Bouchon de flûte Wusear Mundugumor
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Bouchon de flûte Wusear Mundugumor

Région du Bas-Sepik, Province Sepik oriental, Papouasie-Nouvelle-Guinée

Details
Bouchon de flûte Wusear Mundugumor
Région du Bas-Sepik, Province Sepik oriental, Papouasie-Nouvelle-Guinée
Hauteur : 42.5 cm. (16 ¾ in.)
Provenance
Collection Ragnar Lindahl (1888-1978), Rabaul-Helsingborg, acquis en 1931
Transmis par descendance
Michael Hamson, Rancho Palos Verdes, acquis auprès de cette dernière
Collection privée, Europe
Serge Schoffel, Bruxelles
Collection privée, Belgique, acquis auprès de ce dernier en 2018
Literature
Hamson, M. et al., Oceanic Art, 2013, p. 36, n° 17
Conru, K., Craig, B. et al., Sepik Ramu Art, Bruxelles, 2019, pp. 8, 176 et 177, n° 89
Coiffier, C., « Des sculptures de flûtes chez les Biwat de Papouasie-Nouvelle-Guinée », in Tribal Art Magazine, Arquennes, été 2025, n° 116, p. 85, n° 15
Exhibited
Bruxelles, Lempertz, Ancestral Visions. Papua New Guinea Art from the Sepik Ramu, 24 mai - 28 juin 2019
Further details
Mundugumor Wusear Flute Stopper, Lower Sepik Region, East Sepik Province, Papua New Guinea

Brought to you by

Alexis Maggiar
Alexis Maggiar International Head, African & Oceanic Art, Vice Chairman of Christie's France

Lot Essay

«[...] Soulevés d’une rage longuement contenue, les fétiches mundugumor s’égalent à tout ce que l’ambition humaine a pu rêver.
Ils sont l’image de la volonté absolue et de la puissance réservée qui s’exprime par sa décision dans cet instant unique où l’esprit flambe avant d’animer la lutte.»

Bounoure, V., « Les Mundugumor ou l’air des flûtes », in L’Œil, Paris, novembre 1967, n° 155

S’appuyant sur sa reconstitution historique du matériau anthropologique et de la documentation réunie par les anthropologues Margaret Mead et Reo Fortune en 1932, Nancy McDowell explique que les initiations dans la culture mundugumor (biwat) étaient organisées selon un schéma général impliquant « un individu, généralement un homme influent, [qui] parrainait chaque cérémonie afin de permettre aux initiés, en particulier ses fils, de voir pour la première fois les objets rituels et de les introduire dans le culte entourant l’objet spécifique ou la catégorie d’objets concernés (les détails de la cérémonie variant selon l’objet rituel mis à l’honneur) »
(McDowell, N., Mundugumor. From the Field Notes of Margaret Mead and Reo Fortune, Washington-Londres, 1991, p. 131).
L’un des rites initiatiques centraux que Mead et Fortune observèrent et documentèrent durant leur séjour de 1932 parmi les Biwat fut l’initiation ashin (crocodile), associée aux flûtes sacrées. « L’initiation ashin avait pour centre symbolique le crocodile. La flûte elle-même était appelée ashin (que je traduis par « crocodile ») et l’initiation mettait en scène un grand modèle de cet animal alors commun. […] Trois éléments essentiels composaient l’initiation du crocodile : la flûte, les tambours d’eau et un grand modèle de crocodile en rotin. Les tambours et le modèle étaient dits être des « mères crocodiles », et le tambour prêtait sa voix au modèle ; la flûte représentait l’enfant (toujours masculin), mais comme ces flûtes élaborées étaient rarement jouables, de plus petites flûtes, simples, servaient de voix à « l’enfant-flûte. […] ».

La flûte constituait le centre névralgique du rituel d’initiation ashin. Les flûtes rituelles mundugumor étaient des objets d’une grande sophistication qui, selon Mead, avaient été « développées et décorées à un point tel qu’elles tenaient davantage de l’idole que de l’instrument de musique, et étaient pratiquement injouables. Toute leur surface […] est incrustée de coquillages, et, à leur sommet, est fixée une petite figure sculptée à la tête énorme et au corps minuscule, sur laquelle une multitude de coquillages précieux ont été disposés » (Mead citée dans McDowell, ibid., pp. 135-137).

Leur révélation marquait l’apogée de la cérémonie, ainsi que Mead le souligna dans une description saisissante :
«[...] mais entrer et voir les flûtes sacrées, avec leurs longs et minces fûts incrustés de coquillages, surmontés d’une figurine à la tête immense, parée d’un diadème de nacre et d’innombrables ornements gracieux et précieux, au milieu desquels ses yeux de nacre étincellent - voilà une expérience d’une importance majeure »
(Mead, M., Sex and Temperament in Three Primitive Societies, New York, 1935, pp. 212-213).
Cependant, l’esthétique remarquable et la puissance expressive des bouchons de flûte ashin, communément appelés wusear, furent pour la première fois reconnues et véritablement célébrées d’une manière hautement poétique par l’auteur surréaliste Vincent Bounoure, dans un article qu’il publia en 1967 dans la revue L’Œil. Bounoure y associa avec emphase les bouchons de flûte mundugumor à un acte de représentation où il discernait une expression de vivacité et de présence sans équivalent dans aucune autre œuvre d’art connue.

Plus récemment, les contributions documentées de Christian Coiffier ont joué un rôle essentiel dans l’établissement d’une vue d’ensemble du corpus biwat, en identifiant et en contextualisant un nombre significatif de sculptures wusear (voir Coiffier, C., « Des sculptures de flûtes chez les Biwat de Papouasie-Nouvelle-Guinée », in Tribal Art Magazine, Arquennes, n° 116, pp. 78-98).
Aujourd’hui, les bouchons wusear demeurent parmi les créations les plus vénérées de l’art océanien. Bien que notre compréhension en soit moins poétique que celle de Bounoure, nous en reconnaissons volontiers le statut de chefs-d’œuvre suprêmes de l’art du Pacifique, et assurément d’œuvres statuaires les plus emblématiques de la sculpture papoue.
Si des catégories stylistiques distinctes peuvent refléter à la fois des interdépendances culturelles et/ou différentes périodes de création, seuls quelques rares exemplaires connus se distinguent par leur force plastique et leur antiquité. L’œuvre que nous présentons ici est de ce nombre. Par la subtilité du modelé du visage, la dimension contenue de la tête et ses proportions naturelles, la cohésion tendue des membres et du corps, la densité remarquable du bois dans lequel elle fut taillée, et si l’on en juge par la somme de ses qualités esthétiques et matérielles, elle compte assurément parmi les exemples les plus anciens et les plus impressionnants connus à ce jour. Le détail rare d’un oiseau stylisé sculpté à l’arrière de la tête accentue davantage l’unicité de la pièce. Elle n’a d’équivalents stylistiques que dans un petit nombre d’autres sculptures connues, parmi lesquelles il convient de mentionner notamment celle du Ethnologisches Museum de Berlin (inv. n° VI 55001) ; celle autrefois conservée dans la collection Marcia & John Friede, vendue chez Sotheby’s en 2010 (lot 89) ; celle du Náprstek National Museum de Prague ; ainsi que celle du Fowler Museum at UCLA (inv. n° X91.176).

“[...] Stirred by a long-contained rage, the Mundugumor fetishes stand on a par with all that human ambition has ever dared to dream.
They embody the image of absolute will and of restrained power, manifesting itself through decision in that unique instant when the spirit blazes forth before it kindles the struggle.”

Bounoure, V., “Les Mundugumor ou l’air des flûtes”, in L'Œil, Paris, November 1967, no. 155

Based on her historical reconstruction of anthropological material and documentation gathered by anthropologists Margaret Mead and Reo Fortune in 1932, Nancy McDowell explains that initiations in Mundugumor (Biwat) culture were organized following a general pattern which involved “an individual, usually an influential man, [who] sponsored each occasion to allow initiates, especially his sons, to view ritual objects for the first time and to induct them into the cult surrounding the specific object or category of object (details of the ceremony varied according to which ritual object was the focus)” (McDowell, N., Mundugumor. From the Field Notes of Margaret Mead and Reo Fortune, Washington-London, 1991, p. 131).
One of the central initiation rites which Mead and Fortune witnessed and documented during their stay in 1932 among the Biwat was the ashin (crocodile) initiation involving the sacred flutes. “The ashin initiation had as its symbolic centerpiece the crocodile. The flute itself was called ashin (which I translate as “crocodile”) and the initiation involved a large model of this then-common beast. […] There were three essential items in the crocodile initiation: the flute, water drums, and a large rattan model crocodile. The drums and model were said to be crocodile mothers, and the drum provided the voice for the model; the flute represented the child (always male), but because these elaborate flutes were rarely capable of being played, smaller plain flutes provided the voice for the flutechild. […]”

The flute was the centerpiece of the ashin initiation ritual. Mundugumor ritual flutes were elaborate objects, which, according to Mead, had been “developed and decorated to such an extent that they were more like idols than flutes and were virtually unplayable. The whole surface […] is encrusted with shells, and in the top is set a small carved figure with an enormous head and diminutive body upon which a great number of valuable shells have been arranged” (Mead cited in McDowell, ibid., pp. 135-137).

Their revelation marked the apex of the ceremony, as Mead further pointed out in her own compelling description:
“[…] but to enter and see the sacred flutes with their tall, thin shell-encrusted standards surmounted by a manikin figure with a huge head, wearing a diadem of shell and hundreds of graceful and valuable decorations from the midst of which its mother-of-pearl eyes gleam - this is an experience of major importance” (Mead, M., Sex and Temperament in three Primitive Societies, New York, 1935, pp. 212-213).

However, the remarkable aesthetics and powerful features of the ashin flute stoppers, commonly called wusear, was first recognized and truly celebrated in a highly poetical way by Surrealist author Vincent Bounoure in an article which he published in 1967 in the magazine L’Oeil. Here Bounoure emphatically associated Mundugumor flute stoppers with an act of representation in which he recognized an expression of vividness and presence, unparalleled by any other known work of art.

Of more recent date, Christian Coiffier’s documented contributions have been instrumental in establishing a panoramic view of the Biwat corpus, identifying and contextualizing a significant number of wusear sculptures (see Coiffier, C., “Flute Stoppers of the Biwat of Papua new Guinea”, in Tribal Art Magazine, Arquennes, no. 116, pp. 78-98).
Today, wusear stoppers remain among the most revered creations in Pacific art. Although our understanding of them is less poetic than Bounoure’s, we readily accept their status as crowing creations of Pacific art, and certainly as the most emblematic statuary within Papuan sculpture.
While distinct stylistic categories might reflect both cultural interdependencies and/or different periods of creation, only a handful of known examples stand out for their powerful aspect and antiquity. Our present work is one of them. With its subtle modeling of the face, the rather contained dimension of the head and natural proportions, the tense cohesion of limbs and body, the remarkable density of the wood it was carved from, judging thus by the sum of both its aesthetical and physical aspects, it certainly ranks among the most antique and impressive surviving examples. The rare detail of a stylized bird carved at the back of the head further enhances the piece’s uniqueness. It is akin in its style to only some other known sculptures, among which most noteworthy are: the one in the collection of the Ethnologisches Museum Berlin (inv. no. VI 55001), or the one formerly in the Marcia & John Friede collection, sold at Sotheby’s 2010, lot 89, the one form the Náprstek National Museum in Prague, or the one in the Fowler Museum at UCLA (inv. no. X91.176).

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