Lot Essay
La vente après décès d'Eugène Delacroix, qui eut lieu le 21 février 1864, mentionne au lot 664: "27 albums et carnets. Séjours à Champrosay, en Normandie, dans les Pyrénées, à Frépillon, etc." Il est fort possible que le présent carnet ait fait partie de cet ensemble. D'après les quelques dates inscrites: "vendredi 18 septembre, samedi 21 novembre" et des recoupements possibles avec le calendrier perpétuel, le présent carnet a sans doute été réalisé en Basse-Normandie entre les années 1829 et 1846. Delacroix l'a utilisé pendant plusieurs mois entre septembre et novembre au cours de ses voyages notamment à Tancarville (selon une inscription sur l'une des pages) et à l'abbaye de Valmont: l'un des dessins représente le gisant de Nicolas d'Estouville conservé dans l'abbaye Notre-Dame de Valmont.
Tout au long de sa vie, Delacroix ne passa pas moins de neuf séjours, entre 1813 et 1850, au domaine de Valmont à quelques lieues de Fécamp, qui appartenait, à l'époque, à ses cousins Bataille puis Bornot. Une autre étude pour un gisant de l'abbaye de Valmont est conservée au musée du Louvre (Delacroix et la Normandie, cat. expo., Paris, musée national Eugène Delacroix, 1993, no. 15).
De nombreux croquis de ce rare carnet: falaises, jardins, grenouilles, églises en ruines, château, portrait d'enfant, caricature de femme à l'éventail sont associés à des annotations dont, sur la dernière page, une liste d'affaires courantes à régler ou à ne pas oublier "la malle de Pierret, la cravate de laine, gants, prendre la casquette écossaise chez Md D". Delacroix associe donc à la fonction artistique de ce carnet un aspect pratique. Seule la troisième page, où sont représentés les portraits de profil de Cosimo le Vieux et Laurent de Médicis, ne semble pas avoir de relation avec la Normandie.
Le moindre détail de nature, de végétation ou d'architecture retient la curiosité de Delacroix avec toujours cette attention particulière portée à la couleur, aux effets atmosphériques. Tous ses croquis à la mine de plomb sont annotés par des couleurs souvent très précises: "jaune cuivre", "ombre vert gris", "gris bleuâtre cobalt".
L'un des extraits de son Journal lors d'un voyage à Dieppe en Haute-Normandie en août 1854 illustre parfaitement ce rapport à la nature et cette sensibilité des couleurs qui se retrouvent dans ses aquarelles et ses croquis à la mine de plomb annotés, annonciateurs d'une future oeuvre aquarellée ou peinte: "Dans la promenade de ce matin, étudié longuement la mer. Le soleil étant derrière moi, la face des vagues qui se dressait devant moi était jaune, et celle qui regardait le fond réfléchissait le ciel. Des ombres de nuages ont couru sur tout cela et ont produit des effets charmants" (E. Delacroix, Journal 1822-1863, Paris, 1931, réed. 1996, p. 456).
Delacroix réalisa un autre carnet de petit format (qu'il exécuta au cours de l'été 1854) représentant essentiellement des vues de Dieppe à la mine de plomb et parfois à l'aquarelle comparables au présent recueil (Amsterdam, Rijksprentenkabinet; Delacroix, les dernières années, cat. expo., Paris, Grand Palais, 1998, pp. 153-5). Certaines études de végétations du carnet sont d'une force et d'une vigueur assez exceptionnelle (les traits de mine de plomb semblent s'enfoncer dans le papier), comparables à certains croquis d'un autre album que Delacroix réalisa également en Normandie (musée du Louvre, inv. no. 9148; M. Sérullaz, et al., Dessins d'Eugène Delacroix. 1798-1863, Paris, 1984, II, no. 1754, ill).
Tout au long de sa vie, Delacroix ne passa pas moins de neuf séjours, entre 1813 et 1850, au domaine de Valmont à quelques lieues de Fécamp, qui appartenait, à l'époque, à ses cousins Bataille puis Bornot. Une autre étude pour un gisant de l'abbaye de Valmont est conservée au musée du Louvre (Delacroix et la Normandie, cat. expo., Paris, musée national Eugène Delacroix, 1993, no. 15).
De nombreux croquis de ce rare carnet: falaises, jardins, grenouilles, églises en ruines, château, portrait d'enfant, caricature de femme à l'éventail sont associés à des annotations dont, sur la dernière page, une liste d'affaires courantes à régler ou à ne pas oublier "la malle de Pierret, la cravate de laine, gants, prendre la casquette écossaise chez M
Le moindre détail de nature, de végétation ou d'architecture retient la curiosité de Delacroix avec toujours cette attention particulière portée à la couleur, aux effets atmosphériques. Tous ses croquis à la mine de plomb sont annotés par des couleurs souvent très précises: "jaune cuivre", "ombre vert gris", "gris bleuâtre cobalt".
L'un des extraits de son Journal lors d'un voyage à Dieppe en Haute-Normandie en août 1854 illustre parfaitement ce rapport à la nature et cette sensibilité des couleurs qui se retrouvent dans ses aquarelles et ses croquis à la mine de plomb annotés, annonciateurs d'une future oeuvre aquarellée ou peinte: "Dans la promenade de ce matin, étudié longuement la mer. Le soleil étant derrière moi, la face des vagues qui se dressait devant moi était jaune, et celle qui regardait le fond réfléchissait le ciel. Des ombres de nuages ont couru sur tout cela et ont produit des effets charmants" (E. Delacroix, Journal 1822-1863, Paris, 1931, réed. 1996, p. 456).
Delacroix réalisa un autre carnet de petit format (qu'il exécuta au cours de l'été 1854) représentant essentiellement des vues de Dieppe à la mine de plomb et parfois à l'aquarelle comparables au présent recueil (Amsterdam, Rijksprentenkabinet; Delacroix, les dernières années, cat. expo., Paris, Grand Palais, 1998, pp. 153-5). Certaines études de végétations du carnet sont d'une force et d'une vigueur assez exceptionnelle (les traits de mine de plomb semblent s'enfoncer dans le papier), comparables à certains croquis d'un autre album que Delacroix réalisa également en Normandie (musée du Louvre, inv. no. 9148; M. Sérullaz, et al., Dessins d'Eugène Delacroix. 1798-1863, Paris, 1984, II, no. 1754, ill).