Lot Essay
Ce spectaculaire cabinet ornait le Grand Hall du château de Ferrières. Ce hall, aux dimensions monumentales est la pièce centrale de cette demeure emblématique du "goût Rothschild" construite pour James de Rothschild.
C'est en 1829 que ce dernier fait l'acquisition du domaine de Ferrières auprès des descendants de la veuve de Joseph Fouché. Il se lance dans des travaux considérables afin de bâtir ce qui deviendra l'un des châteaux majeurs du XIXe siècle.
Le baron James demande des plans et des projets à Joseph Paxton, l'audacieux architecte du Crystal Palace, construit pour l'exposition de Londres de 1851. Paxton est alors l'architecte de prédilection des cousins de la branche anglaise de James pour qui il vient de terminer la résidence de Mentmore Towers dans le Buckinghamshire.
A de nombreux égards, le Ferrières de Paxton s'apparente aux grandes propriétés anglaises, malgré son inspiration tirée des demeures de la Renaissance italienne et de la Renaissance franaise.
Mais plus que l'oeuvre de Paxton, Ferrières est l'oeuvre de Louis-Eugène Lami (1800-1890). Le peintre est chargé de la décoration intérieure du château. Mais son rôle est beaucoup plus large : il est, pour James de Rothschild, à la fois décorateur, agent artistique, architecte, conseiller. L'inspiration italienne dont il a besoin pour la décoration est puisée lors d'un voyage à Venise avec Betty de Rothschild. Par ailleurs, James envoie Lami relever les plans de châteaux en Angleterre et en Allemagne ; le résultat, pour le moins cosmopolite, n'est donc pas surprenant. Cet éclectisme en terme de décoration intérieure ne fait que répondre à celui de l'architecture du château.
Le rôle de Lami auprès du baron James se place dans la lignée de celui qu'il avait tenu auparavant auprès du duc d'Aumale, à Chantilly où aucune acquisition n'est faite sans son accord. Mais sa place auprès des Rothschild dépasse celle qu'il connait avec le duc d'Aumale : de 1850 jusqu'à sa mort, il va véritablement partager sa vie avec les Rothschild.
Le grand hall dans lequel était placé le cabinet est sans contexte le morceau de bravoure de Lami. Pour reprendre les mots de Pauline Prevost-Marcilhacy, Lami y a conu, à la place du "hall-vestibule" imaginé par Paxton, un "hall-musée" (Pauline Prevost-Marcilhacy, Les Rothschild, bâtisseurs et mécènes, Flammarion Paris, 1995, p. 117). Les dimensions sont à la hauteur du gigantisme du château. Il est décoré, de façon exubérante, dans le goût de la Renaissance italienne ; on y trouve une monumentale cheminée en marbre polychrome, une tribune supportée par quatre atlantes de Charles Cordier, des tapisseries des Gobelins qui tapissent les murs ponctués d'une balustrade. Des cabinets italiens à décor de pierres dures sont flanqués par des bustes en marbre, des meubles de grand prix voisinent des sièges confortables.
Lami joue un rôle majeur dans l'acquisition des oeuvres d'art qui garnissent Ferrières. Le présent cabinet a d'ailleurs pu être acheté par son intermédiaire. Lami parcourt l'Europe pour trouver des objets qui conviennent au gigantisme de Ferrières. A la mort de James, le critique du Figaro souligne le rôle de Lami : "Quand le financier allait acheter des tableaux, il se faisait toujours accompagner par le peintre Eugène Lami, qu'il aimait beaucoup" (Pauline Prevost-Marcilhacy, op. cit., p. 291). Ferrières est un lieu connu pour la présentation de collections. Ainsi, James refuse un projet qui prévoit une colonnade pour le Grand Hall : une telle disposition compliquerait la présentation d'oeuvres d'art.
Le génie de Lami est celui des associations et des contrastes. Il sait mélanger les styles, mêlant harmonieusement styles Renaissance et Louis XIV. Il confronte les matériaux les plus variés. Il oppose les créations et les chefs d'uvre de régions et d'artisans différents.
Le résultat du travail de Paxton et de Lami est spectaculaire. Dans son Journal, Rodolphe Apponyi décrit, admiratif, son séjour à Ferrières : "Il y eut un dîner, puis promenade en calèche avec M. et Mme de Rothschild. Le banquier montra la buanderie modèle, véritable chef d'oeuvre du genre élégant, pittoresque et très commode. On y lave quatre-vingt mille pièces par an, consommation ordinaire de la maison. Les arrangements intérieurs ne laissent rien à désirer. Tout est de bon goût et très magnifique. Il y a de beaux tableaux et une infinité de belles choses de tout genre, des armures, des statuettes, des hanaps en vermeil, ivoire ou or, enrichis de perles et pierres fines, des bahuts en bronze, en fer, en argent, en vieille laque, puis des vases de toute genre, ornés de pierres précieuses, puis d'anciennes armoires, incrustées d'ivoire et d'argent, des mosaques de Florence. Les chambres d'amis sont confortablement meublées, sans trop de luxe, mais avec de beaux tapis, de grands canapés, des fauteuils et des glaces, d'excellents lits, des lavabos, et beaucoup de serviettes" (cité par Anka Muhlstein, James de Rothschild, Gallimard, Paris, 1981).
Un château aussi ambitieux ne peut être inauguré que par l'Empereur ! Le 16 décembre 1862, Napoléon III, stupéfait, découvre ce projet qui passe pour être le château français le plus luxueux du XIXe siècle.
Ce magnifique et spectaculaire cabinet est une parfaite illustration du "goût Rothschild". Par ses plaques en pietra dura notamment, il évoque l'influence italienne qui marque Ferrières.
C'est en 1829 que ce dernier fait l'acquisition du domaine de Ferrières auprès des descendants de la veuve de Joseph Fouché. Il se lance dans des travaux considérables afin de bâtir ce qui deviendra l'un des châteaux majeurs du XIXe siècle.
Le baron James demande des plans et des projets à Joseph Paxton, l'audacieux architecte du Crystal Palace, construit pour l'exposition de Londres de 1851. Paxton est alors l'architecte de prédilection des cousins de la branche anglaise de James pour qui il vient de terminer la résidence de Mentmore Towers dans le Buckinghamshire.
A de nombreux égards, le Ferrières de Paxton s'apparente aux grandes propriétés anglaises, malgré son inspiration tirée des demeures de la Renaissance italienne et de la Renaissance franaise.
Mais plus que l'oeuvre de Paxton, Ferrières est l'oeuvre de Louis-Eugène Lami (1800-1890). Le peintre est chargé de la décoration intérieure du château. Mais son rôle est beaucoup plus large : il est, pour James de Rothschild, à la fois décorateur, agent artistique, architecte, conseiller. L'inspiration italienne dont il a besoin pour la décoration est puisée lors d'un voyage à Venise avec Betty de Rothschild. Par ailleurs, James envoie Lami relever les plans de châteaux en Angleterre et en Allemagne ; le résultat, pour le moins cosmopolite, n'est donc pas surprenant. Cet éclectisme en terme de décoration intérieure ne fait que répondre à celui de l'architecture du château.
Le rôle de Lami auprès du baron James se place dans la lignée de celui qu'il avait tenu auparavant auprès du duc d'Aumale, à Chantilly où aucune acquisition n'est faite sans son accord. Mais sa place auprès des Rothschild dépasse celle qu'il connait avec le duc d'Aumale : de 1850 jusqu'à sa mort, il va véritablement partager sa vie avec les Rothschild.
Le grand hall dans lequel était placé le cabinet est sans contexte le morceau de bravoure de Lami. Pour reprendre les mots de Pauline Prevost-Marcilhacy, Lami y a conu, à la place du "hall-vestibule" imaginé par Paxton, un "hall-musée" (Pauline Prevost-Marcilhacy, Les Rothschild, bâtisseurs et mécènes, Flammarion Paris, 1995, p. 117). Les dimensions sont à la hauteur du gigantisme du château. Il est décoré, de façon exubérante, dans le goût de la Renaissance italienne ; on y trouve une monumentale cheminée en marbre polychrome, une tribune supportée par quatre atlantes de Charles Cordier, des tapisseries des Gobelins qui tapissent les murs ponctués d'une balustrade. Des cabinets italiens à décor de pierres dures sont flanqués par des bustes en marbre, des meubles de grand prix voisinent des sièges confortables.
Lami joue un rôle majeur dans l'acquisition des oeuvres d'art qui garnissent Ferrières. Le présent cabinet a d'ailleurs pu être acheté par son intermédiaire. Lami parcourt l'Europe pour trouver des objets qui conviennent au gigantisme de Ferrières. A la mort de James, le critique du Figaro souligne le rôle de Lami : "Quand le financier allait acheter des tableaux, il se faisait toujours accompagner par le peintre Eugène Lami, qu'il aimait beaucoup" (Pauline Prevost-Marcilhacy, op. cit., p. 291). Ferrières est un lieu connu pour la présentation de collections. Ainsi, James refuse un projet qui prévoit une colonnade pour le Grand Hall : une telle disposition compliquerait la présentation d'oeuvres d'art.
Le génie de Lami est celui des associations et des contrastes. Il sait mélanger les styles, mêlant harmonieusement styles Renaissance et Louis XIV. Il confronte les matériaux les plus variés. Il oppose les créations et les chefs d'uvre de régions et d'artisans différents.
Le résultat du travail de Paxton et de Lami est spectaculaire. Dans son Journal, Rodolphe Apponyi décrit, admiratif, son séjour à Ferrières : "Il y eut un dîner, puis promenade en calèche avec M. et Mme de Rothschild. Le banquier montra la buanderie modèle, véritable chef d'oeuvre du genre élégant, pittoresque et très commode. On y lave quatre-vingt mille pièces par an, consommation ordinaire de la maison. Les arrangements intérieurs ne laissent rien à désirer. Tout est de bon goût et très magnifique. Il y a de beaux tableaux et une infinité de belles choses de tout genre, des armures, des statuettes, des hanaps en vermeil, ivoire ou or, enrichis de perles et pierres fines, des bahuts en bronze, en fer, en argent, en vieille laque, puis des vases de toute genre, ornés de pierres précieuses, puis d'anciennes armoires, incrustées d'ivoire et d'argent, des mosaques de Florence. Les chambres d'amis sont confortablement meublées, sans trop de luxe, mais avec de beaux tapis, de grands canapés, des fauteuils et des glaces, d'excellents lits, des lavabos, et beaucoup de serviettes" (cité par Anka Muhlstein, James de Rothschild, Gallimard, Paris, 1981).
Un château aussi ambitieux ne peut être inauguré que par l'Empereur ! Le 16 décembre 1862, Napoléon III, stupéfait, découvre ce projet qui passe pour être le château français le plus luxueux du XIXe siècle.
Ce magnifique et spectaculaire cabinet est une parfaite illustration du "goût Rothschild". Par ses plaques en pietra dura notamment, il évoque l'influence italienne qui marque Ferrières.