MASQUE BAOULE, ANGLO BA
" f " : In addition to the regular Buyer’s premium… Read more Isidor Kahane Mon père, Hans Himmelheber, me disait combien les Kahane étaient accueillant quand il se rendait chez eux avec ses étudiants afin d'admirer leur collection, c'était à la fin des années 60, début des années 70, quand il remplaça les professeurs Wingert et Frazer pendant plusieurs semestres à l'Université Columbia. Il pensait qu'il était important pour ses étudiants en art Africain de voir et de toucher les oeuvres qu'ils étudiaient. C'est pourquoi, une fois par semaine, il les emmenait chez les Anspach, Chaim Gross et Kahane. Je me rappelle qu'à cette époque Isidor était encore un créateur de tissus et pas encore marchand d'art Asiatique - mais déjà un collectionneur reconnu en art Africain. Je n'ai rencontré les Kahane qu'après leur retour à Zurich et l'ouverture de leur galerie dans un endroit splendide de la vieille ville - la Hechtplatz. Isidor collabora ensuite avec Spink à Londres pendant de nombreuses années. Sa galerie ne présentait que de l'art Asiatique - les sculptures d'Afrique et de Mélanésie tant pour son intérêt personnel - des oeuvres de grande qualité, certaines confiées par Spink, mais lui-même partait souvent en tournée, particulièrement au Japon et en Asie du Sud Est. Il était un connaisseur avec de bonnes connaissances en Histoire de l'Art, et il savait comment présenter un objet avec l'ambiance et l'éclairage adéquat. Lorsqu'on visitait sa galerie on pensait qu'il aimait particulièrement chaque pièce qu'il présentait. Ce qui est bien sûr la ruse de tout marchand talentueux. Mais Isidor était plus qu'un bon vendeur, il était un vrai rasika, une personne avide de goûter le rasa, le "jus" ou l'essence d'une oeuvre d'art (rasika est un terme sanskrit utilisé dans la terminologie esthétique indienne). On pouvait admirer dans sa galerie de magnifiques et anciennes sculptures asiatiques, mais il organisa aussi une exposition dédiée aux miniatures indiennes ou encore à des rouleaux japonais de grande qualité. Et parfois, nous allions à l'étage rencontrer sa femme et apprécier des pièces d'art africain dans l'atmosphère hospitalière de leur appartement. Mais une formidable expérience a été de visiter leur maison de campagne Arcegno près du lac de Locarno au sud de la Suisse. A notre arrivée on était accueillit par leurs magnifiques et souvent monumentales sculptures d'art Africain comme le très impressionnant reliquaire Fang ou le grand masque Nimba réalisé par un sculpteur Baga ou encore le masque Baoule en métal. Ma femme et moi venions de notre cabane alpine et nous fumes éblouit non seulement par l'hospitalité et l'attention des Kahane mais aussi par l'atmosphère délicieuse qu'Isidor et Elly avaient créée pour leur famille et pour leur collection. C'était un week-end inoubliable ! Comme mon prédécesseur Elsy Leuzinger, nous achetions régulièrement des oeuvres de sa galerie pour le Musée Rietberg. En tant que conservateurs du musée local nous bénéficions de certains privilèges comme des informations sur les dernières oeuvres arrivées ou des nouvelles du monde de l'art. Isidor avait beaucoup de relations en Thaïlande, et connaissait non seulement les marchands locaux mais aussi les faux réalisés sur place avec beaucoup de talent. Il avait la confiance des collectionneurs et marchands d'art Asiatique avec d'importantes oeuvres destinées à une clientèle internationale, par son intermédiaire nous avons acquis par exemple les vingt folios illustrés du Jainesque Shahnama datés vers 1425 - oeuvre marquante pour le développement de la peinture Indienne. Ce qui me persuada qu'Isidor Kahane était l'un des plus grands connaisseurs que j'ai eu la chance de rencontrer (oui, je le dis avec conviction), c'est que de temps en temps, pas régulièrement mais pas non plus rarement, il venait depuis sa galerie au Musée Rietberg, non pour voir une exposition spéciale ou pour rencontrer un conservateur mais simplement pour se promener dans les allées, regarder tranquillement telle ou telle oeuvre, s'asseoir dans les pièces de la Villa Wesendonck - et puis partir, sans faire appeler le directeur ou laisser une trace de sa visite. Quand je faisais le tour des salles (ce que je faisais tous les jours à l'époque), je pouvais avoir la chance de le croiser et nous discutions ou nous prenions un café. Mais il ne serait pas venu me voir, me déranger ou me montrer quelque chose. C'était seulement par amour de l'art, pour voir des oeuvres du musée dont il absorbait sans bruit l'essence - il disait qu'elles clarifiaient son esprit et rassuraient son idée du beau : il reste pour moi l'un des rares marchands à être également un vrai rasika ou connaisseur. Already my father, Hans Himmelheber, told me how nice the Kahane's were when he visited their home, together with his students, to see their collection - that was in the late sixties early seventies, when he replaced Professors Wingert and Frazer for several semesters at Columbia University. He felt it was important for his students of African art to see and handle the works that they studied. Therefore, once a week he took him to the Anspach's, Chaim Gross's - and the Kahane's. I recall that at that time Isidor was still a textile designer and not yet a dealer in Asian art - but already a well-established collector of African art. I met the Kahane's only later when they returned to Zurich and had opened a gallery at a splendid location - at the Hechtplatz, in the old part of town. Isidor collaborated then with Spinks in London for many years. His gallery presented only Asian art - African and Melanesian sculpture was his private interest - high quality objects, some of which he had on consignment from London, but he himself was very often on tour, especially in Japan and Southeast Asia. He was a connoisseur with very good art-historical knowledge, and he knew how to install an object with just the right ambience and light. When one visited his gallery, one got the impression that he was especially fond of each work he handled. That, obviously, is part of any successful dealer's craft. But Isidor was far more than a good salesman: He was a true rasika, a person who was eager to taste rasa, the "juice", the essence of an artwork (Rasika is a Sanskrit term, used in the Indian aesthetic terminology). At his gallery wonderful sculptures from early Asian periods could be seen, but once he also staged a special exhibition of Indian miniature paintings, and he also showed Japanese scroll paintings of highest quality. And sometimes, we proceeded upstairs to meet his wife and enjoy some African art-pieces in the hospitable atmosphere of their town flat. But a great experience was a visit to their country house in Arcegno at the Lake of Locarno in Southern Switzerland. There one was greeted by their magnificent, often monumental African sculptures like the most impressive Fang reliquary figure, the big Nimba mask of a Baga-sculptor, or the metal-plated Baule mask. We, my wife and I, had come from our alpine hut and we were truly overwhelmed not only by the Kahane's hospitality and care, but also by the splendid atmosphere Isidor and Elly had created for their family and for their collection. It was a memorable weekend! For the Rietberg Museum we regularly bought works of art from Isidor Kahane's gallery, as had my predecessor Elsy Leuzinger. We enjoyed as curators of the local museum some privileges like early information on fresh arrivals or news from the international art-world. Isidor was very well connected in Thailand, and knew not only the local dealers but was also aware of the forgeries produced there with great skills. He was often entrusted by Asian collectors and dealers with important works to sell to an international clientele, and through him we purchased for instance the twenty illustrated folios of the Jainesque Shahnama of c. 1425 - milestones in the development of Indian painting. What convinced me most to consider Isidor Kahane one of the greatest connoisseurs that I have met in person (yes, I say that with conviction) is that of and on, not regular, but not seldom occasions, he made an excursion from his gallery and came to the Rietberg Museum, not for seeing a special exhibition or to meet a curator there, but just to wander through the galleries, look at this or that piece quietly, sitting in the rooms of the Villa Wesendonck - and then leave again, not calling upon the director, not even leaving a trace of his visit. Only by chance, when I made my round through the galleries (which, in fact in those days I did daily) I chanced upon him and we had a chat or drank a cup of coffee. But he had not come to see me, disturb me or show me something. It was really for enjoyment of art, view some objects in the museum, the essence of which he quietly absorbed - he said, they cleared his mind and reassured his sense of rasika, connoisseurs. Eberhard Fischer La collection Kahane : Un parcours international Isidor Kahane (1921-2004) est reconnu aujourd'hui pour ses importantes contributions dans le domaine de l'art de l'Inde et de l'Asie du Sud-Est. Entre les années 1960 et 1990, certaines des plus importantes collections, tant publiques que privées, européennes qu'américaines, ont été construites en suivant ses conseils. Son nom est attaché à des oeuvres-icones et particulièrement exquises comme par exemple le Bouddha Shakyamuni daté du VIIIe siècle et conservé à l'Asia Society de New York, collection John D. Rockefeller [1979.44] (Fig 1). Ses débuts dans l'art et en tant que collectionneur relèvent de son histoire personnelle - une sensibilité esthétique innée et le choix de changer de carrière professionnelle au milieu de sa vie. Sa collection d'art Africain en est une autre s'étendant sur cinquante ans entre l'Europe, l'Amérique, l'Asie et l'Europe de nouveau. Bien connu pour son oeil avisé en tant que collectionneur d'art et, plus tard, comme marchand, Kahane était sociable et charmant et, en même temps, discret et privé. Seulement quelques amis proches connaissaient sa collection d'art Africain et certains d'entre eux ont pu les admirer. Sa collection d'art Africain était un plaisir réservé à sa femme Elly et à lui-même, et maintenant, une révélation pour d'autres. Après avoir été diplmé de la Zurich Seidenwebschule (l'École de Tissage de la Soie) au début des années 1940, Isidor Kahane commena sa carrière dans l'industrie textile de luxe chez Abraham AG qui réalisait des soies pour des maisons de couture légendaires comme Balenciaga, Yves Saint Laurent et Valentino. Elly et Isidor Kahane se rencontrèrent chez Abraham, lui travaillant comme styliste et elle comme designer. Elly Kahane était elle-même artiste et designer. Elle étudia l'art et le design à la Kunstgewerbeschule de Zurich au début des années 1940 sous la direction de Johannes Itten, célèbre peintre expressionniste. Forte de ses connaissances, Elly encouragea son mari à profiter des ressources culturelles disponibles comme le Zürich Kunsthaus. Ces excursions étaient pour le plaisir et l'inspiration. Chez Abraham, ils travaillèrent pour Gustav Zumsteg, qui était un des associés et un grand collectionneur d'art moderne. Sa collection extraordinaire comprenait des oeuvres de Picasso, Klee et Chagall. Encore aujourd'hui le restaurant Kronenhalle établi par la famille de Zumsteg au Bellevue à Zurich, est de renommée mondiale et expose certains de ses trésors. Zumsteg encouragea Kahane à s'intéresser à l'art et à développer sa propre sensibilité artistique. En 1946, Kahane déménagea aux Etats Unis, renonant à travailler à Paris pour Zumsteg. Tout en poursuivant sa carrière dans l'industrie textile, il collabora avec des sommités comme Christian Dior, alors à l'apogée de son "New Look". Dior fut si impressionné par la qualité de son travail qu'il le sacra "Le Roi du Jacquard" pour avoir développer un nouveau processus de création. À New York, Kahane continua de s'intéresser à l'art et commena à collectionner avant de devenir marchand d'art d'Inde et d'Asie du Sud-Est dans les années 1960. Les Kahane appartenaient à un cercle d'amis qui étaient collectionneurs d'art eux-mêmes - Ben Heller, Gustav et Franyo Schindler, et Adolph Leuthold. Dans les années 1950, Isidor Kahane rencontra John J. Klejman (1906-1995), le galeriste renommé de l'avenue Madison à New York. Sa galerie était très influente auprès de la seconde génération de collectionneurs américains d'art Africain et Océanien actifs dans les années 1950-1960. Sa galerie, bien située et avec une vitrine changeant constamment, intriguait à la fois les collectionneurs avérés et, ce qui est peut-être le plus important, de nouveaux collectionneurs confrontés à cet art pour la première fois. Un des clients new-yorkais de Klejman s'est récemment rappelé que c'était "le choc du vieux" vu dans ces vitrines de l'Avenue Madison qui l'a poussé à collectionner l'art Africain et Océanien et les Antiquités. Quatre des six chefs-d'oeuvre de cette collection ont été acquis auprès de Klejman. Adolph Leuthold fut une autre personnalité importante dans l'aventure africaine de Kahane (voir lots 2 et 4). Il devint ami avec Isidor lorsque celui-ci était styliste à Zurich et emménagea aussi à New York après la Deuxième Guerre mondiale comme une partie de l'industrie textile. Encouragé par Isidor Kahane, Leuthold commena à collectionner. Il avait un oeil très sr et fut attiré par l'art Asiatique, les Antiquités et l'art Africain. Comme exemple de son esprit moderne et aventureux, il demanda à l'architecte, Allan Gelbin en 1964 de construire sa maison dans le Connecticut. Gelbin déclara : "Le propriétaire et l'architecte étaient résolus à créer une atmosphère libérée du passé et des clichés". La Maison de Leuthold devint très significative pour Allan Gelbin, qui écrivit plus tard, "aucune étude de mon travail n'est complète sans ce projet. C'était la première fois que je pouvais utiliser un peu d'imagination. Mes opportunités étaient grandes et mon budget limité" (NCHS). De même, Kahane connaissait le marchand zurichois Emil Storrer (Fig 3) qui se rendit en Afrique pour la première fois en 1951. Son nom est rattaché à certains des plus célèbres objets d'art du Mali et la Cte d'Ivoire conservés maintenant dans les collections du Musée Rietberg, Zurich (RAF 257), la collection Barbier-Mueller, Genève (1006-3) et le Metropolitan Museum de New York (1978.412.315). Le rare et merveilleux masque Baoule fut acquis auprès de lui (lot 1). Lorsque Kahane vivait à New York, il se rendait souvent en Europe pour son travail et venait assister aux défilés de mode parisiens ce qui lui permettait de visiter les musées et les galeries d'art Africain. Auprès de Simone de Monbrison, la mère du marchand parisien Alain de Monbrison, Kahane acheta la spectaculaire figure de reliquaire Kota-Ndasa (lot 6) et rencontra régulièrement Jacques Kerchache. Un voyage à Paris finalisa définitivement l'acquisition de la Baga D'mba (lot 3). Quand l'occasion d'acquérir la sculpture se présenta, ils ne purent y résister et durent mettre en place un important engagement financier. Le prix - 8,000 $. Afin de mettre cet achat en perspective il faut savoir qu'il n'avait jamais payé plus de 1,900 $ pour une oeuvre. Cependant, la seule objection d'Elly Kahane était que la sculpture soit " trop forte ". Mais après un voyage à Paris où elle vit une autre coiffure Baga dans les collections du Musée de l'Homme, elle revint à New York "prête à accueillir la Baga dans leurs vies". Le début des années 1970 apporta des changements pour les Kahane. Ils achetèrent de nouveau les sculptures Fang et Dogon auprès de Leuthold - leur collection d'art Africain fut dès lors fixée. Ils repartirent en Suisse et Isidor fonda la branche zurichoise de Spink & Son avec succès. Un des points culminants de cette collaboration fut la vente de la célèbre - et convoitée - collection d'Ernest Brummer - The Ernest Brummer Collection : Medieval Renaissance And Baroque Art, Vol I, 16th to 19th October 1979. Ils achetèrent leur maison dans Le Tessin où la collection fut conservée jusqu'à aujourd'hui. Isidor Kahane était avisé et doué d'un got irréprochable. Durant une période où beaucoup d'oeuvres anciennes non occidentales et de bonne qualité étaient disponibles, il fit preuve d'une grande fermeté et attendit qu'on lui propose les meilleures pièces et déclina celles qui de répondaient pas à ses espérances. Une de ses premières acquisitions fut une extraordinaire statuette en marbre des Cyclades (Fig 2). Les objets d'art rassemblés par Isidor Kahane il y a plus de cinquante ans ont résisté à l'épreuve du temps. Il resta fidèle à ses principes "Achète ce que tu aimes, qualité vaut mieux que quantité et tout tenter pour acquérir des uvres de grande qualité". Chacun des six objets d'art Africain de la collection est un chef-d'oeuvre dans son genre et lorsqu'on les place parmi les chefs-d'oeuvre d'Inde et d'Asie du Sud-Est et les Antiquités qui sont passés entre ses mains, l'érudition , la pureté esthétique et l'instinct infaillible d'Isidor Kahane ne fait aucun doute. Pourquoi l'art Africain ? Isidor Kahane développa sa sensibilité artistique à Zurich entouré par des peintures et des sculptures modernes, mais il commena par collectionner de l'art Africain. Dans cette optique Kahane resta convaincu qu'il fallait acheter le meilleur quel que soit le domaine. Les peintures modernes - de qualité - étant déjà hors de leur portée, Isidor et Elly, remontèrent à la source - les objets d'art qui ont à l'origine inspiré les artistes modernes - l'art Africain. Isidor et les enfants d'Elly se souviennent de l'époque où leurs parents convoitaient une aquarelle de Klee présentée à New York dans les années 1960. Elle cotait 30,000 $. À peu près au même moment, ils virent un exquis masque Baoule (lot 1) - une oeuvre d'art sensationnelle - d'une esthétique moderne - encore plus rare et conceptuel culturellement. Ce masque valait CHF 12,500 (approximativement 5,500 $) et celui là ils pouvaient se l'offrir. Paul Klee aurait pu être inspiré par ce masque de Baoule. Même s'il l'avait vu, ce qui n'est pas le cas, nous ne le saurions pas car Klee "n'a jamais copié l'objet ou l'oeuvre qu'il pouvait avoir vu ou obtenu une reproduction". Quand il était inspiré par une autre oeuvre d'art, "il limitait sa référence initiale à un seul aspect qu'il considérait séparé de l'ensemble" (Laude dans Primitivism, 1984, vol II, p.488). Cependant, l'influence de l'art prétendument primitif est claire dans le travail de Klee et confirmée par ces deux déclarations lors de l'exposition à la Galerie Tannhauser: "J'aurai aimé pacifier ces esprits troublés qui au vu de leur air perplexe ont recherché en vain les échos des artistes préférés des vieux musées comme El Gréco. Le fait est que des innovations primitivistes ont toujours lieu dans l'art, on pourrait les trouver dans des collections ethnographiques ou, tout simplement, dans sa propre maison, dans la chambre d'enfants". Cette déclaration provient d'une lettre écrite en 1912, lorsque Klee était associé à Wassily Kandinsky et au groupe du Blaue Reiter. Environ dix ans plus tard, Klee déclara que "les enfants, les fous et les peuples primitifs possèdent toujours - ou ont redécouvert - le pouvoir de voir. Tant ce qu'ils voient que les formes qui en découlent sont pour moi les reconfirmations les plus précieuses. Car quand nous regardons quelque chose que nous voyons tous la même chose" (op. cit. 487). L'idée de "voir"était importante dans le processus de Klee et "l'art primitif" était un moyen, ou un filtre, pour voir les choses d'une nouvelle manière, plus idéologique que référentielle. L'intérêt d'Alberto Giacometti et son contact avec des objets d'art Africain et Océanien significatifs ne peuvent pas être mis en doute, il appartenait à un cercle d'amis versés dans le prétendu art primitif, comme Josef Mueller, Michel Leiris et André Breton. Les croquis de 1929 basés sur des publications dans Cahiers d'arts manifestent encore plus de son incontestable intérêt (Wiesinger, L'Atelier d'Alberto Giacometti, Centre Pompidou, Paris, 2007, p.242, figs. 381 et 382). Dans la photo de l'artiste dans son atelier (Fig 4), une figure de reliquaire Kota repose fièrement sur son bureau. Celles de la collection Kahane (lots 5 et 6) ont inspiré beaucoup d'artistes modernes et sont une des formes les plus reconnaissables de sculptures africaines. Linéaire et abstrait, ces statues en bois sont recouvertes de laiton et de cuivre. Des artistes comme Arman continuèrent à être inspirés par les figures Kota et par le processus d'accumulation permettant d'obtenir une sculpture finale. On croit généralement que la tête de la figure Kota est soutenue par des jambes en forme de losange, mais on peut aussi voir le losange comme les bras ou le corps dans une perspective réduite. La légende raconte que Giacometti acheta une figure Kota auprès du sculpteur Serge Brignoni entre les années 1926 et 1930. Plus tard, Brignoni raconta à William Rubin qu'il pensait que cette figure Kota avait été l'inspiration de la moitié féminine du Couple (voir ibid, p.86, fig.81 pour une image du Couple en pierre, 1927). L'union de la forme ovode de la statuaire Kota avec un plan rectangulaire pour créer le corps de la figure en est une référence très précise par opposition à d'autres oeuvres africaines, comme les formes des cuillères Dan, qui l'inspirèrent aussi au milieu des années 1920. (Krauss dans Rubin, Vol 2, 1984, p.528, fn 13) Comme détaillé avec éloquence par William Rubin, la relation de Picasso avec l'art Africain, à la différence de Klee, peut-être montrée par des influences plus précises. (1984, pp. 240-341). "Plus important que n'importe quels emprunts visuels, la relation de Picasso avec les objets tribaux était empreinte d'une émotion intense, d'une force magique capable de nous affecter profondément. Ce qui était lié à sa compréhension des principes conceptuels réducteurs qui sont à la base de la représentation africaine" (op. cit. p. 268). Les représentations de la matresse de Picasso, Marie-Thérèse Walter, sont des exemples de cette inspiration directe, reprenant le style des énormes masques créés par les artistes Baga de Guinée et appelé (traditionnellement, mais par erreur) masques "Nimba". Picasso a vu une sculpture Baga "Nimba" dès 1907 lors d'une visite au Trocadéro (op. cit. p. 276). A la fin des années 1920, Picasso lui-même acquit un masque d'épaule Baga, très proche du style de la Baga de Kahane (Figs 5 et 7) et au même moment il débuta sa relation avec Marie-Thérèse Walter. Ces deux "femmes" sont donc entrées dans sa vie simultanément, Marie-Thérèse étant pour lui l'incarnation de la sensualité et, ainsi, de la fécondité et la fertilité. De la même faon, le masque Baga est lié culturellement à la fertilité - ce qui n'échappa pas à Picasso. Pour Tête de Femme (Marie-Thérèse Walter), 1931-1932 (Fig 6), il utilisa de l'argile, qu'il modela et pétrit de ses propres mains comme une manifestation physique de son sentiment envers son sujet et les formes inspirées par sa matresse et par l'architecture de sa sculpture Baga. Tous les artistes qui ont considéré l'art Africain comme le moyen de voir d'une faon moderne aurait srement été d'accord : Isidor Kahane avait un "oeil". S. K. Bibliographie: NCHS (extrait non attribué dans "Gelbin, Allan, Leuthold House", Modern house file in collection of the New Canaan Historical Society)(https://www.preservationnation.org/travel-and-sites/sites/north eastregion/new-canaan-ct/sites/leuthold-house.html) Rubin, ed., Primitivism in Twentieth-Century Art: Affinity of the Tribal and the Modern, vol 1 et 2, Museum of Modern Art, New York, 1984 The Kahane Collection: An International Story Isidor Kahane (1921-2004) is best known in the art world today for his important contributions in the field of Indian and Southeast Asian art. From the 1960s through the 1990s, with his guidance, some of the most important collections of Indian and Southeast Asian art, both public and private, European and American, were built. His imprimatur is attached to iconic and singularly exquisite works of art including the Kashmiri Crowned Buddha Shakyamuni, dated 714 now in the collection of the Asia Society, New York, Mr. and Mrs. John D. Rockefeller 3rd Collection [1979.44] (Fig 1). Kahanes entre to art and collecting is a personal story, someone with an innate aesthetic sensibility who chose to change career paths in the middle of his life. The story of the African art collection is also one with an international history spanning fifty years between Europe, America and Asia and Europe, again. Well-known for his discerning eye as an art collector and, later, an art dealer, Kahane was outgoing and charming and, at the same time, discreet and private. Only a few trusted friends knew of his African art collection and fewer still ever saw it firsthand. His African art collection was a personal pleasure for him and his wife, Elly Kahane, and is now, a revelation for others. After graduating from the Zurich Seidenwebschule (Silk Weaving School) in the early 1940s, Isidor Kahane began his career in Zurichs luxury textile industry at Abraham AG. They produced silk fabrics for legendary fashion houses such as Balenciaga, Yves Saint Laurent and Valentino. Elly and Isidor Kahane met while working together at Abraham, he as a textile stylist and she as a textile designer. Elly Kahane, an artist and designer herself, studied art and design at Zurichs well-known Kunstgewerbeschule in the early 1940s, under the Directorship of Johannes Itten, the well-known Expressionist painter. Formally trained in art, Elly encouraged her husband to take advantage of the cultural resources available to them, such as the Zurich Kunsthaus. The excursions for looking were for pleasure and inspiration. At Abraham, they worked for Gustav Zumsteg, who was a partner there and a renowned collector of modern art. His extraordinary collection included works by Picasso, Klee and Chagall. Today the restaurant established by Zumstegs family at the Bellevue in Zurich, Kronenhalle, is world-famous and still houses some of these treasures. Zumsteg encouraged Kahane to look at art to develop his own design sensibility. In 1946, Kahane decided to move to America, forgoing an opportunity to work in Paris for Zumsteg. Still pursuing his career in the textile industry during this time, he was commissioned by such luminaries as Christian Dior, then at the height of his New Look fame. Dior was so taken with Kahanes work that he insisted on dealing only with him. He became known in Paris as Le Roi du Jacquard for developing a new process for creating jacquard fabrics. In New York, Kahane pursued the interest in art piqued during his early Zurich years. Before he changed careers to become a dealer in Indian and Southeast Asian art in the 1960s, he began collecting art himself. The Kahanes were part of a circle of friends who were art collectors themselves Ben Heller, Gustav and Franyo Schindler and Adolph Leuthold. In the 1950s, Kahane met John J. Klejman (1906-1995), the renowned Madison Avenue New York gallerist. Klejmans gallery was influential to this second generation of American collectors of African and Oceanic art active in the 1950s and 1960s. His well-situated gallery with its ever-changing window displays intrigued established collectors, and, perhaps, more importantly, inspired and introduced new collectors to this field of art. One of Klejmans New York clients recently recalled that it was the shock of the old seen in those Madison Avenue windows that drew him to collect African and Oceanic art and Antiquities. Four of the six works of art in the collection were acquired through Klejman. Another notable personality in Kahanes African art adventure was Adolph Leuthold (see lots 2 and 4). He was a friend of Isidor dating back to his textile design days in Zurich. Leuthold also moved to New York after World War II as part of the textile industry. Encouraged by Isidor Kahane, Leuthold began collecting. He had a great eye and was drawn to Asian, Ancient and African art. As an example of his modern and adventurous spirit, he commissioned his home in Connecticut from the architect, Allan Gelbin in 1964. Gelbin was quoted as saying: "Owner and architect were determined to create an atmosphere free of past, imitative, cliche-ridden forms". The Leuthold House became very significant to architect Allan Gelbin, who later wrote, "[n]o study of my work is complete without this project. It was my first opportunity to be able to use a little imagination. My opportunities were great as my budget was limited" (NCHS). Likewise, Kahane knew the dealer, Emil Storrer in Zurich. Storrer traveled to Africa in 1951 for the first time. His name is attached to some of the most famous works of art from Mali and Ivory Coast now in the collections of the Rietberg Museum, Zurich (acc. no. RAF 257), the Barbier-Mueller Collection, Geneva (acc. no. 1006-3) and the Metropolitan Museum of Art, New York (acc. no. 1978.412.315). Kahane acquired the exquisite and rare Baule mask (lot 1) from him. While Kahane was living in New York, he made frequent trips to Europe for his work in textiles, which included trips to Paris for the fashion shows. This afforded him the opportunity to visit the museums and African art galleries in Paris. From Simone de Monbrison, mother of Paris dealer, Alain de Monbrison, Kahane acquired the astonishing Kota-Ndasa reliquary figure (lot 6). He also visited Jacques Kerchache often on these trips. A trip to Paris ultimately finalized the Kahanes acquisition of the Baga Dmba (lot 3). When the opportunity to acquire the sculpture was presented, it was compelling, but also required a strong financial commitment. The price - $8,000. To put this into perspective, he had not paid more than $1,900 for any works of art to date. However, Elly Kahanes only objection was that she feared the sculpture was too strong. After a trip to Paris during which she saw another Baga headdress in the collection of the Musée de l'Homme, she returned to New York ready for the Baga to come into their lives. The early 1970s brought changes for the Kahanes. They acquired the Fang and Dogon sculptures from Leuthold their African art collection was then fixed. They moved back to Zurich, and Isidor founded the highly successful arm of Spink & Son there. One of the highlights of his tenure being the sale of the famous and coveted Ernest Brummer collection - The Ernest Brummer Collection: Medieval Renaissance And Baroque Art, Vol I, and Ancient and Classical Art, Vol II, 16th to 19th October 1979. The Kahanes bought their home in the Ticino and this is where the collection has lived until today. Isidor Kahane was discerning and had impeccable taste. At a time when many ancient and non-Western works of good quality would have been available, with magnificent restraint he waited for the best works and declined those that did not meet his standards. He started on the right foot, with one early example from Kahanes collection in these days being an extraordinary Cycladic figure (Fig 2). The works of art that Isidor Kahane selected for his collection more than fifty years ago have withstood the test of time. He held true to these tenets buy what you love, less is more and stretch to acquire great works of art. Each of the six African works of art from the Kahane Collection is a masterpiece representing an extraordinary example of its type. When placed additionally in the context of the masterpieces of Indian and Southeast Asian Art and Antiquities that passed through his hands, Isidor Kahanes great capacity for learning, purity of aesthetic and unerring instinct for quality is clear. Why African Art? Isidor Kahane developed his artistic sensitivity and sensibility in Zurich surrounded by modern paintings and sculpture. When he started collecting, though, African art was his focus. In this path Kahane stayed true to his belief that one must buy the best in any field one pursues. Modern paintings of quality were already difficult to obtain. Instead Isidor and Elly in their quest for beauty and with a sense of purity set their sights on the source the works of art that originally inspired the modern artists African art. Isidor and Elly coveted a Klee watercolor that was on the market in New York in the 1960s. It was $30,000. Around the same time, they saw an exquisite Baule mask (lot 1) a sensational work of art equally modern aesthetically even more rare and conceptual culturally this mask was CHF12,500 (approximately $5,500). This masterpiece they could have. Paul Klee could have been inspired by this Baule mask. Even if he had seen it, which he did not, we would not know as Klee never copied the object or work that he might have seen, had access to, or owned a reproduction of. When inspired by another work of art, he limited his initial reference to a single aspect which he considered apart from a complex whole (Laude in Primitivism, 1984, vol 2, p. 488). However, the influence of so-called Primitive art is clear in Klees work and confirmed by these two statements: I should like to pacify those troubled spirits who to their puzzlement looked in vain [at the Galerie Tannhauser exhibition] for echoes of old Museum favorites such as El Greco. The fact is that primitivistic innovations are still taking place in art, of the sort that one might find in ethnographic collections or, quite simply, in ones own home, in the nursery. This statement is from a letter written in 1912, at which time Klee was associated with Wassily Kandinsky and the Blaue Reiter group. Some ten years later, Klee said that children, the insane, and primitive peoples all still have or have rediscovered the power to see. Both what they see and the forms that they derive from this are for me reconfirmations of the most valuable kind. For when we look at something we all see the same thing (op. cit. 487). The idea of seeing was important to Klees process and primtive art was one such vehicle, or filter, to see things in a new waymore ideological than referential. Alberto Giacomettis interest and exposure to significant African and Oceanic works of art cannot be questioned, and he was in a circle of friends involved in so-called primitive art, such as Josef Mueller, Michel Leiris and Andre Breton. Sketches from 1929 based on publications in Cahiers darts further demonstrate his decided interest (Wiesinger, L'Atelier dAlberto Giacometti, Centre Pompidou, Paris, 2007:242, figs 381 and 382). In the photo of the artist in his study (Fig 4), a Kota reliquary figure sits proudly on his desk. One of the most recognizable African sculptural forms, Kota figures like those from the Kahane collection (lots 5 and 6) inspired many modern artists. Linear and abstract, the wooden figures are overlaid with brass and copper. Artists like Arman continued to be inspired by the Kota figures and the process of accumulation in obtaining the final sculptural form. It is generally believed that the head of the Kota figure is supported by the lozenge-shaped legs, but, in fact, the imagery is more surreal as the lozenge represents arms and so one views the body from a foreshortened perspective. The legend is that Giacometti acquired a Kota figure from the sculptor Serge Brignoni in the years 1926 to 1930. Later, Brignoni recounted to William Rubin that he believed that this Kota figure was the inspiration for the female half of The Couple (see ibid, p. 86, fig 81 for an image of The Couple in stone, 1927). Combining the ovoid shape of Kota statuary with a plaquelike, rectangular plane to create the body of the figure is a very precise reference to this as opposed to other African works, like the Dan spoon forms, that also inspired him in the mid-1920s. (Krauss in Rubin, Vol 2, 1984, p. 528, fn 13). As eloquently and famously detailed by William Rubin, Picassos relationship to African art, unlike Klee, can be linked formally with more precise affinities and influences. (1984, pp. 240-341). More important than any visual borrowings was Picassos sense of tribal objects as charged with intense emotion, with a magical force capable of deeply affecting us. This went hand-in-hand with his understanding of the reductive conceptual principles that underlie African representation (op. cit. 268). One instance of direct inspiration are Picassos representations of his mistress, Marie-Thrse Walter, as the imagery relates to the enormous masks created by Baga artists of Guinea and referred to (historically, but erroneously) as Nimba masks. Picasso saw a Baga Nimba sculpture as early as 1907 during his visits to the Trocadéro (op cit 276). Sometime in the late 1920s, Picasso himself acquired a beautiful Baga headdress, closely related in style to the Kahane Baga (see Figs 5 and 7). It is during this time as well that Picasso began his relationship with Walter. It seems apropos for these two women to enter his life simultaneously, as Marie-Thrse was the incarnation of sensuality and, thereby, ideas of fecundity and fertility. Likewise, the Baga headdress has cultural associations with fertility neither the meaning nor associated form was lost on Picasso. In Head of a Woman (Marie-Thérèse Walter), 1931-1932, he uses clay, which he molded and squeezed with his own hands as a physical manifestation of his sentiment towards his subject to develop the forms inspired by his mistress and mapped by the architecture of his Baga sculpture. Each of these artists who looked to African art as a means to see in a modern way would have surely agreed: Isidor Kahane could see. S. K. References: NCHS (unattributed clipping in "Gelbin, Allan, Leuthold House", Modern house file in collection of the New Canaan Historical Society) (https://www.preservationnation.org/travel-and-sites/sites/northeastregi on/new-canaan-ct/sites/leuthold-house.html) Rubin, ed., Primitivism in Twentieth-Century Art: Affinity of the Tribal and the Modern, vol 1 and 2, Museum of Modern Art, New York, 1984
MASQUE BAOULE, ANGLO BA

RÉGION DE BÉOUMI, CÔTE D'IVOIRE

Details
MASQUE BAOULE, ANGLO BA
Région de Béoumi, Côte d'Ivoire
De forme circulaire et recouvert d'une feuille d'alliage de laiton, les traits du visage stylisés formant une croix avec au centre un disque concave en cupule, l'arête fine du nez se prolongeant au milieu du front, les yeux fendus en amande placés sous de fins sourcils en arc de cercle, la petite bouche ouverte aux lèvres projetées vers l'avant, motifs géométriques au "repoussé" sur les joues et le front, à l'arrière présence d'un mors en corde.
Hauteur: 19 cm. (7½ in.), largeur: 16 cm. (6¼ in.)
Provenance
Acquis auprès d'Emile Storrer, Zürich, 1966
Literature
Commentaire de Bohumil Holas, concernant le masque Baoule dans une lettre inédite et datée d'août 1966.
Holas, B., Arts Traditionnels de la Côte d'Ivoire, Tours, pp.156-157, pl.74
Winizki, E., Gesichter Afrikas, Kunstkreis, Luzerne, 1972, pp.54-55
Kerchache, J., Paudrat, J-L. et Stephan, L., L'Art Africain, Paris, 1988, p.387, no.391
Special notice
" f " : In addition to the regular Buyer’s premium, a commission of 7% (i.e. 7.49% inclusive of VAT for books, 8.372% inclusive of VAT for the other lots) of the hammer price will be charged to the buyer. It will be refunded to the Buyer upon proof of export of the lot outside the European Union within the legal time limit.(Please refer to section VAT refunds)
Further details
BAULE METAL MASK, ANGLO BA

Of circular form, delicate proportions and covered with brass alloy, the slender nose continuing in a medial ridge to the forehead and framed by close-set slit eyes and arched-shape eyebrows, a concave disc at the junction of the nose and eyebrows, geometric motifs on the cheeks and the forehead, the rear with the string bit.

The Baule Anglo ba mask from the Kahane collection
by Alain-Michel Boyer

In Ivory Coast, masks with metal ornament or covered with metal are rare except for a few used for the do by the Dioula (dyula), and especially amongst the people of the center of the country, who always preferred using wood. This emphasizes the importance of this very ancient baule mask, which is, until proven otherwise, a unique example, collected by Emil Storrer before 1966 and carefully preserved in the same collection until today.
Emil Storrer (1917-1989), the prestigious collector and dealer in Zurich, was in Ivory Coast during the fifties and became friends with many French farmers and lumber traders who gave him tips on interesting objects and from whom he bought several pieces (such as a beautiful Dan mask bought in March 1956 in the Man region, from an employee of the Nicklaus Company).
In 1953, during the Senufos iconoclast period of the Massa, which lead to the destruction or abandonment of masks and figures, he saved many objects from this fate, particularly an extraordinary pair of pombibele (sing. piombia) : one was sold to Nelson Rockefeller in 1958 and is now at the Metropolitan Museum of Art in New York and the other figure is now in the Rietberg Museum in Zurich. The reverse of the Baule moon mask reveals delicately methodical adze marks and the bit made of twisted strings which the dancer held between his teeth in order to keep the mask close to his face when he moved. The surface shows that it has been worn many times. Slightly damaged at the base,possibly from a fall, it was withdrawn from the cult and from any use, because a damaged mask cannot be used for any ritual and should be replaced by another one, more or less identical.
Connoisseurs and specialists first learned of this mask in 1967 as Bohumil Holas (then curator of the Abidjan Museum), illustrated the mask in a small volume, ed. CEDA, Arts traditionnels de la Côte d'Ivoire (pp.156-157). But Holas, who never worked in the field with the central tribes, and who described this mask in a few sentences, saw in it one of the archetypes of the rounded masks of the kplékplé used during a cult inspired by a few astral or atmospheric deities, called upon during changes of seasons (p.156). Two points of this sentence should be modified: where as this mask is named and represents the moon (anglo ba means the moon in Baule), the Baule never celebrated any celestial divinities, and seasonal changes did not play a role in these cults but for obvious practical reasons, the ceremonies using masks occurred more frequently during the dry season, whereas during winter time, both men and women were working in the fields.
Furthermore, this mask has no relation to the kplékplé, distinguished by a circular form of the face but also by ringed, thin and black horns with white and smooth ends which create, in perfect symmetry, together with another circle created by branches added during the dance, both extremities almost touch to show a powerful link with Nature.
Additionally, the sculptors of the kplékplé never used metal; whereas the originality of the Kahane moon-mask is the metal overlay which has been attached to the carved wood, hardened by fire. Polished before each dance to show its brightness, this metal created the illusion of gold, and was often used as a substitute in jewelry. The term Baule gold indicates poor quality gold where brass is used with gold as an alloy. For the Baule, however the yellow metal has its own power, much more than for their Yaure or Wan neighbors, and is therefore considered a strong substance.
Regardless, no other known moon-mask is covered with metal, rather they are known only in wood: see Vogel (Baule, African Art, Western Eyes, New Haven and London, Yale University Press, 1997/L'art baoulé, du visible à l'invisible, Paris, Adam Biro, 1999, p. 160-161) and in Boyer (Baule, Milan, Cinq Continents, 2008, plate 11). Today the moon-mask is painted with bright industrial paints. The origin of the moon-mask is most likely distant, in time and space, as we find a disk in the lower part of the Bwa plank mask, in Burkina Faso. The Yaures mn tr mask (moon crescent) - highly sacred, forbidden to women, only appearing at night - is completely different: the human face is placed under a crescent on a stand4. For the Baule, however, the mask appears during funerals for women or amusement dances, during day ceremonies, open to everyone and therefore called oti bla amuin, a womans favorite maskwhereas others are always worn by men. These ceremonies have different names, depending on the regions: in the sub-tribe of the Kod of the Béoumi region, its called bedwo, but in a nearby village, Diakohou, its called ajusu; in the sub-tribe of the Akw, its called mblo (or ngblo, nblo, ou ngo) or gbagba; near the Bandama river, its called djela, zaouli, flali, words used by the close Guro. Even if the names of the cults are different, the interventions of these masks in each ceremony are always immutable and organized: as a result, the moon-mask appears first, before the zoomorphic and the portrait-masks, to animate the dance area.
As opposed to the other Baule masks, such as the goli or other sacred masks forbidden to women, the dancers never wear a fiber hood, rather cloth is attached to the border of the mask to hide their bodies as shown by the holes on the border of this mask and tights cover the feet with raffia anklets. As Baule sculptors like to humanize any visible form, they inscribed a face into the circle. From an aesthetic point of view, this mask is different from the usual Baule style as it is much more stylized, only showing the essential, and only keeping features of the human face masks like the kpwan or ndoma (portrait-masks). Inside the disk, the face is reduced to a few geometrical features in low relief. Through to a very pure design, it captures the essence and allusion replaces assertion, with a clever play of straight and curved lines, which in other cultures could be a type of calligraphy. Each detail speaks to great pureness of lines a cross made by two thin ridges, one vertical, the other horizontal, meeting at their center, the base of the nose with a slightly concave circle, echoes the disc-shaped face, the arch of the eyebrow, the eyelids, the semi-closed eyes, drawing delicate crescents balanced on the horizontal line. In a beautiful counterpoint, the vertical line falls precisely from the base of the protuberant and triangular nose and to the rectangular and lightly drawn mouth. From its apparent simplification results a rigorous synthesis, as if the face would play the role of an inscription - by decisive lines, a tense structure and clever volume unity the artist, with executed the mask with masterly authority. This refined image, liberated from movement, but charged by an intense sensitivity, dissects the genius of the ellipse with an extreme subtlety.
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Lot Essay

Le masque Baoule Anglo ba de la collection Kahane
par Alain-Michel Boyer

En Côte d'Ivoire, les masques en métal ou ornés de parties métalliques sont rares - si l'on excepte quelques-uns parfois en usage dans le do des Dioula (dyula), à plus forte raison chez les peuples du Centre, qui ont toujours privilégié le bois. C'est dire l'importance de ce masque baule, très ancien, et qui s'impose, jusqu'à preuve du contraire, comme un exemplaire absolument unique, collecté par Emil Storrer en 1966, et précieusement conservé dans la même collection jusqu'à aujourd'hui.
Emil Storrer (1917-1989), prestigieux collectionneur et marchand de Zürich, présent en Côte d'Ivoire au cours des années cinquante, devint l'ami de beaucoup de planteurs franais et de négociants en bois, qui lui donnaient des indications sur des pièces intéressantes et auxquels il achetait des objets (tel un beau masque dan, acquis en mars 1956 dans la région de Man, auprès d'un employé de la maison Nicklaus). En 1953, alors que le mouvement iconoclaste du Massa, chez les Senufo, conduisait à la destruction ou à l'abandon des masques et des statues, il sauva de nombreux objets, notamment deux exceptionnels pombibele (sing. piombia) : l'un fut vendu en 1958 à Nelson Rockefeller, et se trouve aujourd'hui au MET, alors que l'autre figure, masculine, de cette paire, appartient au Musée Rietberg à Zurich.
Ce masque-lune des Baule, dont le revers porte encore les marques de l'herminette, a conservé son "mors", fait de cordes torsadées, que le danseur serrait entre ses dents, afin de coller le masque contre son propre visage et l'empêcher d'osciller : cette surface atteste qu'il a été porté lors de nombreuses danses. Légèrement endommagé à la base, sans doute lors d'une chute, il a ensuite été, pour cette raison même, retiré du culte et de tout usage, car un masque détérioré ne peut plus participer à une cérémonie, et doit être remplacé par un autre, plus ou moins identique.
Ce masque attira l'attention des amateurs et des spécialistes pour la première fois en 1969 grâce à Bohumil Holas (alors conservateur du musée d'Abidjan), dans un petit volume illustré, aux éditions CEDA, Arts traditionnels de la Côte d'Ivoire (pages 156-157). Mais Holas, qui n'a jamais travaillé sur le terrain chez les peuples du Centre, et qui décrit cette pièce en quelques lignes, vit en elle "l'un des archétypes des masques discoïdes de la catégorie des kplékplé (..) au service d'un culte inspiré par quelques déités à caractère astral ou atmosphérique, invoquées lors des changements de saisons "(p. 156). Phrase qui mérite d'être rectifiée sur deux points : bien que ce masque représente la lune et porte son nom (anglo ba signifiant "la lune " en langue baule), jamais ce peuple n'a en aucune faon célébré de quelconques divinités célestes, et les changements de saisons ne tiennent aucun rôle dans les cultes - bien que, pour d'évidentes raisons pratiques, les cérémonies masquées soient plus fréquentes en saison sèche qu'en hivernage, au cours duquel les activités agricoles retiennent hommes et femmes dans les champs. En outre, ce masque n'est en rien rattaché au kplékplé, qui se caractérise non seulement par la forme circulaire du visage, mais aussi par des cornes noires, fines, annelées jusqu'aux deux tiers, aux bouts blancs et lisses, et qui constituent, en une rigoureuse symétrie, un autre cercle, puisqu'elles se touchent presque à leur extrémité avec, lors de la danse, des rameaux, qui signent l'appartenance à la nature.
Bien plus : jamais les sculpteurs du kplékplé n'ont eu recours à une pièce de métal, alors que l'originalité de ce masque-lune est d'être constitué d'une plaque de laiton fixée sur une âme de bois durci au feu. Frotté avant les danses pour lui rendre tout son éclat, ce métal pouvait donner l'illusion de l'or, dont il est parfois un ersatz, un substitut, lors de la fabrication de certains bijoux --- et de toute faon le cuivre ou le laiton sont presque toujours utilisés en alliage avec l'or, puisque ce que l'on appelle "or baule" est de très bas titre. Mais le métal jaune, pour les Baule infiniment plus que pour leurs voisins Yaure ou Wan, possède une puissance propre, qui fait de lui une substance considérée comme "forte" . Quoi qu'il en soit, tous les autres masques-lunes connus ne sont nullement ornés d'une plaque de métal, mais uniquement sculptés dans le bois : on en trouvera des photographies dans le livre de Susan Vogel (Baule, African Art, Western Eyes, New Haven and London, Yale University Press, 1997/L'art baoulé, du visible à l'invisible, Paris, Adam Biro, 1999, p. 160-161) et dans celui d'Alain-Michel Boyer (Baule, Milan, Cinq Continents, 2008, planche 11). Aujourd'hui, le masque-lune est recouvert de couleurs vives, avec des peintures industrielles.
Les origines du masque-lune sont vraisemblablement lointaines, dans le temps et dans l'espace, car on retrouve cette forme de disque à la base des masques-planches des Bwa, au Burkina Faso. Alors que chez les Yaure voisins le masque ménè trè ("croissant de lune"), éminemment sacré, interdit aux femmes, est d'apparition exclusivement nocturne - et de composition totalement différente, puisque le visage humain est surmonté d'un croissant sur un support, chez les Baule, le masque-lune apparat au cours de danses de divertissement ou de funérailles de femmes, lors de cérémonies diurnes, ouvertes à tous, et à ce titre il est parfois surnommé oti bla amuin, "le masque favori des femmes", bien qu'il soit toujours porté par un homme. Ces cérémonies portent différents noms, selon les régions : dans le sous-groupe des Kodè de la région de Béoumi, il se nomme bedwo, alors qu'un village proche, Diakohou, les appelle ajusu ; dans le sous-groupe des Akwé, il prend le nom de mblo (ou encore ngblo, nblo, ou ngo) ou gbagba ; aux abords du fleuve Bandama, on l'appelle djela, zaouli, flali, mots qui proviennent des Guro voisins. Si les dénominations des cultes sont fluctuantes, les interventions des différents masques dans chaque cérémonie sont immuables et hiérarchisées : à ce titre, le masque-lune apparaît en premier, avant les masques zoomorphes et les masques-portraits, pour "animer" l'aire de danse. A l'encontre des autres masques des Baule, comme ceux du goli ou les masques sacrés des hommes interdits aux femmes, les danseurs qui les arborent ne portent jamais de cape en fibres végétales, mais uniquement, pour dissimuler leur corps, des pièces de tissus, fixées sur les rebords du masque, comme en témoignent les orifices pratiqués sur les rebords de cet exemplaire et des sortes de collants enveloppent les pieds alors que les chevilles sont entourées de raphia sec.
Comme les sculpteurs baule se plaisent à humaniser toute forme visible, ils ont inscrit un visage dans le cercle. En effet, sur le plan plastique, ce masque diffère de la manière baule habituelle par une stylisation poussée à l'extrême, qui n'accorde place qu'à l'essentiel, mais qui conserve néanmoins certaines marques de la construction des masques à visage humain comme le kpwan ou les ndoma (masques-portraits). A l'intérieur de la clôture du disque, le visage semble se réduire à quelques formes géométriques en bas-relief, grâce à un dessin très pur, o ne règne que l'élémentaire et o l'allusion prend la place de l'affirmation, avec un jeu savant de droites et de courbes, au service de ce qui pourrait paratre, dans d'autres civilisations, une calligraphie, chaque détail contribuant à conférer une grande pureté de lignes : une croix constituée de deux minces arêtes, l'une verticale, l'autre horizontale, qui se rencontrent en leur centre ; la racine du nez marquée par un cercle légèrement concave, écho du disque qui définit la forme générale du visage ; les arcades sourcilières, les paupières, les yeux mi-clos, traant des arcs de cercle en des plis délicats, s'appuient sur la ligne horizontale, alors que la ligne verticale s'épanouit à sa base par un nez triangulaire protubérant et une bouche rectangulaire discrètement dessinée. De son apparent schématisme résulte une rigoureuse synthèse, comme si, en s'organisant en dessin, le visage jouait le rôle d'une inscription : par des traits décisifs, une nerveuse structure et une savante unité de volumes, qui tirent de la sreté de leur exécution une magistrale autorité, cette figure épurée, délivrée du mouvement, mais chargée d'une intense sensibilité, manifeste le génie de l'ellipse avec un extrême raffinement.

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