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Lot Essay
Cette commode attribuée à David Roentgen frappe par le perfectionnisme avec lequel l'ébéniste a réalisé son travail tant au niveau de sa conception que de son exécution. Cette qualité s'exprime dans un esprit de sobriété allié à une ciselure raffinée des bronzes et à la qualité exquise des bois sélectionnés. Les mécanismes et les éléments démontables caractéristiques de l'oeuvre de l'ébéniste se retrouvent dans cette commode, notamment au travers du plateau coulissant supportant le marbre, ainsi que par ses six pieds démontables.
DAVID ROENTGEN (1743-1807), ÉBÉNISTE-MÉCANICIEN
Fils de l'ébéniste Abraham Roentgen (1711-1793), David Roentgen, né à Neuwied, fut l'un des plus grands ébénistes de son époque. Il entre dans l'atelier de son père en 1757 et en prend la direction en 1772. Doté d'un sens aigu des affaires, il transforme l'atelier familial en une véritable entreprise, surpassant ses pairs en proposant des meubles extrêmement raffinés, caractérisés par des mécanismes et des motifs élaborés.
L'un de ses premiers clients est Charles, duc de Lorraine (1712-1780), gouverneur des Pays-Bas autrichiens et frère de l'empereur François Ier, époux de Marie-Thérèse et oncle de la reine Marie-Antoinette. Roentgen se rend à Paris en 1774 pour se familiariser avec le néoclassicisme, la nouvelle mode dans la capitale européenne du goût, qu'il introduit dans son mobilier dès la fin des années 1770. C'est probablement Charles de Lorraine qui, lors de son second séjour à Paris en 1779, a permis à Roentgen d'obtenir une invitation très recherchée à la cour de France.
Il vendit quelques meubles à Louis XVI et Marie-Antoinette, qui lui accordèrent le titre d'ébéniste-mécanicien du Roi et de la Reine après avoir reçu sa requête : David Roentgen de Neuwied en Allemagne, prêt à retourner dans sa patrie, désirerait n'y reparaître qu'avec un titre qui attestât, à ses concitoyens l'avantage inestimable qu'il a eu de voir ses talents honorés de suffrage et de l'approbation de Votre Majesté. Il ose en indiquer à Votre Majesté un moyen simple et qui ne décidant pour lui qu'un titre honorable, n'entraîne aucun inconvénient. C'est l'expédition d'un brevet d'ébéniste mécanicien de Votre Majesté, brevet que le suppliant s'empressera de justifier par de nouveaux efforts pour la perfection de son art.
Le respect que lui conférait ce titre lui valut des commandes de toutes les cours d'Europe, notamment des palais des princes-électeurs de Hesse et de Saxe, des ducs de Wurtemberg et des margraves de Bade. Il est toutefois important de noter que la guilde des menuisiers-ébénistes a réagi différemment et, insatisfaite de ce titre honorifique accordé par la royauté, a exigé de Roentgen qu'il remplisse les conditions requises pour recevoir la maîtrise, ce qu'il a fait le 19 mai 1780.
UN NÉOCLASSICISME OMNIPRÉSENT
Cette commode est caractéristique de l'oeuvre de Roentgen, notamment par sa sobre élégance tant au niveau du placage d’acajou qu’au niveau des bronzes dorés. Caractéristiques que nous retrouvons dans d'autres commodes réalisées par Roentgen, notamment une commode présente dans les collections du Stadtschloss, à Berlin, dans les années 1920 (Hermann Schmitz, op. cit.), ainsi qu'une autre, très proche de la nôtre mais reposant sur quatre pieds, conservée au château de la Fasanerie, à Eichenzell en Allemagne (inv. M 325).
Avec son néoclassicisme raffiné, cette commode présente des similitudes avec quelques autres œuvres de Roentgen, dont une clavecin signée par Roentgen et aujourd'hui conservée au palais de Gatchina à Saint-Pétersbourg (voir H. Huth, op.cit.). Les œuvres de Roentgen les plus comparables comprennent deux commodes ; l'une au Kunstgewerbemuseum de Berlin (inv. W-1984,188) ; et une autre, autrefois conservée dans la collection Löwenthal de Berlin (D. Fabian, op. cit.).
David Roentgen est également connu pour avoir produit d'autres meubles de haute qualité, notamment des bureaux à cylindre (collection Hubert de Givenchy, vente Christie's, Paris, 14 juin 2022, lot 14 ; collection S.M. la reine d’Angleterre, palais de Buckingham, Londres, inv. RCIN 293 ; musée du Louvre, OA 5228, V 4512).
LES COMTES ARRIVABENE-VALENTI-GONZAGA
Originaire de Mantoue, cette importante famille aristocratique italienne naquit du mariage du comte Francesco Arrivabene (1783-1862) avec Teresa Valenti Gonzaga (1793-1871).
Les Arrivabene étaient à l’origine une ancienne famille de Mantoue très proche des Gonzague, active dans la diplomatie et les armes, participant à la vie de la cour. Ils comptèrent en particulier parmi leurs membres les plus éminents Giovanni Pietro, érudit grec, et Leonardo Arrivabene, précepteur de Lodovico Gonzaga. Au cours du XIXe siècle, certains Arrivabene sont également connus pour leur participation active au Risorgimento italien, notamment Giovanni di Alessandro, qui participa aux révoltes des Carbonari en 1820 et fut le compagnon de prison de Pietro Maroncelli à Venise. Rapatrié en Suisse et à Londres, condamné à mort par contumace par l'Autriche en 1824, il s'installa en Belgique en 1827 au château des Arconati à Gaeensbeek où, autour de Giuseppe et Costanza Arconati, se réunirent les exilés italiens modérés et la fine fleur de la culture européenne. Arrivabene s'y fit des amis et intensifia son engagement politique, son travail administratif dans les institutions belges et l'étude de l'économie politique. De retour dans la péninsule en 1859, il fut nommé sénateur. Il vécut à Turin et à Florence et revint à Mantoue en 1866, toujours en participant activement à la vie publique. Citons également Opprandino Arrivabene (1807-1887) qui fut un patriote, journaliste et homme de lettres, grand ami de Giuseppe Verdi. Autre membre important de la famille, Carlo di Francesco e di Teresa Valenti Gonzaga (1818-1874) combattit dans les dragons lombards rattachés à l'armée piémontaise en 1848 et 1849. Il devint député en 1865.
La famille actuelle est représentée par le comte Giberto Arrivabene Valenti Gonzaga, époux de la princesse Bianca de Savoie (née en 1966), fille du duc Amédée de Savoie-Aoste, tous deux parents de cinq enfants : Viola, Vera, Mafalda, Maddalena et Leonardo.
Plusieurs meubles marqués au feu de la famille Arrivabene-Valenti-Gonzaga ont été vendu ces dernières années. Notons un fauteuil de bureau d'époque Louis XVI attribué à Georges Jacob (vente Sotheby's, Paris, 9 novembre 2010, lot 176), une table à thé d'époque Louis XVI attribuée à Adam Weisweiler (vente Christie's, Londres, 19 mai 2021, lot 29) et une table desserte d'époque Louis XV (vente Sotheby's Paris, 15 novembre 2023, lot 40).
DAVID ROENTGEN (1743-1807), ÉBÉNISTE-MÉCANICIEN
Fils de l'ébéniste Abraham Roentgen (1711-1793), David Roentgen, né à Neuwied, fut l'un des plus grands ébénistes de son époque. Il entre dans l'atelier de son père en 1757 et en prend la direction en 1772. Doté d'un sens aigu des affaires, il transforme l'atelier familial en une véritable entreprise, surpassant ses pairs en proposant des meubles extrêmement raffinés, caractérisés par des mécanismes et des motifs élaborés.
L'un de ses premiers clients est Charles, duc de Lorraine (1712-1780), gouverneur des Pays-Bas autrichiens et frère de l'empereur François Ier, époux de Marie-Thérèse et oncle de la reine Marie-Antoinette. Roentgen se rend à Paris en 1774 pour se familiariser avec le néoclassicisme, la nouvelle mode dans la capitale européenne du goût, qu'il introduit dans son mobilier dès la fin des années 1770. C'est probablement Charles de Lorraine qui, lors de son second séjour à Paris en 1779, a permis à Roentgen d'obtenir une invitation très recherchée à la cour de France.
Il vendit quelques meubles à Louis XVI et Marie-Antoinette, qui lui accordèrent le titre d'ébéniste-mécanicien du Roi et de la Reine après avoir reçu sa requête : David Roentgen de Neuwied en Allemagne, prêt à retourner dans sa patrie, désirerait n'y reparaître qu'avec un titre qui attestât, à ses concitoyens l'avantage inestimable qu'il a eu de voir ses talents honorés de suffrage et de l'approbation de Votre Majesté. Il ose en indiquer à Votre Majesté un moyen simple et qui ne décidant pour lui qu'un titre honorable, n'entraîne aucun inconvénient. C'est l'expédition d'un brevet d'ébéniste mécanicien de Votre Majesté, brevet que le suppliant s'empressera de justifier par de nouveaux efforts pour la perfection de son art.
Le respect que lui conférait ce titre lui valut des commandes de toutes les cours d'Europe, notamment des palais des princes-électeurs de Hesse et de Saxe, des ducs de Wurtemberg et des margraves de Bade. Il est toutefois important de noter que la guilde des menuisiers-ébénistes a réagi différemment et, insatisfaite de ce titre honorifique accordé par la royauté, a exigé de Roentgen qu'il remplisse les conditions requises pour recevoir la maîtrise, ce qu'il a fait le 19 mai 1780.
UN NÉOCLASSICISME OMNIPRÉSENT
Cette commode est caractéristique de l'oeuvre de Roentgen, notamment par sa sobre élégance tant au niveau du placage d’acajou qu’au niveau des bronzes dorés. Caractéristiques que nous retrouvons dans d'autres commodes réalisées par Roentgen, notamment une commode présente dans les collections du Stadtschloss, à Berlin, dans les années 1920 (Hermann Schmitz, op. cit.), ainsi qu'une autre, très proche de la nôtre mais reposant sur quatre pieds, conservée au château de la Fasanerie, à Eichenzell en Allemagne (inv. M 325).
Avec son néoclassicisme raffiné, cette commode présente des similitudes avec quelques autres œuvres de Roentgen, dont une clavecin signée par Roentgen et aujourd'hui conservée au palais de Gatchina à Saint-Pétersbourg (voir H. Huth, op.cit.). Les œuvres de Roentgen les plus comparables comprennent deux commodes ; l'une au Kunstgewerbemuseum de Berlin (inv. W-1984,188) ; et une autre, autrefois conservée dans la collection Löwenthal de Berlin (D. Fabian, op. cit.).
David Roentgen est également connu pour avoir produit d'autres meubles de haute qualité, notamment des bureaux à cylindre (collection Hubert de Givenchy, vente Christie's, Paris, 14 juin 2022, lot 14 ; collection S.M. la reine d’Angleterre, palais de Buckingham, Londres, inv. RCIN 293 ; musée du Louvre, OA 5228, V 4512).
LES COMTES ARRIVABENE-VALENTI-GONZAGA
Originaire de Mantoue, cette importante famille aristocratique italienne naquit du mariage du comte Francesco Arrivabene (1783-1862) avec Teresa Valenti Gonzaga (1793-1871).
Les Arrivabene étaient à l’origine une ancienne famille de Mantoue très proche des Gonzague, active dans la diplomatie et les armes, participant à la vie de la cour. Ils comptèrent en particulier parmi leurs membres les plus éminents Giovanni Pietro, érudit grec, et Leonardo Arrivabene, précepteur de Lodovico Gonzaga. Au cours du XIXe siècle, certains Arrivabene sont également connus pour leur participation active au Risorgimento italien, notamment Giovanni di Alessandro, qui participa aux révoltes des Carbonari en 1820 et fut le compagnon de prison de Pietro Maroncelli à Venise. Rapatrié en Suisse et à Londres, condamné à mort par contumace par l'Autriche en 1824, il s'installa en Belgique en 1827 au château des Arconati à Gaeensbeek où, autour de Giuseppe et Costanza Arconati, se réunirent les exilés italiens modérés et la fine fleur de la culture européenne. Arrivabene s'y fit des amis et intensifia son engagement politique, son travail administratif dans les institutions belges et l'étude de l'économie politique. De retour dans la péninsule en 1859, il fut nommé sénateur. Il vécut à Turin et à Florence et revint à Mantoue en 1866, toujours en participant activement à la vie publique. Citons également Opprandino Arrivabene (1807-1887) qui fut un patriote, journaliste et homme de lettres, grand ami de Giuseppe Verdi. Autre membre important de la famille, Carlo di Francesco e di Teresa Valenti Gonzaga (1818-1874) combattit dans les dragons lombards rattachés à l'armée piémontaise en 1848 et 1849. Il devint député en 1865.
La famille actuelle est représentée par le comte Giberto Arrivabene Valenti Gonzaga, époux de la princesse Bianca de Savoie (née en 1966), fille du duc Amédée de Savoie-Aoste, tous deux parents de cinq enfants : Viola, Vera, Mafalda, Maddalena et Leonardo.
Plusieurs meubles marqués au feu de la famille Arrivabene-Valenti-Gonzaga ont été vendu ces dernières années. Notons un fauteuil de bureau d'époque Louis XVI attribué à Georges Jacob (vente Sotheby's, Paris, 9 novembre 2010, lot 176), une table à thé d'époque Louis XVI attribuée à Adam Weisweiler (vente Christie's, Londres, 19 mai 2021, lot 29) et une table desserte d'époque Louis XV (vente Sotheby's Paris, 15 novembre 2023, lot 40).