拍品專文
LE MODELE
Ce géridon, et plus particulièrement les montants simulant le bambou, est tout à fait représentatif du goût exotique mis à la mode sous Louis XVI par quelques arbitres des élégances tels que madame du Barry. Celle-ci offrit en effet au duc de Brissac un guéridon dont la description se rapproche beaucoup du présent lot et qui fut livré par les marchands-merciers Lignereux et Daguerre en 1791. Dans l'inventaire après décès de Daguerre, est mentionné: "Une petite table ronde forme de guéridon en racine de bois d'acajou poli sur trois pieds doubles en bronze doré façon de bambous avec entrejambe à tablettes et camé de porcelaine ornant la tablette supérieuré prisée trois cent francs, cy....300 (P. Lemonnier, Weisweiler, Paris, 1983, p. 162).
Un dessin préparatoire de ce modèle est conservé au musée des Art Décoratifs (illustré dans P. Lemonnier, Weisweiler, pp. 97, 90) et pourrait être de la main de Daguerre. D'autres exemples connus de ce modèle (une vingtaine à ce jour) étant estampillés par Weisweiler, on peut supposer que ce modèle a été exclusivement conçu par Weisweiler et vendu par Daguerre. Engagés dans une étroite collaboration, ce dernier fournit à Weisweiler nombre des plus importants clients de la noblesse française et étrangère, ainsi que les familles royales de France, de Russie et de Naples et le futur roi George IV. Weisweiler resta actif jusqu'en 1809 et ses liens avec Daguerre lui permirent de continuer à travailler et d'exporter sa production, lui évitant ainsi la faillite qui toucha beaucoup de ses confrères à la Révolution.
Les guéridons de ce modèle étaient le plus souvent décorés de plaques de porcelaine ou de biscuit sur le plateau. On peut cependant citer des exemples présentant des similitudes mis en vente ces dernières années:
- un guéridon en placage de loupe de thuya, le plateau orné de plaques de porcelaine représentant les signes du Zodiaque, Collection Roberto Polo, vente Sotheby's-Ader Paris, le 7 novembre 1991, lot 134, - un guéridon de dimensions semblables, le plateau en placage de loupe muni d'un médaillon en bronze doré, vente Christie's Monaco, le 15 juin 1997, lot 174,
- un guéridon en placage de thuya, le plateau orné d'un médaillon en porcelaine de Sèvres à l'imitation de Wedgwood, sans plateau d'entrejambe, vente Paris, hôtel Drouot, le 3 dècembre 2001, lot 300,
- un guéridon de plus grandes dimensions, le plateau en acajou et muni d'un plateau d'entrejambe en coupelle similaire au présent lot, vente Christie's New York, le 26 octobre 2001, lot 75.
LA VOGUE DES MEUBLES MONTES DE PORCELAINE
La mode des meubles montés de porcelaine débuta en France vers 1760 avec Simon-Philippe Poirier qui utilisa des porcelaines de Sèvres. Le marchand Granchez du Petit Dunkerque fut le premier à introduire des camées de Wedgwood et de Bentley mais Daguerre devint en 1787 le représentant exclusif de Wedgwood à Paris.
Wedgwood commença ses créations en 1775 avec des plaques dans le goût antique qui furent très vite utilisées en Angelterre pour décorer des cheminées et des meubles (voir Alison Kelly, Decorative Wedgwood in architecture and furniture, London, 1965). Il exporta aussi très vite en Hollande, en Allemagne et bien sûr en France. L'engouement français fut tel que la manufacture de Sèvres produisit des imitations dans les années 1770 (voir Aileen Dawson, French Biscuit Porcelain in the Style of Wedgwood's Jasperware, Apollo, August 1982, pp. 94-102). Un exemplaire de notre médaillon est enregistré dans une fournée de la manufacture de Sèvres entre mai et décembre 1793 (voir Registre de la Manufacture Vl' 4), mais les registres sont si peu précis que le modèle pourrait très bien être antérieur.
La nomination de Daguerre accéléra son implantation en France (voir Geoffrey de Bellaigue, The James A. de Rothschild collection at Waddesdon Manor, Furniture, Clocks and Gilt Bronze, Fribourg, 1974, p. 859; idem, Daguerre and England, Bernard Molitor 1755-1833, ébéniste parisien d'origine luxembourgeoise, Catalogue d'exposition, Luxembourg (Villa Vauban) 1995, p. 158).
LES MEUBLES MONTES DE WEDGWOOD POUR DAGUERRE
Daguerre demanda à Adam Weisweiler (1744-1820), avec qui il collabora très régulièrement, d'incorporer des plaques de Wedgwood dans toute une production de meubles. Vers 1788, Weisweiler combina une large plaque de Sèvres peinte de fleurs avec une série de médaillons en porcelaine de Wedgwood sur un secrétaire qui fut probablement la dernière livraison de Daguerre à Marie-Antoinette (voir Decorative art from the Samuel H. Kress collection at the Metropolitan Museum of Art, Aylesbury 1964, no. 28; Daniel Alcouffe, Christian Baulez a.o., Il mobile francese dal Medioevo al 1925, Milan 1981, pp. 105-107, fig. 42). Il créa aussi des bonheurs du jours, des consoles dessertes et d'autres modèles comme notre guéridon, probablement sous la commande de Daguerre (voir Patricia Lemonnier, Weisweiler, Paris 1983, pp. 28, 87, 90, 104, 105, 113 et 118). En 1787, Daguerre vint en Angleterre sous l'invitation du Prince de Galles pour collaborer à la décoration de Carlton House. Il y alla jusqu'à sa mort en 1795, lui permettant très certainement de sélectionner les plus belles pièces de Wedgwood.
Ce géridon, et plus particulièrement les montants simulant le bambou, est tout à fait représentatif du goût exotique mis à la mode sous Louis XVI par quelques arbitres des élégances tels que madame du Barry. Celle-ci offrit en effet au duc de Brissac un guéridon dont la description se rapproche beaucoup du présent lot et qui fut livré par les marchands-merciers Lignereux et Daguerre en 1791. Dans l'inventaire après décès de Daguerre, est mentionné: "Une petite table ronde forme de guéridon en racine de bois d'acajou poli sur trois pieds doubles en bronze doré façon de bambous avec entrejambe à tablettes et camé de porcelaine ornant la tablette supérieuré prisée trois cent francs, cy....300 (P. Lemonnier, Weisweiler, Paris, 1983, p. 162).
Un dessin préparatoire de ce modèle est conservé au musée des Art Décoratifs (illustré dans P. Lemonnier, Weisweiler, pp. 97, 90) et pourrait être de la main de Daguerre. D'autres exemples connus de ce modèle (une vingtaine à ce jour) étant estampillés par Weisweiler, on peut supposer que ce modèle a été exclusivement conçu par Weisweiler et vendu par Daguerre. Engagés dans une étroite collaboration, ce dernier fournit à Weisweiler nombre des plus importants clients de la noblesse française et étrangère, ainsi que les familles royales de France, de Russie et de Naples et le futur roi George IV. Weisweiler resta actif jusqu'en 1809 et ses liens avec Daguerre lui permirent de continuer à travailler et d'exporter sa production, lui évitant ainsi la faillite qui toucha beaucoup de ses confrères à la Révolution.
Les guéridons de ce modèle étaient le plus souvent décorés de plaques de porcelaine ou de biscuit sur le plateau. On peut cependant citer des exemples présentant des similitudes mis en vente ces dernières années:
- un guéridon en placage de loupe de thuya, le plateau orné de plaques de porcelaine représentant les signes du Zodiaque, Collection Roberto Polo, vente Sotheby's-Ader Paris, le 7 novembre 1991, lot 134, - un guéridon de dimensions semblables, le plateau en placage de loupe muni d'un médaillon en bronze doré, vente Christie's Monaco, le 15 juin 1997, lot 174,
- un guéridon en placage de thuya, le plateau orné d'un médaillon en porcelaine de Sèvres à l'imitation de Wedgwood, sans plateau d'entrejambe, vente Paris, hôtel Drouot, le 3 dècembre 2001, lot 300,
- un guéridon de plus grandes dimensions, le plateau en acajou et muni d'un plateau d'entrejambe en coupelle similaire au présent lot, vente Christie's New York, le 26 octobre 2001, lot 75.
LA VOGUE DES MEUBLES MONTES DE PORCELAINE
La mode des meubles montés de porcelaine débuta en France vers 1760 avec Simon-Philippe Poirier qui utilisa des porcelaines de Sèvres. Le marchand Granchez du Petit Dunkerque fut le premier à introduire des camées de Wedgwood et de Bentley mais Daguerre devint en 1787 le représentant exclusif de Wedgwood à Paris.
Wedgwood commença ses créations en 1775 avec des plaques dans le goût antique qui furent très vite utilisées en Angelterre pour décorer des cheminées et des meubles (voir Alison Kelly, Decorative Wedgwood in architecture and furniture, London, 1965). Il exporta aussi très vite en Hollande, en Allemagne et bien sûr en France. L'engouement français fut tel que la manufacture de Sèvres produisit des imitations dans les années 1770 (voir Aileen Dawson, French Biscuit Porcelain in the Style of Wedgwood's Jasperware, Apollo, August 1982, pp. 94-102). Un exemplaire de notre médaillon est enregistré dans une fournée de la manufacture de Sèvres entre mai et décembre 1793 (voir Registre de la Manufacture Vl' 4), mais les registres sont si peu précis que le modèle pourrait très bien être antérieur.
La nomination de Daguerre accéléra son implantation en France (voir Geoffrey de Bellaigue, The James A. de Rothschild collection at Waddesdon Manor, Furniture, Clocks and Gilt Bronze, Fribourg, 1974, p. 859; idem, Daguerre and England, Bernard Molitor 1755-1833, ébéniste parisien d'origine luxembourgeoise, Catalogue d'exposition, Luxembourg (Villa Vauban) 1995, p. 158).
LES MEUBLES MONTES DE WEDGWOOD POUR DAGUERRE
Daguerre demanda à Adam Weisweiler (1744-1820), avec qui il collabora très régulièrement, d'incorporer des plaques de Wedgwood dans toute une production de meubles. Vers 1788, Weisweiler combina une large plaque de Sèvres peinte de fleurs avec une série de médaillons en porcelaine de Wedgwood sur un secrétaire qui fut probablement la dernière livraison de Daguerre à Marie-Antoinette (voir Decorative art from the Samuel H. Kress collection at the Metropolitan Museum of Art, Aylesbury 1964, no. 28; Daniel Alcouffe, Christian Baulez a.o., Il mobile francese dal Medioevo al 1925, Milan 1981, pp. 105-107, fig. 42). Il créa aussi des bonheurs du jours, des consoles dessertes et d'autres modèles comme notre guéridon, probablement sous la commande de Daguerre (voir Patricia Lemonnier, Weisweiler, Paris 1983, pp. 28, 87, 90, 104, 105, 113 et 118). En 1787, Daguerre vint en Angleterre sous l'invitation du Prince de Galles pour collaborer à la décoration de Carlton House. Il y alla jusqu'à sa mort en 1795, lui permettant très certainement de sélectionner les plus belles pièces de Wedgwood.