Lot Essay
Ce tableau monumental témoigne de la puissance du style du peintre vénitien Palma le Jeune (1544-1628). Petit-neveu de Palma le Vieux (1480-1528) et fils du peintre Antonio Negretti (1515-1575), l'artiste étudie d’abord les œuvres de Raphaël (1483-1520) et du Titien (1488-1576) avant de passer neuf ans à Rome, où il profite de l’influence des grands tableaux de Michel-Ange (1475-1564) et du cercle maniériste romain. De retour à Venise en 1569, il collabore avec le Tintoret (1518-1594) sur divers projets, comme la restauration des salles du palais des Doges après le grand incendie de 1574.
Il est le mariage subtil de ces influences variées qui fait toute la réussite du Saint Jean Baptiste. Le corps musclé, fait de lignes sinueuses, retient la vigueur des modèles maniéristes, mais le tout est imprégné du riche coloris sombre et de l’application impétueuse de la matière épaisse si typique de la Sérénissime. Cet éclectisme fait de Palma le Jeune un des plus remarquables peintres vénitiens de la seconde moitié du XVIe siècle, et un des plus recherchés auprès des grands mécènes de toute l’Europe.
L’inclusion du terme "Venetus" dans la signature ci-présente nous indique que notre tableau était destiné à une collection hors d’Italie, où les origines de l’artiste n’auraient pas été connues. Le numéro qui apparait en bas à gauche nous a permis de découvrir le nom du propriétaire original, à savoir l’Espagnol Diego Mexía Felípez de Guzmán y Dávila (1580-1655), Marqués de Leganés. Celui-ci est un des plus grands collectionneurs du temps de Palma le Jeune. À partir de 1600 il est au service d’Albert VII (1559-1621) dans les Pays-Bas espagnols, où il fait la connaissance de Pierre Paul Rubens (1577-1640), qui le décrit dans une lettre daté du 27 janvier 1628 à l’érudit Pierre Dupuy (1582-1651) comme "un des plus importants connaisseurs de notre époque" (voir R. Magurn, The Letters of Peter Paul Rubens, Cambridge, 1955, n°145). L’autorité du marquis prend essor pendant la première décennie du règne de Philippe IV (1605-1665), grâce à son amitié avec Gaspar de Guzmán (1587-1645), comte d'Olivares et favori du roi. C’est pendant cette période qu’il commence à s’engager sérieusement dans l’acquisition des tableaux – un inventaire de ses biens en 1630 comprend dix-sept tableaux –, sa collection s'agrandissant de manière exponentielle – l’inventaire de 1637 compte sept-cent cinquante tableaux, le Saint Jean Baptiste inclus. Les œuvres de la collection Leganés se trouvent actuellement dans les plus importants musées mondiaux, y compris le Prado à Madrid, la Rubenshuis à Anvers, les Musées Royaux des Beaux-Arts à Bruxelles et le Museum of Fine Arts de Houston.
Le sujet de saint Jean Baptiste au désert apparait à maintes reprises dans l’histoire de l’art occidental. Il trouve ses origines dans l’Ancien Testament où le prophète Isaïe présage la "Voix de celui qui crie dans le désert" (Isaïe, 40, 3). Ces mots sont repris dans les quatre Livres des Évangiles, qui précisent que saint Jean est celui dont l’avènement a été annoncé. Cette idée du désert, d’une région sauvage avec toutes ses possibilités romanesques inspire les artistes à travers le temps. Nous trouvons notamment des exemples dans l’œuvre de Hans Memling (1430-1494) et Jérôme Bosch (mort en 1516) au XVe siècle, chez Raphaël et Titien pendant la première moitié du XVIe siècle, dans l’œuvre de Murillo (1617-1682) au XVIIe et même un Saint Jean Baptiste jeune au désert du peintre anglais Sir Joshua Reynolds (1723-1792) à la fin du XVIIIe siècle. Comme dans le tableau ci-présent, ces images partagent toutes le motif de l’agneau, symbole du Christ, qui accompagne le Baptiste, et la plupart d’entre eux incluent également un cours d’eau ; les deux font référence aux paroles de saint Jean, "Moi, je vous baptise d'eau … mais celui qui vient après moi, … il vous baptisera du Saint-Esprit et de feu" (Matthieu, 3, 11). Palma peint plusieurs versions du sujet au cours de sa carrière, dont une est conservée dans l’église de Saint Jean Baptiste à Bagno qui date de 1602, une au musée Khanenko à Kiev, et une au Cantor Arts Centre à Stanford en Californie (no. inv. 66.73).
Il est le mariage subtil de ces influences variées qui fait toute la réussite du Saint Jean Baptiste. Le corps musclé, fait de lignes sinueuses, retient la vigueur des modèles maniéristes, mais le tout est imprégné du riche coloris sombre et de l’application impétueuse de la matière épaisse si typique de la Sérénissime. Cet éclectisme fait de Palma le Jeune un des plus remarquables peintres vénitiens de la seconde moitié du XVIe siècle, et un des plus recherchés auprès des grands mécènes de toute l’Europe.
L’inclusion du terme "Venetus" dans la signature ci-présente nous indique que notre tableau était destiné à une collection hors d’Italie, où les origines de l’artiste n’auraient pas été connues. Le numéro qui apparait en bas à gauche nous a permis de découvrir le nom du propriétaire original, à savoir l’Espagnol Diego Mexía Felípez de Guzmán y Dávila (1580-1655), Marqués de Leganés. Celui-ci est un des plus grands collectionneurs du temps de Palma le Jeune. À partir de 1600 il est au service d’Albert VII (1559-1621) dans les Pays-Bas espagnols, où il fait la connaissance de Pierre Paul Rubens (1577-1640), qui le décrit dans une lettre daté du 27 janvier 1628 à l’érudit Pierre Dupuy (1582-1651) comme "un des plus importants connaisseurs de notre époque" (voir R. Magurn, The Letters of Peter Paul Rubens, Cambridge, 1955, n°145). L’autorité du marquis prend essor pendant la première décennie du règne de Philippe IV (1605-1665), grâce à son amitié avec Gaspar de Guzmán (1587-1645), comte d'Olivares et favori du roi. C’est pendant cette période qu’il commence à s’engager sérieusement dans l’acquisition des tableaux – un inventaire de ses biens en 1630 comprend dix-sept tableaux –, sa collection s'agrandissant de manière exponentielle – l’inventaire de 1637 compte sept-cent cinquante tableaux, le Saint Jean Baptiste inclus. Les œuvres de la collection Leganés se trouvent actuellement dans les plus importants musées mondiaux, y compris le Prado à Madrid, la Rubenshuis à Anvers, les Musées Royaux des Beaux-Arts à Bruxelles et le Museum of Fine Arts de Houston.
Le sujet de saint Jean Baptiste au désert apparait à maintes reprises dans l’histoire de l’art occidental. Il trouve ses origines dans l’Ancien Testament où le prophète Isaïe présage la "Voix de celui qui crie dans le désert" (Isaïe, 40, 3). Ces mots sont repris dans les quatre Livres des Évangiles, qui précisent que saint Jean est celui dont l’avènement a été annoncé. Cette idée du désert, d’une région sauvage avec toutes ses possibilités romanesques inspire les artistes à travers le temps. Nous trouvons notamment des exemples dans l’œuvre de Hans Memling (1430-1494) et Jérôme Bosch (mort en 1516) au XVe siècle, chez Raphaël et Titien pendant la première moitié du XVIe siècle, dans l’œuvre de Murillo (1617-1682) au XVIIe et même un Saint Jean Baptiste jeune au désert du peintre anglais Sir Joshua Reynolds (1723-1792) à la fin du XVIIIe siècle. Comme dans le tableau ci-présent, ces images partagent toutes le motif de l’agneau, symbole du Christ, qui accompagne le Baptiste, et la plupart d’entre eux incluent également un cours d’eau ; les deux font référence aux paroles de saint Jean, "Moi, je vous baptise d'eau … mais celui qui vient après moi, … il vous baptisera du Saint-Esprit et de feu" (Matthieu, 3, 11). Palma peint plusieurs versions du sujet au cours de sa carrière, dont une est conservée dans l’église de Saint Jean Baptiste à Bagno qui date de 1602, une au musée Khanenko à Kiev, et une au Cantor Arts Centre à Stanford en Californie (no. inv. 66.73).