Lot Essay
FLORIANE MORIN
in Arts d’Afrique et d’Océanie. Fleurons du musée Barbier-Mueller, 2007, p. 78
Une femme, assise sur son tabouret, pile le mil. Elle est juchée sur le couvercle d'une petite coupe de bois, chapeautant elle-même un second récipient bien plus profond, fardeaux de l'équidé qui supporte l'ensemble. Née du savoir-faire d'un forgeron sculpteur, savamment restaurée par ces mêmes mains habiles, cette coupe allie les lignes épurées d'une silhouette en ronde bosse à la géométrie d'un décor délicatement incisé, couvrant le double récipient.
L'ampleur des réparations indigènes révèle la volonté de préserver des outrages du temps cet objet sacré, intimement lié à la personne du Hogon ou ôgô, cet homme devenu aux yeux de sa communauté grand prêtre du Lêwe (ou Lèbè), souverain spirituel et « ancêtre vivant » désigné par ses semblables en raison de son aînesse. Prisonnier de sa charge comme de sa demeure, le Hogon figure, dans l'imaginaire collectif, un personnage assis, posture évoquant sa dignité, son autorité. Étrangement, le tabouret sculpté sur cette grande coupe (ôgo banya) supporte une femme qui ne peut réellement piler le mil autrement que debout, avec élan.
Selon Jean-Louis Paudrat, cette effigie féminine, se substituant au cavalier plus fréquemment perché au sommet des coupes de Hogon, transcrit la subtile ambivalence de la puissance prêtée au plus éminent responsable religieux. « Desservant des cultes agraires, sa nature est celle de la Terre, féminine lorsqu'elle est fertile, masculine lorsque, durant les longues semaines qui précèdent l'hivernage, elle n'est qu'aridité ». Le piétement de la coupe évoque, lui, le destrier du Hogon, le Nommo. Sculpté lors de l'intronisation du Hogon, ce récipient à l'iconographie complexe renferme la viande que le prêtre va partager avec ses commensaux. Parmi les rares et précieuses coupes sculptées dont l'ancienneté demeure incontestable, celle-ci se distingue encore par l'évocation de cette figure féminine que d'aucuns identifient comme l'épouse du Hogon.
FLORIANE MORIN
in Arts of Africa and Oceania. Highlights from the Musée Barbier-Mueller, 2007, p. 78
A woman, seated on a stool, is crushing millet. She is perched on the lid of a small wooden vessel, itself standing on the lid of a much larger vessel carried by a horse-like animal. The work of a blacksmith-sculptor and skillfully restored by him, this piece combines the pure lines of in-the-round sculpture and the delicately incised geometric decoration covering the double recipient.
The extent of the indigenous repairs shows the pains taken to preserve this sacred object from the ravages of time. It is intimately linked to the person of the Hogon or ogo, the man who became regarded by the community as the high priest of Lêwe (or Lèbè), the spiritual sovereign and “living ancestor” designated by his peers by virtue of his birthright. The prisoner of his responsibility as he is in his dwelling, the Hogon is depicted in the collective imagination as a seated figure, a pose evoking his dignity and authority. Strangely, however, the seated figure on this large vessel (ogo banya) is a woman - who in fact could only properly crush millet standing up.
According to Jean-Louis Paudrat, this female effigy, a substitute for the horseman more frequently depicted atop Hogon vessels, conveys the ambivalence of the power given to the highest-ranking religious dignitary. “Serving agrarian worship, her nature is that of the Earth, female when it is fertile, masculine during the long arid weeks preceding winters.” The base of the vessel is a depiction of the Hogon's charger, the Nommo. This iconographically complex recipient, sculpted for the Hogon's enthronement, contains the meat which the priest shares with his companions at table. This vessel is one of the rare and priceless sculpted ones whose age is incontestable and remarkable for its female figure, whom some say is the Hogon's wife.
in Arts d’Afrique et d’Océanie. Fleurons du musée Barbier-Mueller, 2007, p. 78
Une femme, assise sur son tabouret, pile le mil. Elle est juchée sur le couvercle d'une petite coupe de bois, chapeautant elle-même un second récipient bien plus profond, fardeaux de l'équidé qui supporte l'ensemble. Née du savoir-faire d'un forgeron sculpteur, savamment restaurée par ces mêmes mains habiles, cette coupe allie les lignes épurées d'une silhouette en ronde bosse à la géométrie d'un décor délicatement incisé, couvrant le double récipient.
L'ampleur des réparations indigènes révèle la volonté de préserver des outrages du temps cet objet sacré, intimement lié à la personne du Hogon ou ôgô, cet homme devenu aux yeux de sa communauté grand prêtre du Lêwe (ou Lèbè), souverain spirituel et « ancêtre vivant » désigné par ses semblables en raison de son aînesse. Prisonnier de sa charge comme de sa demeure, le Hogon figure, dans l'imaginaire collectif, un personnage assis, posture évoquant sa dignité, son autorité. Étrangement, le tabouret sculpté sur cette grande coupe (ôgo banya) supporte une femme qui ne peut réellement piler le mil autrement que debout, avec élan.
Selon Jean-Louis Paudrat, cette effigie féminine, se substituant au cavalier plus fréquemment perché au sommet des coupes de Hogon, transcrit la subtile ambivalence de la puissance prêtée au plus éminent responsable religieux. « Desservant des cultes agraires, sa nature est celle de la Terre, féminine lorsqu'elle est fertile, masculine lorsque, durant les longues semaines qui précèdent l'hivernage, elle n'est qu'aridité ». Le piétement de la coupe évoque, lui, le destrier du Hogon, le Nommo. Sculpté lors de l'intronisation du Hogon, ce récipient à l'iconographie complexe renferme la viande que le prêtre va partager avec ses commensaux. Parmi les rares et précieuses coupes sculptées dont l'ancienneté demeure incontestable, celle-ci se distingue encore par l'évocation de cette figure féminine que d'aucuns identifient comme l'épouse du Hogon.
FLORIANE MORIN
in Arts of Africa and Oceania. Highlights from the Musée Barbier-Mueller, 2007, p. 78
A woman, seated on a stool, is crushing millet. She is perched on the lid of a small wooden vessel, itself standing on the lid of a much larger vessel carried by a horse-like animal. The work of a blacksmith-sculptor and skillfully restored by him, this piece combines the pure lines of in-the-round sculpture and the delicately incised geometric decoration covering the double recipient.
The extent of the indigenous repairs shows the pains taken to preserve this sacred object from the ravages of time. It is intimately linked to the person of the Hogon or ogo, the man who became regarded by the community as the high priest of Lêwe (or Lèbè), the spiritual sovereign and “living ancestor” designated by his peers by virtue of his birthright. The prisoner of his responsibility as he is in his dwelling, the Hogon is depicted in the collective imagination as a seated figure, a pose evoking his dignity and authority. Strangely, however, the seated figure on this large vessel (ogo banya) is a woman - who in fact could only properly crush millet standing up.
According to Jean-Louis Paudrat, this female effigy, a substitute for the horseman more frequently depicted atop Hogon vessels, conveys the ambivalence of the power given to the highest-ranking religious dignitary. “Serving agrarian worship, her nature is that of the Earth, female when it is fertile, masculine during the long arid weeks preceding winters.” The base of the vessel is a depiction of the Hogon's charger, the Nommo. This iconographically complex recipient, sculpted for the Hogon's enthronement, contains the meat which the priest shares with his companions at table. This vessel is one of the rare and priceless sculpted ones whose age is incontestable and remarkable for its female figure, whom some say is the Hogon's wife.