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« La couleur est pour moi une sorte de substance sacrée. C’est l’élément de la peinture qui me fascine le plus car il me dépasse. » - Sam Francis
Sam Francis, qui avait servi dans l’armée de l’air américaine pendant la Seconde Guerre mondiale, est hospitalisé entre 1943 et 1947 pour soigner une tuberculose spinale ; il passe donc une grande partie de cette période immobilisé dans un plâtre intégral. Il observe alors les « jeux de lumière au plafond, les effets du ciel à l’aube et au coucher du soleil sur le Pacifique, lorsque son lit de camp était transporté sur le balcon de l’hôpital », relatait James Johnson Sweeney. « Ce qui l’intéressait le plus […] était la qualité de la lumière elle-même […] ; pas seulement le jeu de lumière, mais la substance à partir de laquelle la lumière est produite. » (J. Johnson Sweeney cité dans P. Selz, Sam Francis, New York 1975, p. 34). Encouragé par le peintre figuratif de la Bay Area, David Park, Francis s’essaie alors à la peinture.
Cette fascination pour la lumière et la couleur sera à l’origine de son œuvre. Avec l’aide du G.I. Bill, qui facilita l’installation en France de centaines d’artistes américains, Sam Francis, originaire de Californie, se rend à Paris en 1950.
Il y tombe sous le charme de coloristes français tels que Henri Matisse, Claude Monet et Pierre Bonnard, dont l’hédonisme chromatique et le sens de la composition l’inspirent fortement. Francis incarne la fusion des idées entre l’Europe et l’Amérique, au cœur de l’histoire de la Galerie Jean Fournier.
Défendu notamment par les critiques Georges Duthuit et Michel Tapié, le peintre américain participe à plusieurs expositions importantes d’Art Informel au début des années 1950. Jean Fournier découvre en 1956 le travail de Francis par l’intermédiaire de Simon Hantaï – qu’il a rencontré via Jean Paul Riopelle. L’année suivante, Jean Fournier intègre Francis à une exposition organisée dans sa librairie de l’avenue Kléber, aux côtés de Simon Hantaï, mais aussi Jean Degottex, Hans Hartung, Judit Reigl, Georges Mathieu et Jackson Pollock. D’autres expositions collectives suivent après l’ouverture, en 1963, de la galerie Jean Fournier, rue du Bac. À la fin de l’année 1968, Jean Fournier consacre au peintre californien une exposition exclusive. Lorsque le marchand déménage rue Quincampoix en 1979, il inaugure le nouvel espace avec une exposition de grands formats de Sam Francis exceptionnels. La nombreuse correspondance échangée entre les deux hommes témoigne d’une relation professionnelle efficace portée par un grand respect mutuel. Cette étroite collaboration se poursuivra jusque dans les années 1990.
Francis a mené une vie itinérante, travaillant tout au long de sa carrière à Paris, New York, Berne, Californie, Mexico et Tokyo. Blue Figure (1960) [lot 13], un exemple précoce de la série connue sous le nom de « Formes bleues », a été peint dans l’atelier d’Arcueil – que Francis a conservé jusqu’en 1983 –, et exposé lors des principales rétrospectives de son œuvre de la Suède à la Suisse, en passant par l’Allemagne et les États-Unis, ainsi que dans l’exposition de Jean Fournier, « Sam Francis : Une exposition pour nos anniversaires (1991) », qui marquait les vingt-cinq ans de sa première exposition personnelle à la galerie parisienne.
Peint entre Santa Monica et Tokyo, Sans titre (Edge) (1967-1968) [lot 31] est un exemple des tableaux de la série Edge qui fut capitale pour l’artiste la fin des années 1960.
Ces œuvres radicales sont blanches, à l’exception de bordures de couleurs vives et chatoyantes. Passionné par la psychologie jungienne et la philosophie zen, Francis considérait le vide comme une zone de méditation que le spectateur pouvait habiter.
Il aimait déclarer : « l’espace au centre de ces peintures vous est réservé ». De format vertical, ces toiles évoquent un sentiment de suspension en apesanteur.
Le diagnostic d’un cancer et le décès de deux amis proches ont conduit l’artiste à exprimer plus fortement encore ses sentiments par l’entremise de ses œuvres à la fin des années 1980 [lots 4, 9, 17]. « Ce sont quelques-unes des meilleures peintures de Francis », écrit Willam C. Agee, « car il travaillait à un sommet d’intensité émotionnelle qu’il n’avait peut-être jamais atteint auparavant. » (W. C. Agee, Sam Francis : Paintings 1947-1990, exh. cat. Museum of Contemporary Art, Los Angeles 1999, p. 46). Trois œuvres datées de 1988, réalisées dans les ateliers californiens de Francis à Santa Monica et à Venice, sont caractéristiques de la palette expressive et de la gestuelle dynamique de cette période. Leurs bleus paon, leurs verts, leurs jaunes vifs, leurs rouges et leurs lilas sont mélangés, éclaboussés et marbrés dans des compositions d’une extraordinaire énergie visuelle. Francis mêle des pigments acryliques à de l’aquarelle, créant ainsi des éclats et des coulures aqueuses. Le fond blanc éblouissant participe activement à la mise en valeur et en vibration de la couleur.
« La couleur, déclarait Francis, c’est la lumière sur le feu. Chacune d’entre elle est le résultat d’une combustion, car chaque substance brûle d’une couleur particulière. L’alchimie des couleurs fait écho au processus pictural […] Mais mon travail n’est pas seulement ma peinture, c’est autre chose. La peinture me tient en échec, pour ainsi dire, ou m’empêche de m’envoler dans d’autres directions. C’est une façon d’être ancré dans le monde. » (S. Francis, cité dans J. Butterfield, “The Other Side of Wonder”, Sam Francis : Works On Paper, A Survey, 1948-1979, cat. ex. Institute of Contemporary Arts, Boston 1979). Pour Sam Francis, le monde invitait à une exploration joyeuse. Son œuvre, explorant une riche synthèse de styles, d’influences culturelles et de techniques, continue d’incarner son esprit libre et curieux.
Sam Francis, qui avait servi dans l’armée de l’air américaine pendant la Seconde Guerre mondiale, est hospitalisé entre 1943 et 1947 pour soigner une tuberculose spinale ; il passe donc une grande partie de cette période immobilisé dans un plâtre intégral. Il observe alors les « jeux de lumière au plafond, les effets du ciel à l’aube et au coucher du soleil sur le Pacifique, lorsque son lit de camp était transporté sur le balcon de l’hôpital », relatait James Johnson Sweeney. « Ce qui l’intéressait le plus […] était la qualité de la lumière elle-même […] ; pas seulement le jeu de lumière, mais la substance à partir de laquelle la lumière est produite. » (J. Johnson Sweeney cité dans P. Selz, Sam Francis, New York 1975, p. 34). Encouragé par le peintre figuratif de la Bay Area, David Park, Francis s’essaie alors à la peinture.
Cette fascination pour la lumière et la couleur sera à l’origine de son œuvre. Avec l’aide du G.I. Bill, qui facilita l’installation en France de centaines d’artistes américains, Sam Francis, originaire de Californie, se rend à Paris en 1950.
Il y tombe sous le charme de coloristes français tels que Henri Matisse, Claude Monet et Pierre Bonnard, dont l’hédonisme chromatique et le sens de la composition l’inspirent fortement. Francis incarne la fusion des idées entre l’Europe et l’Amérique, au cœur de l’histoire de la Galerie Jean Fournier.
Défendu notamment par les critiques Georges Duthuit et Michel Tapié, le peintre américain participe à plusieurs expositions importantes d’Art Informel au début des années 1950. Jean Fournier découvre en 1956 le travail de Francis par l’intermédiaire de Simon Hantaï – qu’il a rencontré via Jean Paul Riopelle. L’année suivante, Jean Fournier intègre Francis à une exposition organisée dans sa librairie de l’avenue Kléber, aux côtés de Simon Hantaï, mais aussi Jean Degottex, Hans Hartung, Judit Reigl, Georges Mathieu et Jackson Pollock. D’autres expositions collectives suivent après l’ouverture, en 1963, de la galerie Jean Fournier, rue du Bac. À la fin de l’année 1968, Jean Fournier consacre au peintre californien une exposition exclusive. Lorsque le marchand déménage rue Quincampoix en 1979, il inaugure le nouvel espace avec une exposition de grands formats de Sam Francis exceptionnels. La nombreuse correspondance échangée entre les deux hommes témoigne d’une relation professionnelle efficace portée par un grand respect mutuel. Cette étroite collaboration se poursuivra jusque dans les années 1990.
Francis a mené une vie itinérante, travaillant tout au long de sa carrière à Paris, New York, Berne, Californie, Mexico et Tokyo. Blue Figure (1960) [lot 13], un exemple précoce de la série connue sous le nom de « Formes bleues », a été peint dans l’atelier d’Arcueil – que Francis a conservé jusqu’en 1983 –, et exposé lors des principales rétrospectives de son œuvre de la Suède à la Suisse, en passant par l’Allemagne et les États-Unis, ainsi que dans l’exposition de Jean Fournier, « Sam Francis : Une exposition pour nos anniversaires (1991) », qui marquait les vingt-cinq ans de sa première exposition personnelle à la galerie parisienne.
Peint entre Santa Monica et Tokyo, Sans titre (Edge) (1967-1968) [lot 31] est un exemple des tableaux de la série Edge qui fut capitale pour l’artiste la fin des années 1960.
Ces œuvres radicales sont blanches, à l’exception de bordures de couleurs vives et chatoyantes. Passionné par la psychologie jungienne et la philosophie zen, Francis considérait le vide comme une zone de méditation que le spectateur pouvait habiter.
Il aimait déclarer : « l’espace au centre de ces peintures vous est réservé ». De format vertical, ces toiles évoquent un sentiment de suspension en apesanteur.
Le diagnostic d’un cancer et le décès de deux amis proches ont conduit l’artiste à exprimer plus fortement encore ses sentiments par l’entremise de ses œuvres à la fin des années 1980 [lots 4, 9, 17]. « Ce sont quelques-unes des meilleures peintures de Francis », écrit Willam C. Agee, « car il travaillait à un sommet d’intensité émotionnelle qu’il n’avait peut-être jamais atteint auparavant. » (W. C. Agee, Sam Francis : Paintings 1947-1990, exh. cat. Museum of Contemporary Art, Los Angeles 1999, p. 46). Trois œuvres datées de 1988, réalisées dans les ateliers californiens de Francis à Santa Monica et à Venice, sont caractéristiques de la palette expressive et de la gestuelle dynamique de cette période. Leurs bleus paon, leurs verts, leurs jaunes vifs, leurs rouges et leurs lilas sont mélangés, éclaboussés et marbrés dans des compositions d’une extraordinaire énergie visuelle. Francis mêle des pigments acryliques à de l’aquarelle, créant ainsi des éclats et des coulures aqueuses. Le fond blanc éblouissant participe activement à la mise en valeur et en vibration de la couleur.
« La couleur, déclarait Francis, c’est la lumière sur le feu. Chacune d’entre elle est le résultat d’une combustion, car chaque substance brûle d’une couleur particulière. L’alchimie des couleurs fait écho au processus pictural […] Mais mon travail n’est pas seulement ma peinture, c’est autre chose. La peinture me tient en échec, pour ainsi dire, ou m’empêche de m’envoler dans d’autres directions. C’est une façon d’être ancré dans le monde. » (S. Francis, cité dans J. Butterfield, “The Other Side of Wonder”, Sam Francis : Works On Paper, A Survey, 1948-1979, cat. ex. Institute of Contemporary Arts, Boston 1979). Pour Sam Francis, le monde invitait à une exploration joyeuse. Son œuvre, explorant une riche synthèse de styles, d’influences culturelles et de techniques, continue d’incarner son esprit libre et curieux.