Edgar Degas (1834-1917)
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Provenant d'une importante collection privée
Edgar Degas (1834-1917)

Physionomie de criminel

Details
Edgar Degas (1834-1917)
Physionomie de criminel
signé 'Degas' (en bas à droite); avec le cachet de l'atelier 'ATELIER ED. DEGAS' (au revers du carton d'artiste; Lugt 657)
pastel et fusain sur papier monté sur carton d'artiste
47.8 x 63.2 cm.
Exécuté en 1881

signed 'Degas' (lower right); stamped 'ATELIER ED. DEGAS' (on the reverse of the artist's board; Lugt 657)
pastel and charcoal on paper mounted on the artist's board
18 ¾ x 24 ¾ in.
Executed in 1881
Provenance
Atelier de l'artiste; sa deuxième vente, Mes Lair-Dubreuil et Delvigne, Galerie Georges Petit, Paris, 13 décembre 1918, lot 200 (titré 'Au tribunal: deux prévenus').
Ambroise Vollard, Paris (acquis au cours de cette vente).
Collection Monsieur D., France; sa vente, Mes Ader, Picard et Tajan, Paris, 22 mars 1979, lot 11.
Malborough Fine Art, Londres (en 1979).
Collection particulière (acquis auprès de celle-ci en 1979).
Collection particulière (par descendance); vente, Sotheby's, Londres, 24 juin 2015, lot 33.
Collection particulière, Royaume-Uni (acquis au cours de cette vente).
Acquis auprès de celle-ci par le propriétaire actuel en mars 2024.
Literature
J. Claretie, 'La Vie à Paris: Les Artistes indépendants', in La Vie à Paris, 1881.
H. Havard, 'L’Exposition des artistes indépendants', in Le Siècle, 3 avril 1881, p. 2.
'Un Domino, Échos de Paris', 3 avril 1881, in Le Gaulois, p. 1.
Vernay, 'Les Impressionnistes', 4 avril 1881, in Le Soir.
G. Geffroy, 'L’Exposition des artistes indépendants', in La Justice, 4 avril 1881, p. 3.
J. Durand, 'Échos du Jour', in La Presse, 4 avril 1881, p. 1.
'Echos de Paris' in L’Opinion, 5 avril 1881.
G. Goetschy, 'Exposition des artistes indépendants', in Le Voltaire, 5 avril 1881.
Gonzague-Privat, 'L’Exposition des artistes indépendants', in L’Événement, 5 avril 1881, p. 2.
A. Michel, 'Exposition des artistes indépendants', in Le Parlement, 5 avril 1881.
A. Dalligny, 'Les Indépendants: Sixième Exposition', in Le Journal des Arts, 8 avril 1881.
A. Silvestre, 'Sixième Exposition des artistes indépendants', in L’Estafette, 11 avril 1881, p. 3.
Enjoiras, 'Causerie artistique: Exposition des artistes indépendants', in L’Intransigeant, 12 avril 1881, p. 3.
'La Petite République française', in Petite Chronique, 14 avril 1881.
L. Enault, 'Chronique' in Moniteur des arts, 15 avril 1881.
Palette, 'Les Expositions particulières', in Paris-Moderne, 15 avril 1881, vol. I, p. 72, no. 4.
A. Valabrègue, 'Beaux-Arts: L’Exposition des impressionnistes', in La Revue littéraire et artistique, 15 avril 1881.
A. Silvestre, 'Le Monde des Arts: Sixième Exposition des artistes indépendants', in La Vie Moderne, 16 avril 1881.
C. Ephrussi, 'Exposition des Artistes Indépendants', in La Chronique des arts et de la curiosité, 16 avril 1881.
G. Geffroy, 'L'Exposition des artistes indépendants', in La Justice, 19 avril 1881, p. 3.
E. de Mont, 'L'Exposition de boulevard des Capucines', in La Civilisation, 21 avril 1881.
H. Trianon, 'Sixième Exposition de peinture par un groupe d’artistes: 35, boulevard des Capucines', in Le Constitutionnel, 24 avril 1881, p. 2.
Comtesse Louise, 'Lettres familières sur l’art: Salon de 1881', in La France nouvelle, mai 1881.
V. Champier, 'La Société des artistes indépendants', in L’Année artistique, 1881.
J.-K. Huysmans, 'L’Exposition des indépendants en 1881', in L’Art moderne, 1883, p. 249 et 250.
P.-A. Lemoisne, Degas et son œuvre, Paris, 1946, vol. II, p. 360, no. 639 (illustré, p. 361).
J. Bouret, Degas, Londres, 1965, p. 147.
in Gazette de l'Hotel Drouot, 16 mars 1979, vol. 88, no. 11, p. 8.
G. Schurr, 'Retour au Palais de l'Orsay' in Gazette de l'Hôtel Drouot, 30 mars 1979, vol. 88, no. 13, p. 2.
'Résultats de ventes' in Gazette de l'Hôtel Drouot, 9 avril 1979, vol. 88, no. 14, p. 10.
C. S. Moffett, R. Berson, B. Lee Williams et F. E. Wissman, The New Painting: Impressionism 1874-1886, San Francisco et Washington, 1986, p. 342, fig. 6 (illustré).
R. Gordon et A. Forge, Degas, Paris, 1988, p. 119 (illustré).
J. S. Boggs, Degas, Paris, Ottawa et New York, 1988, p. 208, 209 et 211, fig. 104 (illustré, p. 209).
D. Druick, 'La petite danseuse et les criminels: Degas moraliste?', in Degas inédit, 1988, p. 226, no. 2 (illustré).
H. Loyrette, Degas, Paris, 1991, p. 387 et 394.
J. S. Boggs et A. Maheux, Degas Pastels, Londres, 1992, p. 98-99, no. 30 (illustré en couleurs, p. 99).
C. S. Moffett, The New Painting: Impressionism 1874-1886, San Francisco et Washington, 1996, vol. I, p. 342 (illustré, fig. 6).
R. Berson, The New Painting: Impressionism 1874-1886, San Francisco et Washington, 1996, vol. II, p. 180, no. VI-18 (illustré, p. 190).
H. Buchanan, Edgar Degas and Ludovic Lepic: An Impressionist Friendship, 1997, Cleveland, vol. II, p. 84, fig. 43 (illustré).
R. Kendall, D. W. Druick et A. Beale, Degas and the Little Dancer, cat. exp., Londres, 1998, p. 79 (illustré, fig. 46).
C. Armstrong, A Degas Sketchbook, Los Angeles, 2000, p. 57 (illustré, fig. 16).
J. House, Impressionism, Paint and Politics, Londres, 2004, p. 138.
B. Granger, La psychiatrie à l'épreuve de la justice: contribution au débat, Paris, 2011, p. 116 (illustré).
A. Callen, Looking at Men: Art, Anatomy and the Modern Male Body, Londres, 2018, p. 78 (illustré en couleurs, fig. 2.14).
A. Eiling et E. Mongi-Vollmer, En Passant: Impressionism in Sculpture, Londres, 2020, p. 58 et 59, fig. 4 (illustré en couleurs).
Exhibited
Paris, 35 Boulevard des Capucines, 6ème exposition de peinture par Cassatt, Degas, Forain, Gauguin, Guillaumin, Morisot, Pissarro, Raffaelli, Rouart, Tillot, Vidal, Vignon, Zandomeneghi, avril-mai 1881, p. 4, no. 18.
Paris, Galerie Schmit, Degas, mai-juin 1975, p. 40, no. 20 (illustré en couleurs; titré 'Au tribunal. Deux prévenus').
Zurich, Kunsthaus et Tubingue, Kunsthalle, Degas, Portraits, décembre 1994-juin 1995, p. 356, no. 161 (illustré).
Venise, Palazzo Grassi, La Biennale di Venezia, 46. Esposizione Internazionale d'arte: identità e alterità, juin-octobre 1995, p. 149 et 152, no. II.136 (illustré en couleurs, p. 152).
Omaha, Joslyn Art Museum et Williamstown, Sterling, Degas and the Little Dancer, février-septembre 1998, p. 79 (illustré en couleurs, fig. 46).
Paris, Musée d'Orsay, Crime et châtiment, mars-juin 2010, p. 327, no. 406 (illustré en couleurs, ill. 342).
Further details
Présentée lors de la sixième exposition impressionniste en 1881, Physionomie de criminel (1880–81) s’impose comme l’une des œuvres les plus audacieuses de Degas—où la spontanéité du pastel devient un outil d’exploration des dilemmes moraux de son époque. Cette exposition marque un tournant décisif dans la réception critique de l’artiste : jusqu’alors ses scènes parisiennes, notamment celles représentant des danseuses, étaient souvent perçues comme empreintes de satire ou d’ironie. En dévoilant, en 1881, deux Physionomies de criminels aux côtés de la sculpture en cire Petite danseuse de quatorze ans—aujourd’hui célébrée à travers ses fontes posthumes en bronze—Degas renverse ces interprétations et affirme sa posture de naturaliste, observateur lucide du monde contemporain, à l’instar de ses homologues littéraires.
Le 27 août 1880, Degas assiste au procès de trois jeunes hommes accusés d’homicide, une affaire qui passionne la presse parisienne. Le principal accusé, Émile Abadie, âgé de vingt ans, avait déjà été jugé l’année précédente pour le meurtre de trois personnes—dont un vieux vendeur de journaux vivant près de l’appartement de Degas—et gracié en raison de son jeune âge. En août 1879, Michel Knobloch avoue un autre crime, impliquant Abadie et un complice, ce qui conduit à leur condamnation à perpétuité sur l’île du Diable, au large de la Guyane française. Degas suit l’affaire de près : il connaissait la victime de la rue Fontaine, et son ami Paul Valpinçon siège comme juré suppléant lors du second procès. Durant les audiences, Degas croque les visages des accusés à la craie noire, saisissant leurs traits et expressions dans l’attente du verdict (Druick, p. 98).
En plaçant La Petite danseuse de quatorze ans aux côtés des pastels Physionomie de criminel lors de l’exposition de 1881, Degas ne se contente pas de provoquer : il orchestre une véritable collision entre des catégories que le spectateur du XIXᵉ siècle s’efforçait de maintenir distinctes. La danseuse, façonnée par la discipline jusqu’à la grâce, vêtue de tissus réels, évolue dans un espace liminaire entre l’enfant et la poupée, entre l’innocence et le labeur. Les criminels, quant à eux, socialement désignés comme déviants, portent pourtant la dignité austère du portrait renaissant.
En juxtaposant ces figures, Degas ébranle les systèmes binaires qui classent les corps—innocent/coupable, art/crime. La danseuse se voit subtilement teintée d’une aura de culpabilité ; les accusés, eux, acquièrent une présence presque classique. Ce qui semblait immuable—la physionomie du visage humain—commence à vaciller.
Cette mise en regard radicale fut recréée en 1998 lors de l’exposition Degas and the Little Dancer (Joslyn Art Museum, Omaha ; Sterling and Francine Clark Art Institute, Williamstown), où le pastel présenté fut exposé aux côtés d’un exemplaire en bronze de La Petite danseuse de quatorze ans. Degas considérait ce pastel comme une œuvre d’une importance particulière, le conservant dans sa collection personnelle jusqu’à sa mort. Lors de la vente posthume de son atelier, il fut acquis par le célèbre marchand Ambroise Vollard. L’œuvre fut brièvement prêtée en 1994–1995 à la grande rétrospective consacrée aux portraits de Degas ainsi qu’à la Biennale de Venise, où elle suscita un vif intérêt de la part des chercheurs, des critiques et du public.
Odilon Redon conclut ses Réflexions sur la sixième exposition impressionniste par cet hommage empreint d’admiration : « M. Degas, sans conteste le plus grand artiste de ce groupe, est un Daumier avec une palette à la main. C’est la même observation profonde et sincère de la vie parisienne. ». Nulle part cette réflexion sur la physionomie humaine ne s’exprime avec autant de clarté que dans la confrontation audacieuse entre la danseuse et le criminel. Degas ne cherche pas à illustrer des types : il interroge les catégories elles-mêmes. La force de l’exposition ne réside pas dans une opposition entre grâce et monstruosité, mais dans la révélation de la frontière poreuse qui les sépare. Les mêmes codes visuels qui élèvent la ballerine régissent aussi le délinquant ; la discipline qui façonne le corps de l’enfant contraint également celui de l’accusé. Sous le regard de Degas, l’étude de la physionomie devient un prisme d’observation, une double lentille où se rejoignent les interrogations morales et sociales.

Exhibited at the sixth Impressionist exhibition in 1881, Physionomie de criminel (1880–81) stands among Degas’ most daring artistic statements—deploying the immediacy of pastel to probe the moral questions of his age. The exhibition marked a decisive shift in the artist’s critical reception: until then, his Parisian subjects, particularly his dancers, had often been interpreted as satirical or ironic. By unveiling, in 1881, two Physionomies de criminels alongside the wax sculpture Petite danseuse de quatorze ans—now celebrated through posthumous bronze casts—Degas dismantled these assumptions, asserting himself as a naturalist who confronted contemporary life with the same fearless acuity as his literary contemporaries.
On 27 August 1880, Degas attended the trial of three young men accused of homicide, a case that captivated the Parisian press. The alleged ringleader, twenty-year-old Émile Abadie, had been tried the previous year for the murder of three people—including an elderly newspaper seller near Degas’ apartment—and pardoned on account of his youth. In August 1879, Michel Knobloch confessed to another killing, implicating Abadie and an accomplice, resulting in life sentences on Devil’s Island, off the coast of French Guiana. Degas followed the case closely: he knew the murdered neighbour on Rue Fontaine, and his friend Paul Valpinçon served as a substitute juror at the second trial. During the proceedings, Degas sketched the accused in black chalk, capturing their physiognomies and expressions as they awaited judgment (Druick, p.98).
The two principal figures present a marked contrast: Abadie, dressed in dark attire, bears the resolute, austere features often associated with the hardened criminal type, while Knobloch, with his softer expression, and blue jacket, conveys a more theatrical presence, even suggesting the physiognomy of an actor (Druick, p.98). From these drawings, Degas developed three pastels, two of which were shown at the 1881 exhibition. The transformation of courtroom sketches into exhibitions works was in itself an audacious gesture, Degas demonstrated remarkable audacity: he retained contextual details—the coiffure of a lawyer, the braid of a gendarme’s uniform, the railing of the defendants’ box—but concentrated on physiognomy. As Douglas Druick has demonstrated, he exaggerated bone structure and deepened shadows, aging his sitters into embodiments of the “criminal type” theorised by contemporary criminologists.
The Abadie case raised questions that spoke directly to Degas’ concerns. Contemporary debates in criminology and social science sought to explain criminal behaviour through both physical and social models, but the contradictions exposed by the trial underscored the limitations of such theories. For Degas, deeply engaged with the study of human physiognomy, these uncertainties offered fertile ground for artistic exploration. True to the tradition of physiognomic studies, Degas’ pastels capture the physical traces of their deeds—the flickering glimmers of expression, the flesh marked by vice—echoing Géricault’s portraits of criminals and the insane (Wissman, p.342). Beyond criminological interest, the case provoked a broader controversy over naturalism and its supposed influence on criminal behaviour. Abadie and Gille had been recruited as extras in a January 1879 production of Zola’s
L’Assommoir at the Ambigu Theatre. (Loyrette, p.389). As Le Figaro noted, in pursuit of naturalism the director had scoured Parisian neighbourhoods to find unprecedented extras; remarkably, it was between these stage appearances that the young men carried out their crime.
When Degas placed
The Little Dancer of Fourteen Years alongside the Physionomie de criminel pastels in 1881, he orchestrated more than a provocation: he staged a collision of categories that nineteenth-century spectators were keen to keep separate. The dancer, disciplined into grace, clothed in real fabric, exists in the liminal space between child and doll, innocence and labor. The criminals, socially marked as deviant, carry the austere dignity of the Renaissance portrait. By juxtaposing these figures, Degas unsettled the binary systems that classify bodies—innocent/guilty, art/crime. The dancer acquires a faint taint of criminality; the accused unexpectedly embody classical presence. What had seemed stable—the physiognomy of the human face—begins to waver.
This radical pairing was recreated in 1998 at the exhibition
Degas and the Little Dancer (Joslyn Art Museum, Omaha; Sterling and Francine Clark Art Institute, Williamstown), where the present pastel was displayed beside a bronze cast of La Petite danseuse de quatorze ans. Degas himself regarded this pastel as a work of special importance, keeping it in his private collection throughout his life. At the posthumous sale of his estate, it was acquired by the legendary dealer Ambroise Vollard. It was briefly loaned in 1994–95 to the major Degas portrait retrospective and the Venice Biennale; it drew remarkable attention from scholars, critics, and public alike.
Odilon Redon concluded his
Réflexions on the sixth impressionist exhibition with this loving tribute: “Mr. Degas, the greatest artist of this group without doubt, is a Daumier with a palette in hand. It is the same profound and truthful observation of Parisian life.” (fig. 5) Nowhere was this reflection on the human physiognomy more clearly articulated than in the bold juxtaposition of the danseuse and the criminal. Degas was not illustrating types; he was interrogating the very categories themselves. The exhibition’s power lay not in contrasting grace with monstrosity, but in revealing the porous line between them. The same visual codes that elevate the ballerina also regulate the delinquent; the discipline shaping the child’s body also constrains the accused. In Degas’ hands, the study of physiognomy becomes a lens not only for observation, but a dual aperture that brings moral and social inquiry into a single focal point.

Brought to you by

Léa Bloch
Léa Bloch Specialist, Head of Sale

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