Lot Essay
Ces splendides candélabres sont originaux tant par l'association audacieuse de la porcelaine rose (très en vogue depuis sa création à Sèvres en 1758) et du bronze doré que par leur dessin autour d'une caryatide dont nous ne connaissons que très peu d'exemples (on retrouve ces caryatides sur une pendule illustrée dans le Tardy, La Pendule Française dans le Monde, Tardy, 1981, p.64.). La figure humaine revient en force sous le style néoclassique alors qu'elle avait presque disparu du répertoire rocaille qui préférait les motifs végétaux. Au coeur de la création -comme sur nos candélabres-, la figure humaine fut répandue aussi bien sur les pendules que les flambeaux, vases ou chenets par de nombreux sculpteurs tels que Berruer, Clodion, Monnot, Foucou, Lecomte ou Lorta. La plupart de cette production nous est malheureusement parvenue anonymement aujourd'hui mais le nom de Louis-Simon Boizot (1743 - 1809) revient fréquemment tans sa production était grande et de la meilleure qualité. Il fut responsable de l'atelier de sculpture de Sèvres à partir de 1773 où il créa de nombreux modèles de biscuit mais aussi de candélabres, chenets et pendules en association avec les plus grands bronziers de son temps : Pierre-Philippe Thomire, Pierre Gouthière et François Rémond.
Bien que la porcelaine rose de nos candélabres ne porte pas de marque de la manufacture de Sèvres, nous pouvons néanmoins supposer qu'elle en provient. L'extrême qualité de ciselure -proche de l'orfèvrerie- des bronzes dorés de nos candélabres laisse aussi supposer une exécution par l'un des trois bronziers cités plus haut, Thomire, Gouthière ou Gouthière. Enfin, le dessin de nos caryatides se rapproche de figures de Boizot par l'allongement des bras soutenant un bouquet de lumière, les doigts effilés, les drapés à l'antique moulant pudiquement le corps féminin, le découvrement partiel de la poitrine et le modelé du visage. Ces figures de Boizot sont employées dans la composition d'une paire de candélabres en biscuit de Sèvres et bronze doré, fruit de la collaboration du sculpteur et de Thomire (illustrées dans Louis-Simon Boizot 1743 - 1809, Sculpteur du roi et directeur de l'atelier de sculpture à la Manufacture de Sèvres, Catalogue d'exposition éponyme au Musée Lambinet de Versailles en octobre 2001- février 2002, Editions Somogy, Versailles, 2001, p.278-279). D'autres figures féminines de Boizot sont proches de nos caryatides telles que celles ornant une pendule exécutée par Rémond en 1790 et celles ornant les anses d'une paire de vases en porcelaine de Sèvres conservés au château de Versailles (illustrée dans op.cit., p. 258 et 290).
LES COLLABORATIONS DE BOIZOT AVEC GOUTHIERE, THOMIRE ET REMOND La première collaboration de Boizot avec Gouthière (1732-1813, maître doreur-ciseleur en 1758) débuta en 1771 à l'occasion d'une pendule commandée par la ville d'Avignon en l'honneur du marquis de Rochechouart. Gouthière introduisit Boizot dans le cercle artistique de la comtesse du Barry qui commanda au sculpteur deux figures de marbre en 1772 et 1773. Boizot lui fournit ensuite le modèle de deux girandoles qui devaient être exécutées en argent et que l'on retrouve dans un registre de Gouthière du 31 décembre 1773. Ces girandoles ne semblent pas avoir été exécutées mais les modèles réapparurent en 1773 sous le nom L'Amour et l'Amitié et Zéphyr et Flore, puis ils furent diffusés en biscuit de Sèvres. La comtesse du Barry introduisit ensuite Boizot aux Bâtiments du roi et il collabora de nouveau avec Gouthière sur une cheminée de l'appartement de la comtesse au château de Fontainebleau. Gouthière a peut-être fait appel à Boizot pour la conception du pavillon de Bagatelle par Bélanger pour le comte d'Artois. Le sculpteur est aussi peut-être l'auteur des sphinges des chenets du salon. Malheureusement, les documents nous manquent sur l'activité de Gouthière et certaines collaborations entre les deux artistes ne nous sont pas parvenues.
Pour ce qui est de la première collaboration de Thomire (1751-1843, maître fondeur en 1772) et de Boizot, elle pourrait être antérieure à l'arrivée de Boizot à la Manufacture de Sèvres en 1773. Celui-ci proposa au comte d'Angiviller que Thomire succédât à Duplessis comme bronzier de la Manufature. Après quelques réticences, Thomire s'assura la quasi exclusivité de la production de bronze pour la Manufacture. Parmi leurs premières oeuvres communes, citons une paire de vases Medicis et une paire de candélabres en biscuit et bronze doré mentionnés plus haut. La collaboration Thomire/Boizot pourrait être aussi à l'origine du candélabre de l'indépendance Américaine créé en 1785 par Thomire pour le cabinet d'angle de Louis XVI à Versailles. Leur collaboration ne se cantonna pas seulement à la Manufacture de Sèvres et Thomire a pu faire appel à Boizot pour des commandes du garde meuble de la Couronne, de la reine et surtout pour de marchands merciers tels que Dominique Daguerre puis Lignereux, son successeur. Boizot n'était cependant pas le seul sculpteur à qui Thomire faisait appel tant sa production était importante et avide de nouveauté. Pour le garde meuble de la Couronne et de la reine, le duo collabora sur plusieurs pièces documentées dont la plus fameuse est le coffre à diamant de Marie-Antoinette à Versailles en 1787 orné lui aussi de caryatides. Enfin, les archives sur les marchands merciers ne nous laissent que supposer que Boizot est à l'origine des fameuses vestales et porteuses de pendules exécutées par Thomire.
Boizot collabora aussi avec François Rémond (1747-1812, matre doreur en 1774) à de nombreuses reprises comme l'atteste une partie de la comptabilité de Rémond récemment réapparue (voir Christian Baulez, les bronziers Gouthière, Thomire et Rémond dans le catalogue de l'exposition op.cit., p.283). Le nom du sculpteur y est fréquemment mentionné mais pas systématiquement si bien qu'on peut supposer que d'autres oeuvres de Rémond sont nées de leur collaboration. Rémond travailla aussi ponctuellement avec d'autres sculpteurs tels que Jean-Baptiste Budelot pour une commande de girandoles en 1787. Boizot et Rémond intervinrent régulièrement sur des oeuvres de Roentgen mais aussi sur des commandes de Daguerre. Malheureusement les documents manquent sur certaines production et on ne peut qu'attribuer à Boizot les splendides figures de chameaux, négrillons et amours ornant la garniture de cheminée livrée à Versailles en 1781 et 1782 pour le boudoir turc du comte d'Artois. Une collaboration plus documentée concerne certaines pendules comme la fameuse pendule à l'Etude dont Boizot créa les figures et les bas-reliefs. Pour ce qui est du luminaire, Rémond fournit de nombreux flambeaux, girandoles et bras de lumière à des fondeurs, des amateurs ou des marchands tels que le duc de Penthièvre, le comte d'Artois et Daguerre. Il créa ainsi de " petites girandoles à figure portant cornet, modèle de Boizot, femme " (voir Christian Baulez, op.cit., p. 293 et la vente Christie's Londres, 20 avril 1985, lot 52). Malheureusement, le troisième volume du livre-journal de Rémond a été perdu et une partie des paiements à ses ouvriers à partir de 1788 est perdue, ce qui limite la connaissance de ses collaborations sur une période particulièrement riche pour Rémond qui livrait à cette époque de nombreux objets pour le prince de Galles et pour le banquier Jean-Joseph de Laborde.
Référence bibliographique :
Louis-Simon Boizot 1743 - 1809, Sculpteur du roi et directeur de l'atelier de sculpture à la Manufacture de Sèvres, Catalogue d'exposition éponyme au Musée Lambinet de Versailles en octobre 2001- février 2002, Editions Somogy, Versailles, 2001.
Bien que la porcelaine rose de nos candélabres ne porte pas de marque de la manufacture de Sèvres, nous pouvons néanmoins supposer qu'elle en provient. L'extrême qualité de ciselure -proche de l'orfèvrerie- des bronzes dorés de nos candélabres laisse aussi supposer une exécution par l'un des trois bronziers cités plus haut, Thomire, Gouthière ou Gouthière. Enfin, le dessin de nos caryatides se rapproche de figures de Boizot par l'allongement des bras soutenant un bouquet de lumière, les doigts effilés, les drapés à l'antique moulant pudiquement le corps féminin, le découvrement partiel de la poitrine et le modelé du visage. Ces figures de Boizot sont employées dans la composition d'une paire de candélabres en biscuit de Sèvres et bronze doré, fruit de la collaboration du sculpteur et de Thomire (illustrées dans Louis-Simon Boizot 1743 - 1809, Sculpteur du roi et directeur de l'atelier de sculpture à la Manufacture de Sèvres, Catalogue d'exposition éponyme au Musée Lambinet de Versailles en octobre 2001- février 2002, Editions Somogy, Versailles, 2001, p.278-279). D'autres figures féminines de Boizot sont proches de nos caryatides telles que celles ornant une pendule exécutée par Rémond en 1790 et celles ornant les anses d'une paire de vases en porcelaine de Sèvres conservés au château de Versailles (illustrée dans op.cit., p. 258 et 290).
LES COLLABORATIONS DE BOIZOT AVEC GOUTHIERE, THOMIRE ET REMOND La première collaboration de Boizot avec Gouthière (1732-1813, maître doreur-ciseleur en 1758) débuta en 1771 à l'occasion d'une pendule commandée par la ville d'Avignon en l'honneur du marquis de Rochechouart. Gouthière introduisit Boizot dans le cercle artistique de la comtesse du Barry qui commanda au sculpteur deux figures de marbre en 1772 et 1773. Boizot lui fournit ensuite le modèle de deux girandoles qui devaient être exécutées en argent et que l'on retrouve dans un registre de Gouthière du 31 décembre 1773. Ces girandoles ne semblent pas avoir été exécutées mais les modèles réapparurent en 1773 sous le nom L'Amour et l'Amitié et Zéphyr et Flore, puis ils furent diffusés en biscuit de Sèvres. La comtesse du Barry introduisit ensuite Boizot aux Bâtiments du roi et il collabora de nouveau avec Gouthière sur une cheminée de l'appartement de la comtesse au château de Fontainebleau. Gouthière a peut-être fait appel à Boizot pour la conception du pavillon de Bagatelle par Bélanger pour le comte d'Artois. Le sculpteur est aussi peut-être l'auteur des sphinges des chenets du salon. Malheureusement, les documents nous manquent sur l'activité de Gouthière et certaines collaborations entre les deux artistes ne nous sont pas parvenues.
Pour ce qui est de la première collaboration de Thomire (1751-1843, maître fondeur en 1772) et de Boizot, elle pourrait être antérieure à l'arrivée de Boizot à la Manufacture de Sèvres en 1773. Celui-ci proposa au comte d'Angiviller que Thomire succédât à Duplessis comme bronzier de la Manufature. Après quelques réticences, Thomire s'assura la quasi exclusivité de la production de bronze pour la Manufacture. Parmi leurs premières oeuvres communes, citons une paire de vases Medicis et une paire de candélabres en biscuit et bronze doré mentionnés plus haut. La collaboration Thomire/Boizot pourrait être aussi à l'origine du candélabre de l'indépendance Américaine créé en 1785 par Thomire pour le cabinet d'angle de Louis XVI à Versailles. Leur collaboration ne se cantonna pas seulement à la Manufacture de Sèvres et Thomire a pu faire appel à Boizot pour des commandes du garde meuble de la Couronne, de la reine et surtout pour de marchands merciers tels que Dominique Daguerre puis Lignereux, son successeur. Boizot n'était cependant pas le seul sculpteur à qui Thomire faisait appel tant sa production était importante et avide de nouveauté. Pour le garde meuble de la Couronne et de la reine, le duo collabora sur plusieurs pièces documentées dont la plus fameuse est le coffre à diamant de Marie-Antoinette à Versailles en 1787 orné lui aussi de caryatides. Enfin, les archives sur les marchands merciers ne nous laissent que supposer que Boizot est à l'origine des fameuses vestales et porteuses de pendules exécutées par Thomire.
Boizot collabora aussi avec François Rémond (1747-1812, matre doreur en 1774) à de nombreuses reprises comme l'atteste une partie de la comptabilité de Rémond récemment réapparue (voir Christian Baulez, les bronziers Gouthière, Thomire et Rémond dans le catalogue de l'exposition op.cit., p.283). Le nom du sculpteur y est fréquemment mentionné mais pas systématiquement si bien qu'on peut supposer que d'autres oeuvres de Rémond sont nées de leur collaboration. Rémond travailla aussi ponctuellement avec d'autres sculpteurs tels que Jean-Baptiste Budelot pour une commande de girandoles en 1787. Boizot et Rémond intervinrent régulièrement sur des oeuvres de Roentgen mais aussi sur des commandes de Daguerre. Malheureusement les documents manquent sur certaines production et on ne peut qu'attribuer à Boizot les splendides figures de chameaux, négrillons et amours ornant la garniture de cheminée livrée à Versailles en 1781 et 1782 pour le boudoir turc du comte d'Artois. Une collaboration plus documentée concerne certaines pendules comme la fameuse pendule à l'Etude dont Boizot créa les figures et les bas-reliefs. Pour ce qui est du luminaire, Rémond fournit de nombreux flambeaux, girandoles et bras de lumière à des fondeurs, des amateurs ou des marchands tels que le duc de Penthièvre, le comte d'Artois et Daguerre. Il créa ainsi de " petites girandoles à figure portant cornet, modèle de Boizot, femme " (voir Christian Baulez, op.cit., p. 293 et la vente Christie's Londres, 20 avril 1985, lot 52). Malheureusement, le troisième volume du livre-journal de Rémond a été perdu et une partie des paiements à ses ouvriers à partir de 1788 est perdue, ce qui limite la connaissance de ses collaborations sur une période particulièrement riche pour Rémond qui livrait à cette époque de nombreux objets pour le prince de Galles et pour le banquier Jean-Joseph de Laborde.
Référence bibliographique :
Louis-Simon Boizot 1743 - 1809, Sculpteur du roi et directeur de l'atelier de sculpture à la Manufacture de Sèvres, Catalogue d'exposition éponyme au Musée Lambinet de Versailles en octobre 2001- février 2002, Editions Somogy, Versailles, 2001.