.jpg?w=1)
L'hôtel Hottinguer, rue de la Baume
A l'ombre de l'église Saint Philippe du Roule à Paris, l'hôtel Hottinguer a survécu aux bouleversements de l'histoire et aux transformations de la société au cours de la deuxième moitié du XXème siècle. Sa façade imposante est toujours l'un des ornements principaux de la tranquille rue de la Baume, l'une des rares rues résidentielles du quartier qui conserve l'allure élégante des années 1900. C'est en effet à l'orée du XXème siècle qu'Henri Hottinguer (1868-1943) fit construire, à proximité de la demeure de son frère Maurice, par l'architecte Rahir, ce bel hôtel inspiré d'une demeure aristocratique du XVIIIème siècle. D'origine suisse, sa famille, qui depuis 1401 à l'honneur de figurer parmi les "bourgeois" de Zurich, s'était établie à Paris à la fin du XVIIIème siècle et, rapidement, était arrivée au sommet du monde des affaires et de la société, surtout grâce à l'énergie, au travail et au remarquable esprit d'entreprise de Jean-Conrad Hottinguer (1764-1841). Désormais le nom d'Hottinguer, comme celui des Mallet, Mirabeau, Neuflize, Vernes... sera synonyme de banque, de haute finance et on retrouvera les membres de la famille dans toutes les grandes entreprises financières et industrielles du XIXème et du XXème siècle: création de la Banque de France, de la Chambre de Commerce, des chemins de fer, de l'empire colonial français, etc...
La situation de la famille Hottinguer, suivant une tradition bien établie, avait été également confortée par des mariages au sein de familles protestantes de niveau et d'importance comparables et notamment par le mariage de Jean-Henri (1803-1866) en 1832 avec Caroline Delessert, elle même appartenant à une célèbre famille de banquiers dont le nom reste associé aux fastes de la Restauration et de la Monarchie de Juillet. Descendante du fondateur de la Caisse d'Epargne, Benjamin Delessert (1773-1847), fille de collectionneurs, Caroline Delessert apporta à sa belle-famille, non seulement un magnifique hôtel particulier, l'hôtel d'Uzès situé 172 rue Montmartre, mais également les vestiges d'une des plus fameuses collections de tableaux du XIXème siècle, formée avec passion par Etienne Delessert (1735-1816) et ses trois fils Benjamin, François et Gabriel.
Au rez-de-chaussée de l'hôtel d'Uzès, à côté des somptueux salons aux boiseries dorées dessinées vers 1767 d'après les dessins de Claude-Nicolas Ledoux, les frères Delessert ouvraient largement à un public d'amateurs avertis, leur galerie de peintures, connue dans Paris sous le nom de galerie Delessert. Cette collection de deux-cent onze peintures, dont ils firent publier le catalogue en 1846, et qui comptait des chefs d'oeuvre tels que la "Vierge à l'Enfant" de Raphaël, provenant des collections du duc d'Orléans, aujourd'hui au musée Condé de Chantilly, "L'élégante compagnie" de Peter de Hoog, aujourd'hui au Metropolitan Museum, le "Portrait de Wille" par Greuze, au musée Jacquemart André, etc... Malgré la dispersion d'une partie de la collection, dont la vente sur place par l'office de Maître Pillet dura quatre jours en 1869, leurs descendants ont conservé un certain nombre de forts beaux tableaux par Nicolas Berchem, Van Dael, Meissonier... qui n'ayant pas été vus ou reproduits depuis plus de cent cinquante ans, vont aujourd'hui être proposés aux enchères.
L'hôtel de la rue de la Baume devait s'enrichir, non seulement de panneaux de boiseries de Ledoux, vestiges de l'hôtel d'Uzès détruit à la fin du Second Empire et dont on peut admirer d'autres éléments au musée Carnavalet, mais également d'autres remarquables décors de boiseries et de cheminées du XVIIIème siècle provenant de la demeure du marquis de Las Cases, rue Saint Florentin, et d'un hôtel de Bordeaux, d'un plafond de Charles de la Fosse, de tapisseries anciennes, etc...
Dans ce cadre élégant, Henri Hottinguer (1868-1943) et son épouse américaine devaient recevoir durant toute la première moitié du XXème siècle le monde de la politique, des affaires, des arts et la société parisienne; en 1913, le baron et la baronne Hottinguer demandent aux "Ballets Russes" de Diaghilev, alors au sommet de leur récente gloire, de danser dans le jardin illuminé pour l'occasion par des ampoules électriques multicolores; en 1918, ils célèbrent la victoire par une grande réception à laquelle sont conviés les officiers de toutes les armées alliées dont les képis et les sabres encombrent les vestiaires...
A leurs propres meubles et objets d'art, s'ajoutèrent tout naturellement, rue de la Baume, d'autres tableaux et objets d'art provenant d'héritages familiaux ou d'achats (notamment lors des ventes Delessert) ou le groupe important d'aquarelles d'Eugène Lami représentant les comédies de Molière qui provient de la famille La Villestreux.
Fils d'Henri, né en 1902, le baron Rodolphe Hottinguer, devait non seulement diriger la banque Hottinguer mais également occuper les plus hautes fonctions dans le monde de la banque et des affaires jusqu'à sa mort survenue en 1985. Il avait hérité du goût de collectionneur de ses ancêtres et un de ses plus grands plaisirs était de rechercher des meubles, dessins, tableaux, bronzes et objets d'art destinés à figurer dans son hôtel particulier. Il notait soigneusement tous ses achats et en conservait dans des cahiers la trace et l'historique; ceux-ci témoignent de sa grande culture, de sa précision, de son goût pour la décoration et de son attachement à ses demeures, l'hôtel de la rue de la Baume et le château du Piple en région parisienne, acheté par son ancêtre Jean-Conrad en 1819.
Sa prédilection pour le XVIIIème siècle devait le guider dans de nombreux achats, notamment l'intéressante suite de dessins de l'entourage de Vien, et le très bel ensemble de bronzes dont le chef d'oeuvre reste le groupe d'Apollon et Marsyas par le sculpteur baroque florentin Foggini. Les commodes de laque, ou au décor de marqueterie datant du XVIIIème siècle, les sièges en bois doré et les encoignures de Riesener, les porcelaines de chine ou européennes et la somptueuse argenterie, complétaient un décor où la somptuosité, l'élégance et la vie de famille coexistaient sans heurts et qui a miraculeusement été préservé jusqu'à aujourd'hui.
Bertrand du Vignaud
LUSTRE DE STYLE LOUIS XIV
Details
LUSTRE DE STYLE LOUIS XIV
En bronze ciselé et doré; à six lumières, le fût en balustre à décor de treillis de fleurs
Hauteur: 65 cm. (25 5/8 in.), Diamètre: 68 cm. (26¾ in.)
En bronze ciselé et doré; à six lumières, le fût en balustre à décor de treillis de fleurs
Hauteur: 65 cm. (25 5/8 in.), Diamètre: 68 cm. (26¾ in.)
Further details
A LOUIS XIV STYLE CHANDELIER