Lot Essay
Les bronzes
L'extraordinaire monture de bronze doré à têtes d'éléphant et de rhinocéros est, à notre connaissance, un modèle unique.
Les éléphants tirent probablement leur inspiration de ceux créés en céramique par Jean-Claude Duplessis en 1757 pour la manufacture de Sèvres dont il est le directeur artistique.
Ce vase à tête d'éléphant Duplessis, tel qu'il est référencé dans l'inventaire de Sèvres de 1814, connaît un tel succès qu'il est fabriqué jusqu'en 1772 et vendu à travers le marchand-mercier Lazare-Duveaux aux plus grands commanditaires, de Louis XV à Madame de Pompadour en passant par le Prince de Condé.
Duplessis était un artiste de talent maîtrisant le dessin, l'orfèvrerie et le travail du bronze tout comme Juste-Aurèle Meissonnier dont il aurait été l'élève. C'est chez lui qu'il aurait puisé le goût du rocaille mis en exergue dans la garniture présentée ici et dont il pourrait être l'auteur.
Originaire d'Italie, Duplessis s'installe à Paris vers 1735 emménageant peu après à l'hôtel de Soissons chez le Prince de Carriguan ; ce dernier facilite sans doute l'accès pour Duplessis à un logement au Louvre dès 1749. Bénéficiant de la protection du ministre d'Argenson, Duplessis parvient à exercer simultanément le travail du bronze et de l'orfèvrerie avant même de devenir "orfèvre du roi" en 1758, en témoigne le prodigieux brasero offert en 1742 par Louis XV au grand Turc (musée de Topkapi). C'est à partir de ce moment que Duplessis réalise des montures parfois ambitieuses et toujours de la plus grande originalité pour des vases en Sèvres ou en porcelaine de Chine. La qualité d'exécution des bronzes varie, laissant supposer qu'il arrivait peut-être à Duplessis de sous-traiter ses bronzes.
Les vases présentés ici sont encore d'esprit très rocaille cependant tempérés par les bordures à la base et au col ponctués de boutons annonçant le style néoclassique.
La garniture que nous présentons est aussi à rapprocher d'une paire de vases en porcelaine de Chine bleue également garnie d'une monture de bronze doré à têtes d'éléphant (vente Christie's Londres, le 12 décembre 2002, lot 49) et qui dérive vraisemblablement du même modèle de Sèvres. Cette paire, dotée de motifs plus néo-classicisants, est sans doute plus représentative de l'oeœuvre de Jean-Claude Thomas Chambellan Duplessis "fils" (env.1730-1783). Reçu maître fondeur et ciseleur en 1765 il commença à travailler auprès de son père dés 1752 ; nous ne devons donc pas exclure la possibilité qu'il pût être impliqué aussi dans la réalisation de la présente garniture, celle-ci comportant des traces de colliers de perles.
Cette question subsiste aussi pour d'autres oeœuvres maeures stelles que le bureau à cylindre du roi par Oeben et dont les bronzes furent payés en 1767 à M.Duplessis modeleur sans que l'on puisse aujourd'hui encore savoir à qui du père ou du fils en attribuer la paternité.
Les vases chinois
Destinés au marché Européen dès leur fabrication ces vases en porcelaine de Chine étaient constitués par paire ou pour former des garnitures de trois ou cinq vases ; arrivés en France ils étaient garnis de bronzes dorés plus ou moins élaborés. Des vases semblables aux nôtres en porcelaine de Chine bleue et qui conservent des traces de décor doré, à pans coupés et montés en aiguières, sont conservés dans les collections James A. de Rothschild à Waddesdon Manor (voir illustration, G.de Bellaigue, Waddesdon Manor, Furniture and giltbronzes, p.750).
L'éléphant et le rhinocéros : une fascination pour l'exotisme
Les motifs animaliers témoignent du regain de curiosité pour les contrées exotiques de l'Orient, dont Louis XIV lui-même faisait déjà preuve avec l'aménagement de la Ménagerie. Les peintures par Jean-Baptiste Oudry ou les gravures plus anciennes des XVIème et XVIIème siècles servent de modèle aux artisans de l'époque Louis XV.
Dans ses pendules Jean-Joseph de Saint-Germain fait de l'éléphant un de ses sujets de prédilection, s'inspirant probablement de la gravure d'Albrecht Dürer de 1515 (British Museum, Londres) pour ce qui est du rhinocéros. En 1747, le passage d'un rhinocéros en Europe crée un retentissement dont les machands-merciers vont tirer profit. Pendant que Kändler à Dresde en fait certains de ses modèles d'autres, tel que Duplessis, en font des montures de bronze.
Les Narychkine
Dès le 18ème siècle, les membres de cette grande famille Russe occupent les plus hauts postes de l'administration impériale.
Semen (Simon) Kyrilovitch (1710-1775), ambassadeur à Londres et grand veneur de la cour
Petr Kyrillovitch (1713-1770), aide de camp de l'impératrice, chambellan
Alexei Vassilievitch (1753-1799), grand écuyer de la Cour
Kyrille Alexeevitch (1786-1838), grand maître de la Cour
Alexandre Alexeevitch (1838-1916), conseiller privé de l'empereur, sénateur, ministre adjoint de l'agriculture puis des domaines
Kyrille Mikhailovitch (1855-1922), conseiller d'état, ministre à Stuttgart puis à Stockholm.
Dans The Palaces of Leningrad, V.Kennet mentionne un palais Narychkine à Saint Petersbourg sur la Fontanka, agrandi vers 1821-22 par L.A Narychkine et transmis en 1844 à la fille de ce dernier à l'occasion de son mariage avec le comte P.Shuvalov.
Bibliographie comparée
A.Jackson et A.Jaffer, Encounters, VxA Publications, 2004, p.42
R.Savill, The Wallace collection Catalogue of Sèvres Porcelain-I, Londres, 1988, p.162.
L'extraordinaire monture de bronze doré à têtes d'éléphant et de rhinocéros est, à notre connaissance, un modèle unique.
Les éléphants tirent probablement leur inspiration de ceux créés en céramique par Jean-Claude Duplessis en 1757 pour la manufacture de Sèvres dont il est le directeur artistique.
Ce vase à tête d'éléphant Duplessis, tel qu'il est référencé dans l'inventaire de Sèvres de 1814, connaît un tel succès qu'il est fabriqué jusqu'en 1772 et vendu à travers le marchand-mercier Lazare-Duveaux aux plus grands commanditaires, de Louis XV à Madame de Pompadour en passant par le Prince de Condé.
Duplessis était un artiste de talent maîtrisant le dessin, l'orfèvrerie et le travail du bronze tout comme Juste-Aurèle Meissonnier dont il aurait été l'élève. C'est chez lui qu'il aurait puisé le goût du rocaille mis en exergue dans la garniture présentée ici et dont il pourrait être l'auteur.
Originaire d'Italie, Duplessis s'installe à Paris vers 1735 emménageant peu après à l'hôtel de Soissons chez le Prince de Carriguan ; ce dernier facilite sans doute l'accès pour Duplessis à un logement au Louvre dès 1749. Bénéficiant de la protection du ministre d'Argenson, Duplessis parvient à exercer simultanément le travail du bronze et de l'orfèvrerie avant même de devenir "orfèvre du roi" en 1758, en témoigne le prodigieux brasero offert en 1742 par Louis XV au grand Turc (musée de Topkapi). C'est à partir de ce moment que Duplessis réalise des montures parfois ambitieuses et toujours de la plus grande originalité pour des vases en Sèvres ou en porcelaine de Chine. La qualité d'exécution des bronzes varie, laissant supposer qu'il arrivait peut-être à Duplessis de sous-traiter ses bronzes.
Les vases présentés ici sont encore d'esprit très rocaille cependant tempérés par les bordures à la base et au col ponctués de boutons annonçant le style néoclassique.
La garniture que nous présentons est aussi à rapprocher d'une paire de vases en porcelaine de Chine bleue également garnie d'une monture de bronze doré à têtes d'éléphant (vente Christie's Londres, le 12 décembre 2002, lot 49) et qui dérive vraisemblablement du même modèle de Sèvres. Cette paire, dotée de motifs plus néo-classicisants, est sans doute plus représentative de l'oeœuvre de Jean-Claude Thomas Chambellan Duplessis "fils" (env.1730-1783). Reçu maître fondeur et ciseleur en 1765 il commença à travailler auprès de son père dés 1752 ; nous ne devons donc pas exclure la possibilité qu'il pût être impliqué aussi dans la réalisation de la présente garniture, celle-ci comportant des traces de colliers de perles.
Cette question subsiste aussi pour d'autres oeœuvres maeures stelles que le bureau à cylindre du roi par Oeben et dont les bronzes furent payés en 1767 à M.Duplessis modeleur sans que l'on puisse aujourd'hui encore savoir à qui du père ou du fils en attribuer la paternité.
Les vases chinois
Destinés au marché Européen dès leur fabrication ces vases en porcelaine de Chine étaient constitués par paire ou pour former des garnitures de trois ou cinq vases ; arrivés en France ils étaient garnis de bronzes dorés plus ou moins élaborés. Des vases semblables aux nôtres en porcelaine de Chine bleue et qui conservent des traces de décor doré, à pans coupés et montés en aiguières, sont conservés dans les collections James A. de Rothschild à Waddesdon Manor (voir illustration, G.de Bellaigue, Waddesdon Manor, Furniture and giltbronzes, p.750).
L'éléphant et le rhinocéros : une fascination pour l'exotisme
Les motifs animaliers témoignent du regain de curiosité pour les contrées exotiques de l'Orient, dont Louis XIV lui-même faisait déjà preuve avec l'aménagement de la Ménagerie. Les peintures par Jean-Baptiste Oudry ou les gravures plus anciennes des XVIème et XVIIème siècles servent de modèle aux artisans de l'époque Louis XV.
Dans ses pendules Jean-Joseph de Saint-Germain fait de l'éléphant un de ses sujets de prédilection, s'inspirant probablement de la gravure d'Albrecht Dürer de 1515 (British Museum, Londres) pour ce qui est du rhinocéros. En 1747, le passage d'un rhinocéros en Europe crée un retentissement dont les machands-merciers vont tirer profit. Pendant que Kändler à Dresde en fait certains de ses modèles d'autres, tel que Duplessis, en font des montures de bronze.
Les Narychkine
Dès le 18ème siècle, les membres de cette grande famille Russe occupent les plus hauts postes de l'administration impériale.
Semen (Simon) Kyrilovitch (1710-1775), ambassadeur à Londres et grand veneur de la cour
Petr Kyrillovitch (1713-1770), aide de camp de l'impératrice, chambellan
Alexei Vassilievitch (1753-1799), grand écuyer de la Cour
Kyrille Alexeevitch (1786-1838), grand maître de la Cour
Alexandre Alexeevitch (1838-1916), conseiller privé de l'empereur, sénateur, ministre adjoint de l'agriculture puis des domaines
Kyrille Mikhailovitch (1855-1922), conseiller d'état, ministre à Stuttgart puis à Stockholm.
Dans The Palaces of Leningrad, V.Kennet mentionne un palais Narychkine à Saint Petersbourg sur la Fontanka, agrandi vers 1821-22 par L.A Narychkine et transmis en 1844 à la fille de ce dernier à l'occasion de son mariage avec le comte P.Shuvalov.
Bibliographie comparée
A.Jackson et A.Jaffer, Encounters, VxA Publications, 2004, p.42
R.Savill, The Wallace collection Catalogue of Sèvres Porcelain-I, Londres, 1988, p.162.