拍品專文
Notre groupe sculpté a très certainement été commissionné par Jacqueline de Bavière et faisait partie d’un ensemble architectural plus important destiné à une chapelle privée.
Le personnage de Marie-Madeleine est une figure majeure de l’iconographie chrétienne dont la réalité historique fut diversement interprétée en fonction des époques et des historiens. Citée plus que la plupart des apôtres dans le Nouveau Testament elle reste une figure féminine exemplaire du message porté par le Christ au point d’avoir été parfois nommée, « l’Apôtre des apôtres ». Elle a été abondamment représentée au fil des siècles par différents artistes exploitant plusieurs traits remarquables qui caractérisent certaines versions de sa légende, pécheresse, pénitente, contemplative, ermite.
Notre groupe sculpté a très certainement été commissionné par Jacqueline de Bavière et faisait partie d’un ensemble architectural plus important destiné à une chapelle privée.
Le personnage de Marie-Madeleine est une figure majeure de l’iconographie chrétienne dont la réalité historique fut diversement interprétée en fonction des époques et des historiens. Citée plus que la plupart des apôtres dans le Nouveau Testament elle reste une figure féminine exemplaire du message porté par le Christ au point d’avoir été parfois nommée, « l’Apôtre des apôtres ». Elle a été abondamment représentée au fil des siècles par différents artistes exploitant plusieurs traits remarquables qui caractérisent certaines versions de sa légende, pécheresse, pénitente, contemplative, ermite.
Jeunesse loin des conflits
Jacqueline de Bavière naquit le 22 juin 1401 à Quesnoy, lieu de la résidence du comté de Hainaut. Elle fut l’unique fille légitime de Guillaume IV de Hainaut (1365-1417), (dit Guillaume II de Bavière-Straubing et Guillaume VI de Hollande), et Margueritte de Bourgogne (1374-1441). En 1406, ses parents choisirent de la marier à l’âge de cinq ans à Jean de Touraine (1398-1417), fils du roi de France Charles VI (1368-1422), lui-même âgé de huit ans (Bousmar, op. cit., p. 390.). Ce mariage visait à renforcer l’assise de la maison de Hainaut dans ses liens avec le royaume de France. Jacqueline et son mari furent élevés ensemble dans la culture française et reçurent une éducation bourgondo-bavaroise à la cour de Hainaut (loc. cit.). A la mort du frère ainé de Jean de Touraine (1397-1415) en 1415, le jeune époux de Jacqueline devint dauphin de France. Dans le climat de guerre ouverte par la folie du Roi Charles VI entre les bourguignons et les armagnacs, Guillaume IV et Margueritte de Bourgogne se hâtèrent d’officialiser l’union de leur fille avec le futur roi de France pour soutenir la politique de Jean sans Peur (1371-1419), l’oncle de Jacqueline.
En 1417, une double tragédie, la mort de son mari et de son père à un mois d’intervalle, bouleversa le destin de Jacqueline de Bavière ; son père ayant préalablement veillé à faire reconnaître officiellement la succession de sa fille par les Etats de Hainaut. La mort prématurée de Jean de Touraine l’empêcha définitivement d’accéder au trône de France, et la précipita dans le tourment politique de la succession de son père.
Luttes successorales
Le destin de Jacqueline de Bavière fut alors marqué, durant une quinzaine d’années, par une succession de tensions, de conflits et de guerres, attisés par la convoitise de son héritage, entre l’empereur Sigismond (1368-1437), son oncle Jean de Bavière (1373-1424), et son oncle Jean sans Peur, puis de son fils Philippe le Bon (1396-1467), duc de Bourgogne et cousin de Jacqueline.
A la mort de son père, l’empereur Sigismond nomma Jean sans Peur gouverneur de la Hollande et de la Zélande. Ce dernier incita sa nièce à épouser Jean de Brabant (1403-1427), un de ses cousins germains au faible caractère, pour mieux contrôler ses Etats.
Le lien familial unissant Jacqueline de Bavière et Jean de Brabant, les obligeait à obtenir une autorisation papale préalable pour rendre leur mariage officiel. L’oncle Jean de Bavière, à la vocation ecclésiastique, fit alors barrage. Soutenu par l’empereur Sigismond, il convainquit le Pape d’émettre une bulle d’interdiction, empêchant ainsi les jeunes fiancés d’officialiser leur union. A la suite d’une période de nombreux conflits, Philippe le Bon, obtint du Pape une rétractation de la bulle en 1418.
Les hostilités, loin de s’apaiser, reprirent alors de plus belle, virant en une forme de guerre civile entre les partisans de Jacqueline, héritière légitime et ceux de son oncle Jean de Bavière, soutenu par l’empereur.
Entre guerres et médiations
Pour apaiser les tensions, Philippe le Bon fut désigné comme médiateur de ce conflit. Le traité de Gorkum du 19 juillet 1419, entérinant sa défaite fut refusé par Jacqueline de Bavière qui repartit en guerre contre son oncle. En 1420, Jacqueline tenta de se délester de son faible mari, exigeant du Pape qu’il tranche en faveur de l’annulation de son mariage. Elle ne fut pas soutenue par son cousin Philippe le Bon.
Désormais isolée dans son contexte de famille, Jacqueline se tourna vers l’Angleterre pour trouver de nouveaux soutiens. C’est ainsi qu’elle rencontra Humphrey duc de Gloucester (1390-1447), qu’elle épousa, déclarant seule nul son mariage avec Jean de Brabant, arguant qu’elle ne l’avait pas épousé de son plein gré et que les lettres de dispenses avaient été révoquées par le Pape (loc. cit,. p. 404.).
La guerre des bulles reprit, Philippe le Bon et Jean de Brabant, mari officiel de Jacqueline, demandèrent instamment au Pape qu’il annule à son tour le mariage anglais de Jacqueline. La réponse du Pape se faisant attendre, la guerre fut à nouveau relancée. A la mort de Jean de Bavière en 1424, Jacqueline plaida une nouvelle fois l’invalidité de son mariage à Jean de Brabant, obtenant cette fois-ci que ses Etats l’acceptent. Philippe le Bon dressa alors une armée de 40.000 hommes qui infligea aux armées de Jacqueline une série de cuisantes défaites. Son impopularité croissante et ses défaites successives, lui valurent d’être abandonnée à son sort par son mari anglais, le duc de Gloucester qui repartit en Angleterre.
Jean de Brabant en sa qualité d’époux officiel, fut alors requis par Philippe le Bon pour la signature d’un traité qui l’instituait tuteur officiel des intérêts de Jacqueline et gérant de ses territoires. Devant l’impasse de son combat acharné, elle finit par se rendre à la « protection offerte » par son cousin Philippe le Bon qui l’emprisonna à Gand dans des conditions confortables.
Le statut d’une femme adultère
Néanmoins, Jacqueline n’abandonna pas pour autant sa lutte pour la reconnaissance de ses droits et réussi à s’échapper de sa prison en août 1425. La guerre reprit encore de plus belle, jusqu’au moment où Philippe le Bon obtint du pape Martin V (1368-1431) qu’il confirme la validation du mariage de Jacqueline à Jean de Brabant, et donc sa situation de femme adultère (loc. cit., p. 421.). Malgré un combat devenant de plus en plus désespéré, Jacqueline de Bavière ne renonça pas. La mort de Jean de Brabant en 1427, entraina les Etats de Hainaut à déclarer leur allégeance officielle à Philippe le Bon. Jacqueline, totalement isolée et privée de ses propres appuis, ne put finalement que capituler face au duc de Bourgogne. Le traité de Delft, signé en 1428, conféra à son cousin le pouvoir d’exercer une tutelle absolue sur l’administration de ses terres et sur la possibilité d’un remariage soumis à un consentement préalable de ce dernier.
La capitulation
Jacqueline s’installa alors dans les Iles Zélandaises où elle rencontra Frank van Borselen (1396-1470). Il semble qu’elle ait authentiquement aimé cet homme issu de la haute noblesse, jusqu’à prendre le risque de l’épouser en secret en 1432. Mais ce mariage, qui ne resta pas secret très longtemps, déclencha à nouveau l’ire de Philippe le bon, furieux de la transgression de sa cousine. Jacqueline, par amour, décida alors d’abandonner définitivement sa couronne comtale. Le 12 avril 1433, un nouveau traité de la Haye fut signé, qui reconnaissait officiellement Philippe le Bon comme Comte de Hainaut, Hollande, Zélande et seigneur de Frise (loc. cit., p. 431.). Jacqueline pût enfin se marier publiquement avec son dernier mari. En 1436, après avoir vécu ses dernières années paisiblement, alors que les luttes de pouvoir faisaient toujours rage entre l’empereur Sigismond, Philippe le Bon, Humphrey de Gloucester et Henri IV (1367-1413), Jacqueline fut emportée par la tuberculose et mourut à l’âge de trente-cinq ans sans laisser d’enfants.
Le culte magdalénien
Dès le XIIe siècle, l’image d’une Marie-Madeleine autonome fut largement exploitée par les artistes en Bourgogne. Mais c’est à partir du XVe siècle, que des sculptures de la Sainte représentée debout, tenant un vase d’onguent à la main, commencèrent à peupler les églises bourguignonnes (Taccone, op. cit., p. 307.). Les ducs de Bourgogne s’emparèrent progressivement de la figure de Marie-Madeleine pour finalement lui vouer un véritable culte. C’est sous l’influence de Philippe le Bon que ce culte magdalénien se pérennisa, inscrivant durablement l’image de la Sainte dans le paysage de la dynastie bourguignonne, qui s’en servit également comme arme politique de propagande (loc. cit., p. 374.).
Sa fille, nommée Madeleine de Bourgogne, se fit représenter dans une peinture datant de 1490-95 qu’on attribue à Jean Hey, dans une attitude de prière au côté de Marie-Madeleine. Elle montre l’attachement continu des bourguignons pour le culte magdalénien (loc. cit., pp. 378-379.).
Jacqueline de Bavière, une figure controversée
Jacqueline de Bavière occupa une place importante dans l’historiographie, la mémoire, les arts et la littérature néerlandaise (Bousmar, op. cit., p. 386.). Elle fut l’une des rares femmes médiévales à s’être véritablement ancrée dans l’histoire néerlandaise.
Nous connaissons plusieurs portraits de Jacqueline de Bavière, commandés de son vivant. Le premier, réalisé par Lambert van Eyck en 1432, est aujourd’hui perdu. Plusieurs répliques et copies existent qui nous renseignent sur la nature du tableau : un dessin à la plume d’argent conservé au Städel Museum de Francfort, un panneau peint sur chêne conservé au Kunsthitorishes de Vienne (inv. 4444), et un dessin au crayon de Jacques Le Boucq dans son recueil d’Arras (Arras, Bibliothèque municipale, ms. 266).
Un second portrait perdu également, représente Jacqueline portant le collier de Saint-Antoine. Ce tableau aurait été réalisé comme pendant de celui de son mari Frank van Borselen à l’occasion de leur noce. Une version datant du début du XVIe siècle est conservée au Rijksmuseum d’Amsterdam. Une de ses copies, réalisée au XVIe siècle et attribuée à Jan Mostaert, est aujourd’hui conservée au Statens Museum for Kunst à Copenhague (loc. cit., p. 430.). Dans cette copie, Jacqueline de Bavière tient un œillet, sa coiffe et sa cotte reproduisant les éléments de ses armoiries.
Marie Madeleine une arme politique ?
La réalisation de l’œuvre en pierre qui associe les figures de Jacqueline de Bavière et de Marie-Madeleine, eut très certainement, une portée politique. Elle s’adressait directement au culte que son cousin vouait à Marie-Madeleine. L’idée de se faire représenter avec l’un des symboles sacrés de la maison Bourguignonne visait indéniablement à apaiser les tensions qui subsistaient entre elle et Philippe le Bon à la fin de sa vie ; tensions ravivées notamment en raison du mariage secret que Jacqueline contracta, bravant l’interdit qui lui imposait de ne se marier qu’avec l’accord de son cousin.
Jacqueline fut également très soucieuse de renforcer son statut de preude femme (loc. cit., p. 446.), pour se réhabiliter des scandales d’adultères qu’elle ne manquât pas de provoquer en guise de révolte ou de déception à l’égard des différents mariages contractés sous la tutelle ou le contrôle de la pression politique.
La réalisation de cette œuvre sculpturale, la représentant en pénitente, prend alors le sens d’une ultime reddition à ses vainqueurs, destinée à obtenir l’effacement de l’humiliation de l’honneur perdu.
Mais plus intimement ce groupe ne représente-t-il pas aussi le symbole d’une femme ayant déposé les armes de trop de combats perdus, se retirant du tumulte du monde, et aspirant à trouver une sérénité inédite dans le silence sacré de la prière ?
Le personnage de Marie-Madeleine est une figure majeure de l’iconographie chrétienne dont la réalité historique fut diversement interprétée en fonction des époques et des historiens. Citée plus que la plupart des apôtres dans le Nouveau Testament elle reste une figure féminine exemplaire du message porté par le Christ au point d’avoir été parfois nommée, « l’Apôtre des apôtres ». Elle a été abondamment représentée au fil des siècles par différents artistes exploitant plusieurs traits remarquables qui caractérisent certaines versions de sa légende, pécheresse, pénitente, contemplative, ermite.
Notre groupe sculpté a très certainement été commissionné par Jacqueline de Bavière et faisait partie d’un ensemble architectural plus important destiné à une chapelle privée.
Le personnage de Marie-Madeleine est une figure majeure de l’iconographie chrétienne dont la réalité historique fut diversement interprétée en fonction des époques et des historiens. Citée plus que la plupart des apôtres dans le Nouveau Testament elle reste une figure féminine exemplaire du message porté par le Christ au point d’avoir été parfois nommée, « l’Apôtre des apôtres ». Elle a été abondamment représentée au fil des siècles par différents artistes exploitant plusieurs traits remarquables qui caractérisent certaines versions de sa légende, pécheresse, pénitente, contemplative, ermite.
Jeunesse loin des conflits
Jacqueline de Bavière naquit le 22 juin 1401 à Quesnoy, lieu de la résidence du comté de Hainaut. Elle fut l’unique fille légitime de Guillaume IV de Hainaut (1365-1417), (dit Guillaume II de Bavière-Straubing et Guillaume VI de Hollande), et Margueritte de Bourgogne (1374-1441). En 1406, ses parents choisirent de la marier à l’âge de cinq ans à Jean de Touraine (1398-1417), fils du roi de France Charles VI (1368-1422), lui-même âgé de huit ans (Bousmar, op. cit., p. 390.). Ce mariage visait à renforcer l’assise de la maison de Hainaut dans ses liens avec le royaume de France. Jacqueline et son mari furent élevés ensemble dans la culture française et reçurent une éducation bourgondo-bavaroise à la cour de Hainaut (loc. cit.). A la mort du frère ainé de Jean de Touraine (1397-1415) en 1415, le jeune époux de Jacqueline devint dauphin de France. Dans le climat de guerre ouverte par la folie du Roi Charles VI entre les bourguignons et les armagnacs, Guillaume IV et Margueritte de Bourgogne se hâtèrent d’officialiser l’union de leur fille avec le futur roi de France pour soutenir la politique de Jean sans Peur (1371-1419), l’oncle de Jacqueline.
En 1417, une double tragédie, la mort de son mari et de son père à un mois d’intervalle, bouleversa le destin de Jacqueline de Bavière ; son père ayant préalablement veillé à faire reconnaître officiellement la succession de sa fille par les Etats de Hainaut. La mort prématurée de Jean de Touraine l’empêcha définitivement d’accéder au trône de France, et la précipita dans le tourment politique de la succession de son père.
Luttes successorales
Le destin de Jacqueline de Bavière fut alors marqué, durant une quinzaine d’années, par une succession de tensions, de conflits et de guerres, attisés par la convoitise de son héritage, entre l’empereur Sigismond (1368-1437), son oncle Jean de Bavière (1373-1424), et son oncle Jean sans Peur, puis de son fils Philippe le Bon (1396-1467), duc de Bourgogne et cousin de Jacqueline.
A la mort de son père, l’empereur Sigismond nomma Jean sans Peur gouverneur de la Hollande et de la Zélande. Ce dernier incita sa nièce à épouser Jean de Brabant (1403-1427), un de ses cousins germains au faible caractère, pour mieux contrôler ses Etats.
Le lien familial unissant Jacqueline de Bavière et Jean de Brabant, les obligeait à obtenir une autorisation papale préalable pour rendre leur mariage officiel. L’oncle Jean de Bavière, à la vocation ecclésiastique, fit alors barrage. Soutenu par l’empereur Sigismond, il convainquit le Pape d’émettre une bulle d’interdiction, empêchant ainsi les jeunes fiancés d’officialiser leur union. A la suite d’une période de nombreux conflits, Philippe le Bon, obtint du Pape une rétractation de la bulle en 1418.
Les hostilités, loin de s’apaiser, reprirent alors de plus belle, virant en une forme de guerre civile entre les partisans de Jacqueline, héritière légitime et ceux de son oncle Jean de Bavière, soutenu par l’empereur.
Entre guerres et médiations
Pour apaiser les tensions, Philippe le Bon fut désigné comme médiateur de ce conflit. Le traité de Gorkum du 19 juillet 1419, entérinant sa défaite fut refusé par Jacqueline de Bavière qui repartit en guerre contre son oncle. En 1420, Jacqueline tenta de se délester de son faible mari, exigeant du Pape qu’il tranche en faveur de l’annulation de son mariage. Elle ne fut pas soutenue par son cousin Philippe le Bon.
Désormais isolée dans son contexte de famille, Jacqueline se tourna vers l’Angleterre pour trouver de nouveaux soutiens. C’est ainsi qu’elle rencontra Humphrey duc de Gloucester (1390-1447), qu’elle épousa, déclarant seule nul son mariage avec Jean de Brabant, arguant qu’elle ne l’avait pas épousé de son plein gré et que les lettres de dispenses avaient été révoquées par le Pape (loc. cit,. p. 404.).
La guerre des bulles reprit, Philippe le Bon et Jean de Brabant, mari officiel de Jacqueline, demandèrent instamment au Pape qu’il annule à son tour le mariage anglais de Jacqueline. La réponse du Pape se faisant attendre, la guerre fut à nouveau relancée. A la mort de Jean de Bavière en 1424, Jacqueline plaida une nouvelle fois l’invalidité de son mariage à Jean de Brabant, obtenant cette fois-ci que ses Etats l’acceptent. Philippe le Bon dressa alors une armée de 40.000 hommes qui infligea aux armées de Jacqueline une série de cuisantes défaites. Son impopularité croissante et ses défaites successives, lui valurent d’être abandonnée à son sort par son mari anglais, le duc de Gloucester qui repartit en Angleterre.
Jean de Brabant en sa qualité d’époux officiel, fut alors requis par Philippe le Bon pour la signature d’un traité qui l’instituait tuteur officiel des intérêts de Jacqueline et gérant de ses territoires. Devant l’impasse de son combat acharné, elle finit par se rendre à la « protection offerte » par son cousin Philippe le Bon qui l’emprisonna à Gand dans des conditions confortables.
Le statut d’une femme adultère
Néanmoins, Jacqueline n’abandonna pas pour autant sa lutte pour la reconnaissance de ses droits et réussi à s’échapper de sa prison en août 1425. La guerre reprit encore de plus belle, jusqu’au moment où Philippe le Bon obtint du pape Martin V (1368-1431) qu’il confirme la validation du mariage de Jacqueline à Jean de Brabant, et donc sa situation de femme adultère (loc. cit., p. 421.). Malgré un combat devenant de plus en plus désespéré, Jacqueline de Bavière ne renonça pas. La mort de Jean de Brabant en 1427, entraina les Etats de Hainaut à déclarer leur allégeance officielle à Philippe le Bon. Jacqueline, totalement isolée et privée de ses propres appuis, ne put finalement que capituler face au duc de Bourgogne. Le traité de Delft, signé en 1428, conféra à son cousin le pouvoir d’exercer une tutelle absolue sur l’administration de ses terres et sur la possibilité d’un remariage soumis à un consentement préalable de ce dernier.
La capitulation
Jacqueline s’installa alors dans les Iles Zélandaises où elle rencontra Frank van Borselen (1396-1470). Il semble qu’elle ait authentiquement aimé cet homme issu de la haute noblesse, jusqu’à prendre le risque de l’épouser en secret en 1432. Mais ce mariage, qui ne resta pas secret très longtemps, déclencha à nouveau l’ire de Philippe le bon, furieux de la transgression de sa cousine. Jacqueline, par amour, décida alors d’abandonner définitivement sa couronne comtale. Le 12 avril 1433, un nouveau traité de la Haye fut signé, qui reconnaissait officiellement Philippe le Bon comme Comte de Hainaut, Hollande, Zélande et seigneur de Frise (loc. cit., p. 431.). Jacqueline pût enfin se marier publiquement avec son dernier mari. En 1436, après avoir vécu ses dernières années paisiblement, alors que les luttes de pouvoir faisaient toujours rage entre l’empereur Sigismond, Philippe le Bon, Humphrey de Gloucester et Henri IV (1367-1413), Jacqueline fut emportée par la tuberculose et mourut à l’âge de trente-cinq ans sans laisser d’enfants.
Le culte magdalénien
Dès le XIIe siècle, l’image d’une Marie-Madeleine autonome fut largement exploitée par les artistes en Bourgogne. Mais c’est à partir du XVe siècle, que des sculptures de la Sainte représentée debout, tenant un vase d’onguent à la main, commencèrent à peupler les églises bourguignonnes (Taccone, op. cit., p. 307.). Les ducs de Bourgogne s’emparèrent progressivement de la figure de Marie-Madeleine pour finalement lui vouer un véritable culte. C’est sous l’influence de Philippe le Bon que ce culte magdalénien se pérennisa, inscrivant durablement l’image de la Sainte dans le paysage de la dynastie bourguignonne, qui s’en servit également comme arme politique de propagande (loc. cit., p. 374.).
Sa fille, nommée Madeleine de Bourgogne, se fit représenter dans une peinture datant de 1490-95 qu’on attribue à Jean Hey, dans une attitude de prière au côté de Marie-Madeleine. Elle montre l’attachement continu des bourguignons pour le culte magdalénien (loc. cit., pp. 378-379.).
Jacqueline de Bavière, une figure controversée
Jacqueline de Bavière occupa une place importante dans l’historiographie, la mémoire, les arts et la littérature néerlandaise (Bousmar, op. cit., p. 386.). Elle fut l’une des rares femmes médiévales à s’être véritablement ancrée dans l’histoire néerlandaise.
Nous connaissons plusieurs portraits de Jacqueline de Bavière, commandés de son vivant. Le premier, réalisé par Lambert van Eyck en 1432, est aujourd’hui perdu. Plusieurs répliques et copies existent qui nous renseignent sur la nature du tableau : un dessin à la plume d’argent conservé au Städel Museum de Francfort, un panneau peint sur chêne conservé au Kunsthitorishes de Vienne (inv. 4444), et un dessin au crayon de Jacques Le Boucq dans son recueil d’Arras (Arras, Bibliothèque municipale, ms. 266).
Un second portrait perdu également, représente Jacqueline portant le collier de Saint-Antoine. Ce tableau aurait été réalisé comme pendant de celui de son mari Frank van Borselen à l’occasion de leur noce. Une version datant du début du XVIe siècle est conservée au Rijksmuseum d’Amsterdam. Une de ses copies, réalisée au XVIe siècle et attribuée à Jan Mostaert, est aujourd’hui conservée au Statens Museum for Kunst à Copenhague (loc. cit., p. 430.). Dans cette copie, Jacqueline de Bavière tient un œillet, sa coiffe et sa cotte reproduisant les éléments de ses armoiries.
Marie Madeleine une arme politique ?
La réalisation de l’œuvre en pierre qui associe les figures de Jacqueline de Bavière et de Marie-Madeleine, eut très certainement, une portée politique. Elle s’adressait directement au culte que son cousin vouait à Marie-Madeleine. L’idée de se faire représenter avec l’un des symboles sacrés de la maison Bourguignonne visait indéniablement à apaiser les tensions qui subsistaient entre elle et Philippe le Bon à la fin de sa vie ; tensions ravivées notamment en raison du mariage secret que Jacqueline contracta, bravant l’interdit qui lui imposait de ne se marier qu’avec l’accord de son cousin.
Jacqueline fut également très soucieuse de renforcer son statut de preude femme (loc. cit., p. 446.), pour se réhabiliter des scandales d’adultères qu’elle ne manquât pas de provoquer en guise de révolte ou de déception à l’égard des différents mariages contractés sous la tutelle ou le contrôle de la pression politique.
La réalisation de cette œuvre sculpturale, la représentant en pénitente, prend alors le sens d’une ultime reddition à ses vainqueurs, destinée à obtenir l’effacement de l’humiliation de l’honneur perdu.
Mais plus intimement ce groupe ne représente-t-il pas aussi le symbole d’une femme ayant déposé les armes de trop de combats perdus, se retirant du tumulte du monde, et aspirant à trouver une sérénité inédite dans le silence sacré de la prière ?