Lot Essay
JEAN-PHILIPPE BEAULIEU
Au sein du corpus flamboyant des arts de Nouvelle-Irlande trône le livika, un tambour à friction surnommé le violon des morts par les Allemands au début du XXe siècle. Cet unique instrument de musique fut documenté en 1909 par Augustin Krämer de l’expédition navale allemande. « Le nom livika est dérivé de l’oiseau calao et habituellement sa tête est gravée à l’extrémité du tambour. La face inférieure du bec et la face inférieure du livika comportent trois langues, dont deux peuvent être considérées comme des pattes et la troisième comme une queue tournée vers l'intérieur. On enduit ses mains de résine, comme on traite les cordes d’un violon. On caresse le livika de la tête vers la queue, la main passant sur ces trois langues sculptées qui chantent trois notes distinctes. Ces sons sont si puissants et perçants qu'ils causent de la terreur dans la nuit. » Le chant du livika est souvent interprété comme le chant d’un oiseau des puissances chtoniennes de l’inframonde où règne l’ancêtre primordial Moroa.
L’aire d’utilisation couvre toute la région dont la vie rituelle était dictée par les rites malangan, y compris les ulis, du centre jusqu’au nord de la Nouvelle-Irlande, ainsi que les îles Tabar. Les livika, contrairement aux malangan, étaient préservés soigneusement au sein des clans et étaient souvent transmis à travers les générations. Ce sont des objets rares, et nous avons identifié un corpus d’une centaine de livika en collections privées et publiques, avec parfois des informations précises d’acquisition. Le livika Barbier-Mueller est proche des exemplaires acquis par Wilhelm Wostrack en 1908 sur les contreforts du plateau Lelet, et par Augustin Krämer à Lelet en 1909. Ils partagent la forme générale, avec une crête et une queue, trois langues fermant des chambres de résonnance. Ils ont des yeux en opercule de turbo, avec les paupières soulignées par une rangée de triangles, une bouche aux dents pointues. La première chambre de résonnance est entourée par une fine ligne. Nous n’avons trouvé ces éléments sculptés uniquement sur les livika acquis au centre de la Nouvelle-Irlande, la même aire dont sont originaires les ulis, ce qui suggère donc que le livika Barbier-Mueller en soit aussi originaire.
At the heart of the flamboyant corpus of New Ireland arts there is the livika, a friction drum referred to as the fiddle of the dead by the Germans in the early 20th century. This unique musical instrument was documented in 1909 by Augustin Krämer of the German naval expedition. “The name livika is derived from the hornbill bird, and its head is usually engraved on the end of the drum. The underside of the beak and the underside of the livika comprise three tongues, two of which can be thought of as legs while the third has an inward-turning tail. Hands are coated with resin, like the strings on a violin. The livika is caressed from head to tail, the hand passing over the three sculpted tongues, which sing out three distinct notes. These sounds are so powerful and piercing that they cause terror when heard in the night.” The livika's tune is often interpreted as the song of a bird from the Chtonian powers of the underworld, where the primordial ancestor Moroa reigns.
The area of use covers the whole region, whose ritual life was dictated by Malangan rites, including the ulis from central to northern New Ireland, as well as the Tabar Islands. The livikas, unlike the malangans, were carefully preserved within clans and often passed down through generations. They are rare objects, and we have identified a corpus of around 100 livikas in private and public collections, sometimes with precise acquisition information. The Barbier-Mueller livika is close to those acquired by Wilhelm Wostrack in 1908 at the foothills of the Lelet plateau, and by Augustin Krämer in Lelet in 1909. They share the same general shape, with a crest and a tail, its three tongues closing resonance chambers. They have turbo-lid eyes, with eyelids highlighted by a row of triangles, and a mouth with pointed teeth. The first resonance chamber is surrounded by a thin line. We found these sculptural elements only on the livikas acquired in central New Ireland, the same area from which the ulis originated, suggesting that the Barbier-Mueller livika also came from there.
Au sein du corpus flamboyant des arts de Nouvelle-Irlande trône le livika, un tambour à friction surnommé le violon des morts par les Allemands au début du XXe siècle. Cet unique instrument de musique fut documenté en 1909 par Augustin Krämer de l’expédition navale allemande. « Le nom livika est dérivé de l’oiseau calao et habituellement sa tête est gravée à l’extrémité du tambour. La face inférieure du bec et la face inférieure du livika comportent trois langues, dont deux peuvent être considérées comme des pattes et la troisième comme une queue tournée vers l'intérieur. On enduit ses mains de résine, comme on traite les cordes d’un violon. On caresse le livika de la tête vers la queue, la main passant sur ces trois langues sculptées qui chantent trois notes distinctes. Ces sons sont si puissants et perçants qu'ils causent de la terreur dans la nuit. » Le chant du livika est souvent interprété comme le chant d’un oiseau des puissances chtoniennes de l’inframonde où règne l’ancêtre primordial Moroa.
L’aire d’utilisation couvre toute la région dont la vie rituelle était dictée par les rites malangan, y compris les ulis, du centre jusqu’au nord de la Nouvelle-Irlande, ainsi que les îles Tabar. Les livika, contrairement aux malangan, étaient préservés soigneusement au sein des clans et étaient souvent transmis à travers les générations. Ce sont des objets rares, et nous avons identifié un corpus d’une centaine de livika en collections privées et publiques, avec parfois des informations précises d’acquisition. Le livika Barbier-Mueller est proche des exemplaires acquis par Wilhelm Wostrack en 1908 sur les contreforts du plateau Lelet, et par Augustin Krämer à Lelet en 1909. Ils partagent la forme générale, avec une crête et une queue, trois langues fermant des chambres de résonnance. Ils ont des yeux en opercule de turbo, avec les paupières soulignées par une rangée de triangles, une bouche aux dents pointues. La première chambre de résonnance est entourée par une fine ligne. Nous n’avons trouvé ces éléments sculptés uniquement sur les livika acquis au centre de la Nouvelle-Irlande, la même aire dont sont originaires les ulis, ce qui suggère donc que le livika Barbier-Mueller en soit aussi originaire.
At the heart of the flamboyant corpus of New Ireland arts there is the livika, a friction drum referred to as the fiddle of the dead by the Germans in the early 20th century. This unique musical instrument was documented in 1909 by Augustin Krämer of the German naval expedition. “The name livika is derived from the hornbill bird, and its head is usually engraved on the end of the drum. The underside of the beak and the underside of the livika comprise three tongues, two of which can be thought of as legs while the third has an inward-turning tail. Hands are coated with resin, like the strings on a violin. The livika is caressed from head to tail, the hand passing over the three sculpted tongues, which sing out three distinct notes. These sounds are so powerful and piercing that they cause terror when heard in the night.” The livika's tune is often interpreted as the song of a bird from the Chtonian powers of the underworld, where the primordial ancestor Moroa reigns.
The area of use covers the whole region, whose ritual life was dictated by Malangan rites, including the ulis from central to northern New Ireland, as well as the Tabar Islands. The livikas, unlike the malangans, were carefully preserved within clans and often passed down through generations. They are rare objects, and we have identified a corpus of around 100 livikas in private and public collections, sometimes with precise acquisition information. The Barbier-Mueller livika is close to those acquired by Wilhelm Wostrack in 1908 at the foothills of the Lelet plateau, and by Augustin Krämer in Lelet in 1909. They share the same general shape, with a crest and a tail, its three tongues closing resonance chambers. They have turbo-lid eyes, with eyelids highlighted by a row of triangles, and a mouth with pointed teeth. The first resonance chamber is surrounded by a thin line. We found these sculptural elements only on the livikas acquired in central New Ireland, the same area from which the ulis originated, suggesting that the Barbier-Mueller livika also came from there.