Lot Essay
L’image moraliste du peintre Greuze (1725-1805) et ses jeunes filles orantes aux traits innocents camoufle une partie moins chaste de sa production. Le peintre loué par le philosophe Diderot (1713-1784) comme ‘prédicateur des bonnes mœurs’, opposé à un Baudouin (1723-1769) ‘prédicateur des mauvaises’ (cité par G. Faroult, L’Amour peintre, Paris, 2020, p. 295), n’était pourtant pas dépourvu d’une certaine malice et d’un goût prononcé pour une peinture sensuelle.
D’abord certaines scènes convenables affichent un sous-texte peu déguisé, comme les métaphores de la perte de virginité dans La Cruche cassée (musée du Louvre, Paris, inv. 5036) ou Le Miroir brisé (Wallace collection, Londres, inv. P442). D’autres scènes de genre révèlent heureusement une ambiguïté plus diffuse et dans un ton moins gravement réprobateur. La Jeune fille aux colombes représente ainsi au lavis brun une jeune femme endormie dans une rêverie volontiers lascive (musée des Beaux-Arts, Paris, inv. Ph 24639). L’arrière-plan composé de colombes en pleine saison — occupées à s’accoupler — guide l’interprétation pour qui n’avait pas saisi pleinement l’expression pâmée de la jeune femme.
La représentation d’un lit défait sans occupant dans la pièce pousse cependant davantage l’évocation érotique. La vacuité de la scène n’offrant aucun symbole iconographique, le spectateur se charge seul d’interpréter les événements récents. Cette simplicité de la composition ne rend pourtant pas le motif courant. Peu d’artistes ont laissé au lit seul le premier rôle. Fragonard (1732-1806) préfère dans son célèbre Verrou (musée du Louvre, Paris, inv. RF 1974 2) reléguer au second plan le lit défait pour préfigurer la suite d’une étreinte sur le point d’aboutir. Baudouin ou Hogarth (1697-1764) ne boudent pas leur plaisir de chahuter des lits, tantôt paillasses rustiques ou baldaquins sophistiqués, mais leurs occupants ne sont jamais bien loin dans la pièce. Si un dessin du musée de Besançon par Fragonard met en majesté un lit à baldaquin défait (inv. D.2940), la présence de deux amours ailés dans le coin gauche du lit met à distance le réel.
Ici, la simplicité frontale de la description frappe le spectateur. Une liberté de facture accompagne également la liberté du sujet. Les coups de brosses spontanés du peintre évoquent le mouvement des draps empilés. En dévoilant l’essentiel tout en ne montrant rien, ou plus rien, l’artiste représente avec une grande sincérité un éternel sujet dont la mise en scène inspire encore et toujours du voluptueux XVIIIe siècle à Sophie Calle (née en 1953).
D’abord certaines scènes convenables affichent un sous-texte peu déguisé, comme les métaphores de la perte de virginité dans La Cruche cassée (musée du Louvre, Paris, inv. 5036) ou Le Miroir brisé (Wallace collection, Londres, inv. P442). D’autres scènes de genre révèlent heureusement une ambiguïté plus diffuse et dans un ton moins gravement réprobateur. La Jeune fille aux colombes représente ainsi au lavis brun une jeune femme endormie dans une rêverie volontiers lascive (musée des Beaux-Arts, Paris, inv. Ph 24639). L’arrière-plan composé de colombes en pleine saison — occupées à s’accoupler — guide l’interprétation pour qui n’avait pas saisi pleinement l’expression pâmée de la jeune femme.
La représentation d’un lit défait sans occupant dans la pièce pousse cependant davantage l’évocation érotique. La vacuité de la scène n’offrant aucun symbole iconographique, le spectateur se charge seul d’interpréter les événements récents. Cette simplicité de la composition ne rend pourtant pas le motif courant. Peu d’artistes ont laissé au lit seul le premier rôle. Fragonard (1732-1806) préfère dans son célèbre Verrou (musée du Louvre, Paris, inv. RF 1974 2) reléguer au second plan le lit défait pour préfigurer la suite d’une étreinte sur le point d’aboutir. Baudouin ou Hogarth (1697-1764) ne boudent pas leur plaisir de chahuter des lits, tantôt paillasses rustiques ou baldaquins sophistiqués, mais leurs occupants ne sont jamais bien loin dans la pièce. Si un dessin du musée de Besançon par Fragonard met en majesté un lit à baldaquin défait (inv. D.2940), la présence de deux amours ailés dans le coin gauche du lit met à distance le réel.
Ici, la simplicité frontale de la description frappe le spectateur. Une liberté de facture accompagne également la liberté du sujet. Les coups de brosses spontanés du peintre évoquent le mouvement des draps empilés. En dévoilant l’essentiel tout en ne montrant rien, ou plus rien, l’artiste représente avec une grande sincérité un éternel sujet dont la mise en scène inspire encore et toujours du voluptueux XVIIIe siècle à Sophie Calle (née en 1953).
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