拍品專文
Un mystère entoure un ensemble de sculptures en bois de Polynésie Centrale, originaires d'un triangle formé par les îles de la Société, les îles Australes et les îles Cook. Toutes ces oeuvres rassemblées par Steven Hooper lors de l'exposition Pacific Encounters (Londres, 2006) semble poser plus de questions que de réponses. David King, dont le livre sur la London Missionary Society devrait être publié en même temps que ce catalogue, a vécu la même exprience, avec deux exceptions - voir le paragraphe 6 ci-dessous.
En 1796, quatre prêtres et vingt-six laïcs quittèrent l'Angleterre, à bord du Duff, pour convertir les insulaires de l'Océan Pacifique. Il s'agissait d'une entreprise privée organisée par la London Mission (plus tard la London Missionary Society (LMS)). Ils établirent des missions au Tonga, à Tahiti et aux îles Marquises, mais sans grand succès. Finalement, en 1812, ils baptisèrent Pomare II de Tahiti qui devint la base de leurs futures activités, avec Raiatea leur île préférée. C'est de Raiatea qu'A'a (inv. LMS19) rapportée de Rurutu en 1821 partie pour Londres et plus tard les trente et unes " idoles " d'Aitutaki. Ceci explique pourquoi les sculptures des Iles Australes et Cook furent incorrectement notées comme originaires des Iles de la Société.
Si on examine la sculpture Ohly, on remarque que son aspect général est très proche de celle du Museum der Kulturen (Vc 1521), Bâle, Suisse, avec les bras séparés du corps légèrement disproportionnés et tombant des épaules carrées, une tête ovoïde avec un menton triangulaire, un nez allongé et un front en forme de dôme. Ces deux statuettes sont sculptées sur un poteau, mais chacun d'une forme différente (Cf. Ed. Oliver Wick et Antje Denner, Visual Encounters, Fondation Beyeler, Bâle, 2009, Section IX, no.5). La figure de Bâle entra dans les collections du Museum der Kulturen en 1981 et provenait de la Mission de Bâle fondée en 1815. Son étiquette en allemand donnant sa provenance Tahitienne.
Une autre statuette, mieux connue, placée aussi sur un poteau et avec une position semblable, est conservée dans le Musée Hunterian, à Glasgow, (inv.E.360), (voir Peter Buck, Arts and Crafts of the Cook Islands, 1944, réimprimé en 1971, p.342, fig.212 et Steven Hooper, op. cit. no.197 et Visual Encounters, op. cit., no.4).
Les sculptures polynésiennes aux oreilles percées sont rares, mais on en retrouve de très similaires sur le personnage sculpté du chasse-mouche du British Museum, (BM TAH 137), avec une provenance tahitienne datée du XVIIIème siècle (Hooper, op.cit., p.175, fig.127). En fait la pose des mains sur l'abdomen, avec ou sans trois ou quatre doigts, est commune aux statuettes des Iles de la Société. On voit cette même caractéristique sur les figures des Iles Cook, comme celle d'Aitutaki au musée Ethnographique de Munich, (inv.190) qui possède le même abdomen allongé que celle d'Ohly (Beyeler, op.cit., Section IX, fig.2). L'expression contente, avec le traitement des yeux et de la bouche semblable à la sculpture Ohly, se retrouve à l'extrémité d'une poignée de chasse-mouche des îles Australe/De la Société au musée d'Histoire naturelle, Lille (Océanie, La découverte du paradis, Paris, 1997, p.160 et p.161, fig.145).
W.O. Oldman avait plusieurs statuettes énigmatiques dans sa collection qui sont maintenant en Nouvelle-Zélande. Dunedin a le n.436, censé représenter Terongo et ses trois fils, qu'Oldman acheta à E Little en 1922 (The Oldman Collection of Polynesian Artifacts, 2004, pl.4). William Ellis (Polynesian Researches, 1829, facsimile 1967, p.220 et frontispice vol II) attribue cette figure à Tahiti, mais Buck souligne ses similitudes avec le dessin grossier d'Aitutaki par John Williams (Missionary Enterprises, London, 1837, p.64). Le n.437 (pl.4), exposé également à Dunedin, pour lequel David King nous a gentiment dit qu'il avait trouvé la preuve dans les archives du L.M.S., l'école d'études Orientales et Africaines, (SOAS), Londres, qu'il fut rapporté par Williams, Bourne et Papeiha entre le 9 et 28 juillet 1823 d'Aitutaki, le même mois que la sculpture de Williams.
Ernest Ohly hérita en 1955 de la Berkeley Gallery, rue Davies à Londres, à la mort de son père, William. Né en 1920 à Francfort, il étudia en Suisse et rejoignit son père à Londres après la Guerre, travaillant à la galerie et vivant à Barnet parmi les artistes que son père avait rassemblé autour de lui, avec parmi eux beaucoup d'Australiens. Fondé par William en 1941, la galerie proposait des antiquités d'Extrême-Orient, des peintures, des sculptures mais aussi de l'art tribal et des céramiques modernes. Ceci est décrit dans Provenance Twelve Dealers and Collectors in England 1760-1990 (Waterfield et King, 2006 réédition 2010). Ernest dirigea la galerie jusqu'en 1977 et son intérêt pour l'art d'Extrême-Orient, l'art tribal et la céramique continua jusqu'à sa mort soudaine le 8 avril 2008. Il était un homme discret avec "un bon oeil", qui visitait les expositions des salles des ventes avec le sculpteur Gunther Bloch.
Sa famille possède l'inventaire fait par Ernest dans les années 1970, des choses rapportées à Blackheath. On y trouve le "No.33A Une statue Tahitienne sur pied, achetée à Hutchings, hauteur 21 in., avril 1958, 35 livres". Elle avait aussi un numéro de la galerie B445. Il n'y a pas de traces d'un missionnaire appelé Hutchings, mais il existe un Sidney Hutchins et un John J. K. Hutchin, ayant tous deux travaillé pour le L.M.S. à Rarotonga, aux îles Cook. Les archives du L.M.S conservent quelques rapports et lettres de Sidney Hutchins qui servi dans les annes 1920 et beaucoup de rapports et lettres de John J.K. Hutchin, qui servi pendant presque trois décennies à partir de 1882, parlait le Rarotonga couramment et ont traduit des textes. Lui et sa femme appréciaient la vie locale et entretenaient des relations amicales avec les habitants des Iles Cook.
Cependant le progrès n'était jamais direct. Hutchin écrit dans un rapport daté du 8 janvier 1904 : "Il y a toujours beaucoup de superstition et d'ignorance parmi eux... De même que les rayons du soleil lutte pour atteindre la terre, à travers l'épais buisson, la superstition, l'ignorance et la sensualité gênent l'accession à la vie spirituelle". L'alcool était terriblement néfaste pour les habitants, particulièrement au nord des Iles Cook. Le bateau de la Mission, le John Williams, visitait les Iles de la Société, les Iles Cook et Samoa régulièrement, mais aussi les Iles Australes, la Nouvelle-Zélande et la Nouvelle Guinée où il y avait des représentations de la mission.
La plupart des pasteurs étaient natifs de leur île ou d'une île adjacente, mais le lien entre tous les membres de la Mission était très fort. En 1916, un rapport anonyme des îles Cook au siège social LMS Londres annonça la mort d'un pasteur indigène, Obeda, à l'âge de 95 ans, le décrivant comme "le dernier survivant des îles du Sud des jours païens. Il est né l'année suivant l'introduction de l'évangile à Aitutaki et avant que John Williams ne découvre Rarotonga".
Comment Hutchin ou Hutchins ont acquis la figure est un mystère.
Ernest Ohly ne douta jamais de l'origine donnée à sa statue et nous regrettons seulement de ne pas en avoir plus discuté avec lui, au lieu de seulement l'admirer.
Au demeurant ses origines exactes restent une énigme.
En 1796, quatre prêtres et vingt-six laïcs quittèrent l'Angleterre, à bord du Duff, pour convertir les insulaires de l'Océan Pacifique. Il s'agissait d'une entreprise privée organisée par la London Mission (plus tard la London Missionary Society (LMS)). Ils établirent des missions au Tonga, à Tahiti et aux îles Marquises, mais sans grand succès. Finalement, en 1812, ils baptisèrent Pomare II de Tahiti qui devint la base de leurs futures activités, avec Raiatea leur île préférée. C'est de Raiatea qu'A'a (inv. LMS19) rapportée de Rurutu en 1821 partie pour Londres et plus tard les trente et unes " idoles " d'Aitutaki. Ceci explique pourquoi les sculptures des Iles Australes et Cook furent incorrectement notées comme originaires des Iles de la Société.
Si on examine la sculpture Ohly, on remarque que son aspect général est très proche de celle du Museum der Kulturen (Vc 1521), Bâle, Suisse, avec les bras séparés du corps légèrement disproportionnés et tombant des épaules carrées, une tête ovoïde avec un menton triangulaire, un nez allongé et un front en forme de dôme. Ces deux statuettes sont sculptées sur un poteau, mais chacun d'une forme différente (Cf. Ed. Oliver Wick et Antje Denner, Visual Encounters, Fondation Beyeler, Bâle, 2009, Section IX, no.5). La figure de Bâle entra dans les collections du Museum der Kulturen en 1981 et provenait de la Mission de Bâle fondée en 1815. Son étiquette en allemand donnant sa provenance Tahitienne.
Une autre statuette, mieux connue, placée aussi sur un poteau et avec une position semblable, est conservée dans le Musée Hunterian, à Glasgow, (inv.E.360), (voir Peter Buck, Arts and Crafts of the Cook Islands, 1944, réimprimé en 1971, p.342, fig.212 et Steven Hooper, op. cit. no.197 et Visual Encounters, op. cit., no.4).
Les sculptures polynésiennes aux oreilles percées sont rares, mais on en retrouve de très similaires sur le personnage sculpté du chasse-mouche du British Museum, (BM TAH 137), avec une provenance tahitienne datée du XVIIIème siècle (Hooper, op.cit., p.175, fig.127). En fait la pose des mains sur l'abdomen, avec ou sans trois ou quatre doigts, est commune aux statuettes des Iles de la Société. On voit cette même caractéristique sur les figures des Iles Cook, comme celle d'Aitutaki au musée Ethnographique de Munich, (inv.190) qui possède le même abdomen allongé que celle d'Ohly (Beyeler, op.cit., Section IX, fig.2). L'expression contente, avec le traitement des yeux et de la bouche semblable à la sculpture Ohly, se retrouve à l'extrémité d'une poignée de chasse-mouche des îles Australe/De la Société au musée d'Histoire naturelle, Lille (Océanie, La découverte du paradis, Paris, 1997, p.160 et p.161, fig.145).
W.O. Oldman avait plusieurs statuettes énigmatiques dans sa collection qui sont maintenant en Nouvelle-Zélande. Dunedin a le n.436, censé représenter Terongo et ses trois fils, qu'Oldman acheta à E Little en 1922 (The Oldman Collection of Polynesian Artifacts, 2004, pl.4). William Ellis (Polynesian Researches, 1829, facsimile 1967, p.220 et frontispice vol II) attribue cette figure à Tahiti, mais Buck souligne ses similitudes avec le dessin grossier d'Aitutaki par John Williams (Missionary Enterprises, London, 1837, p.64). Le n.437 (pl.4), exposé également à Dunedin, pour lequel David King nous a gentiment dit qu'il avait trouvé la preuve dans les archives du L.M.S., l'école d'études Orientales et Africaines, (SOAS), Londres, qu'il fut rapporté par Williams, Bourne et Papeiha entre le 9 et 28 juillet 1823 d'Aitutaki, le même mois que la sculpture de Williams.
Ernest Ohly hérita en 1955 de la Berkeley Gallery, rue Davies à Londres, à la mort de son père, William. Né en 1920 à Francfort, il étudia en Suisse et rejoignit son père à Londres après la Guerre, travaillant à la galerie et vivant à Barnet parmi les artistes que son père avait rassemblé autour de lui, avec parmi eux beaucoup d'Australiens. Fondé par William en 1941, la galerie proposait des antiquités d'Extrême-Orient, des peintures, des sculptures mais aussi de l'art tribal et des céramiques modernes. Ceci est décrit dans Provenance Twelve Dealers and Collectors in England 1760-1990 (Waterfield et King, 2006 réédition 2010). Ernest dirigea la galerie jusqu'en 1977 et son intérêt pour l'art d'Extrême-Orient, l'art tribal et la céramique continua jusqu'à sa mort soudaine le 8 avril 2008. Il était un homme discret avec "un bon oeil", qui visitait les expositions des salles des ventes avec le sculpteur Gunther Bloch.
Sa famille possède l'inventaire fait par Ernest dans les années 1970, des choses rapportées à Blackheath. On y trouve le "No.33A Une statue Tahitienne sur pied, achetée à Hutchings, hauteur 21 in., avril 1958, 35 livres". Elle avait aussi un numéro de la galerie B445. Il n'y a pas de traces d'un missionnaire appelé Hutchings, mais il existe un Sidney Hutchins et un John J. K. Hutchin, ayant tous deux travaillé pour le L.M.S. à Rarotonga, aux îles Cook. Les archives du L.M.S conservent quelques rapports et lettres de Sidney Hutchins qui servi dans les annes 1920 et beaucoup de rapports et lettres de John J.K. Hutchin, qui servi pendant presque trois décennies à partir de 1882, parlait le Rarotonga couramment et ont traduit des textes. Lui et sa femme appréciaient la vie locale et entretenaient des relations amicales avec les habitants des Iles Cook.
Cependant le progrès n'était jamais direct. Hutchin écrit dans un rapport daté du 8 janvier 1904 : "Il y a toujours beaucoup de superstition et d'ignorance parmi eux... De même que les rayons du soleil lutte pour atteindre la terre, à travers l'épais buisson, la superstition, l'ignorance et la sensualité gênent l'accession à la vie spirituelle". L'alcool était terriblement néfaste pour les habitants, particulièrement au nord des Iles Cook. Le bateau de la Mission, le John Williams, visitait les Iles de la Société, les Iles Cook et Samoa régulièrement, mais aussi les Iles Australes, la Nouvelle-Zélande et la Nouvelle Guinée où il y avait des représentations de la mission.
La plupart des pasteurs étaient natifs de leur île ou d'une île adjacente, mais le lien entre tous les membres de la Mission était très fort. En 1916, un rapport anonyme des îles Cook au siège social LMS Londres annonça la mort d'un pasteur indigène, Obeda, à l'âge de 95 ans, le décrivant comme "le dernier survivant des îles du Sud des jours païens. Il est né l'année suivant l'introduction de l'évangile à Aitutaki et avant que John Williams ne découvre Rarotonga".
Comment Hutchin ou Hutchins ont acquis la figure est un mystère.
Ernest Ohly ne douta jamais de l'origine donnée à sa statue et nous regrettons seulement de ne pas en avoir plus discuté avec lui, au lieu de seulement l'admirer.
Au demeurant ses origines exactes restent une énigme.