Lot Essay
L'Enlèvement d'une Sabine est l'une des compositions les plus célèbres et les plus prisées de Giambologna, illustrant son talent dans un arrangement complexe qui nécessite que le spectateur observe le groupe sous plusieurs angles. Ce groupe en bronze est une version réduite du grand marbre de Giambologna, commandité par le Grand-Duc Francesco de' Medicis et dévoilée en 1583. Il demeure dans son lieu d'origine à la Loggia dei Lanzi à Florence.
L'évolution de la composition de ce groupe est richement documentée. Dès 1579, Giambologna crée un groupe de deux figures représentant un homme enlevant une femme, pour Ottavio Farnese, le duc de Parme. Dans une lettre au Duc, il écrit : 'Havevo apunto compito et rinettato il groppo delle due Figure di Bronzo che io promessi a V. Ecc. Ill. ma di volerli fare quin li mandaj il Mercurio e la Femina' ('Je viens de terminer et de ciseler le groupe de deux figures en bronze que j'avais promis à votre illustre Excellence quand je vous ai envoyé Mercure et la Femme', propos cités par Filangieri di Candida, op. cit., pp. 20-21). Il convient de remarquer que Giambologna suggéra qu'il était possible d'interpréter ce groupe comme évoquant des différents thèmes; pour lui, ce n'était en effet pas le récit qui était important mais l'occasion qui était donnée à l'artiste de résoudre les difficultés rencontrées par lui dans une telle composition ou s'affrontent deux figures.
Cependant, un tel groupe ne peut avoir été concu que pour être fondu en métal ; le poids de la sculpture en marbre ne pouvant pas être soutenue par les deux chevilles fines du personnage masculin. En conséquence, le groupe situé dans la Loggia dei Lanzi, aujourd'hui reconnu comme étant l'Enlèvement d'une Sabine, intègre une troisième figure accroupie entre les jambes du ravisseur romain. Cette troisième figure joue ainsi un rôle crucial tant par sa participation dans une 'composition en spirale' tant admirée par les artistes de l'époque, que par le soutien renforcé que celle-ci apporte aux personnages la surplombant.
D'autres modèles aux trois figures réalisés en bronze existent dans de nombreuses collections anciennes, parmi lesquelles celle du Prince de Liechtenstein (voir Frankfurt, Museum alter Plastik, Die Bronzen der Furstlichen Sammlung Liechtenstein, 26 Nov. 1986 - 15 fev. 1987, no. 16, p. 176-177) bien qu'à ce jour, aucun des modèles ne semble avoir été conçu et fondu par Giambologna lui-même (Avery, 1987, op. cit., no. 89, p. 263). Les bronzes existants portent tous les poinçons de son assistant principal, Antonio Susini, ainsi que de ses successeurs, Gianfrancesco Susini et Ferdinando Tacca.
A la mort de Giambologna en 1608, son assistant Pietro Tacca devint sculpteur auprès des grands ducs de Médicis et quand Tacca lui-même mourut en 1640, le rôle revint à son fils Ferdinando. Ferdinando hérita ainsi de l'atelier de Giambologna et de la fonderie à Borgo Pinti et peut également être considéré comme l'héritier artistique de Giambologna, perpétuant, comme il le fit, l'élégant style maniériste de la fin du XVIème siècle à Florence, jusqu'au milieu du XVIIème siècle. Aujourd'hui, le nombre limité de compositions par Ferdinando documentées ne permet pas véritablement de reconstituer son répertoire à part entière ; notons cependant que l'une de ses commandes les plus importantes fut le relief en bronze du Martyr de St Stephen à Santo Stefano al Ponte à Florence.
Dans un article sur Ferdinando Tacca par Anthony Radcliffe (op. cit.), ce dernier attribue un nombre de petits groupes de bronze à Tacca sur la base des similitudes avec le relief du Martyr, et c'est au vu de ces bronzes et du relief lui-même que nous sommes à même d'attribuer ce bronze à Tacca. La première similitude évidente réside dans la finition de la base en forme de rocher. Presque considérée comme la signature de l'artiste, cette habitude qu'avait Tacca de terminer ses socles par une série de motifs ondoyants de traces poinçonnées est clairement représentée sur ce socle. Mais surtout, c'est dans l'exécution des détails les plus infimes que Tacca se permet de laisser sa propre empreinte artistique sur la composition originale de Giambologna. En particulier, le style du visage de la Sabine, avec ses lignes rondes, son long nez et sa bouche ouverte, rappelle immédiatement le visage de la femme assise en arrière-plan à droite du relief du Martyr (pour une illustration de ce dernier voir Radcliffe, op. cit.fig. 3). Ce groupe en bronze représente ainsi le 'coexistence' de deux des plus grands sculpteurs en bronze à Florence: Giambologna, qui créa la composition originale, et Ferdinando Tacca, qui y ajouta sa propre interprétation artistique.
L'évolution de la composition de ce groupe est richement documentée. Dès 1579, Giambologna crée un groupe de deux figures représentant un homme enlevant une femme, pour Ottavio Farnese, le duc de Parme. Dans une lettre au Duc, il écrit : 'Havevo apunto compito et rinettato il groppo delle due Figure di Bronzo che io promessi a V. Ecc. Ill. ma di volerli fare quin li mandaj il Mercurio e la Femina' ('Je viens de terminer et de ciseler le groupe de deux figures en bronze que j'avais promis à votre illustre Excellence quand je vous ai envoyé Mercure et la Femme', propos cités par Filangieri di Candida, op. cit., pp. 20-21). Il convient de remarquer que Giambologna suggéra qu'il était possible d'interpréter ce groupe comme évoquant des différents thèmes; pour lui, ce n'était en effet pas le récit qui était important mais l'occasion qui était donnée à l'artiste de résoudre les difficultés rencontrées par lui dans une telle composition ou s'affrontent deux figures.
Cependant, un tel groupe ne peut avoir été concu que pour être fondu en métal ; le poids de la sculpture en marbre ne pouvant pas être soutenue par les deux chevilles fines du personnage masculin. En conséquence, le groupe situé dans la Loggia dei Lanzi, aujourd'hui reconnu comme étant l'Enlèvement d'une Sabine, intègre une troisième figure accroupie entre les jambes du ravisseur romain. Cette troisième figure joue ainsi un rôle crucial tant par sa participation dans une 'composition en spirale' tant admirée par les artistes de l'époque, que par le soutien renforcé que celle-ci apporte aux personnages la surplombant.
D'autres modèles aux trois figures réalisés en bronze existent dans de nombreuses collections anciennes, parmi lesquelles celle du Prince de Liechtenstein (voir Frankfurt, Museum alter Plastik, Die Bronzen der Furstlichen Sammlung Liechtenstein, 26 Nov. 1986 - 15 fev. 1987, no. 16, p. 176-177) bien qu'à ce jour, aucun des modèles ne semble avoir été conçu et fondu par Giambologna lui-même (Avery, 1987, op. cit., no. 89, p. 263). Les bronzes existants portent tous les poinçons de son assistant principal, Antonio Susini, ainsi que de ses successeurs, Gianfrancesco Susini et Ferdinando Tacca.
A la mort de Giambologna en 1608, son assistant Pietro Tacca devint sculpteur auprès des grands ducs de Médicis et quand Tacca lui-même mourut en 1640, le rôle revint à son fils Ferdinando. Ferdinando hérita ainsi de l'atelier de Giambologna et de la fonderie à Borgo Pinti et peut également être considéré comme l'héritier artistique de Giambologna, perpétuant, comme il le fit, l'élégant style maniériste de la fin du XVIème siècle à Florence, jusqu'au milieu du XVIIème siècle. Aujourd'hui, le nombre limité de compositions par Ferdinando documentées ne permet pas véritablement de reconstituer son répertoire à part entière ; notons cependant que l'une de ses commandes les plus importantes fut le relief en bronze du Martyr de St Stephen à Santo Stefano al Ponte à Florence.
Dans un article sur Ferdinando Tacca par Anthony Radcliffe (op. cit.), ce dernier attribue un nombre de petits groupes de bronze à Tacca sur la base des similitudes avec le relief du Martyr, et c'est au vu de ces bronzes et du relief lui-même que nous sommes à même d'attribuer ce bronze à Tacca. La première similitude évidente réside dans la finition de la base en forme de rocher. Presque considérée comme la signature de l'artiste, cette habitude qu'avait Tacca de terminer ses socles par une série de motifs ondoyants de traces poinçonnées est clairement représentée sur ce socle. Mais surtout, c'est dans l'exécution des détails les plus infimes que Tacca se permet de laisser sa propre empreinte artistique sur la composition originale de Giambologna. En particulier, le style du visage de la Sabine, avec ses lignes rondes, son long nez et sa bouche ouverte, rappelle immédiatement le visage de la femme assise en arrière-plan à droite du relief du Martyr (pour une illustration de ce dernier voir Radcliffe, op. cit.fig. 3). Ce groupe en bronze représente ainsi le 'coexistence' de deux des plus grands sculpteurs en bronze à Florence: Giambologna, qui créa la composition originale, et Ferdinando Tacca, qui y ajouta sa propre interprétation artistique.