拍品專文
Selon la classification ethno-morphologique établie par François Neyt (Redoutable statuaire Songye d'Afrique Centrale, Bruxelles, 2004), cette statue nkisi se rattache au style des Kalebwe centraux et méridionaux. Voir Neyt (op. cit.), pages 204-205, fig. 172, pour une statue de l’ancienne collection Arman, vraisemblablement du même atelier : la tête, aussi portée par un cou annelé, avec un front court, les yeux en fente diagonale, la bouche ouverte avec des lèvres saillantes, le menton allongé et rectangulaire; les traits du visage sont tous couverts par des bandes de cuivre. Une autre statue stylistiquement très apparentée est conservée au Musée Royal d'Afrique Centrale à Tervuren (Neyt, op. cit., pp. 234-235, fig. 200). Le travail de ce maître sculpteur a une gravité particulière en raison des proportions spécifiques de la sculpture. La caractéristique la plus évidente est la frontalité rigide, une pose de dignité et de force. L’importance de la tête est particulièrement soulignée ici ; des bandes de cuivre sont appliquées sur le visage pour augmenter la puissance de la statue. Deux caractéristiques de la tête de cette figure, la grande bouche et le crâne bulbeux, nécessitent une considération supplémentaire puisque leurs formes sont également importantes sur le plan fonctionnel. Certaines statues ont été nourries par la bouche, où des substances magiques y ont été insérées, d'où l'exagération de la taille de cet orifice. Quant à la tête bulbeuse, elle était à l'origine recouverte d'une coiffe de plumes. Dépouillée de cet attribut, l’arrondi prononcé de la tête est révélé. La principale caractéristique affectant la forme du haut du corps est l'articulation du ventre. L'abdomen proéminent est un signe de fertilité qui concerne à la fois les ancêtres et les nouveau-nés, donc la continuation de la lignée. De plus, la position des bras ajoute du volume à la partie centrale du corps. Leur posture angulaire souligne la forme du corps épais. Des trous ont été percés aux aisselles pour accueillir les poteaux qui étaient attachés pour manipuler et transporter la statue. Le pouvoir de ces figures, manipulées par un devin (nganga), était craint et elles devaient être manipulées avec précaution. Les statues Songye de grandes dimensions, à l'image de celle-ci, étaient destinées à servir à toute une communauté et étaient liées à la procréation, à la protection contre les maladies, la sorcellerie, et la guerre. D'après Dunja Hersak (Songye, 1986), elles se distinguent des autres objets magiques Songye car ce sont des instruments permettant d'interagir avec les esprits des ancêtres. Les communautés pouvaient ainsi invoquer les esprits de leurs aïeux à l'aide de ces effigies. Avant de sortir du territoire Songye, la statue était dépouillée de tout son attirail. Les jambes, à l'origine dissimulées par un pagne, n’étaient jamais sculptées – d'où l'aspect monolithe de cette puissante statue.