Lot Essay
NORMAN ABRAMOVIC
in Arts & Cultures, 2002, pp. 234-237
L'île Saibai, d'une surface considérable par rapport aux autres îles du détroit, est située à proximité de la côte sud-est de Nouvelle-Guinée, en face de la région dite Daudai. On n'y confectionnait pas de masques en écaille de tortue et le travail du bois, abondant, était une source de revenu importante car les canots, les tambours et même certains masques ou autres sculptures sacrées s'exportaient vers le sud. II est possible d'ailleurs qu'une partie de ces sculptures ait elle-même été importée de la vaste région Daudai.
Pour en revenir aux masques, il semble que le seul à avoir été utilisé à Saibai soit celui qui porte le nom du rite de fertilité mawa, une cérémonie qui avait lieu en automne, après les récoltes du fruit de l'arbre ubar (une prune sauvage). Une vingtaine de ces masques en bois sont connus. Tous ont été acquis dans la deuxième moitié du XIXe siècle, et tous ont des caractéristiques stylistiques qui les apparentent à l'art de la région Daudai, sans ressemblance avec les visages humains en écaille de tortue des régions plus au sud du détroit de Torrès.
La date d'acquisition du masque mawa des collections Barbier-Mueller est inconnue. Cet objet a été reproduit pour la première fois, entouré de sagaies comme un centre de panoplie, sur la couverture d'un petit catalogue édité en 1900 par l'Aquarium de Melbourne pour l'inauguration de l'exposition de sa collection « d'œuvres de sauvages ». L'Aquarium ayant été victime d'un terrible incendie dans les années 30, sa collection fut vendue. Le masque devint la propriété de Frédérick Cooper Smith (Mount Dandenong, Melbourne) dont les héritiers se séparèrent. Il fut acquis à Londres par Jean Paul Barbier-Mueller en 1973.
*
Au sein du corpus déjà très restreint, le masque de la collection Barbier-Mueller occupe une place parmi les exemplaires les plus imposants connus. On remarque notamment l’extraordinaire complexité graphique et sculpturale qui le caractérisent, tout en faisant le chef-d’œuvre du genre, exceptionnel et pratiquement hors pair. Pour des œuvres similaires, on peut citer l’exemplaire du British Museum acquis par MacFarlane en 1885 et ceux du Museum für Völkerkunde Dresden, reproduits dans Tiesler, F., Die Kunst Neuguineas, Dresde, 2023, vol. 1, pp. 292 et 293, n° 138 et 139.
NORMAN ABRAMOVIC
in Arts & Cultures, 2002, pp. 234-237
Saibai Island, which spans a considerable area compared to the other islands in the Torres Strait, is located close to the southeast coast of New Guinea, opposite the Daudai region. No tortoiseshell masks were made here, however abundant woodworking was an important source of income, as canoes, drums and even certain masks and other sacred sculptures were exported to the south. Some of these carvings may even have been imported from the vast Daudai region.
Returning to the masks, it seems that the only one to have been used at Saibai is the one named after the mawa fertility rite, a ceremony that took place in autumn, after the harvest of the fruit of the ubar tree (a wild plum). Some twenty of these wooden masks are known. All of them were acquired in the second half of the 19th century, and all have stylistic characteristics that link them to the art of the Daudai region, with no resemblance to the tortoiseshell human faces of the regions further south of the Torres Strait.
The date of acquisition of the mawa mask from the Barbier-Mueller collections is unknown. This object was reproduced for the first time, surrounded by assegais like the centerpiece of a panoply, on the cover of a small catalogue published in 1900 by the Melbourne Aquarium for the inauguration of the exhibition of its collection of “works of savages”. After the Aquarium suffered a terrible fire in the 1930s, the collection was dispersed. The mask became the property of Frederick Cooper Smith (Mount Dandenong, Melbourne), and then sold by his heirs. It was acquired in Londres by Jean Paul Barbier-Mueller in 1973.
*
Within the already limited corpus, the Barbier-Mueller mask is one of the most imposing examples known. In particular, its extraordinary graphic and sculptural complexity make it a masterpiece of its kind, exceptional and virtually unrivalled. Similar works include the British Museum copy acquired by MacFarlane in 1885 and those in the Museum für Völkerkunde Dresden, reproduced in Tiesler, F., Die Kunst Neuguineas, Dresden, 2023, vol. 1, pp. 292 and 293, nos. 138 and 139.
in Arts & Cultures, 2002, pp. 234-237
L'île Saibai, d'une surface considérable par rapport aux autres îles du détroit, est située à proximité de la côte sud-est de Nouvelle-Guinée, en face de la région dite Daudai. On n'y confectionnait pas de masques en écaille de tortue et le travail du bois, abondant, était une source de revenu importante car les canots, les tambours et même certains masques ou autres sculptures sacrées s'exportaient vers le sud. II est possible d'ailleurs qu'une partie de ces sculptures ait elle-même été importée de la vaste région Daudai.
Pour en revenir aux masques, il semble que le seul à avoir été utilisé à Saibai soit celui qui porte le nom du rite de fertilité mawa, une cérémonie qui avait lieu en automne, après les récoltes du fruit de l'arbre ubar (une prune sauvage). Une vingtaine de ces masques en bois sont connus. Tous ont été acquis dans la deuxième moitié du XIXe siècle, et tous ont des caractéristiques stylistiques qui les apparentent à l'art de la région Daudai, sans ressemblance avec les visages humains en écaille de tortue des régions plus au sud du détroit de Torrès.
La date d'acquisition du masque mawa des collections Barbier-Mueller est inconnue. Cet objet a été reproduit pour la première fois, entouré de sagaies comme un centre de panoplie, sur la couverture d'un petit catalogue édité en 1900 par l'Aquarium de Melbourne pour l'inauguration de l'exposition de sa collection « d'œuvres de sauvages ». L'Aquarium ayant été victime d'un terrible incendie dans les années 30, sa collection fut vendue. Le masque devint la propriété de Frédérick Cooper Smith (Mount Dandenong, Melbourne) dont les héritiers se séparèrent. Il fut acquis à Londres par Jean Paul Barbier-Mueller en 1973.
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Au sein du corpus déjà très restreint, le masque de la collection Barbier-Mueller occupe une place parmi les exemplaires les plus imposants connus. On remarque notamment l’extraordinaire complexité graphique et sculpturale qui le caractérisent, tout en faisant le chef-d’œuvre du genre, exceptionnel et pratiquement hors pair. Pour des œuvres similaires, on peut citer l’exemplaire du British Museum acquis par MacFarlane en 1885 et ceux du Museum für Völkerkunde Dresden, reproduits dans Tiesler, F., Die Kunst Neuguineas, Dresde, 2023, vol. 1, pp. 292 et 293, n° 138 et 139.
NORMAN ABRAMOVIC
in Arts & Cultures, 2002, pp. 234-237
Saibai Island, which spans a considerable area compared to the other islands in the Torres Strait, is located close to the southeast coast of New Guinea, opposite the Daudai region. No tortoiseshell masks were made here, however abundant woodworking was an important source of income, as canoes, drums and even certain masks and other sacred sculptures were exported to the south. Some of these carvings may even have been imported from the vast Daudai region.
Returning to the masks, it seems that the only one to have been used at Saibai is the one named after the mawa fertility rite, a ceremony that took place in autumn, after the harvest of the fruit of the ubar tree (a wild plum). Some twenty of these wooden masks are known. All of them were acquired in the second half of the 19th century, and all have stylistic characteristics that link them to the art of the Daudai region, with no resemblance to the tortoiseshell human faces of the regions further south of the Torres Strait.
The date of acquisition of the mawa mask from the Barbier-Mueller collections is unknown. This object was reproduced for the first time, surrounded by assegais like the centerpiece of a panoply, on the cover of a small catalogue published in 1900 by the Melbourne Aquarium for the inauguration of the exhibition of its collection of “works of savages”. After the Aquarium suffered a terrible fire in the 1930s, the collection was dispersed. The mask became the property of Frederick Cooper Smith (Mount Dandenong, Melbourne), and then sold by his heirs. It was acquired in Londres by Jean Paul Barbier-Mueller in 1973.
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Within the already limited corpus, the Barbier-Mueller mask is one of the most imposing examples known. In particular, its extraordinary graphic and sculptural complexity make it a masterpiece of its kind, exceptional and virtually unrivalled. Similar works include the British Museum copy acquired by MacFarlane in 1885 and those in the Museum für Völkerkunde Dresden, reproduced in Tiesler, F., Die Kunst Neuguineas, Dresden, 2023, vol. 1, pp. 292 and 293, nos. 138 and 139.