Lot Essay
Josef Müller s'installe à Paris en 1922 et y restera pendant deux décennies. Il connaissait bien la ville pour y avoir vécu sporadiquement depuis le début du XXe siècle. C'est là que, jeune homme, il avait courageusement poussé la porte de la galerie d'Ambroise Vollard et acquis ses premiers tableaux de Cézanne. À dix-neuf ans, il avait également acquis son premier Picasso. Sa passion pour la peinture le hantera toute sa vie et son ambition de constituer une collection aussi magnifique qu'un Gesamtkunstwerk, ne s'éteindra jamais.
Pendant son séjour à Paris, Josef Müller tient de nombreux carnets dans lesquels il inscrit méticuleusement ses achats d'œuvres d'art, qui sont multiples et variés : peintures modernes, sculptures gréco-romaines, art asiatique. Alors qu'ils sont moins fréquents et peu significatifs au cours des années 1920, c'est à partir du milieu des années 1930 que ses acquisitions d'œuvres d'art africain apparaissent régulièrement dans ses carnets. La première mention d'un certain « Morice » date de 1937. Ce n’est qu’en 1938, que le nom d'Antony Moris apparaît plus régulièrement. L'orthographe de son nom étant désormais corrigée, c’est le signe d'une plus grande familiarité avec un homme dont l'histoire en tant que marchand est peu connue, mais dont l'activité est parmi les plus florissantes de l'époque. Ancien policier, Antony Moris, également appelé « Père Moris » par ses contemporains, renonce au service administratif en 1913, et ouvre une boutique rue Victor-Masset. Moris est devenu par la suite l'un des plus importants marchands d'ethnographie de son époque, une source incontournable pour tous les collectionneurs avertis. Sa collection a été dispersée de son vivant, une partie ayant été acquise par l'omniprésent Charles Ratton et la plus grande partie par Pierre Vérité, qui allait bientôt devenir l'un des proches de Josef Müller.
Cette tête Fang représente l'acquisition la plus importante de Josef Müller auprès d'Antony Moris. En tant que telle, elle couronne l'ensemble de sa collection. Nous pourrions être tentés de dire qu'il s'agit également de l'œuvre d'art africain la plus importante qu’Antony Moris n’ait jamais vendue au cours de sa carrière de marchand, une pièce à laquelle son nom pourrait être associé pour l'histoire future, tout comme nous parlons aujourd'hui de la « tête Brümmer » ou du « Grand Byeri », en hommage à l'œil, au goût et à la connaissance d'un marchand ou d’un collectionneur remarquable.
La tête se distingue par son élégance : un jeu subtil de lignes convexes et concaves et un souci du détail unique, dont témoigne éloquemment le splendide rendu de la coiffure à l'arrière de la tête. Cette tête étonne également par ses yeux hypnotiques et, sur le plan sculptural, par la combinaison habile de caractéristiques naturalistes et d'un rendu abstrait.
Cet élégant portrait porte la signature invisible d'un artiste unique. Il s'impose sans conteste comme l'un des plus raffinés de sa catégorie, aux côtés de quelques-uns des plus emblématiques. Dans le groupe restreint des autres têtes de Fang Betsi connues, elle est particulièrement proche par son style et son rendu de deux autres œuvres : l'une faisant partie de la collection du musée du quai Branly-Jacques Chirac, l'autre connue sous le nom historique de "tête Brummer" de la collection Dapper. Une autre œuvre de parenté plus lointaine mais suffisamment proche dans le style pour être citée, anciennement dans la collection de Claude Berri, a été récemment vendue aux enchères.
Josef Müller settled in Paris in 1922 and was to remain there for two decades. He knew the city well as he had sporadically lived there since the early XXth century. Here, as a young man, he had courageously walked into Ambroise Vollard’s gallery and acquired his first Cézanne paintings. As a young man of nineteen he had also acquired his first Picasso. His passion for painting was to haunt him relentlessly his entire life, and his ambition to build a collection as magnificent as a Gesamtkunstwerk would never dwindle.
During his time spent in Paris Josef Müller kept numerous notebooks in which he meticulously inscribed his purchases of art, reflecting his multiple interest in modern paintings, Greco-Roman sculpture or Asian art. While less frequent and rather unsignificant during the 1920s, it is from the mid-1930s on that his acquisitions of African art works appear regularly in his notebooks. The first mention in the notebooks of a certain “Morice” dates from 1937. By 1938 the name of Antony Moris appears regularly, the spelling of his name now corrected, a sign of greater familiarity with a man whose history as a dealer is little known, but whose activity was among the most buoyant of the period. A former policeman, Antony Moris, also called “Father Moris” by his contemporaries, renounced administrative service in 1913 and opened a boutique in the rue Victor-Masset. Moris became one of the most important ethnographic dealers of his time, a valuable source for all connoisseur collectors. His collection was dispersed in his lifetime, parts of which were acquired then by the ubiquitous Charles Ratton while most of it was acquired by Pierre Vérité, soon to become also one of Josef Müller’s close acquaintances.
The present Fang head was Josef Müller’s most significant purchase with Antony Moris. As such, it crowns his entire collection and unmistakably represents his most exceptional purchase of African art tout court. One might be tempted to say this was also the most significant African art work Antony Moris ever sold in his career as a dealer, a piece his name could be connected with for future history, in as much as we speak today of the “Brummer head” or the “Big Byeri”, in homage to a dealer’s or collector’s eye, goût and connoisseurship.
The head stands out through its elegance : a subtle interplay of convex and concave lines and a unique attention to detail, the latter eloquently witnessed by the splendid rendering of the coiffure at the back of the head. It further astonishes visually with its hypnotic eyes, and sculpturally, the combination of both naturalistic features and abstract rendering.
This elegant portrait bears the invisible signature of a unique artist. It undoubtedly excels as one of the most refined in its category alongside some of the most iconic ones. Within the narrow group of other known Fang Betsi heads, it is particularly close in style and rendering to two other works: one part of the collection of the musée du quai Branly - Jacques Chirac, the other known as the historical “Brummer head” from the Dapper collection. A further work of more distant kinship but still close enough in style to be cited, formerly in the collection of Claude Berri, was recently sold on the market.
Pendant son séjour à Paris, Josef Müller tient de nombreux carnets dans lesquels il inscrit méticuleusement ses achats d'œuvres d'art, qui sont multiples et variés : peintures modernes, sculptures gréco-romaines, art asiatique. Alors qu'ils sont moins fréquents et peu significatifs au cours des années 1920, c'est à partir du milieu des années 1930 que ses acquisitions d'œuvres d'art africain apparaissent régulièrement dans ses carnets. La première mention d'un certain « Morice » date de 1937. Ce n’est qu’en 1938, que le nom d'Antony Moris apparaît plus régulièrement. L'orthographe de son nom étant désormais corrigée, c’est le signe d'une plus grande familiarité avec un homme dont l'histoire en tant que marchand est peu connue, mais dont l'activité est parmi les plus florissantes de l'époque. Ancien policier, Antony Moris, également appelé « Père Moris » par ses contemporains, renonce au service administratif en 1913, et ouvre une boutique rue Victor-Masset. Moris est devenu par la suite l'un des plus importants marchands d'ethnographie de son époque, une source incontournable pour tous les collectionneurs avertis. Sa collection a été dispersée de son vivant, une partie ayant été acquise par l'omniprésent Charles Ratton et la plus grande partie par Pierre Vérité, qui allait bientôt devenir l'un des proches de Josef Müller.
Cette tête Fang représente l'acquisition la plus importante de Josef Müller auprès d'Antony Moris. En tant que telle, elle couronne l'ensemble de sa collection. Nous pourrions être tentés de dire qu'il s'agit également de l'œuvre d'art africain la plus importante qu’Antony Moris n’ait jamais vendue au cours de sa carrière de marchand, une pièce à laquelle son nom pourrait être associé pour l'histoire future, tout comme nous parlons aujourd'hui de la « tête Brümmer » ou du « Grand Byeri », en hommage à l'œil, au goût et à la connaissance d'un marchand ou d’un collectionneur remarquable.
La tête se distingue par son élégance : un jeu subtil de lignes convexes et concaves et un souci du détail unique, dont témoigne éloquemment le splendide rendu de la coiffure à l'arrière de la tête. Cette tête étonne également par ses yeux hypnotiques et, sur le plan sculptural, par la combinaison habile de caractéristiques naturalistes et d'un rendu abstrait.
Cet élégant portrait porte la signature invisible d'un artiste unique. Il s'impose sans conteste comme l'un des plus raffinés de sa catégorie, aux côtés de quelques-uns des plus emblématiques. Dans le groupe restreint des autres têtes de Fang Betsi connues, elle est particulièrement proche par son style et son rendu de deux autres œuvres : l'une faisant partie de la collection du musée du quai Branly-Jacques Chirac, l'autre connue sous le nom historique de "tête Brummer" de la collection Dapper. Une autre œuvre de parenté plus lointaine mais suffisamment proche dans le style pour être citée, anciennement dans la collection de Claude Berri, a été récemment vendue aux enchères.
Josef Müller settled in Paris in 1922 and was to remain there for two decades. He knew the city well as he had sporadically lived there since the early XXth century. Here, as a young man, he had courageously walked into Ambroise Vollard’s gallery and acquired his first Cézanne paintings. As a young man of nineteen he had also acquired his first Picasso. His passion for painting was to haunt him relentlessly his entire life, and his ambition to build a collection as magnificent as a Gesamtkunstwerk would never dwindle.
During his time spent in Paris Josef Müller kept numerous notebooks in which he meticulously inscribed his purchases of art, reflecting his multiple interest in modern paintings, Greco-Roman sculpture or Asian art. While less frequent and rather unsignificant during the 1920s, it is from the mid-1930s on that his acquisitions of African art works appear regularly in his notebooks. The first mention in the notebooks of a certain “Morice” dates from 1937. By 1938 the name of Antony Moris appears regularly, the spelling of his name now corrected, a sign of greater familiarity with a man whose history as a dealer is little known, but whose activity was among the most buoyant of the period. A former policeman, Antony Moris, also called “Father Moris” by his contemporaries, renounced administrative service in 1913 and opened a boutique in the rue Victor-Masset. Moris became one of the most important ethnographic dealers of his time, a valuable source for all connoisseur collectors. His collection was dispersed in his lifetime, parts of which were acquired then by the ubiquitous Charles Ratton while most of it was acquired by Pierre Vérité, soon to become also one of Josef Müller’s close acquaintances.
The present Fang head was Josef Müller’s most significant purchase with Antony Moris. As such, it crowns his entire collection and unmistakably represents his most exceptional purchase of African art tout court. One might be tempted to say this was also the most significant African art work Antony Moris ever sold in his career as a dealer, a piece his name could be connected with for future history, in as much as we speak today of the “Brummer head” or the “Big Byeri”, in homage to a dealer’s or collector’s eye, goût and connoisseurship.
The head stands out through its elegance : a subtle interplay of convex and concave lines and a unique attention to detail, the latter eloquently witnessed by the splendid rendering of the coiffure at the back of the head. It further astonishes visually with its hypnotic eyes, and sculpturally, the combination of both naturalistic features and abstract rendering.
This elegant portrait bears the invisible signature of a unique artist. It undoubtedly excels as one of the most refined in its category alongside some of the most iconic ones. Within the narrow group of other known Fang Betsi heads, it is particularly close in style and rendering to two other works: one part of the collection of the musée du quai Branly - Jacques Chirac, the other known as the historical “Brummer head” from the Dapper collection. A further work of more distant kinship but still close enough in style to be cited, formerly in the collection of Claude Berri, was recently sold on the market.