拍品专文
Le portrait inédit que nous présentons est une redécouverte significative. Il constitue un maillon passionnant dans la compréhension de l’évolution de l’art du portrait en Europe dans le dernier tiers du XVIe siècle.
Présenté en buste, sur un fond à la vibration chromatique évoluant du brun sombre au beige, la composition révèle un homme à l’âge avancé, à la chevelure et à la barbe fournie et au visage aux traits forts marqués de rides profondes et expressives. Son vêtement noir, simple, campe un personnage robuste et laisse apparaître sa main droite, à la carnation fine et transparente.
Présenté ou signalé à plusieurs spécialistes et historiens d’art de la période, un parfait consensus n’a pas été obtenu concernant l’auteur du tableau ci-présent. Or, tous ont unanimement reconnu la grande qualité de l’œuvre et la complexité de la comparaison et du jugement attributif à différents artistes.
De par sa puissance picturale et sa délicate sensibilité, notre portrait est à mettre en rapport avec les maîtres du genre actifs dans les Pays-Bas et en Flandre entre 1570 et 1580. Il montre l’interconnexion d’une génération d’artistes particulièrement brillante, à la formation néerlandaise, ayant travaillé dans différents pays européens (Pays-Bas, Flandre, Italie, Espagne, Angleterre). Anthonis Mor (entre 1516 et 1521-1576), artiste dont l'œuvre présente de fortes affinités avec notre tableau, est certainement le premier d’entre eux. Citons aussi Peter Pourbus (1523 ou 1524-1584), son fils Frans Pourbus l’Ancien (154-1581) mais aussi Maarten de Vos (1532-1603), Frans Floris (1517-1570) (plus célèbres pour leurs scènes religieuses mais également auteurs de portraits puissants) et les deux Key, Willem (1515/1516-1568) et Adrien Thomasz (vers 1544-après 1589).
Nous proposons de rapprocher notre tableau de l’une des œuvres les plus fameuses et énigmatiques de l’art du Portrait de cette période : Le portrait de l’artiste Lambert Lombard (1505 ou 1506-1566) aujourd’hui conservé au Musée de l’Art Wallon de Liège (no. inv. 373).
Cette dernière, puissamment charismatique, a une facture virtuose. Elle représente l’artiste, de trois-quarts, sur un fond uni crème. Autant l’identité de son modèle ne fait pas l’objet de discussions (voir le rapprochement avec la gravure de Johannes Wierix (1549-1621) datée de 1572 (C. Oger, Lambert Lombart, peintre de la Renaissance, Bruxelles, 2006, pp. 335-336, cat. 2 reproduit fig. 291)), autant son attribution est toujours incertaine (révélant ainsi la complexité, même sur les plus grands chefs d’œuvre, de l’expertise sur cette période). En effet, cette dernière fut longtemps considérée comme l’autoportrait de Lambert Lombard, hypothèse maintenant rejetée au profit d’un œuvre plutôt réalisée par Frans Floris (voir E. Wouk, The Life of Lambert Lombard, Los Angeles, 2021, pp. 99-100) ou par Anthonis Mor (voir C. Oger, 2006, idem).
D’un point de vue technique, si l’on rapproche l’écriture picturale des deux œuvres, on retrouve les mêmes détails de finesse dans la réalisation des cheveux et de la barbe ; la même facture subtile et transparente notamment au niveau du traitement des oreilles, les empâtements similaires des glacis blancs pour signifier les rides et également les larges repentirs au niveau des vêtements (bonnet sur notre tableau et manche sur l’œuvre de Liège). Nous remercions Madame Cécile Oger qui a accepté la confrontation des deux œuvres et plaide en faveur d’une réattribution du Portrait de Lambert Lombard à Anthonis Mor et également pour notre tableau.
Il est aussi intéressant de percevoir notre tableau dans la compréhension de l’époque développée par Wouk en 2021 (voir E. Wouk, 2021, idem). Considéré dans ce contexte, notre portrait est manifestement un portrait plus intimiste. Il se démarque des portraits officiels de dignitaires, religieux ou politiques. Le vêtement ample, la coiffe pourraient même laisser supposer un modèle artiste lui-même proche ou familier du peintre qui le représente. L’artiste se plaît alors à peindre à la fois l’autorité du modèle mais également sa tendresse, sa bonhommie dégageant une personnalité psychologique plus sensible.
On sait que, fin 1554, Anthonis Mor, à son retour d’Espagne, va revenir en Hollande. Petit à petit, il va aussi peindre davantage de portraits plus intimes et s’attacher à représenter des portraits plus vrais, empreints d’humanité et souvent représentant des personnages qu’il côtoyait. Le portrait du peintre Jan van Scorel (1495-1562), son maître, signé et daté 1560 (Society of Antiquaries of London, Londres, no. inv. 338) nous semble en être une belle illustration. Dans cette logique, pouvons-nous imaginer le modèle de notre tableau comme étant Pierre Brueghel L’ancien (vers 1525-1569) dont la comparaison des traits semble pouvoir fonctionner et dont aucune représentation peinte n’est actuellement connue ?
En dernier point, bien qu’il n’existe pas une source écrites qui nous indique dans le corpus de Mor la présence d’un portrait d’homme âgé en buste, on connait au moins un document assez précis qui atteste de l’existence d’une œuvre similaire, qui serait donc de localisation inconnue. Il s’agit d’un portrait très proche apparaissant sur un tableau de David Teniers le Jeune (1610-1690) représentant la collection de l’Archiduc Léopold-Guillaume (1614-1662) à Bruxelles (musée du Prado, Madrid, no. inv. P001813). L’homme âgé avec un béret, situé entre Teniers et Conde Fuensaldana (1603-1661), lieutenant et conseiller de l’Archiduc, pourrait bien être notre tableau, même si l’exécution imprécise des traits rend plus complexe une comparaison détaillée. Chose claire, on remarque l’inscription "MORO" sur le cadre. Dans l’hypothèse, soutenue par Madame Oger, d’une attribution pleine à Anthonis Mor de notre tableau, nous proposons d’envisager cette provenance comme probable.
Présenté en buste, sur un fond à la vibration chromatique évoluant du brun sombre au beige, la composition révèle un homme à l’âge avancé, à la chevelure et à la barbe fournie et au visage aux traits forts marqués de rides profondes et expressives. Son vêtement noir, simple, campe un personnage robuste et laisse apparaître sa main droite, à la carnation fine et transparente.
Présenté ou signalé à plusieurs spécialistes et historiens d’art de la période, un parfait consensus n’a pas été obtenu concernant l’auteur du tableau ci-présent. Or, tous ont unanimement reconnu la grande qualité de l’œuvre et la complexité de la comparaison et du jugement attributif à différents artistes.
De par sa puissance picturale et sa délicate sensibilité, notre portrait est à mettre en rapport avec les maîtres du genre actifs dans les Pays-Bas et en Flandre entre 1570 et 1580. Il montre l’interconnexion d’une génération d’artistes particulièrement brillante, à la formation néerlandaise, ayant travaillé dans différents pays européens (Pays-Bas, Flandre, Italie, Espagne, Angleterre). Anthonis Mor (entre 1516 et 1521-1576), artiste dont l'œuvre présente de fortes affinités avec notre tableau, est certainement le premier d’entre eux. Citons aussi Peter Pourbus (1523 ou 1524-1584), son fils Frans Pourbus l’Ancien (154-1581) mais aussi Maarten de Vos (1532-1603), Frans Floris (1517-1570) (plus célèbres pour leurs scènes religieuses mais également auteurs de portraits puissants) et les deux Key, Willem (1515/1516-1568) et Adrien Thomasz (vers 1544-après 1589).
Nous proposons de rapprocher notre tableau de l’une des œuvres les plus fameuses et énigmatiques de l’art du Portrait de cette période : Le portrait de l’artiste Lambert Lombard (1505 ou 1506-1566) aujourd’hui conservé au Musée de l’Art Wallon de Liège (no. inv. 373).
Cette dernière, puissamment charismatique, a une facture virtuose. Elle représente l’artiste, de trois-quarts, sur un fond uni crème. Autant l’identité de son modèle ne fait pas l’objet de discussions (voir le rapprochement avec la gravure de Johannes Wierix (1549-1621) datée de 1572 (C. Oger, Lambert Lombart, peintre de la Renaissance, Bruxelles, 2006, pp. 335-336, cat. 2 reproduit fig. 291)), autant son attribution est toujours incertaine (révélant ainsi la complexité, même sur les plus grands chefs d’œuvre, de l’expertise sur cette période). En effet, cette dernière fut longtemps considérée comme l’autoportrait de Lambert Lombard, hypothèse maintenant rejetée au profit d’un œuvre plutôt réalisée par Frans Floris (voir E. Wouk, The Life of Lambert Lombard, Los Angeles, 2021, pp. 99-100) ou par Anthonis Mor (voir C. Oger, 2006, idem).
D’un point de vue technique, si l’on rapproche l’écriture picturale des deux œuvres, on retrouve les mêmes détails de finesse dans la réalisation des cheveux et de la barbe ; la même facture subtile et transparente notamment au niveau du traitement des oreilles, les empâtements similaires des glacis blancs pour signifier les rides et également les larges repentirs au niveau des vêtements (bonnet sur notre tableau et manche sur l’œuvre de Liège). Nous remercions Madame Cécile Oger qui a accepté la confrontation des deux œuvres et plaide en faveur d’une réattribution du Portrait de Lambert Lombard à Anthonis Mor et également pour notre tableau.
Il est aussi intéressant de percevoir notre tableau dans la compréhension de l’époque développée par Wouk en 2021 (voir E. Wouk, 2021, idem). Considéré dans ce contexte, notre portrait est manifestement un portrait plus intimiste. Il se démarque des portraits officiels de dignitaires, religieux ou politiques. Le vêtement ample, la coiffe pourraient même laisser supposer un modèle artiste lui-même proche ou familier du peintre qui le représente. L’artiste se plaît alors à peindre à la fois l’autorité du modèle mais également sa tendresse, sa bonhommie dégageant une personnalité psychologique plus sensible.
On sait que, fin 1554, Anthonis Mor, à son retour d’Espagne, va revenir en Hollande. Petit à petit, il va aussi peindre davantage de portraits plus intimes et s’attacher à représenter des portraits plus vrais, empreints d’humanité et souvent représentant des personnages qu’il côtoyait. Le portrait du peintre Jan van Scorel (1495-1562), son maître, signé et daté 1560 (Society of Antiquaries of London, Londres, no. inv. 338) nous semble en être une belle illustration. Dans cette logique, pouvons-nous imaginer le modèle de notre tableau comme étant Pierre Brueghel L’ancien (vers 1525-1569) dont la comparaison des traits semble pouvoir fonctionner et dont aucune représentation peinte n’est actuellement connue ?
En dernier point, bien qu’il n’existe pas une source écrites qui nous indique dans le corpus de Mor la présence d’un portrait d’homme âgé en buste, on connait au moins un document assez précis qui atteste de l’existence d’une œuvre similaire, qui serait donc de localisation inconnue. Il s’agit d’un portrait très proche apparaissant sur un tableau de David Teniers le Jeune (1610-1690) représentant la collection de l’Archiduc Léopold-Guillaume (1614-1662) à Bruxelles (musée du Prado, Madrid, no. inv. P001813). L’homme âgé avec un béret, situé entre Teniers et Conde Fuensaldana (1603-1661), lieutenant et conseiller de l’Archiduc, pourrait bien être notre tableau, même si l’exécution imprécise des traits rend plus complexe une comparaison détaillée. Chose claire, on remarque l’inscription "MORO" sur le cadre. Dans l’hypothèse, soutenue par Madame Oger, d’une attribution pleine à Anthonis Mor de notre tableau, nous proposons d’envisager cette provenance comme probable.