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« Plutôt que de mouvement, je préfère parler de tension. Et de rythme, oui. On peut aussi parler de forme : une mise en forme de la matière et de la lumière. » - Pierre Soulages
Peinture 130 x 97 cm, 18 février 1969 de Pierre Soulages est une œuvre empreinte de luminosité, de résonance et d’immobilité. Trois larges touches sombres et droites occupent une grande partie de la toile verticale. Les intervalles entre elles révèlent les éclairs rythmiques du fond blanc cassé, ainsi qu’un large aplat de pigment sépia dilué. La zone claire à gauche apparaît comme une fenêtre d’une transparence encore plus délicate, tandis que l’obscurité en haut à droite confère à la composition un poids quasi-architectural. Soulages ne cherche pas à enregistrer le mouvement ou l’émotion dans ses coups de pinceau : il organise les contrastes en une surface unique et forte qui doit être appréhendée dans sa totalité, tel un signe calligraphique. Avec sa forme guidée uniquement par les qualités innées de son support, cette œuvre fait écho à la phrase du plasticien : « Je ne dépeins pas, je peins. Je ne représente pas, je présente. » (Pierre Soulages, cité dans “Peindre la peinture”, Pierre Soulages : Outrenoir : Entretiens avec Françoise Jaunin, Lausanne, 2014, p. 16).
James Johnson Sweeney, l’un des premiers défenseurs de Soulages lorsqu’il était conservateur du Solomon R. Guggenheim Museum dans les années 1950, écrivait : « une peinture de Pierre Soulages est comme un accord sur un vaste piano frappé avec les deux mains simultanément – frappé et tenu. » (James Johnson Sweeney, Pierre Soulages, New York 1972, p. 5). Cette analogie rend compte de l’impact durable et singulier de l’œuvre de Soulages. L’accord se distingue de la mélodie : contrairement aux séquences gestuelles de nombreuses peintures expressionnistes abstraites, Peinture 130 x 97 cm, 18 février 1969 n’offre aucun itinéraire à suivre, aucun récit lyrique des sentiments de l’artiste déversés sur la toile. Il s’agit plutôt d’une surface contenue et résonnante, d’une énergie structurelle et chromatique globale. Soulages ne planifiait pas ses compositions, mais réagissait à la peinture qui se trouvait devant lui, travaillant directement avec sa viscosité, sa translucidité et sa tonalité pour assembler une présence cohérente. Il recherche la grandeur profonde et intemporelle de l’art roman et paléolithique qui l’a inspiré dans sa jeunesse.
Soulages réalise pour la première fois des ‘compositions linéaires unifiées’ en 1947, incarnant ainsi le principe directeur de son art : si une ligne n’enregistre pas la durée de sa réalisation, le temps s’arrête et le mouvement se transforme en tension dynamique. Tout au long des années 1950, il expérimente les effets de clair-obscur et les faisceaux de peinture sombres et imbriqués, créant des couleurs complexes et translucides en grattant les couches d’empâtement. La décennie suivante est dominée par des silhouettes noires anguleuses : Soulages perfectionne alors l’immobilité et l’intégrité structurelle de ses peintures. La fin des années 1960 et le début des années 1970 cèdent la place à des œuvres assurées et lucides : l’artiste réduit sa palette à un vocabulaire de bruns, de noirs et de blancs d’os chauds, dignes d’un vieux maître. Le nombre et la diversité de ses traits s’affinent en même temps qu’ils s’amplifient, et les myriades d’interactions de ses matériaux avec la lumière sont exploitées avec toujours plus d’intensité et de contraste. Anticipant la simplicité ultime des toiles entièrement noires de l’Outrenoir – commencées en 1979 –, c’est dans cette période de relative clarté que s’inscrit Peinture 130 x 97 cm, 18 février 1969.
‘’Rather than movement, I prefer to talk of tension. And rhythm, yes. We can also say form: a shaping of matter and light.’’ - Pierre Soulages
Pierre Soulages’ Peinture 130 x 97 cm, 18 février 1969 is a painting of luminosity, resonance and stillness. Three broad, dark, upright strokes consume much of the vertical canvas. Gaps in between them reveal rhythmic flashes of the off-white ground beneath, and a wide sweep of dilute, sepia pigment. The clear area to the left is a window of still more delicate translucency, while further darkness at the upper right lends the composition an architectural weight. Soulages does not aim to record movement or emotion in his brushstrokes: he instead arranges contrasts into a single, forceful surface that is to be apprehended in its totality, like a calligraphic sign. With its form guided solely by the innate qualities of its medium, the present work exemplifies Soulages’ statement that ‘’I do not depict, I paint. I do not represent, I present.’’ (P. Soulages, quoted in ‘Peindre la peinture’, Pierre Soulages: Outrenoir: Entretiens avec Françoise Jaunin, Lausanne, 2014, p. 16)
James Johnson Sweeney, an early champion of Soulages while curator of the Solomon R. Guggenheim Museum in the 1950s, wrote memorably that ‘’A painting by Pierre Soulages is like a chord on a vast piano struck with both hands simultaneously—struck and held.’’ (J. Johnson Sweeney, Pierre Soulages, New York 1972, p. 5). This simile captures the sustained, singular impact of Soulages’ work. Chord is distinct from melody: unlike the gestural sequences of many Abstract Expressionist paintings, Peinture 130 x 97 cm, 18 février 1969 offers no itinerary to follow, no lyrical anecdote of the artist’s feelings poured or splashed onto the canvas. It is instead a contained, resonant surface of overall structural and chromatic energy. Soulages did not plan compositions but responded to the paint in front of him, working directly with its viscosity, translucency and tone to assemble a cohesive presence. He sought the profound, timeless grandeur of the Romanesque and palaeolithic art that had inspired him as a youth.
Soulages first made unified, linear compositions in 1947, realising in them the guiding principle of his art: if a line did not record the duration of its making, time was brought to a standstill, and movement transformed into dynamic tension. He experimented with chiaroscuro effects and dark, interlocking beams of paint throughout the 1950s, eventually creating complex, translucent colour in his works through scraping away layers of impasto. Stark, angular black silhouettes dominated the following decade as Soulages honed his paintings’ stillness and structural integrity, before giving way to the assured, lucid works of the late 1960s and early 1970s. He dialled back his palette to a vocabulary of warm, Old Masterly browns, blacks and bone-whites. The number and diversity of his strokes was refined as their breadth was amplified, and his materials’ myriad interactions with light were exploited to ever greater intensity and contrast. Anticipating the ultimate, breakthrough simplicity of the all-black Outrenoir canvases commenced in 1979, it is to this period of poised clarity that Peinture 130 x 97 cm, 18 février 1969 belongs.
Peinture 130 x 97 cm, 18 février 1969 de Pierre Soulages est une œuvre empreinte de luminosité, de résonance et d’immobilité. Trois larges touches sombres et droites occupent une grande partie de la toile verticale. Les intervalles entre elles révèlent les éclairs rythmiques du fond blanc cassé, ainsi qu’un large aplat de pigment sépia dilué. La zone claire à gauche apparaît comme une fenêtre d’une transparence encore plus délicate, tandis que l’obscurité en haut à droite confère à la composition un poids quasi-architectural. Soulages ne cherche pas à enregistrer le mouvement ou l’émotion dans ses coups de pinceau : il organise les contrastes en une surface unique et forte qui doit être appréhendée dans sa totalité, tel un signe calligraphique. Avec sa forme guidée uniquement par les qualités innées de son support, cette œuvre fait écho à la phrase du plasticien : « Je ne dépeins pas, je peins. Je ne représente pas, je présente. » (Pierre Soulages, cité dans “Peindre la peinture”, Pierre Soulages : Outrenoir : Entretiens avec Françoise Jaunin, Lausanne, 2014, p. 16).
James Johnson Sweeney, l’un des premiers défenseurs de Soulages lorsqu’il était conservateur du Solomon R. Guggenheim Museum dans les années 1950, écrivait : « une peinture de Pierre Soulages est comme un accord sur un vaste piano frappé avec les deux mains simultanément – frappé et tenu. » (James Johnson Sweeney, Pierre Soulages, New York 1972, p. 5). Cette analogie rend compte de l’impact durable et singulier de l’œuvre de Soulages. L’accord se distingue de la mélodie : contrairement aux séquences gestuelles de nombreuses peintures expressionnistes abstraites, Peinture 130 x 97 cm, 18 février 1969 n’offre aucun itinéraire à suivre, aucun récit lyrique des sentiments de l’artiste déversés sur la toile. Il s’agit plutôt d’une surface contenue et résonnante, d’une énergie structurelle et chromatique globale. Soulages ne planifiait pas ses compositions, mais réagissait à la peinture qui se trouvait devant lui, travaillant directement avec sa viscosité, sa translucidité et sa tonalité pour assembler une présence cohérente. Il recherche la grandeur profonde et intemporelle de l’art roman et paléolithique qui l’a inspiré dans sa jeunesse.
Soulages réalise pour la première fois des ‘compositions linéaires unifiées’ en 1947, incarnant ainsi le principe directeur de son art : si une ligne n’enregistre pas la durée de sa réalisation, le temps s’arrête et le mouvement se transforme en tension dynamique. Tout au long des années 1950, il expérimente les effets de clair-obscur et les faisceaux de peinture sombres et imbriqués, créant des couleurs complexes et translucides en grattant les couches d’empâtement. La décennie suivante est dominée par des silhouettes noires anguleuses : Soulages perfectionne alors l’immobilité et l’intégrité structurelle de ses peintures. La fin des années 1960 et le début des années 1970 cèdent la place à des œuvres assurées et lucides : l’artiste réduit sa palette à un vocabulaire de bruns, de noirs et de blancs d’os chauds, dignes d’un vieux maître. Le nombre et la diversité de ses traits s’affinent en même temps qu’ils s’amplifient, et les myriades d’interactions de ses matériaux avec la lumière sont exploitées avec toujours plus d’intensité et de contraste. Anticipant la simplicité ultime des toiles entièrement noires de l’Outrenoir – commencées en 1979 –, c’est dans cette période de relative clarté que s’inscrit Peinture 130 x 97 cm, 18 février 1969.
‘’Rather than movement, I prefer to talk of tension. And rhythm, yes. We can also say form: a shaping of matter and light.’’ - Pierre Soulages
Pierre Soulages’ Peinture 130 x 97 cm, 18 février 1969 is a painting of luminosity, resonance and stillness. Three broad, dark, upright strokes consume much of the vertical canvas. Gaps in between them reveal rhythmic flashes of the off-white ground beneath, and a wide sweep of dilute, sepia pigment. The clear area to the left is a window of still more delicate translucency, while further darkness at the upper right lends the composition an architectural weight. Soulages does not aim to record movement or emotion in his brushstrokes: he instead arranges contrasts into a single, forceful surface that is to be apprehended in its totality, like a calligraphic sign. With its form guided solely by the innate qualities of its medium, the present work exemplifies Soulages’ statement that ‘’I do not depict, I paint. I do not represent, I present.’’ (P. Soulages, quoted in ‘Peindre la peinture’, Pierre Soulages: Outrenoir: Entretiens avec Françoise Jaunin, Lausanne, 2014, p. 16)
James Johnson Sweeney, an early champion of Soulages while curator of the Solomon R. Guggenheim Museum in the 1950s, wrote memorably that ‘’A painting by Pierre Soulages is like a chord on a vast piano struck with both hands simultaneously—struck and held.’’ (J. Johnson Sweeney, Pierre Soulages, New York 1972, p. 5). This simile captures the sustained, singular impact of Soulages’ work. Chord is distinct from melody: unlike the gestural sequences of many Abstract Expressionist paintings, Peinture 130 x 97 cm, 18 février 1969 offers no itinerary to follow, no lyrical anecdote of the artist’s feelings poured or splashed onto the canvas. It is instead a contained, resonant surface of overall structural and chromatic energy. Soulages did not plan compositions but responded to the paint in front of him, working directly with its viscosity, translucency and tone to assemble a cohesive presence. He sought the profound, timeless grandeur of the Romanesque and palaeolithic art that had inspired him as a youth.
Soulages first made unified, linear compositions in 1947, realising in them the guiding principle of his art: if a line did not record the duration of its making, time was brought to a standstill, and movement transformed into dynamic tension. He experimented with chiaroscuro effects and dark, interlocking beams of paint throughout the 1950s, eventually creating complex, translucent colour in his works through scraping away layers of impasto. Stark, angular black silhouettes dominated the following decade as Soulages honed his paintings’ stillness and structural integrity, before giving way to the assured, lucid works of the late 1960s and early 1970s. He dialled back his palette to a vocabulary of warm, Old Masterly browns, blacks and bone-whites. The number and diversity of his strokes was refined as their breadth was amplified, and his materials’ myriad interactions with light were exploited to ever greater intensity and contrast. Anticipating the ultimate, breakthrough simplicity of the all-black Outrenoir canvases commenced in 1979, it is to this period of poised clarity that Peinture 130 x 97 cm, 18 février 1969 belongs.