拍品專文
« Des signes, je suis passé à l’écriture. De l’écriture, à l’écriture de lignes. De l’écriture des lignes, aux lignes. » - Jean Degottex
Né à Sathonay-Camp près de Lyon en 1918, Jean Degottex s’installe à Paris avec ses parents à l’âge de quinze ans. Artiste autodidacte, il se fait connaître dans les années 1950 et 1960 à travers ses peintures abstraites, caractérisées par un coup de pinceau lyrique et expressif. Fortement inspiré par la calligraphie chinoise et japonaise, Degottex s’intéresse également à la philosophie zen. Ses « marques » évoquent des systèmes de notation ou des signes, et son style oscille entre abstraction et lisibilité. Appréciant son travail, André Breton a présenté ses tableaux dans sa galerie À L’Étoile Scellée au cours des années 1950. À la fois réflexives et instantanées, laissant une grande part à l’inconscient, elles étaient, selon lui, dans la lignée de l’écriture automatique du Surréalisme.
La première exposition personnelle de Degottex s’est tenue à la galerie Denise René en 1949. Six ans plus tard, Jean Fournier expose son travail à la librairie Kléber, dans le 16e arrondissement de Paris. Jean Fournier avait inauguré cet espace en 1954 et y présentait déjà les œuvres de Simon Hantaï, Georges Mathieu et Josef Šíma, figures incontournables de l’abstraction d’après-guerre. En 1956, Jean Fournier s’engage auprès de Degottex avec une première exposition personnelle, où l'œuvre Sans titre (29 août 1956) [lot 18] est présentée, puis une autre collective qui marquent le début d’une collaboration soutenue et régulière, suivront 5 expositions personnelles jusqu’en 1979 et de nombreuses expositions collectives que Jean Fournier aimait tant organiser.
À la fin des années 1950 et dans les années 1960, Degottex développe son propre langage pictural grâce à de multiples séries de peintures à grande échelle, dont « Rose-Noire » et « Métasphères ». Si cette période se révèle productive sur le plan pictural, elle s’avère malheureusement tragique sur le plan personnel. En 1963, la fille de l’artiste, Frédérique, meurt dans un accident à l’âge de seize ans. Degottex suspend sa pratique pendant un an. Les œuvres qui suivent se distinguent par un intérêt renouvelé pour les matériaux. Degottex commence à explorer la toile comme un site structurel : il gratte et érafle la peinture encore humide en utilisant des outils de fortune, comme des tournevis. Suite Rose-Noir (V) (1964) [lot 3], une grande toile rose pâle recouverte de peinture noire et traversée de trois lignes horizontales est caractéristique de cette période. Elle sera exposée au Kölnischer Kunstverein de Cologne un an après sa création.
Métasphère rouge (I) (1965) [lot 27] est une vaste toile qui témoigne de la fascination de Degottex pour la calligraphie. Des empâtements noirs balayent des lignes souples et horizontales. Un léger cercle rouge pâle emplit la partie supérieure de la toile, évoquant les rouleaux suspendus chinois ou japonais. L’œuvre est aussi frappante que succincte, témoignant du désir de l’artiste de « réinventer la peinture comme une opération de réduction vers l’élémentaire » ; elle renvoie à la philosophie du groupe Supports/Surfaces qui a prospéré à la galerie Jean Fournier pendant cette période. (P. Wat, 'Ne rien attendre, tout espérer', in Petit journal pour l'exposition ''Petits et grands tableaux en souvenir de Jean Fournier'', Galerie Jean Fournier, Paris 2016, p. 19).
Dans les années 1970, Degottex fait évoluer son approche et met au point sa technique de « report » : un processus par lequel il transfert des marques d’une partie d’une surface à une autre au moyen d’une technique d’empreinte. En pliant ou en froissant la toile afin de créer des lignes improvisées, Degottex attire l’attention sur le support en tant qu’entité picturale. Report-bleu (1978) [lot 16] illustre à merveille cette nouvelle technique. Sur une toile carrée tachée de tonalités bleues, de fines lignes d’un bleu profond s’infiltrent et déteignent comme de l’encre sur une page. En 1981, trois ans plus tard, Degottex reçoit le Grand Prix National de la Peinture.
Né à Sathonay-Camp près de Lyon en 1918, Jean Degottex s’installe à Paris avec ses parents à l’âge de quinze ans. Artiste autodidacte, il se fait connaître dans les années 1950 et 1960 à travers ses peintures abstraites, caractérisées par un coup de pinceau lyrique et expressif. Fortement inspiré par la calligraphie chinoise et japonaise, Degottex s’intéresse également à la philosophie zen. Ses « marques » évoquent des systèmes de notation ou des signes, et son style oscille entre abstraction et lisibilité. Appréciant son travail, André Breton a présenté ses tableaux dans sa galerie À L’Étoile Scellée au cours des années 1950. À la fois réflexives et instantanées, laissant une grande part à l’inconscient, elles étaient, selon lui, dans la lignée de l’écriture automatique du Surréalisme.
La première exposition personnelle de Degottex s’est tenue à la galerie Denise René en 1949. Six ans plus tard, Jean Fournier expose son travail à la librairie Kléber, dans le 16e arrondissement de Paris. Jean Fournier avait inauguré cet espace en 1954 et y présentait déjà les œuvres de Simon Hantaï, Georges Mathieu et Josef Šíma, figures incontournables de l’abstraction d’après-guerre. En 1956, Jean Fournier s’engage auprès de Degottex avec une première exposition personnelle, où l'œuvre Sans titre (29 août 1956) [lot 18] est présentée, puis une autre collective qui marquent le début d’une collaboration soutenue et régulière, suivront 5 expositions personnelles jusqu’en 1979 et de nombreuses expositions collectives que Jean Fournier aimait tant organiser.
À la fin des années 1950 et dans les années 1960, Degottex développe son propre langage pictural grâce à de multiples séries de peintures à grande échelle, dont « Rose-Noire » et « Métasphères ». Si cette période se révèle productive sur le plan pictural, elle s’avère malheureusement tragique sur le plan personnel. En 1963, la fille de l’artiste, Frédérique, meurt dans un accident à l’âge de seize ans. Degottex suspend sa pratique pendant un an. Les œuvres qui suivent se distinguent par un intérêt renouvelé pour les matériaux. Degottex commence à explorer la toile comme un site structurel : il gratte et érafle la peinture encore humide en utilisant des outils de fortune, comme des tournevis. Suite Rose-Noir (V) (1964) [lot 3], une grande toile rose pâle recouverte de peinture noire et traversée de trois lignes horizontales est caractéristique de cette période. Elle sera exposée au Kölnischer Kunstverein de Cologne un an après sa création.
Métasphère rouge (I) (1965) [lot 27] est une vaste toile qui témoigne de la fascination de Degottex pour la calligraphie. Des empâtements noirs balayent des lignes souples et horizontales. Un léger cercle rouge pâle emplit la partie supérieure de la toile, évoquant les rouleaux suspendus chinois ou japonais. L’œuvre est aussi frappante que succincte, témoignant du désir de l’artiste de « réinventer la peinture comme une opération de réduction vers l’élémentaire » ; elle renvoie à la philosophie du groupe Supports/Surfaces qui a prospéré à la galerie Jean Fournier pendant cette période. (P. Wat, 'Ne rien attendre, tout espérer', in Petit journal pour l'exposition ''Petits et grands tableaux en souvenir de Jean Fournier'', Galerie Jean Fournier, Paris 2016, p. 19).
Dans les années 1970, Degottex fait évoluer son approche et met au point sa technique de « report » : un processus par lequel il transfert des marques d’une partie d’une surface à une autre au moyen d’une technique d’empreinte. En pliant ou en froissant la toile afin de créer des lignes improvisées, Degottex attire l’attention sur le support en tant qu’entité picturale. Report-bleu (1978) [lot 16] illustre à merveille cette nouvelle technique. Sur une toile carrée tachée de tonalités bleues, de fines lignes d’un bleu profond s’infiltrent et déteignent comme de l’encre sur une page. En 1981, trois ans plus tard, Degottex reçoit le Grand Prix National de la Peinture.