拍品專文
par Bertrand Goy
Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, la simplicité n’est pas ce qui caractérise la statuaire Baulé la plus archaïque : en témoignent ses premières représentantes parvenues en Europe qui ont en partage, outre une profusion de détails anatomiques, des visages d’une extrême préciosité et des corps puissants façonnés avec précision. Maurice Delafosse, acquéreur d’un exemplaire de ces statues en 1896, voyait dans son profil le raffinement de celui de Séthi 1er, pharaon d’Égypte, gravé dans la pierre du temple d’Abydos.
L’œuvre de la collection Danis illustre à la perfection ce « maniérisme » au sens du Cinquecento italien. Tous les traits du visage d’un pur ovale sont minutieusement ciselés, de la bouche délicate à l’ample courbure des sourcils protégeant des paupières très étirées, aussi finement dessinées que les ailettes du nez. Les chéloïdes d’usage sont bien marquées aux tempes et sur la glabelle et ornent également le corps, dessinant un motif particulièrement élaboré sur le cou et dans le dos. La coiffure, chef-d’œuvre de sophistication, couvre la tête d’un tressage serré, bordé à sa base d’une large natte en S épousant le contour des oreilles élégamment ourlées, pour se terminer en cadogan. Deux manières de cornes ornant le sinciput et une longue barbe à trois pointes complètent ce portrait d’ancêtre empreint de douceur et de sérénité.
Le personnage est croqué dans la posture très caractéristique de la statuaire Baulé, le corps très droit, les épaules tirées en arrière, mains posées de part et d’autre du nombril, avec pour effet de projeter l’abdomen légèrement vers l’avant. De grande taille, le corps est bien proportionné, doté de membres inférieurs longs et déliés, aux muscles galbés où se devinent les subtiles facettes laissées par la gouge, gages de précision et de qualité. La patine glacée témoigne des onctions autrefois prodiguées à cette sculpture dont la taille et la qualité la réservaient sans doute à la fonction d’asie usu, destinée à accueillir des esprits qui, n’assumant pas leur légendaire laideur, exigeaient les plus beaux des réceptacles pour s’y incarner.
by Bertrand Goy
Contrary to what one might imagine, simplicity is not the hallmark of the most archaic Baule statuary, as can be seen from its first representatives to reach Europe, which, in addition to a profusion of anatomical details, share extremely precious faces and powerful bodies shaped with precision. Maurice Delafosse, who bought one of these statues in 1896, saw in its profile a similar refinement to that of Sethi I, Pharaoh of Egypt, engraved in stone at the temple of Abydos.
The work in the Danis collection is a perfect illustration of this “mannerism” in the sense of the Italian Cinquecento. All the features of the purely oval face are meticulously chiselled, from the delicate mouth to the ample curvature of the eyebrows protecting the stretched eyelids as finely drawn as the wings of the nose. The customary keloids well marked at the temples and on the glabella adorn the body also, creating a particularly elaborate pattern on the neck and the back. The hairstyle, a masterpiece of sophistication, covers the head with tight braids, edged into a wide S-shaped curl around the contours of the elegantly hemmed ears to end in a cadogan. A set of horns on the sinciput and a long, three-pointed beard complete this gentle, serene portrait of an ancestor.
The figure is depicted in the highly characteristic posture of the Baule statuary, with the body very upright, shoulders drawn back, and hands placed on both sides of the navel, projecting the abdomen slightly forward. The body is large and well-proportioned, the lower limbs are long and lithe, and shapely muscles reveal the subtle facets left by the gouge, marks of precision and quality. The glazed patina attests to the frequent anointing once lavished on this sculpture which, given its size and quality, was no doubt intended to the function of asie usu, to welcome spirits who, not accepting their legendary ugliness, demanded the most beautiful of receptacles in which to be incarnated.
Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, la simplicité n’est pas ce qui caractérise la statuaire Baulé la plus archaïque : en témoignent ses premières représentantes parvenues en Europe qui ont en partage, outre une profusion de détails anatomiques, des visages d’une extrême préciosité et des corps puissants façonnés avec précision. Maurice Delafosse, acquéreur d’un exemplaire de ces statues en 1896, voyait dans son profil le raffinement de celui de Séthi 1er, pharaon d’Égypte, gravé dans la pierre du temple d’Abydos.
L’œuvre de la collection Danis illustre à la perfection ce « maniérisme » au sens du Cinquecento italien. Tous les traits du visage d’un pur ovale sont minutieusement ciselés, de la bouche délicate à l’ample courbure des sourcils protégeant des paupières très étirées, aussi finement dessinées que les ailettes du nez. Les chéloïdes d’usage sont bien marquées aux tempes et sur la glabelle et ornent également le corps, dessinant un motif particulièrement élaboré sur le cou et dans le dos. La coiffure, chef-d’œuvre de sophistication, couvre la tête d’un tressage serré, bordé à sa base d’une large natte en S épousant le contour des oreilles élégamment ourlées, pour se terminer en cadogan. Deux manières de cornes ornant le sinciput et une longue barbe à trois pointes complètent ce portrait d’ancêtre empreint de douceur et de sérénité.
Le personnage est croqué dans la posture très caractéristique de la statuaire Baulé, le corps très droit, les épaules tirées en arrière, mains posées de part et d’autre du nombril, avec pour effet de projeter l’abdomen légèrement vers l’avant. De grande taille, le corps est bien proportionné, doté de membres inférieurs longs et déliés, aux muscles galbés où se devinent les subtiles facettes laissées par la gouge, gages de précision et de qualité. La patine glacée témoigne des onctions autrefois prodiguées à cette sculpture dont la taille et la qualité la réservaient sans doute à la fonction d’asie usu, destinée à accueillir des esprits qui, n’assumant pas leur légendaire laideur, exigeaient les plus beaux des réceptacles pour s’y incarner.
by Bertrand Goy
Contrary to what one might imagine, simplicity is not the hallmark of the most archaic Baule statuary, as can be seen from its first representatives to reach Europe, which, in addition to a profusion of anatomical details, share extremely precious faces and powerful bodies shaped with precision. Maurice Delafosse, who bought one of these statues in 1896, saw in its profile a similar refinement to that of Sethi I, Pharaoh of Egypt, engraved in stone at the temple of Abydos.
The work in the Danis collection is a perfect illustration of this “mannerism” in the sense of the Italian Cinquecento. All the features of the purely oval face are meticulously chiselled, from the delicate mouth to the ample curvature of the eyebrows protecting the stretched eyelids as finely drawn as the wings of the nose. The customary keloids well marked at the temples and on the glabella adorn the body also, creating a particularly elaborate pattern on the neck and the back. The hairstyle, a masterpiece of sophistication, covers the head with tight braids, edged into a wide S-shaped curl around the contours of the elegantly hemmed ears to end in a cadogan. A set of horns on the sinciput and a long, three-pointed beard complete this gentle, serene portrait of an ancestor.
The figure is depicted in the highly characteristic posture of the Baule statuary, with the body very upright, shoulders drawn back, and hands placed on both sides of the navel, projecting the abdomen slightly forward. The body is large and well-proportioned, the lower limbs are long and lithe, and shapely muscles reveal the subtle facets left by the gouge, marks of precision and quality. The glazed patina attests to the frequent anointing once lavished on this sculpture which, given its size and quality, was no doubt intended to the function of asie usu, to welcome spirits who, not accepting their legendary ugliness, demanded the most beautiful of receptacles in which to be incarnated.