Lot Essay
« Il est peu d’ornements plus imposants, plus intéressants dans l’arrangement d’un cabinet, que celui qu’on peut y introduire par la distribution bien entendue de vases […] de belles proportions» telle est la citation extraite du catalogue de vente du duc d’Aumont qui nous vient à l’esprit lorsque l’on admire ces vases qui revêtent également une qualité de modernité indéniable.
En effet, cette exceptionnelle paire de vases illustre à merveille le véritable tour de force technique de l’homme sur le métal où se mêlent préciosité et luxe du matériau qu’est l’acier mais également des rêves alchimiques à l’instar du bois pétrifié.
Pouvant être comparée à un travail de bijoutier, cette paire de vases est un véritable chef-d’œuvre parmi ceux référencés de la manufacture russe de Toula.
Toula, située au sud de Moscou, a su exploiter très tôt sa situation géologique ; le gisement de fer sur lequel la ville est installée lui permet d’exister économiquement et de dépasser rapidement son rôle de producteur d’armes en support de la chambre d’armement de Moscou. Etablie en 1712 sous l’impulsion de Pierre Ier le Grand (règne 1682-1725), la manufacture sait mettre en avant le talent de ses maîtres armuriers à travers la production d’objets civils dès les années 1740 sous le règne d’Elizabeth Ire (règne 1741-1762) alors que le besoin en armes diminue – conséquence de la fin de la guerre contre la Suède.
Sortent ainsi des ateliers de la manufacture aux côtés d’objets - tels que bougeoirs, coffrets, tirelires – des meubles reprenant les formes traditionnelles du mobilier que sont les sièges ou encore les tables. Ainsi notre paire de vases reprend la forme classique du modèle dit Médicis.
La spécificité des œuvres de Toula réside dans l’utilisation de différents matériaux sur le même objet. Ce travail d’incrustation et de fonte à différentes températures apporte une variation subtile de couleurs. Le modèle dit à « facettes de diamant » que l’on retrouve sur les présents vases est utilisé pour décorer les objets les plus précieux de la manufacture.
Les objets de Toula concentrent ainsi intrinsèquement originalité du modèle, technique artisanale hors du commun et raffinement artistique.
Ajoutant l’excellence à la rareté, la manufacture de Toula reçoit non seulement des commandes aristocratiques, mais également impériales comme exposé précédemment. L’impératrice Catherine II (règne 1762-1796), grande amatrice convaincue d’arts décoratifs et fervente protectrice de la production nationale, complète sa collection - déjà conséquente - avec ces trésors de modernité qu’elle présente annuellement à Tsarkoïe Selo.
L’engouement pour les pièces de Toula se poursuit sous le règne d’Alexandre Ier (règne 1801-1825) et sont considérées comme des œuvres phares de la Galerie des Trésors du Palais d’Hiver, aujourd’hui musée de l’Ermitage.
La manufacture de Toula incarne ainsi la perfection artisanale et l’audace d’une identité russe se voulant affirmée dans l’Europe du XVIIe siècle. Le savoir-faire et l’habileté d’exécution des maîtres armuriers / serruriers participent au rayonnement de la nation des tsars à travers le vieux continent, notamment par des cadeaux diplomatiques. Signalons enfin que pour perfectionner leurs connaissances, les membres de la manufacture voyagent en Europe de l’ouest. L’exemple d’Aleksey Surnin – nommé directeur en 1774 par Catherine II - devenu héros de conte, reflète notamment l’admiration de ses confrères britanniques pour son travail.
La paire de vases est à rapprocher d’un ensemble mobilier destiné à la toilette, à l’instar des deux ensembles majeurs conservés au palais de Pavlosk, réalisés dans les années 1780, voire 1785 – 1790.
Le premier ensemble d’articles de toilette est composé d’une table de toilette, d’un miroir reposant sur un coffret, de quatre flambeaux, d’une paire de vases couverts très proches des nôtres et d’une chaise.
Acheté en 1789 auprès de l’armurier Semion Samarin par Catherine II pour sa belle-fille Maria Feodorovna (1758-1828), cet ensemble est placé dans la garde-robe du palais de Pavlosk de la princesse. Il sera complété en 1801 par une petite table et un tabouret offert par son fils, le tsar Alexandre.
Cet ensemble de toilette est illustré dans Art Object in Steel by Tula Craftsmen, Leningrad, 1974, ill. 66, A. Chenevière, Russian Furniture. The Golden Age 1780-1840, New York, 1988, p. 248, ou encore dans U. Leben, « D’acier. L’art du mobilier et des objets en fer et acier polis » in Connaissance des arts, septembre 1995, n. 520, p. 113) - notons que seuls deux flambeaux sur les quatre cités sont illustrés.
Hauts de 32 centimètres, ces vases étaient destinés à contenir la poudre pour perruque et sont décrits comme « une paire de vases et couvercles à décor ajouré de treille » dans un inventaire de Pavlosk dressé en 1790.
Ces vases – proches des nôtres - présentent un décor similaire à facettes de diamant sur une forme Médicis, le couvercle est également muni d’une prise en pomme de pin. La véritable différence avec nos vases réside en l’absence de patins retenus par des serres au profit d’une base en plinthe.
Notons que l’on retrouve les mêmes patins en boule retenus par des serres sur un miroir de toilette reposant sur un coffret et est daté de la seconde moitié du XVIIIe siècle (illustré dans Art Object in Steel by Tula Craftsmen, Leningrad, 1974, ill. 62-64).
Le second ensemble de toilette comprend une table, un miroir de toilette et son coffret, quatre flambeaux, deux porte-aiguilles, une paire de vases couverts et un tabouret. Commandé en 1787 auprès de Toula par Catherine II – certainement suite à sa seconde visite la même année, après celle de 1775 – l’ensemble apparaît dans un inventaire du palais de Pavlosk en avril 1789.
Il est illustré dans Art Objects in Steel by Tula Craftsmen, Leningrad, 1974, ill. 65 ou encore dans E. Ducamp (sous la dir.), Pavlosk, The Collections, Paris, 1993, p. 92.
Les vases sont de forme Médicis et munis d’un couvercle également surmonté d’une prise en pomme de pin. Cependant, contrairement aux précédents vases et à notre lot, le corps présente un décor uni et non à facettes de diamant.
En effet, cette exceptionnelle paire de vases illustre à merveille le véritable tour de force technique de l’homme sur le métal où se mêlent préciosité et luxe du matériau qu’est l’acier mais également des rêves alchimiques à l’instar du bois pétrifié.
Pouvant être comparée à un travail de bijoutier, cette paire de vases est un véritable chef-d’œuvre parmi ceux référencés de la manufacture russe de Toula.
Toula, située au sud de Moscou, a su exploiter très tôt sa situation géologique ; le gisement de fer sur lequel la ville est installée lui permet d’exister économiquement et de dépasser rapidement son rôle de producteur d’armes en support de la chambre d’armement de Moscou. Etablie en 1712 sous l’impulsion de Pierre Ier le Grand (règne 1682-1725), la manufacture sait mettre en avant le talent de ses maîtres armuriers à travers la production d’objets civils dès les années 1740 sous le règne d’Elizabeth Ire (règne 1741-1762) alors que le besoin en armes diminue – conséquence de la fin de la guerre contre la Suède.
Sortent ainsi des ateliers de la manufacture aux côtés d’objets - tels que bougeoirs, coffrets, tirelires – des meubles reprenant les formes traditionnelles du mobilier que sont les sièges ou encore les tables. Ainsi notre paire de vases reprend la forme classique du modèle dit Médicis.
La spécificité des œuvres de Toula réside dans l’utilisation de différents matériaux sur le même objet. Ce travail d’incrustation et de fonte à différentes températures apporte une variation subtile de couleurs. Le modèle dit à « facettes de diamant » que l’on retrouve sur les présents vases est utilisé pour décorer les objets les plus précieux de la manufacture.
Les objets de Toula concentrent ainsi intrinsèquement originalité du modèle, technique artisanale hors du commun et raffinement artistique.
Ajoutant l’excellence à la rareté, la manufacture de Toula reçoit non seulement des commandes aristocratiques, mais également impériales comme exposé précédemment. L’impératrice Catherine II (règne 1762-1796), grande amatrice convaincue d’arts décoratifs et fervente protectrice de la production nationale, complète sa collection - déjà conséquente - avec ces trésors de modernité qu’elle présente annuellement à Tsarkoïe Selo.
L’engouement pour les pièces de Toula se poursuit sous le règne d’Alexandre Ier (règne 1801-1825) et sont considérées comme des œuvres phares de la Galerie des Trésors du Palais d’Hiver, aujourd’hui musée de l’Ermitage.
La manufacture de Toula incarne ainsi la perfection artisanale et l’audace d’une identité russe se voulant affirmée dans l’Europe du XVIIe siècle. Le savoir-faire et l’habileté d’exécution des maîtres armuriers / serruriers participent au rayonnement de la nation des tsars à travers le vieux continent, notamment par des cadeaux diplomatiques. Signalons enfin que pour perfectionner leurs connaissances, les membres de la manufacture voyagent en Europe de l’ouest. L’exemple d’Aleksey Surnin – nommé directeur en 1774 par Catherine II - devenu héros de conte, reflète notamment l’admiration de ses confrères britanniques pour son travail.
La paire de vases est à rapprocher d’un ensemble mobilier destiné à la toilette, à l’instar des deux ensembles majeurs conservés au palais de Pavlosk, réalisés dans les années 1780, voire 1785 – 1790.
Le premier ensemble d’articles de toilette est composé d’une table de toilette, d’un miroir reposant sur un coffret, de quatre flambeaux, d’une paire de vases couverts très proches des nôtres et d’une chaise.
Acheté en 1789 auprès de l’armurier Semion Samarin par Catherine II pour sa belle-fille Maria Feodorovna (1758-1828), cet ensemble est placé dans la garde-robe du palais de Pavlosk de la princesse. Il sera complété en 1801 par une petite table et un tabouret offert par son fils, le tsar Alexandre.
Cet ensemble de toilette est illustré dans Art Object in Steel by Tula Craftsmen, Leningrad, 1974, ill. 66, A. Chenevière, Russian Furniture. The Golden Age 1780-1840, New York, 1988, p. 248, ou encore dans U. Leben, « D’acier. L’art du mobilier et des objets en fer et acier polis » in Connaissance des arts, septembre 1995, n. 520, p. 113) - notons que seuls deux flambeaux sur les quatre cités sont illustrés.
Hauts de 32 centimètres, ces vases étaient destinés à contenir la poudre pour perruque et sont décrits comme « une paire de vases et couvercles à décor ajouré de treille » dans un inventaire de Pavlosk dressé en 1790.
Ces vases – proches des nôtres - présentent un décor similaire à facettes de diamant sur une forme Médicis, le couvercle est également muni d’une prise en pomme de pin. La véritable différence avec nos vases réside en l’absence de patins retenus par des serres au profit d’une base en plinthe.
Notons que l’on retrouve les mêmes patins en boule retenus par des serres sur un miroir de toilette reposant sur un coffret et est daté de la seconde moitié du XVIIIe siècle (illustré dans Art Object in Steel by Tula Craftsmen, Leningrad, 1974, ill. 62-64).
Le second ensemble de toilette comprend une table, un miroir de toilette et son coffret, quatre flambeaux, deux porte-aiguilles, une paire de vases couverts et un tabouret. Commandé en 1787 auprès de Toula par Catherine II – certainement suite à sa seconde visite la même année, après celle de 1775 – l’ensemble apparaît dans un inventaire du palais de Pavlosk en avril 1789.
Il est illustré dans Art Objects in Steel by Tula Craftsmen, Leningrad, 1974, ill. 65 ou encore dans E. Ducamp (sous la dir.), Pavlosk, The Collections, Paris, 1993, p. 92.
Les vases sont de forme Médicis et munis d’un couvercle également surmonté d’une prise en pomme de pin. Cependant, contrairement aux précédents vases et à notre lot, le corps présente un décor uni et non à facettes de diamant.