Flowers, bottle and two jugs
Details
Roderic O'Conor (1860-1940)
Flowers, bottle and two jugs
signé ‘O’Conor’ (en bas à droite); avec le cachet ‘atelier O'CONOR’ (au revers; Lugt 3911)
huile sur toile
73.4 x 54.8 cm.
Peint vers 1891-92
signed 'O’Conor' (lower right); stamped 'atelier O'CONOR' (on the reverse; Lugt 3911)
oil on canvas
28 7⁄8 x 21 ½ in.
Painted circa 1891-92
Flowers, bottle and two jugs
signé ‘O’Conor’ (en bas à droite); avec le cachet ‘atelier O'CONOR’ (au revers; Lugt 3911)
huile sur toile
73.4 x 54.8 cm.
Peint vers 1891-92
signed 'O’Conor' (lower right); stamped 'atelier O'CONOR' (on the reverse; Lugt 3911)
oil on canvas
28 7⁄8 x 21 ½ in.
Painted circa 1891-92
Provenance
Atelier de l'artiste; sa vente, Me Bellier, Paris, 7 février 1956.
Roland, Browse and Delbanco, Londres (avant 1964).
Dorothy E. Miller.
Gisbourne Art Gallery and Museum, New Zealand (don de celle-ci en 1965).
Browse & Darby, Londres.
Sam Josefowitz, Pully (acquis auprès de celle-ci le 4 septembre 1986).
Puis par descendance aux propriétaires actuels.
Roland, Browse and Delbanco, Londres (avant 1964).
Dorothy E. Miller.
Gisbourne Art Gallery and Museum, New Zealand (don de celle-ci en 1965).
Browse & Darby, Londres.
Sam Josefowitz, Pully (acquis auprès de celle-ci le 4 septembre 1986).
Puis par descendance aux propriétaires actuels.
Literature
R. Johnston, 'Gauguin's Irish Friend', in Art & Artists, septembre 1984, p. 28 (illustré).
J. Benington, Roderic O'Conor, A biography, with a catalogue of his work, Dublin, 1992, p. 190, no. 17 (illustré en couleurs, fig. 7).
J. Benington, Roderic O'Conor, A biography, with a catalogue of his work, Dublin, 1992, p. 190, no. 17 (illustré en couleurs, fig. 7).
Exhibited
Londres, Roland, Browse & Delbanco, Roderic O'Conor, Norman Adams, avril-mai 1964, p. 3, no. 4 (illustré, fig. 4).
Londres, Barbican Art Gallery; Belfast, The Ulster Museum; Dublin, National Gallery of Ireland et Manchester, Whitworth Art Gallery, Roderic O'Conor, septembre 1985-mai 1986, p. 64, no. 7 (illustré, p. 65).
Sydney, Art Gallery of New South Wales, Gauguin and the Pont-Aven School, mai-juillet 1994, p. 160 et 221, no. 96 (illustré en couleurs, p. 162; titré 'Still-life with a carafe').
Indianapolis, Indianapolis Museum of Art; Baltimore, The Walters Art Gallery; Montréal, The Montreal Museum of Fine Arts; Memphis, The Dixon Gallery and Gardens; San Diego, San Diego Museum of Art; Portland, Portland Art Museum; Boston, Museum of Fine Arts et Jérusalem, The Israel Museum, Gauguin and the School of Pont-Aven, septembre 1994-janvier 1997, p. 126, no. 96 (illustré en couleurs, p. 127; titré 'Still-life with a carafe').
Londres, Barbican Art Gallery; Belfast, The Ulster Museum; Dublin, National Gallery of Ireland et Manchester, Whitworth Art Gallery, Roderic O'Conor, septembre 1985-mai 1986, p. 64, no. 7 (illustré, p. 65).
Sydney, Art Gallery of New South Wales, Gauguin and the Pont-Aven School, mai-juillet 1994, p. 160 et 221, no. 96 (illustré en couleurs, p. 162; titré 'Still-life with a carafe').
Indianapolis, Indianapolis Museum of Art; Baltimore, The Walters Art Gallery; Montréal, The Montreal Museum of Fine Arts; Memphis, The Dixon Gallery and Gardens; San Diego, San Diego Museum of Art; Portland, Portland Art Museum; Boston, Museum of Fine Arts et Jérusalem, The Israel Museum, Gauguin and the School of Pont-Aven, septembre 1994-janvier 1997, p. 126, no. 96 (illustré en couleurs, p. 127; titré 'Still-life with a carafe').
Further details
O'Conor arrive dans le village de pêcheurs breton de Pont-Aven à la fin de l'été 1891. Le premier chapitre du développement de l'école de peinture de Pont-Aven est déjà clos. Gauguin, le précurseur de l'école, actif dans la région depuis 1886, est absent pour son premier voyage dans les mers du Sud. En 1892-93, Émile Bernard, son ancien ami et compagnon d'armes artistique, passe sa dernière saison dans la ville avant dix-huit ans, tandis que Paul Sérusier, un autre de ses principaux disciples, est attiré par les charmes plus tranquilles de Huelgoat et de Châteauneuf-du-Faou. Le champ était donc libre pour un artiste résolument moderniste comme O'Conor, qui pouvait se fondre dans les différentes tendances de la peinture progressiste qui attiraient l'attention sur la scène artistique parisienne, émanant d'artistes basés dans le Sud et l'Ouest de la France, ainsi que dans la capitale elle-même.
Le style dominant à Pont-Aven était le synthétisme, qui rejetait la perspective conventionnelle au profit de formes larges et plates, représentées à l'aide de couleurs anormalement vives et de contours audacieux (semblables à l'aspect des vitraux médiévaux). Bien qu'O'Conor ait expérimenté des éléments de ce style dans certains de ses dessins et gravures, il n'y a jamais adhéré totalement. Si l'utilisation libre de la couleur le séduit, il ne peut souscrire à la focalisation extrêmement superficielle et aux distorsions apparemment volontaires de la nature pratiquées par ses collègues synthétistes.
D'une part, Flowers, bottle and two jugs (Fleurs, bouteille et deux cruches), peint pas plus de six mois après l'arrivée d'O'Conor à Pont-Aven, est une déclaration de sa nouvelle affinité pour cette région reculée de France. Les natures mortes qu'il a incluses proviennent toutes de la région : deux cruches en faïence peintes à la main de Quimper, une bouteille de cidre fermier et un verre de ce qui semble être des roses sauvages. C'est comme si le peintre annonçait qu'il s'était débarrassé des conventions fatiguées de la civilisation bourgeoise en faveur d'une simplicité plus authentique et rustique, faisant écho aux sentiments de Gauguin quatre ans plus tôt lorsqu'il louait fièrement le son de ses sabots de bois résonnant sur le sol granitique. O'Conor avait la Bretagne dans la peau ; ce n'est pas un hasard si la région est devenue son point d'encrage pour les treize années qui suivraient.
À un autre niveau, Flowers, bottle and two jugs est une déclaration mûre et assurée du radicalisme artistique d'O'Conor. Dans ce tableau, où les relations spatiales, tonales et chromatiques sont soigneusement étudiées, il cloue littéralement ses couleurs au mât, aidé par un puissant rayon de soleil qui traverse une fenêtre située juste à l'extérieur de l'image, à gauche. La méthode utilisée par O'Conor pour appliquer ses pigments est l'aspect le plus audacieux du tableau, qui a dû provoquer un choc visuel puissant lorsque ses contemporains plus conventionnels l'ont vu. De haut en bas, la surface du tableau a été articulée à l'aide de "bandes" de pigments audacieuses et rythmées, la plupart alignées verticalement, à l'exception des stries diagonales utilisées dans les deux cruches. Les rubans de peinture non dissimulés perturbent notre lecture figurative de la composition, nous incitant à nous concentrer sur la chaîne et la trame des coups de pinceau du peintre et sur les harmonies de ses couleurs. Les gestes emphatiques d'O'Conor sont porteurs d'un message très moderne : le tableau est avant tout une entité bidimensionnelle régie par la logique de sa propre fabrication, au lieu d'être destiné à la fonction d'illusion de la réalité tridimensionnelle.
Les vibrations de couleurs scintillantes dans Flowers, bottle and two jugs pourraient être conçues comme ayant une fonction similaire à celle des points de couleur pure utilisés par les pointillistes. Les coups de pinceau atténués de O'Conor sont cependant trop marqués pour permettre aux couleurs individuelles de se mélanger optiquement - ses coups alternés de rose et de bleu, par exemple, ne créent pas de violet. La méthode s'apparente davantage à celle d'une tapisserie, dans laquelle les fils d'une même couleur réapparaissent dans d'autres parties du dessin, le tricotant visuellement. Si l'éthique pluridisciplinaire que Gauguin a propagée parmi ses disciples à Pont-Aven a sans aucun doute stimulé la renaissance des formes artistiques médiévales, il faut chercher ailleurs le catalyseur de l'invention de la "hachure" par O'Conor. L'impulsion a été donnée par une rencontre avec les peintures de Vincent Van Gogh, récemment décédé, qu'O'Conor a eu la perspicacité d'apprécier à une époque où le Néerlandais n'avait pas encore acquis une réputation digne de ce nom. Les détails précis de l'exposition sont incertains, mais elle pourrait avoir eu lieu soit en privé, par le biais d'une présentation de Theo Van Gogh arrangée par l'ami d'O'Conor, Edward Brooks, soit en public, sous la forme d'une visite à l'exposition commémorative de Van Gogh organisée à la galerie Le Barc de Boutteville, à Paris, en avril 1892.
Quel que soit le lieu, il ne fait aucun doute que 1892 a été une année charnière pour O'Conor, car il a été profondément ému et inspiré, pour la toute première fois, par le réseau giratoire de lignes parallèles superposé par Van Gogh aux champs, aux arbres et aux nuages dans ses paysages de St Rémy. O'Conor décrira plus tard ces tableaux comme "de merveilleuses expressions de caractère poussées jusqu'à l'hallucination". Cette découverte a eu un effet considérable sur le jeune peintre, lui permettant de dépasser rapidement le naturalisme relativement conventionnel du The Cider Drinker (Queensland Art Gallery) et de concevoir une réponse plus personnelle aux compositions dynamiques de Vincent. Les coups de pinceau hésitants et plumeux de Still Life with Bottles (Londres, Tate Gallery) ont rapidement cédé la place au marquage plus audacieux de Flowers, bottle and two jugs, dans lesquelles la "hachure" a atteint pour la première fois son état pleinement évolué.
Après avoir inauguré la méthode avec succès dans une nature morte, O'Conor l'a appliquée avec autant d'audace aux paysages et aux personnages, établissant ainsi le style très original et moderne qui a distingué son art jusqu'à sa rencontre avec Gauguin deux ans plus tard. Un tiers des dix-huit tableaux "hachurés" d'O'Conor qui ont survécu sont conservés dans de grandes collections muséales du monde entier, et il n'en reste pas plus d'une douzaine en mains privées.
Jonathan Benington
O'Conor arrived in the Breton fishing village of Pont-Aven in late summer 1891. The first chapter in the development of the Pont-Aven School of painting was already over. Gauguin, the School's founding father, who had been active in the area since 1886, was now absent on his first trip to the South Seas. In 1892-93 Émile Bernard, his former friend and artistic comrade in arms, came one last time for the next 18 years. Paul Sérusier, another of the chief disciples, was lured away by the quieter charms of Huelgoat and Châteauneuf-du-Faou. The field was thus wide open for a staunchly modernist artist such as O'Conor to meld his own style out of the various strains of progressive painting that were shaking the Parisian art scene, originated by artists based in the South and West of France, as well as the capital itself.
The prevailing Pont-Aven style was Synthetism, which rejected conventional perspective in favour of broad flat forms, depicted using unnaturally bright colours and bold contours (similar in appearance to medieval stained glass). Although O'Conor experimented with elements of the style in some of his drawings and etchings, he never embraced it wholeheartedly. While the free use of colour appealed to him, he could not subscribe to the extremely shallow focal place and seemingly wilful distortions of nature practiced by his Synthetist colleagues.
On one level, Flowers, bottle and two jugs, executed no more than six months after O'Conor's arrival in Pont-Aven, is a declaration of his newfound affinity for this remote region of France. The still life objects he has included were all locally sourced: two hand-painted faïence jugs from Quimper, a bottle of farm cider, and a glass of what appear to be wild roses. It is as if the painter were announcing that he has rid himself of the tired conventions of bourgeois civilisation in favour of a more authentic, rustic simplicity, echoing the sentiments of Gauguin four years earlier when he proudly eulogised the sound of his wooden clogs ringing out on the granite ground. Brittany had got into O'Conor's bones; it was no accident that the region became his base for the next thirteen years.
On another level, Flowers, bottle and two jugs is a mature and confident statement of O'Conor's artistic radicalism. In this picture, with its carefully considered spatial, tonal and chromatic relationships, he quite literally nails his colours to the mast, aided by a strong shaft of sunlight streaming through a window just out of the picture to the left. The method O'Conor has used to apply his pigments is the most daring aspect of the painting, and one that must have triggered a potent visual shock when it was seen by his more conventional contemporaries. From top to bottom, the picture surface has been articulated using bold, rhythmic 'stripes' of pigment, most of them aligned vertically, with the exception of the diagonal striations used in the two jugs. The undisguised ribbons of paint disrupt our representational reading of the composition, making us focus instead on the warp and weft of the painter's brushstrokes and the harmonies of his colours. O'Conor's emphatic gestures carry a very modern message: that the painting is, first and foremost, a two-dimensional entity governed by the logic of its own making, instead of being intended to function as an illusion of three-dimensional reality.
The flickering colour vibrations in Flowers, bottle and two jugs could be conceived as serving a similar purpose to the dots of pure colour used by the Pointillists. O'Conor's attenuated brushstrokes are, however, too prominent to allow individual colours to mix optically - his alternating strokes of pink and blue, for example, do not create purple. The method is more akin to that of a tapestry, in which strands of the same colour reappear in other parts of the design, knitting it together visually. Whilst the multi-disciplinary ethos that Gauguin propagated amongst his followers in Pont-Aven undoubtedly stimulated the revival of medieval art forms, one has to look elsewhere to find the catalyst for O'Conor's invention of the 'stripe'. The spur was provided by an encounter with the paintings of the recently deceased Vincent Van Gogh, which O'Conor was perceptive enough to appreciate at a time when the Dutchman had not acquired any reputation to speak of. The precise details of the viewing are uncertain, but it could either have taken place privately via an introduction to Theo Van Gogh brokered by O'Conor's friend, Edward Brooks, or else publicly in the form of a visit to the Van Gogh memorial exhibition staged at Le Barc de Boutteville's gallery in Paris in April 1892.
Whatever the venue, there can be no doubt that 1892 was a pivotal year for O'Conor because he was deeply moved and inspired, for the very first time, by the gyrating web of parallel lines that Van Gogh superimposed on fields, trees and clouds in his St Rémy landscapes. O'Conor would later describe these pictures as "wonderful expressions of character pushed to the point of hallucination". The discovery had a far-reaching effect on the young painter, enabling him to progress rapidly beyond the relatively conventional naturalism of The Cider Drinker (Queensland Art Gallery), and devise a more personal response to Vincent's dynamically configured compositions. The tentatively hatched and feathered brushstrokes of Still Life with Bottles (London, Tate Gallery) soon gave way to the bolder mark-making of Flowers, bottle and two jugs, in which the 'stripe' has attained its fully evolved state for the first time.
Having inaugurated the method successfully in a still life, O'Conor went on to apply it with equal daring to landscapes and figure subjects, thus establishing the highly original and modern style that distinguished his art up until the time of his meeting with Gauguin two years later. One third of O'Conor's eighteen surviving 'striped' pictures are vested in major museum collections around the world, leaving no more than a dozen still in private hands.
Jonathan Benington
Le style dominant à Pont-Aven était le synthétisme, qui rejetait la perspective conventionnelle au profit de formes larges et plates, représentées à l'aide de couleurs anormalement vives et de contours audacieux (semblables à l'aspect des vitraux médiévaux). Bien qu'O'Conor ait expérimenté des éléments de ce style dans certains de ses dessins et gravures, il n'y a jamais adhéré totalement. Si l'utilisation libre de la couleur le séduit, il ne peut souscrire à la focalisation extrêmement superficielle et aux distorsions apparemment volontaires de la nature pratiquées par ses collègues synthétistes.
D'une part, Flowers, bottle and two jugs (Fleurs, bouteille et deux cruches), peint pas plus de six mois après l'arrivée d'O'Conor à Pont-Aven, est une déclaration de sa nouvelle affinité pour cette région reculée de France. Les natures mortes qu'il a incluses proviennent toutes de la région : deux cruches en faïence peintes à la main de Quimper, une bouteille de cidre fermier et un verre de ce qui semble être des roses sauvages. C'est comme si le peintre annonçait qu'il s'était débarrassé des conventions fatiguées de la civilisation bourgeoise en faveur d'une simplicité plus authentique et rustique, faisant écho aux sentiments de Gauguin quatre ans plus tôt lorsqu'il louait fièrement le son de ses sabots de bois résonnant sur le sol granitique. O'Conor avait la Bretagne dans la peau ; ce n'est pas un hasard si la région est devenue son point d'encrage pour les treize années qui suivraient.
À un autre niveau, Flowers, bottle and two jugs est une déclaration mûre et assurée du radicalisme artistique d'O'Conor. Dans ce tableau, où les relations spatiales, tonales et chromatiques sont soigneusement étudiées, il cloue littéralement ses couleurs au mât, aidé par un puissant rayon de soleil qui traverse une fenêtre située juste à l'extérieur de l'image, à gauche. La méthode utilisée par O'Conor pour appliquer ses pigments est l'aspect le plus audacieux du tableau, qui a dû provoquer un choc visuel puissant lorsque ses contemporains plus conventionnels l'ont vu. De haut en bas, la surface du tableau a été articulée à l'aide de "bandes" de pigments audacieuses et rythmées, la plupart alignées verticalement, à l'exception des stries diagonales utilisées dans les deux cruches. Les rubans de peinture non dissimulés perturbent notre lecture figurative de la composition, nous incitant à nous concentrer sur la chaîne et la trame des coups de pinceau du peintre et sur les harmonies de ses couleurs. Les gestes emphatiques d'O'Conor sont porteurs d'un message très moderne : le tableau est avant tout une entité bidimensionnelle régie par la logique de sa propre fabrication, au lieu d'être destiné à la fonction d'illusion de la réalité tridimensionnelle.
Les vibrations de couleurs scintillantes dans Flowers, bottle and two jugs pourraient être conçues comme ayant une fonction similaire à celle des points de couleur pure utilisés par les pointillistes. Les coups de pinceau atténués de O'Conor sont cependant trop marqués pour permettre aux couleurs individuelles de se mélanger optiquement - ses coups alternés de rose et de bleu, par exemple, ne créent pas de violet. La méthode s'apparente davantage à celle d'une tapisserie, dans laquelle les fils d'une même couleur réapparaissent dans d'autres parties du dessin, le tricotant visuellement. Si l'éthique pluridisciplinaire que Gauguin a propagée parmi ses disciples à Pont-Aven a sans aucun doute stimulé la renaissance des formes artistiques médiévales, il faut chercher ailleurs le catalyseur de l'invention de la "hachure" par O'Conor. L'impulsion a été donnée par une rencontre avec les peintures de Vincent Van Gogh, récemment décédé, qu'O'Conor a eu la perspicacité d'apprécier à une époque où le Néerlandais n'avait pas encore acquis une réputation digne de ce nom. Les détails précis de l'exposition sont incertains, mais elle pourrait avoir eu lieu soit en privé, par le biais d'une présentation de Theo Van Gogh arrangée par l'ami d'O'Conor, Edward Brooks, soit en public, sous la forme d'une visite à l'exposition commémorative de Van Gogh organisée à la galerie Le Barc de Boutteville, à Paris, en avril 1892.
Quel que soit le lieu, il ne fait aucun doute que 1892 a été une année charnière pour O'Conor, car il a été profondément ému et inspiré, pour la toute première fois, par le réseau giratoire de lignes parallèles superposé par Van Gogh aux champs, aux arbres et aux nuages dans ses paysages de St Rémy. O'Conor décrira plus tard ces tableaux comme "de merveilleuses expressions de caractère poussées jusqu'à l'hallucination". Cette découverte a eu un effet considérable sur le jeune peintre, lui permettant de dépasser rapidement le naturalisme relativement conventionnel du The Cider Drinker (Queensland Art Gallery) et de concevoir une réponse plus personnelle aux compositions dynamiques de Vincent. Les coups de pinceau hésitants et plumeux de Still Life with Bottles (Londres, Tate Gallery) ont rapidement cédé la place au marquage plus audacieux de Flowers, bottle and two jugs, dans lesquelles la "hachure" a atteint pour la première fois son état pleinement évolué.
Après avoir inauguré la méthode avec succès dans une nature morte, O'Conor l'a appliquée avec autant d'audace aux paysages et aux personnages, établissant ainsi le style très original et moderne qui a distingué son art jusqu'à sa rencontre avec Gauguin deux ans plus tard. Un tiers des dix-huit tableaux "hachurés" d'O'Conor qui ont survécu sont conservés dans de grandes collections muséales du monde entier, et il n'en reste pas plus d'une douzaine en mains privées.
Jonathan Benington
O'Conor arrived in the Breton fishing village of Pont-Aven in late summer 1891. The first chapter in the development of the Pont-Aven School of painting was already over. Gauguin, the School's founding father, who had been active in the area since 1886, was now absent on his first trip to the South Seas. In 1892-93 Émile Bernard, his former friend and artistic comrade in arms, came one last time for the next 18 years. Paul Sérusier, another of the chief disciples, was lured away by the quieter charms of Huelgoat and Châteauneuf-du-Faou. The field was thus wide open for a staunchly modernist artist such as O'Conor to meld his own style out of the various strains of progressive painting that were shaking the Parisian art scene, originated by artists based in the South and West of France, as well as the capital itself.
The prevailing Pont-Aven style was Synthetism, which rejected conventional perspective in favour of broad flat forms, depicted using unnaturally bright colours and bold contours (similar in appearance to medieval stained glass). Although O'Conor experimented with elements of the style in some of his drawings and etchings, he never embraced it wholeheartedly. While the free use of colour appealed to him, he could not subscribe to the extremely shallow focal place and seemingly wilful distortions of nature practiced by his Synthetist colleagues.
On one level, Flowers, bottle and two jugs, executed no more than six months after O'Conor's arrival in Pont-Aven, is a declaration of his newfound affinity for this remote region of France. The still life objects he has included were all locally sourced: two hand-painted faïence jugs from Quimper, a bottle of farm cider, and a glass of what appear to be wild roses. It is as if the painter were announcing that he has rid himself of the tired conventions of bourgeois civilisation in favour of a more authentic, rustic simplicity, echoing the sentiments of Gauguin four years earlier when he proudly eulogised the sound of his wooden clogs ringing out on the granite ground. Brittany had got into O'Conor's bones; it was no accident that the region became his base for the next thirteen years.
On another level, Flowers, bottle and two jugs is a mature and confident statement of O'Conor's artistic radicalism. In this picture, with its carefully considered spatial, tonal and chromatic relationships, he quite literally nails his colours to the mast, aided by a strong shaft of sunlight streaming through a window just out of the picture to the left. The method O'Conor has used to apply his pigments is the most daring aspect of the painting, and one that must have triggered a potent visual shock when it was seen by his more conventional contemporaries. From top to bottom, the picture surface has been articulated using bold, rhythmic 'stripes' of pigment, most of them aligned vertically, with the exception of the diagonal striations used in the two jugs. The undisguised ribbons of paint disrupt our representational reading of the composition, making us focus instead on the warp and weft of the painter's brushstrokes and the harmonies of his colours. O'Conor's emphatic gestures carry a very modern message: that the painting is, first and foremost, a two-dimensional entity governed by the logic of its own making, instead of being intended to function as an illusion of three-dimensional reality.
The flickering colour vibrations in Flowers, bottle and two jugs could be conceived as serving a similar purpose to the dots of pure colour used by the Pointillists. O'Conor's attenuated brushstrokes are, however, too prominent to allow individual colours to mix optically - his alternating strokes of pink and blue, for example, do not create purple. The method is more akin to that of a tapestry, in which strands of the same colour reappear in other parts of the design, knitting it together visually. Whilst the multi-disciplinary ethos that Gauguin propagated amongst his followers in Pont-Aven undoubtedly stimulated the revival of medieval art forms, one has to look elsewhere to find the catalyst for O'Conor's invention of the 'stripe'. The spur was provided by an encounter with the paintings of the recently deceased Vincent Van Gogh, which O'Conor was perceptive enough to appreciate at a time when the Dutchman had not acquired any reputation to speak of. The precise details of the viewing are uncertain, but it could either have taken place privately via an introduction to Theo Van Gogh brokered by O'Conor's friend, Edward Brooks, or else publicly in the form of a visit to the Van Gogh memorial exhibition staged at Le Barc de Boutteville's gallery in Paris in April 1892.
Whatever the venue, there can be no doubt that 1892 was a pivotal year for O'Conor because he was deeply moved and inspired, for the very first time, by the gyrating web of parallel lines that Van Gogh superimposed on fields, trees and clouds in his St Rémy landscapes. O'Conor would later describe these pictures as "wonderful expressions of character pushed to the point of hallucination". The discovery had a far-reaching effect on the young painter, enabling him to progress rapidly beyond the relatively conventional naturalism of The Cider Drinker (Queensland Art Gallery), and devise a more personal response to Vincent's dynamically configured compositions. The tentatively hatched and feathered brushstrokes of Still Life with Bottles (London, Tate Gallery) soon gave way to the bolder mark-making of Flowers, bottle and two jugs, in which the 'stripe' has attained its fully evolved state for the first time.
Having inaugurated the method successfully in a still life, O'Conor went on to apply it with equal daring to landscapes and figure subjects, thus establishing the highly original and modern style that distinguished his art up until the time of his meeting with Gauguin two years later. One third of O'Conor's eighteen surviving 'striped' pictures are vested in major museum collections around the world, leaving no more than a dozen still in private hands.
Jonathan Benington