Francis Picabia (1879-1953)
Artist's Resale Right ("droit de Suite"). If the … Read more
Francis Picabia (1879-1953)

Le retour de la pêche, les Martigues

Details
Francis Picabia (1879-1953)
Le retour de la pêche, les Martigues
signé et daté 'Picabia 1903' (en bas à droite)
huile sur toile
150 x 200 cm.
Peint en 1903

signed and dated 'Picabia 1903' (lower right)
oil on canvas
59 x 78 ¼ in.
Painted in 1903
Provenance
Collection Boulard de Villeneuve, France (en 1903).
François Léon Jouinot-Gambetta, France (avant 1923).
Madame François Léon Jouinot-Gambetta, France (par succession).
Collection particulière, France (acquis auprès de celle-ci).
Puis par descendance au propriétaire actuel.
Literature
L. Vauxcelles, 'Notes d'arts', in Gil Blas, 10 février 1905.
W. A. Camfield, B. et P. Calté, C. Clements et A. Pierre, Francis Picabia, catalogue raisonné, Paris, 2014, vol. I, p. 189, no. 81 (illustré en couleurs, p. 188).
Exhibited
Paris, Galeries Nationales du Grand Palais, Société des artistes français, mai 1903, no. 1410.
Paris, Galerie Haussman, Picabia, février 1905, p. 3, no. 15.
Special notice
Artist's Resale Right ("droit de Suite"). If the Artist's Resale Right Regulations 2006 apply to this lot, the buyer also agrees to pay us an amount equal to the resale royalty provided for in those Regulations, and we undertake to the buyer to pay such amount to the artist's collection agent.

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Natacha Muller
Natacha Muller

Lot Essay

Pour Francis Picabia, l’année 1903 est à marquer d’une pierre blanche. Il expose au Salon des Indépendants, au Salon de mai, au Salon d’automne et au Salon annuel du Cercle Volney. Ces apparitions publiques marquent un tournant dans sa carrière artistique: dès lors, il connaît un succès à la fois critique et financier. Picabia est enfin en mesure de s’assumer en tant qu’artiste professionnel, même si à l’époque sa peinture est grandement inspirée de Camille Pissarro, Alfred Sisley et Paul Signac. Il choisit de fuir la ville pour s’exiler à Moret et Villeneuve-sur-Yonne, plus au sud, deux villages pittoresques où il commence à expérimenter des couleurs plus
vives et un coup de pinceau plus libre et expressif.
En 1902, Picabia séjourne à Moret. S’il n’y fait pas la rencontre de Sisley, il tisse néanmoins une amitié fidèle avec le troisième fils de Pissarro, Georges (Manzana) Pissarro. En septembre 1902, ils voyagent ensemble à Martigues, avant d’être rejoints en novembre par Rodo, le frère de Georges (fig. 1). Dans une lettre destinée à son père, Camille Pissarro, Rodo évoque le génie de Picabia ainsi que sa technique innovante. Cette dernière consiste à s’aider de la photographie pour ses oeuvres. Rodo fait sans doute allusion dans cette lettre à la présente oeuvre, exposée par Picabia au Salon de la Société des artistes français de mars 1903. À son tour, Camille Pissarro écrit une lettre à son fils Lucien : «Nous venons de recevoir une lettre de Rodo, il paraît qu’il travaille beaucoup ainsi que Georges ; il me raconte qu’ils sont en compagnie d’un élève de Cormon. Ce garçon est extraordinaire, il fait des quantités d’études
sur nature par le procédé en usage dans les écoles, il ne fait qu’une séance, de cette façon il arrive à couvrir des quantités de bouts de toile, il ne tient aucun compte de l’air, de la lumière et il peint tout en brun uniforme !!! Dans le Midi !!! Quand il a ainsi fait quantité de ces croquis, il commence son tableau de Salon: une toile de deux mètres, après avoir fait par le moyen de la photographie le motif qui lui convient !!» (cité in J. Bailly-Herzberg, Correspondance de Camille Pissarro, Saint-Ouen-l’Aumône, 1991, vol. V p. 331).
Retour de pêche, les Martigues, aux dimensions imposantes et à la si belle luminosité, captive immédiatement les visiteurs du Salon, tenu à Paris au Grand Palais. Picabia ne tarde pas à saisir les opportunités commerciales associées à l’événement, et décide de faire réaliser des lithographies en couleurs de l’oeuvre, afin de la rendre accessible à tous (fig. 2). Georges Petit, alors directeur de la célèbre Galerie Charpentier, organise chaque année le Salon de la gravure en couleurs et expose cette lithographie dès 1906. Chaque épreuve, réalisée par Eugène Delâtre, y est vendue au prix de 80 francs (W.A. Camfield, B. et P. Calté, C. Cléments et A. Pierre, op. cit., p. 189, no. 83). Comme Pissarro et Sisley, Picabia cherche à rendre les nuances de l’éclairage et de l’atmosphère pour exprimer son admiration pour la nature-même, plutôt que de se borner à reproduire froidement les effets de la lumière sur les couleurs. La correspondance de la famille Pissarro constitue une source fascinante en matière de compréhension des techniques «modernes» employées par Picabia consistant à réaliser la toile dans son atelier après avoir croqué son sujet en plein air, puis l’avoir photographié. Cette méthode, radicalement différente de celles de ses prédécesseurs impressionnistes, aide le peintre à se libérer de la rigueur, aussi stricte qu’auto-infligée, qui caractérise jusque-là ses toiles. S’il porte toujours une attention particulière à la composition, à partir de 1903, il cherche et parvient à exprimer par son art des émotions plus vives et profondes.

1903 was a banner year for Francis Picabia. He exhibited at the Salon des Indépendants, the Salon de mai, the Salon d’automne and the Salon annuel du Cercle Volney, and these public appearances marked a turning point in the artist’s career, one which was to lead him to critical acclaim and financial success. Finally able to consider himself a professional artist, Picabia’s painting at this time was heavily indebted to Pissarro, Sisley and Signac. Choosing for his escape from the city the picturesque villages of Moret and, further south, Villeneuve-sur-Yonne, Picabia began to experiment with a brighter palette and afreer, more expressive brushstroke.
In 1902, Picabia was in Moret, and while he did not meet Sisley there, he did become fast friends with the third son of Camille Pissarro, Georges (Manzana) Pisssarro. In September 1902 they travelled together to Martigues, and in November were joined by Georges’ brother, Rodo (fig. 1). In a letter Rodo write to his father Camille Pissarro, he commented on Picabia’s genius, as well as his novel technique of using the aide of photography in his work. In this letter, Rodo was certainly commenting on the present work, that Picabia exhibited at the Salon organised by the Société des artistes francais in March 1903. In turn, Camille Pissarro wrote a letter to his son Lucien, recounting bits of family news from afar: ”We have just received a letter from Rodo… he tells me that they go around with a pupil of Cormon; this youth is extraordinary, he makes many studies from nature using the methods taught in the schools. In this way he is able to cover endless quantities of canvas without taking into account the air or the light, and he paints everything in a uniform brown! And that in the south! When he has made enough sketches this way, he addresses himself to his painting, for the Salon, a canvas of more than six feet, after having established his motif by means of photographs!" (cited in J. Bailly-Herzberg, Correspondance de Camille Pissarro, Saint-Ouen-l’Aumône, 1991, vol. V p. 331).
The present work - so large in scale and the subject matter so striking - was sure to capture the attention of visitors to the Salon (which was held in Paris at the Grand Palais). Picabia was quick to seize upon the potential commercial possibilities associated with exposing at the Salon, and also made an intaglio print of the present work, ultimately making his work accessible to a larger audience. Georges Petit, who directed the prominent Galerie Charpentier at the time, hosted an annual Print Fair (Salon de la Gravure en couleurs). The print for the present painting (fig. 2) was likely edited by Georges Petit shortly before its exposition in 1906. Each impression sold for 80 francs, and the printer was likely to be Eugène Delâtre (W.A. Camfield, B. and P. Calté, C. Cléments and A. Pierre,
op. cit., p. 189, no. 83). Like Pissarro and Sisley, Picabia explored the possibilities of light and atmosphere to express a closer affinity to nature itself, rather than merely describing the technical play of light and colour. The documentation via the Pissarro family correspondance is fascinating in the understanding of how Picabia used ‘modern’ techniques to facilitate his work, which is to say to take sketches of his subject en plein air and then to photograph the subject and complete the painting in his studio. A technique that differed radically from his Impressionist forebears. He was able to liberate himself also from his strict, self-imposed compositional rigors in order to express a deeper emotion in his art, while still maintaining an overriding interest in form and composition.

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