
Josephine Wanecq Specialist, Head of Evening Sale

Lot Essay

« L'art est un phénomène intemporel... l'idée impressionniste d'atomiser la lumière est toujours d'actualité. » - Jesús Rafael Soto

La collection de Helga et Edzard Reuter offre deux œuvres importantes de Jesús Rafael Soto, figure de proue de l’art cinétique vénézuélien. Collage et Vibration (1959-1960) est un véritable chef-d’œuvre de jeunesse réalisé à l’huile sur panneau, incorporant des éléments de tissu et de métal. Trois grands aplats de marron foncé, de noir et de gris composent une sorte de nature morte abstraite, rappelant l’intérêt précoce de l’artiste pour le cubisme. On observe des empâtements appuyés autour du plan central, tandis que des pointillés de bleus et rouges brillants le long des bords révèlent des couches de pentimenti. Un fil métallique fixé à l’extrême droite, parsemé de traces de la même peinture bleue et rouge, témoigne du désir de l’artiste d’animer l’abstraction.

Dans son travail, Soto cherchait avant tout à créer un nouvel espace optique ; il a poursuivi cette mission avec détermination tout au long de sa carrière. Réalisé dans les dernières années du XXe siècle, Petit rond bleu (1998) est particulièrement révélateur du succès de cette recherche. Ses fils métalliques fluctuants s’activent grâce à la présence du spectateur devant l’œuvre, créant une relation réciproque. Ces deux œuvres remarquables peuvent être considérées comme le point d’orgue de la carrière de l’artiste.

Tandis qu’il étudiait à la Escuela de Artes Plásticas de Caracas à la fin des années 1940, Soto a été fasciné par une nature morte signée Georges Braque. On retrouve dans Collage et Vibration certains échos des natures mortes fragmentées du peintre français – en particulier ses papiers collés « faux bois ». Mais, tandis que Braque mélangeait dans ses collages du papier journal, du papier peint avec de l’imitation de bois de chêne, Soto inclut une bande de tissu rouge foncé fixée au panneau sous-jacent à l’aide de clous minutieusement disposés. Laissés visibles le long d’un côté du tissu, ces clous rappellent la bordure en pointillés sur la lisière de la Violette de Parme (1914, Metropolitan Museum of Art) de Braque. De même, les fines hachures verticales de Collage et Vibration rendent hommage à l’utilisation radicale par le maître cubiste d’un peigne en acier trempé dans la peinture pour créer des passages de bois en trompe-l’œil.

Cependant, la présente œuvre s’avère résolument tournée vers l’avenir. Sa séquence de fils de fer oscillants est caractéristique du travail de cette époque du plasticien, qui cherche à libérer l’abstraction des limites du plan de l’image. En s’entrelaçant sur des lignes blanches hachurées, dans les zones de chevauchement des motifs, ces fils produisent un effet moiré, une réelle interférence optique. Soto a affiné cet effet de texture visuelle à travers des séries successives tout au long de sa carrière, depuis ses premières expériences avec des superpositions de plexiglas, en passant par les Vibrations qui – comme dans cette œuvre – intègrent des éléments métalliques trouvés, jusqu’à sa dernière série de Pénétrables à grande échelle.

Dans Petit rond bleu, Soto invoque la perturbation optique pour provoquer la relation entre l’œuvre d’art et le spectateur. Chacun est lié à l’autre par une sorte de réciprocité optique, l’œuvre n’étant pas seulement activée par la présence du spectateur, mais cessant à bien des égards d’exister à son départ. En se déplaçant devant Petit rond bleu, le spectateur fait l’expérience d’un effet vibratoire éblouissant lorsqu’un orbe déformé, d’un bleu froid, émerge comme le reflet sur l’eau d’une lune pâle.

Arrivé à Paris en 1950, Soto s’est rapidement immergé dans le cercle d’artistes qui s’était formé autour de la Galerie Denise René. En 1955, il participe à l’exposition d’art cinétique des artistes de la galerie, baptisé « Le mouvement », aux côtés d’Alexander Calder, Marcel Duchamp et Victor Vasarely. Enrichissant encore cette effervescence moderniste, Soto voyage beaucoup, captivé tour à tour par les recherches abstraites de Piet Mondrian, Kasimir Malevitch, László Moholy-Nagy et Josef Albers. Il décrira plus tard l’emblématique composition suprématiste White on White de Malevitch comme « une sorte de pierre de touche spirituelle » (J.R. Soto cité dans Soto : A Retrospective Exhibition, catalogue d’exposition, Solomon R. Guggenheim Museum, New York, 1974, p. 13). Si des artistes comme Malevitch offraient un nouveau champ pour l’abstraction radicale, Soto cherchait avant tout à dynamiser celle-ci. Il concevait la relation entre l’œuvre d’art et le spectateur comme faisant partie intégrante de l’œuvre elle-même, dirigeant, tel un chef d’orchestre, le mouvement de chacun au cœur de leurs interactions. Parvenant à une dématérialisation proto-conceptuelle de l’œuvre d’art, Soto a soulevé l’abstraction du plan en 2D de l’image, contribuant ainsi à l’en libérer.


“Art is a timeless phenomenon ... the impressionist idea of atomising light is still valid today.” - Jesús Rafael Soto

From the collection of Helga and Edzard Reuter come two important works by the Venezuelan artist Jesús Rafael Soto, a leading figure of Kinetic art. Collage et Vibration (1959-1960) is a splendid early masterwork in oil on panel, incorporating collaged fabric and metal elements. Its three large planes of deep maroon, black, and striated monochrome present a kind of abstract still-life, recalling the artist’s early and decisive interest in Cubism. Dramatic impasto converging around the central plane, with brilliant blue and red flecks around its edges, reveals layers of pentimenti. A relief of metal wire attached to the right-most plane, laced with traces of the same blue and red paint, speaks to the artist’s career-defining desire to animate abstraction. Soto sought fundamentally to evolve new optical space with his work, and pursued this mission single-mindedly throughout his career. Executed in the final years of the twentieth century, Petit rond bleu (1998) is an emblematic and elegant testament to his success. Its oscillating metal wires are activated by the viewer’s presence in front of the work, forging a reciprocal spatial and perceptual relationship between artwork and viewer. These two remarkable works can be seen to bookend the career of one of abstraction’s most vital artistic voices.

While studying at the Escuela de Artes Plásticas in Caracas in the late 1940s, Soto was transfixed by a chance encounter with a still life by Georges Braque. Echoes of Braque’s fragmented still lifes—particularly his ‘faux bois’ papiers collés—are identifiable in the faceted planes of Collage et Vibration. Where Braque pasted newsprint and wallpaper printed with imitation oak wood into his collages, Soto includes a swathe of deep red fabric affixed to the underlying panel with steadily punctuated nails. Left visible along one edge of the fabric, the nails in Soto’s work recall the dotted selvage border in Braque’s Bottle, Glass, and Pipe (Violette de Parme) (1914, Metropolitan Museum of Art). Likewise, Soto’s thin vertical hatching in the present work pays tribute to the Cubist master’s radical use of a steel comb dipped in paint to create trompe-l’oeil passages of woodgrain.

At the same time, Collage et Vibration is resolutely forward-looking. Its lyrical sequence of wire is emblematic of Soto’s work from this period, as he sought to liberate abstraction from the confines of the picture plane. As they interlace across the work’s hatched white lines, these wires impart a moiré effect, a rich visual texture and optical interference produced in areas of overlapping pattern. Soto refined this effect through successive series across his career, from his early experiments with plexiglass overlays, to the Vibrations which—as in the present work—incorporate found metal elements, to his later series of large-scale immersive Pénétrables.

In Petit rond bleu Soto masterfully invokes optical disturbance to conduct the relationship between artwork and viewer, as the artwork swells to fill the space between each. They are bound together in a kind of optical reciprocity, as the artwork is not only activated by the viewer’s presence but in many ways ceases to exist upon their departure. Moving in front of Petit rond bleu, the viewer experiences a dazzling vibratory effect as a distorted, cool blue orb emerges like the reflection of a pale moon on water.

First arriving in Paris in 1950, Soto had quickly become immersed in the circle of artists who coalesced around the Galerie Denise René. In 1955 he participated in the gallery’s seminal Kinetic Art exhibition "Le mouvement" (The Movement) along with artists such as Alexander Calder, Marcel Duchamp and Victor Vasarely. Further enriching this modernist ferment, Soto travelled widely, enthralled in turn by the abstract investigations of Piet Mondrian, Kasimir Malevich, László Moholy-Nagy and Josef Albers. He later described Malevich’s iconic Suprematist Composition: White on White as ‘a kind of spiritual touchstone’ (J.R. Soto quoted in Soto: A Retrospective Exhibition, exhibition catalogue, Solomon R. Guggenheim Museum, New York, 1974, p. 13). If artists such as Malevich had presented a distilled and radical new possibility for abstraction, now Soto sought to dynamise it. He conceived of the relationship between artwork and viewer as an integral part of the artwork itself, orchestrating—like a conductor—the movement of each through their interaction. Achieving a proto-conceptual dematerialization of the artwork, Soto lifted abstraction from the flat picture plane and set it free.

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