Lot Essay
Selon l’illustre et regretté spécialiste du Gabon, Louis Perrois, cette tête fang d’une rareté exceptionnelle représente l’effigie d’un ancêtre, utilisée dans le cadre des danses Ngan Ngom pratiquées dans le nord du Gabon et le nord-est du Río Muni.
Contrairement aux plus célèbres têtes de reliquaires fang, généralement revêtues d’une patine noire et résineuse, cet exemplaire présente des affinités plus marquées avec les masques Ngil fang, tant par sa morphologie que par sa structure et la texture de sa surface. Perrois invite d’ailleurs à confronter ces caractéristiques à celles d’autres exemplaires analogues, notamment le masque Ngil conservé au musée Barbier-Mueller de Genève1.
La cavité rectangulaire creusée à l’arrière du cou de cette tête servait vraisemblablement à l’insertion d’une tige de support.
La danse Ngan Ngom constitue une tradition ancestrale des Fang-Ntumu, porteuse d’une profonde valeur morale et sociale. Elle occupe une place essentielle dans la vie communautaire ainsi que dans la formation des jeunes générations.
La tête y revêt la fonction d’une marionnette figurant les ancêtres défunts, le blanc étant la couleur des esprits des morts. Les danses et les chants accompagnant son apparition transmettent proverbes et maximes, véritables fondements du tissu moral et social du groupe.
Comme l’a observé Jacques Binet2, ces têtes fang, utilisées comme marionnettes, « versent des idées nouvelles dans un moule ancien et dans une forme traditionnelle : on y conte des histoires d’amour impossibles, inconcevables au regard de la mentalité coutumière.
Sur les modes musicaux et chorégraphiques autrefois réservés aux mythes cosmogoniques, la tête qui semble surgir du fond des âges endosse le rôle de voyeur d’une comédie de Boulevard ». Binet remarque avec justesse qu’il est révélateur que la question du théâtre soit posée : « ces têtes paraissent désormais investies d’une fonction divertissante et théâtrale, sans que l’on y perçoive les dimensions mythiques ou rituelles plus profondes ».
Pour une tête presque identique, présentant un degré d’abstraction et une patine comparables, voir l’exemplaire conservé au Museu Etnològic i de Cultures del Món de Barcelone, acquis en 1957 dans la province du Woleu-Ntem lors de l’expédition d’August Panyella i Gómez (inv. n° 60-657).
1 Perrois, L., Arts du Gabon. Les arts plastiques du bassin de l’Ogooué, Arnouville, 1979, p. 106, n° 104.
2 Binet, J., Sociétés de danse chez les Fang du Gabon, Paris, 1972, pp. 46-48.
According to the illustrious and late Gabonese specialist Louis Perrois, this Fang head of exceptional rarity represents the effigy of an ancestor, used in the context of the Ngan Ngom dances performed in northern Gabon and the northeastern Río Muni.
Unlike the more famous Fang reliquary heads, generally coated with a black, resinous patina, this example shows closer affinities with the Fang Ngil masks, both in terms of its morphology and the structure and texture of its surface. Perrois indeed encourages comparing these features with those of other analogous examples, notably the Ngil mask preserved at the musée Barbier-Mueller in Geneva1. The rectangular cavity carved at the back of the neck of this head likely served for the insertion of a supporting rod.
The Ngan Ngom dance constitutes an ancestral tradition of the Fang-Ntumu, carrying profound moral and social significance. It occupies an essential place in communal life as well as in the education of the younger generations. Within this context, the head functions as a puppet representing deceased ancestors, white being the color of the spirits of the dead. The dances and songs accompanying its appearance transmit proverbs and maxims, the very foundations of the moral and social fabric of the group.
As Jacques Binet2 observed, these Fang heads, used as puppets, “pour new ideas into an ancient mold and within a traditional form: one tells stories of impossible love, inconceivable from the perspective of customary mentality. Set to musical and choreographic modes formerly reserved for cosmogonic myths, the head, which seems to emerge from the depths of time, assumes the role of a spectator of a Boulevard comedy.” Binet rightly notes that it is revealing that the question of theater arises: “these heads now appear invested with an entertaining and theatrical function, without one perceiving the deeper mythic or ritual dimensions.”
For a nearly identical head, exhibiting a comparable degree of abstraction and patina, see the example preserved at the Museu Etnològic i de Cultures del Món in Barcelona, acquired in 1957 in the Woleu-Ntem province during the expedition of August Panyella i Gómez (inv. no. 60-657).
1 Perrois, L., Arts du Gabon. Les arts plastiques du bassin de l’Ogooué, Arnouville, 1979, p. 106, no. 104.
2 Binet, J., Sociétés de danse chez les Fang du Gabon, Paris, 1972, pp. 46-48.
Contrairement aux plus célèbres têtes de reliquaires fang, généralement revêtues d’une patine noire et résineuse, cet exemplaire présente des affinités plus marquées avec les masques Ngil fang, tant par sa morphologie que par sa structure et la texture de sa surface. Perrois invite d’ailleurs à confronter ces caractéristiques à celles d’autres exemplaires analogues, notamment le masque Ngil conservé au musée Barbier-Mueller de Genève1.
La cavité rectangulaire creusée à l’arrière du cou de cette tête servait vraisemblablement à l’insertion d’une tige de support.
La danse Ngan Ngom constitue une tradition ancestrale des Fang-Ntumu, porteuse d’une profonde valeur morale et sociale. Elle occupe une place essentielle dans la vie communautaire ainsi que dans la formation des jeunes générations.
La tête y revêt la fonction d’une marionnette figurant les ancêtres défunts, le blanc étant la couleur des esprits des morts. Les danses et les chants accompagnant son apparition transmettent proverbes et maximes, véritables fondements du tissu moral et social du groupe.
Comme l’a observé Jacques Binet2, ces têtes fang, utilisées comme marionnettes, « versent des idées nouvelles dans un moule ancien et dans une forme traditionnelle : on y conte des histoires d’amour impossibles, inconcevables au regard de la mentalité coutumière.
Sur les modes musicaux et chorégraphiques autrefois réservés aux mythes cosmogoniques, la tête qui semble surgir du fond des âges endosse le rôle de voyeur d’une comédie de Boulevard ». Binet remarque avec justesse qu’il est révélateur que la question du théâtre soit posée : « ces têtes paraissent désormais investies d’une fonction divertissante et théâtrale, sans que l’on y perçoive les dimensions mythiques ou rituelles plus profondes ».
Pour une tête presque identique, présentant un degré d’abstraction et une patine comparables, voir l’exemplaire conservé au Museu Etnològic i de Cultures del Món de Barcelone, acquis en 1957 dans la province du Woleu-Ntem lors de l’expédition d’August Panyella i Gómez (inv. n° 60-657).
1 Perrois, L., Arts du Gabon. Les arts plastiques du bassin de l’Ogooué, Arnouville, 1979, p. 106, n° 104.
2 Binet, J., Sociétés de danse chez les Fang du Gabon, Paris, 1972, pp. 46-48.
According to the illustrious and late Gabonese specialist Louis Perrois, this Fang head of exceptional rarity represents the effigy of an ancestor, used in the context of the Ngan Ngom dances performed in northern Gabon and the northeastern Río Muni.
Unlike the more famous Fang reliquary heads, generally coated with a black, resinous patina, this example shows closer affinities with the Fang Ngil masks, both in terms of its morphology and the structure and texture of its surface. Perrois indeed encourages comparing these features with those of other analogous examples, notably the Ngil mask preserved at the musée Barbier-Mueller in Geneva1. The rectangular cavity carved at the back of the neck of this head likely served for the insertion of a supporting rod.
The Ngan Ngom dance constitutes an ancestral tradition of the Fang-Ntumu, carrying profound moral and social significance. It occupies an essential place in communal life as well as in the education of the younger generations. Within this context, the head functions as a puppet representing deceased ancestors, white being the color of the spirits of the dead. The dances and songs accompanying its appearance transmit proverbs and maxims, the very foundations of the moral and social fabric of the group.
As Jacques Binet2 observed, these Fang heads, used as puppets, “pour new ideas into an ancient mold and within a traditional form: one tells stories of impossible love, inconceivable from the perspective of customary mentality. Set to musical and choreographic modes formerly reserved for cosmogonic myths, the head, which seems to emerge from the depths of time, assumes the role of a spectator of a Boulevard comedy.” Binet rightly notes that it is revealing that the question of theater arises: “these heads now appear invested with an entertaining and theatrical function, without one perceiving the deeper mythic or ritual dimensions.”
For a nearly identical head, exhibiting a comparable degree of abstraction and patina, see the example preserved at the Museu Etnològic i de Cultures del Món in Barcelona, acquired in 1957 in the Woleu-Ntem province during the expedition of August Panyella i Gómez (inv. no. 60-657).
1 Perrois, L., Arts du Gabon. Les arts plastiques du bassin de l’Ogooué, Arnouville, 1979, p. 106, no. 104.
2 Binet, J., Sociétés de danse chez les Fang du Gabon, Paris, 1972, pp. 46-48.
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