拍品专文
Ce précieux bureau, au dessin rare, appartient à un corpus réduit, livré par David Roentgen. Perfection de la ligne, des matériaux mais encore dans sa réalisation, ce bureau répond, comme toujours, au standard élevé de la production de l’ébéniste allemand. Chacun des meubles réalisé par David Roentgen nous fait comprendre pourquoi il a su conquérir les cours européennes, à commencer par la France, pour, par la suite fournir abondamment la cour impériale russe.
David Roentgen (1743-1807)
Fils d'Abraham Roentgen (1711-1793), David reprit l'atelier paternel en 1772 pour devenir l'un des plus grands ébénistes de son temps. Son sens inné des affaires, son goût pour la nouveauté et la recherche lui permettent au fil des ans de développer un réseau commercial de grande ampleur.
Après son premier voyage à Paris où il s'inspire et se familiarise avec le tout nouveau goût néoclassique de la capitale, il renouvelle entièrement sa gamme de meubles et devient le représentant le plus audacieux et le plus novateur de ce style en ébénisterie. A Paris, il fait également une rencontre décisive : celle de Charles de Lorraine, oncle de Marie-Antoinette mais aussi gouverneur des Pays-Bas. Il deviendra son plus grand mécène et lui permet d'accéder en 1785 au prestigieux titre d'Ebéniste mécanicien du Roi et de la Reine de France.
Tel un sésame, ce titre lui ouvre les portes de toutes les cours européennes tout comme les châteaux des électeurs de Hesse, de Saxe, des ducs de Wurtemberg et des marquis de Baden.
Fort de sa réputation Roentgen investit à Paris la rue de Grenelle dès 1781. Jusqu'ici son commerce était entre les mains du marchand miroitier Brébant. Grâce aux bons conseils prodigués en 1774 par son compatriote et graveur Jean-Georges Wille (1715-1808) installé à Paris depuis 1736, il tisse un solide réseau.
A partir de 1781, la boutique et notamment la vente et la promotion de ses meubles seront confiées à Johann Gottlieb Frost (1746-1814). Également d'origine allemande, il aurait été l'élève de Roentgen et se prétendait même être son successeur comme en témoigne une de ses publications du Journal Général de France du 25 décembre 1785 où il est écrit « Le sieur Frost, successeur du sieur David Roentgen, ébéniste-mécanicien du Roi et de la Reine, tient à présent rue Croix des-Petits-Champs, le grand magasin d'ébénisterie que ce dernier avait ci-devant rue de Grenelle Saint-Honoré, et continue de vendre des meubles très recherchés par leur forme et leur poli » (Journal Général de France, 25 décembre 1785, p. 3453).
L’impératrice Catherine II (1729-1796)
Paris sera le point de départ de la reconnaissance internationale de Roentgen dont l'atelier, perdu au cœur de l'Allemagne, fournira bientôt les plus grandes cours européennes. Son principal client sera Catherine la Grande, tsar de toutes les Russies.
David Roentgen livra des centaines de meubles destinés au Palais d'Hiver ou à ses autres palais. Aujourd'hui, seulement 22 lots de ces livraisons figurent encore à l'inventaire des palais de l'Ermitage à Saint-Pétersbourg, la majorité ayant été vendue dans les années trente par les soviétiques. Le correspondant parisien de Catherine II, le baron Melchior Grimm, qui tenait l'impératrice au courant des événements politiques et culturels de la capitale française, l'informait régulièrement des progrès réalisés sur les pièces insolites de l'atelier de Roentgen à Neuwied sur le Rhin, suscitant ainsi l'envie de Catherine II de l'ajouter à sa collection.
En 1784, David Roentgen apporta lui-même le Bureau d'Appolon encore aujourd'hui à Saint- Pétersbourg où il devint un ornement principal du Grand Ermitage, le bâtiment qui venait d'être construit pour abriter les collections d'art de l'Impératrice. Ce fut la première œuvre de Roentgen à présenter les formes architecturales que l'on retrouve sur le présent cabinet.
La conception a probablement été choisie avec un œil sensible aux goûts de l'acheteur ciblé : Catherine II. Grimm connaissait l'ampleur des travaux de construction à Saint-Pétersbourg et l'obsession de Catherine pour les meubler avec le dernier goût néoclassique et de la façon la plus somptueuse possible.
Les bureaux en acajou avec décor en bronze ciselé et doré équipés de dispositifs mécaniques complexes ou d'un mécanisme musical ravirent l'impératrice russe. Les mécanismes que Roentgen a produits en collaboration avec le mécanicien Peter Kinzing ont fortement contribué à sa renommée et son succès. Ses meubles entièrement démontables, faciles à transporter à travers l'Europe marquaient les esprits et subjuguaient par la qualité de leur réalisation. Enfin pour que la séduction soit complète, et fort bien au fait des gouts russes, Roentgen s'associa aux meilleurs pour la réalisation des bronzes d'ornements. François Rémond exécutait généralement les modèles du sculpteur Louis- Simon Boizot ; Roentgen en avait toutefois l'exclusivité. Les pièces acquises par Catherine auprès de Roentgen faisaient l'objet de démonstration devant ses invités éblouis, et furent pour certaines pièces confiées dès 1790 à l'Académie des sciences pour être montrées au public et étudiées.
L’Ermitage
Le présent bureau est très certainement le pendant d’un autre secrétaire, identique, aujourd’hui conservé au palais de Pavlosk et visible dans le Third Interconnecting Study.
Il a été livré par Roentgen en mars 1786 à l’Ermitage comme l’indique la facture n. 40 « un secrétaire sur huit colonnes d’ordre dorique garni en or mat. » pour la somme de 1500 roubles auxquels s’ajoute 540 roubles pour le transport entre l’atelier de Roentgen à Neuwied et Saint-Petersbourg.
Ce bureau était encore visible à l’Ermitage avant la Révolution en 1917, car vu et décrit par Denis Roche dans son ouvrage (op. cit.) : « Un bureau en acajou décoré de bronzes dorés sur huit colonnes également en acajou, chapiteaux, bases et frises de bronze ; rabattant sur charnières et à serrure. A l’extérieur, un médaillon de bronze figure la Science et la Vigilance (un amour qui écrit et un coq qui chante) ; le dedans est garni de maroquin vert. Aux angles du bureau, quatre petits vases de bronze. » (Etat des meubles achetés au maître Roentgen David).
Compte tenu de la spécificité du dessin de ce secrétaire, il est difficile de croire que Roentgen ait pu livrer notre bureau à un autre commanditaire que l’impératrice de Russie. Il est alors très probable que notre bureau ait fait partie des commandes de Catherine II à Roentgen entre 1784 et 1786 et dont le total s’élevait à la somme colossale de 111.512 roubles.
David Roentgen (1743-1807)
Fils d'Abraham Roentgen (1711-1793), David reprit l'atelier paternel en 1772 pour devenir l'un des plus grands ébénistes de son temps. Son sens inné des affaires, son goût pour la nouveauté et la recherche lui permettent au fil des ans de développer un réseau commercial de grande ampleur.
Après son premier voyage à Paris où il s'inspire et se familiarise avec le tout nouveau goût néoclassique de la capitale, il renouvelle entièrement sa gamme de meubles et devient le représentant le plus audacieux et le plus novateur de ce style en ébénisterie. A Paris, il fait également une rencontre décisive : celle de Charles de Lorraine, oncle de Marie-Antoinette mais aussi gouverneur des Pays-Bas. Il deviendra son plus grand mécène et lui permet d'accéder en 1785 au prestigieux titre d'Ebéniste mécanicien du Roi et de la Reine de France.
Tel un sésame, ce titre lui ouvre les portes de toutes les cours européennes tout comme les châteaux des électeurs de Hesse, de Saxe, des ducs de Wurtemberg et des marquis de Baden.
Fort de sa réputation Roentgen investit à Paris la rue de Grenelle dès 1781. Jusqu'ici son commerce était entre les mains du marchand miroitier Brébant. Grâce aux bons conseils prodigués en 1774 par son compatriote et graveur Jean-Georges Wille (1715-1808) installé à Paris depuis 1736, il tisse un solide réseau.
A partir de 1781, la boutique et notamment la vente et la promotion de ses meubles seront confiées à Johann Gottlieb Frost (1746-1814). Également d'origine allemande, il aurait été l'élève de Roentgen et se prétendait même être son successeur comme en témoigne une de ses publications du Journal Général de France du 25 décembre 1785 où il est écrit « Le sieur Frost, successeur du sieur David Roentgen, ébéniste-mécanicien du Roi et de la Reine, tient à présent rue Croix des-Petits-Champs, le grand magasin d'ébénisterie que ce dernier avait ci-devant rue de Grenelle Saint-Honoré, et continue de vendre des meubles très recherchés par leur forme et leur poli » (Journal Général de France, 25 décembre 1785, p. 3453).
L’impératrice Catherine II (1729-1796)
Paris sera le point de départ de la reconnaissance internationale de Roentgen dont l'atelier, perdu au cœur de l'Allemagne, fournira bientôt les plus grandes cours européennes. Son principal client sera Catherine la Grande, tsar de toutes les Russies.
David Roentgen livra des centaines de meubles destinés au Palais d'Hiver ou à ses autres palais. Aujourd'hui, seulement 22 lots de ces livraisons figurent encore à l'inventaire des palais de l'Ermitage à Saint-Pétersbourg, la majorité ayant été vendue dans les années trente par les soviétiques. Le correspondant parisien de Catherine II, le baron Melchior Grimm, qui tenait l'impératrice au courant des événements politiques et culturels de la capitale française, l'informait régulièrement des progrès réalisés sur les pièces insolites de l'atelier de Roentgen à Neuwied sur le Rhin, suscitant ainsi l'envie de Catherine II de l'ajouter à sa collection.
En 1784, David Roentgen apporta lui-même le Bureau d'Appolon encore aujourd'hui à Saint- Pétersbourg où il devint un ornement principal du Grand Ermitage, le bâtiment qui venait d'être construit pour abriter les collections d'art de l'Impératrice. Ce fut la première œuvre de Roentgen à présenter les formes architecturales que l'on retrouve sur le présent cabinet.
La conception a probablement été choisie avec un œil sensible aux goûts de l'acheteur ciblé : Catherine II. Grimm connaissait l'ampleur des travaux de construction à Saint-Pétersbourg et l'obsession de Catherine pour les meubler avec le dernier goût néoclassique et de la façon la plus somptueuse possible.
Les bureaux en acajou avec décor en bronze ciselé et doré équipés de dispositifs mécaniques complexes ou d'un mécanisme musical ravirent l'impératrice russe. Les mécanismes que Roentgen a produits en collaboration avec le mécanicien Peter Kinzing ont fortement contribué à sa renommée et son succès. Ses meubles entièrement démontables, faciles à transporter à travers l'Europe marquaient les esprits et subjuguaient par la qualité de leur réalisation. Enfin pour que la séduction soit complète, et fort bien au fait des gouts russes, Roentgen s'associa aux meilleurs pour la réalisation des bronzes d'ornements. François Rémond exécutait généralement les modèles du sculpteur Louis- Simon Boizot ; Roentgen en avait toutefois l'exclusivité. Les pièces acquises par Catherine auprès de Roentgen faisaient l'objet de démonstration devant ses invités éblouis, et furent pour certaines pièces confiées dès 1790 à l'Académie des sciences pour être montrées au public et étudiées.
L’Ermitage
Le présent bureau est très certainement le pendant d’un autre secrétaire, identique, aujourd’hui conservé au palais de Pavlosk et visible dans le Third Interconnecting Study.
Il a été livré par Roentgen en mars 1786 à l’Ermitage comme l’indique la facture n. 40 « un secrétaire sur huit colonnes d’ordre dorique garni en or mat. » pour la somme de 1500 roubles auxquels s’ajoute 540 roubles pour le transport entre l’atelier de Roentgen à Neuwied et Saint-Petersbourg.
Ce bureau était encore visible à l’Ermitage avant la Révolution en 1917, car vu et décrit par Denis Roche dans son ouvrage (op. cit.) : « Un bureau en acajou décoré de bronzes dorés sur huit colonnes également en acajou, chapiteaux, bases et frises de bronze ; rabattant sur charnières et à serrure. A l’extérieur, un médaillon de bronze figure la Science et la Vigilance (un amour qui écrit et un coq qui chante) ; le dedans est garni de maroquin vert. Aux angles du bureau, quatre petits vases de bronze. » (Etat des meubles achetés au maître Roentgen David).
Compte tenu de la spécificité du dessin de ce secrétaire, il est difficile de croire que Roentgen ait pu livrer notre bureau à un autre commanditaire que l’impératrice de Russie. Il est alors très probable que notre bureau ait fait partie des commandes de Catherine II à Roentgen entre 1784 et 1786 et dont le total s’élevait à la somme colossale de 111.512 roubles.