Lot Essay
Courbes et contre-courbes équilibrées, finesse et précision de la sculpture généreuse mais néanmoins élégante caractérisent cette console à l’image de son commanditaire, l’un des plus importants sous le règne de Louis XV : Madame de Pompadour. Bertrand Rondot résume ainsi le style Pompadour : “C’est à un rocaille assagi qu’elle va s’abandonner, préférant l’élégance à l’effet, la fluidité à la rupture, l’équilibre au contraste”.
L’absence normale d’estampille ou de marque d’inventaire est largement palliée ici par la présence de la tour mise en avant en ceinture puisqu’il s’agit du meuble des armes de la marquise. On ne peut indiquer plus clairement la provenance. A l’origine, cette console était présentée en pendant avec une autre console identique - à la différence de la composition du trophée musical sur l’entretoise, très probablement dans le cabinet de Musique du château de Bellevue. Cette seconde console, autrefois dans la collection Penard y Fernandez (vente Paris, Me Ader, palais Galliera, 7 décembre 1960, lot 91) est aujourd’hui conservée au musée national des Châteaux de Versailles et de Trianon (inv. V3715).
Maîtresse en titre du roi de 1745 à 1751, Jeanne-Antoinette Poisson, marquise de Pompadour (1721-1764) reste l’un des personnages incontournables du règne de Louis XV quant à l’évolution de l’Art français. Grande mécène, curieuse, son influence est en effet étendue puisqu’elle soutient aussi bien Diderot et d’Alembert dans leur publication des deux premiers tomes de l’Encyclopédie, que l’aménagement de la place Louis XV (aujourd’hui place de la Concorde), elle favorise en 1751 la nomination de son frère le marquis de Marigny au poste prestigieux de directeur des Bâtiments du roi, ou encore joue un rôle particulièrement actif dans la création de la manufacture de Sèvres. Conseillère du roi jouissant d’une influence remarquable, allant au-delà de leur relation intime, la marquise possède jusqu’à sa mort plusieurs résidences où les aménagements et décors seront parmi les plus prestigieux de son temps, comme : le château de Crécy (offert par le roi en mai 1746), le château de la Celle (1748), le château de Bellevue (1748), le palais d’Evreux (1753), le château de Saint-Ouen (par usufruit dès 1759), le château de Ménars (1760), tandis qu’elle loue le château de Champs-sur-Marne (1757-1759) et loge à Versailles dès 1749 dans l’appartement du duc et de la duchesse de Penthièvre.
Madame de Pompadour aurait obtenu le terrain en mars 1748 après avoir cédé au roi six maisons lui appartenant à Compiègne. Huit cents ouvriers, sous la prestigieuse surveillance personnelle de Louis XV, réalisent l’exploit de faire émerger de terre en seulement deux ans cette résidence de plaisance jouissant d’un superbe panorama depuis le plateau de Meudon composé du corps principal, deux ailes, de communs (comprenant le théâtre), le Petit-Bellevue et le réaménagement du pavillon de Brimborion situé plus bas.
Participent à ce projet : Normant de Tournehem, directeur des bâtiments du roi et oncle de la marquise, Ange-Jacques Gabriel, premier architecte du roi, puis Lassurance.
Petit bijou de l’architecture du XVIIIe siècle que certains qualifient de folie financière (2,5 millions de livres), Bellevue est loin des obligations de l’étiquette tout en offrant la pratique de la chasse non loin de Versailles. Lieu d’ermitage destiné à recevoir le roi, la marquise y donne par ailleurs des opéras et des pièces de théâtre, où elle s'emploie à monter en personne sur scène comme lors de la représentation de Zélisca le 6 mai 1751.
A ce jour, il n’existe aucun inventaire de l’ameublement du château du temps où la marquise en était propriétaire. La marquise meuble le château dès l’achèvement des travaux à l’automne 1750 jusqu’en 1752. Elle s’adresse principalement à Lazare Duvaux pour les ébénisteries, les luminaires (chenets, lustres, appliques et leurs accessoires) et les objets montés. En effet, parmi les cinq cents achats, on compte plus d’une soixantaine d’entrées dans le Livre Journal du marchand-mercier à propos de livraisons, transports, réparations, entretiens en tous genres en rapport avec Bellevue. On y note toutefois une certaine confusion car s’il est facile de repérer ceux (souvent des objets) pour lesquels Duvaux facture le “port à Bellevue”, cela est plus difficile pour ceux qui ne sont pas livrés par le marchand (faisant partie de plus larges transports de meubles ordonnés par la marquise) ou ceux pour lesquels des frais de port sont mentionnés, sans que la destination en soit indiquée. Néanmoins, il est clair que les achats groupés et répétitifs de quantité de meubles à la fois concernent l’ameublement d’un château et de ce fait ne peuvent se rapporter à cette époque qu’à Bellevue.
Dans le cas présent, que la console et celle en pendant proviennent plus du château de Bellevue que de l’hôtel d’Evreux ou du château de Saint-Ouen s’argumente par la quasi-omniprésence de la tour sur le plateau de Meudon : les grilles, les garde-corps des balcons, les teintures murales, les deux paires de consoles et les tables de la salle à manger présentent ces armes.
Enfin, le thème de la musique clairement indiqué par les deux trophées, laisse penser en toute logique que ces meubles étaient destinés au cabinet de Musique situé à l’angle sud-est du château. On sait par ailleurs, que le cabinet de Musique disposait d’une cheminée ornée de chenets "à deux figures chinoises, l’une tenant un livre de Musique et l’autre un tambourin assis sur un cartel de rocailles.”
Finalement, Madame de Pompadour revend la résidence avec une grande partie de son contenu au roi en juin 1757 pour 325.000 livres. certainement pour financer l'École Militaire de Paris (qu’elle paie avec ses propres fonds). L’inventaire de ce mobilier est seulement dressé en avril 1763, lorsqu’il est enregistré sur le journal du Garde-Meuble royal en même temps que les meubles reçoivent la marque à l’encre BV couronné accompagnant le numéro d’inventaire. Le roi entreprend alors quelques remaniements, hésite plus tard à l’offrir à Madame du Barry ; le château est finalement attribué après la mort de Louis XV à ses filles, Mesdames de France : Adélaïde, Sophie et Victoire. Elles y restent jusqu’en février 1791 et émigre clandestinement en Italie. S’enclenche alors un rapide déclin pour la propriété jusqu’à se voir progressivement dépecer et détruire aux XIXe et XXe siècles.
L’absence normale d’estampille ou de marque d’inventaire est largement palliée ici par la présence de la tour mise en avant en ceinture puisqu’il s’agit du meuble des armes de la marquise. On ne peut indiquer plus clairement la provenance. A l’origine, cette console était présentée en pendant avec une autre console identique - à la différence de la composition du trophée musical sur l’entretoise, très probablement dans le cabinet de Musique du château de Bellevue. Cette seconde console, autrefois dans la collection Penard y Fernandez (vente Paris, Me Ader, palais Galliera, 7 décembre 1960, lot 91) est aujourd’hui conservée au musée national des Châteaux de Versailles et de Trianon (inv. V3715).
Maîtresse en titre du roi de 1745 à 1751, Jeanne-Antoinette Poisson, marquise de Pompadour (1721-1764) reste l’un des personnages incontournables du règne de Louis XV quant à l’évolution de l’Art français. Grande mécène, curieuse, son influence est en effet étendue puisqu’elle soutient aussi bien Diderot et d’Alembert dans leur publication des deux premiers tomes de l’Encyclopédie, que l’aménagement de la place Louis XV (aujourd’hui place de la Concorde), elle favorise en 1751 la nomination de son frère le marquis de Marigny au poste prestigieux de directeur des Bâtiments du roi, ou encore joue un rôle particulièrement actif dans la création de la manufacture de Sèvres. Conseillère du roi jouissant d’une influence remarquable, allant au-delà de leur relation intime, la marquise possède jusqu’à sa mort plusieurs résidences où les aménagements et décors seront parmi les plus prestigieux de son temps, comme : le château de Crécy (offert par le roi en mai 1746), le château de la Celle (1748), le château de Bellevue (1748), le palais d’Evreux (1753), le château de Saint-Ouen (par usufruit dès 1759), le château de Ménars (1760), tandis qu’elle loue le château de Champs-sur-Marne (1757-1759) et loge à Versailles dès 1749 dans l’appartement du duc et de la duchesse de Penthièvre.
Madame de Pompadour aurait obtenu le terrain en mars 1748 après avoir cédé au roi six maisons lui appartenant à Compiègne. Huit cents ouvriers, sous la prestigieuse surveillance personnelle de Louis XV, réalisent l’exploit de faire émerger de terre en seulement deux ans cette résidence de plaisance jouissant d’un superbe panorama depuis le plateau de Meudon composé du corps principal, deux ailes, de communs (comprenant le théâtre), le Petit-Bellevue et le réaménagement du pavillon de Brimborion situé plus bas.
Participent à ce projet : Normant de Tournehem, directeur des bâtiments du roi et oncle de la marquise, Ange-Jacques Gabriel, premier architecte du roi, puis Lassurance.
Petit bijou de l’architecture du XVIIIe siècle que certains qualifient de folie financière (2,5 millions de livres), Bellevue est loin des obligations de l’étiquette tout en offrant la pratique de la chasse non loin de Versailles. Lieu d’ermitage destiné à recevoir le roi, la marquise y donne par ailleurs des opéras et des pièces de théâtre, où elle s'emploie à monter en personne sur scène comme lors de la représentation de Zélisca le 6 mai 1751.
A ce jour, il n’existe aucun inventaire de l’ameublement du château du temps où la marquise en était propriétaire. La marquise meuble le château dès l’achèvement des travaux à l’automne 1750 jusqu’en 1752. Elle s’adresse principalement à Lazare Duvaux pour les ébénisteries, les luminaires (chenets, lustres, appliques et leurs accessoires) et les objets montés. En effet, parmi les cinq cents achats, on compte plus d’une soixantaine d’entrées dans le Livre Journal du marchand-mercier à propos de livraisons, transports, réparations, entretiens en tous genres en rapport avec Bellevue. On y note toutefois une certaine confusion car s’il est facile de repérer ceux (souvent des objets) pour lesquels Duvaux facture le “port à Bellevue”, cela est plus difficile pour ceux qui ne sont pas livrés par le marchand (faisant partie de plus larges transports de meubles ordonnés par la marquise) ou ceux pour lesquels des frais de port sont mentionnés, sans que la destination en soit indiquée. Néanmoins, il est clair que les achats groupés et répétitifs de quantité de meubles à la fois concernent l’ameublement d’un château et de ce fait ne peuvent se rapporter à cette époque qu’à Bellevue.
Dans le cas présent, que la console et celle en pendant proviennent plus du château de Bellevue que de l’hôtel d’Evreux ou du château de Saint-Ouen s’argumente par la quasi-omniprésence de la tour sur le plateau de Meudon : les grilles, les garde-corps des balcons, les teintures murales, les deux paires de consoles et les tables de la salle à manger présentent ces armes.
Enfin, le thème de la musique clairement indiqué par les deux trophées, laisse penser en toute logique que ces meubles étaient destinés au cabinet de Musique situé à l’angle sud-est du château. On sait par ailleurs, que le cabinet de Musique disposait d’une cheminée ornée de chenets "à deux figures chinoises, l’une tenant un livre de Musique et l’autre un tambourin assis sur un cartel de rocailles.”
Finalement, Madame de Pompadour revend la résidence avec une grande partie de son contenu au roi en juin 1757 pour 325.000 livres. certainement pour financer l'École Militaire de Paris (qu’elle paie avec ses propres fonds). L’inventaire de ce mobilier est seulement dressé en avril 1763, lorsqu’il est enregistré sur le journal du Garde-Meuble royal en même temps que les meubles reçoivent la marque à l’encre BV couronné accompagnant le numéro d’inventaire. Le roi entreprend alors quelques remaniements, hésite plus tard à l’offrir à Madame du Barry ; le château est finalement attribué après la mort de Louis XV à ses filles, Mesdames de France : Adélaïde, Sophie et Victoire. Elles y restent jusqu’en février 1791 et émigre clandestinement en Italie. S’enclenche alors un rapide déclin pour la propriété jusqu’à se voir progressivement dépecer et détruire aux XIXe et XXe siècles.