Clovis Trouille (1889-1975)
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Clovis Trouille (1889-1975)

Le Présent des Gaules ou Sous-bois celtique avec menhir et loups

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Clovis Trouille (1889-1975)
Le Présent des Gaules ou Sous-bois celtique avec menhir et loups
signé 'Clovis Trouille' (en bas à droite); signé et inscrit 'Clovis Trouille 57 Avenue Mathurin Moreau Paris 19è «le présent des Gaules»' (au revers); inscrit 'Au grand Cérémonial druidique de la Cueillette du gui, La Femme adultère est pardonnée, d’autant mieux qu’elle n’est pas la sienne. Elle va le récompenser par la divine communion ancestrale, Présent des Gaules, du culte celtique. La morale est sauve, lorsqu’une passion exquise, une belle pénitente savoure L’orgasme sacré, de son bon confesseur, dans la soutane.' (le long du côté inférieur)
huile sur toile sur assemblage de bois dans le cadre de l'artiste
Image: 71.4 x 84.3 cm.
Cadre de l'artiste: 78.5 x 92 x 2 cm.
Peint en 1969

signed 'Clovis Trouille' (lower right); signed and inscribed 'Clovis Trouille 57 Avenue Mathurin Moreau Paris 19è «le présent des Gaules»' (on the reverse); inscribed 'Au grand Cérémonial druidique de la Cueillette du gui, La Femme adultère est pardonnée, d’autant mieux qu’elle n’est pas la sienne. Elle va le récompenser par la divine communion ancestrale, Présent des Gaules, du culte celtique. La morale est sauve, lorsqu’une passion exquise, une belle pénitente savoure L’orgasme sacré, de son bon confesseur, dans la soutane.' (along the lower edge)
oil on canvas on wood assemblage in the artist's frame
Image: 28 x 33 1⁄8 in.
Artist's frame: 30 7⁄8 x 36 ¼ x 0 ¾ in.
Painted in 1969
Provenance
Atelier de l'artiste.
Puis par succession aux propriétaires actuels.
Literature
C. Prévost, Parcours à travers l'œuvre de Clovis Trouille, Arles, 2003, p. 263 (illustré en couleurs p. 262-263; détails illustrés en couleurs, p. 202, p. 264 et p. 265; illustré in situ, p. 96).
Exhibited
Paris, Salles d'exposition Wilson, XXVe Salon de mai, mai-juin 1969, no. 198.
Paris, Musée des Arts d’Afrique et d’Océanie, Exposition Clovis Trouille, octobre 1999-janvier 2000 (sans catalogue).
Ostende, Museum voor Moderne Kunst, Clovis Trouille, mars-novembre 2002.
Further Details
Dans Le Présent des Gaules, Clovis Trouille crée une œuvre où se croisent et se confrontent différentes temporalités et symboliques, faisant écho à des références culturelles riches et complexes. En effet, le poème Présent des Gaules d’André Breton (1947) est au cœur de la démarche de Trouille pour ce tableau. Tiré de son recueil Clair de Terre, ce poème propose une réflexion sur l'identité française et la situation de la France à une époque de crise et de transformation. Breton joue avec l'idée de la France comme héritière d'un passé glorieux, symbolisé par les ‘Gaules’, mais qui se trouve désormais confrontée à des défis modernes qui la déstabilisent. Le poème évoque une tension entre tradition et modernité, entre le passé mythique et la réalité contemporaine. Breton utilise des images surréalistes pour exprimer la confusion et l'incertitude de cette époque, tout en cherchant à capturer l'essence de la France à travers ses paysages, son histoire et sa culture. Présent des Gaules est ainsi une méditation poétique sur le destin de la France, dans laquelle André Breton explore les liens entre passé et présent, tout en exprimant une certaine inquiétude face à l'avenir.
En choisissant un titre qui fait directement référence à cette œuvre littéraire, Clovis Trouille s’inscrit dans une tradition surréaliste de réappropriation d’un passé celtique, et met en images le poème de Breton. Ce dernier, qui surnommait Clovis Trouille de ‘grand maître de cérémonie du tout est permis’, était un passionné de l’histoire et des cultures anciennes, collectionnant notamment des monnaies et artefacts celtes. Ces objets incarnaient pour lui une forme d’art brut, non corrompu par les canons esthétiques imposés par la société bourgeoise et chrétienne. Ils représentaient ainsi une connexion avec un passé païen, libre de toute influence religieuse dominante. La fascination de Breton pour ces reliques celtiques reflétait sa quête d'un retour aux origines, à une époque où la spiritualité était encore imprégnée de mystère et d’indépendance vis-à-vis des institutions.
Outre son lien direct avec le poème d'André Breton, le tableau de Clovis Trouille s’inspire de la célèbre représentation du Noli me Tangere par Titien. Cette œuvre, conservée à la National Gallery de Londres, représente une scène clé du christianisme, dans laquelle le Christ ressuscité apparaît à Marie-Madeleine, lui signifiant de ne pas le toucher car il n’est pas encore monté au ciel. Trouille reprend cette posture iconique du Christ, symbolisant la séparation entre le sacré et le profane, mais il la transpose dans un contexte résolument subversif. Tandis que Titien visait à souligner la pureté et la distance divine du Christ, Trouille utilise cette référence pour questionner et détourner ces notions de tentation, de pureté et de spiritualité, en les confrontant à une réalité contemporaine bien plus provocante. Cette confrontation est accentuée par l’introduction d’éléments modernes dans l’œuvre, notamment la figure des Bigoudènes vêtues uniquement de bas de bikinis roses, rappelant la figure de Marie-Madeleine ou dansant dans l’eau. Le bikini, inventé en 1946 et popularisé dans les années 1950, devient ici un symbole de la libération sexuelle des années 60 et de la remise en question des normes sociales et morales. En choisissant de représenter des Bigoudènes dans cette tenue moderne et provocante, Clovis Trouille oppose le passé au présent. Ce contraste entre la coiffe traditionnelle, lourde de significations historiques et culturelles, et le bikini, symbole de modernité et d'émancipation, souligne les tensions entre tradition et modernité.
La représentation de ces figures féminines, à la fois ancrées dans leur passé celtique et libérées par la modernité, reflète une société en mutation, où les valeurs anciennes sont constamment réévaluées et contestées, rejoignant les idées évoquées par André Breton dans son poème. La coiffe bigoudène, élément central de la représentation, transcende son rôle de simple accessoire vestimentaire pour devenir un puissant symbole de résistance et d'identité régionale. Selon une légende bien ancrée, la hauteur croissante de cette coiffe serait une réaction à la destruction des clochers bretons ordonnée par Louis XIV lors de la révolte des Bonnets Rouges en 1675, une révolte fiscale contre la monarchie. Cette coiffe, qui aurait ainsi augmenté en taille pour défier l'autorité, incarne la fierté et la détermination bretonnes face à l'oppression. Interprétée par certains comme un symbole phallique, la coiffe bigoudène évoque la virilité et la résistance, des thèmes qui résonnent fortement dans l'œuvre de Clovis Trouille. La coiffe haute, par sa forme et son histoire, fait également écho au menhir présent à l'arrière-plan de la composition. Le paon, situé à droite de la figure féminine du premier plan, est un autre élément crucial du tableau. Souvent utilisé comme symbole chrétien de résurrection et d'immortalité, le paon est également associé à la vanité, en raison de la splendeur ostentatoire de ses plumes. Dans l'œuvre de Clovis Trouille, l'animal reflète cette double signification : il incarne à la fois la beauté superficielle, critiquant ainsi les valeurs esthétiques de la modernité, et il interroge la notion de résurrection, en la détournant du contexte chrétien pour l’inscrire dans une réflexion plus large sur la vanité. Le choix de cet animal n’est pas anodin et renforce l’opposition entre le sacré et le profane, tout en ajoutant une couche de complexité à la critique sociale et religieuse que l’artiste développe à travers sa peinture.

In Le Présent des Gaules, Clovis Trouille has created a work in which different temporalities and symbolism intersect and confront each other, offering a wide range of rich and complex cultural references. André Breton's poem Présent des Gaules (1947) lies at the heart of Clovis Trouille's approach for this particular painting. Taken from his collection Clair de Terre, the poem reflects on French identity and the situation of France at a time of crisis and transformation. Breton plays with the idea of France as heir to a glorious past, symbolised by the ‘Gauls’, but now facing modern challenges that destabilise it. The poem evokes a tension between tradition and modernity, between the mythical past and contemporary reality. Breton uses surrealist imagery to express the confusion and uncertainty of the times, while seeking to capture the essence of France through its landscapes, history and culture. Présent des Gaules is thus a poetic meditation on France’s destiny, in which André Breton explores the links between past and present, while expressing a certain anxiety about the future.
By choosing a title that refers directly to this literary work, Clovis Trouille is following a surrealist tradition of reinventing a Celtic past, and putting Breton's poem into images. Breton, who nicknamed Clovis Trouille the ‘grand master of ceremonies of everything is allowed’, was passionate about history and ancient cultures, and collected Celtic coins and artefacts. For him, these objects embodied a form of pure art, uncorrupted by the aesthetic canons imposed by bourgeois and Christian society. They represented a connection with a pagan past, free from any dominant religious influence. Breton's fascination with these Celtic relics reflected his quest for a return to origins - at a time when spirituality was still imbued with mystery - and independence from institutions.

In addition to its direct link with André Breton's poem, Clovis Trouille's painting is clearly inspired by Titian's famous depiction of Noli me Tangere. This masterpiece, housed in the National Gallery of London, depicts a key scene in the Christian religion: the risen Christ appears to Mary Magdalene, telling her not to touch him because he has not yet ascended to heaven. Clovis Trouille takes up this iconic posture of Christ, symbolising the separation between the sacred and the profane, but transposes it into a resolutely subversive context. Whereas Titian's aim was to emphasise Christ's purity and divine distance, Clovis Trouille uses this reference to question and divert these notions of temptation, purity and spirituality, by confronting them with a far more provocative contemporary reality. This confrontation is accentuated by the introduction of modern elements into the work, such as the ‘Bigouden’ women (traditional Breton women) dressed only in pink bikinis, recalling the figure of Mary Magdalene or dancing in the water. The bikini, invented in 1946, which became common in the 1950s, here becomes a symbol of the sexual liberation of the 1960s as well as of the questioning of social and moral norms. By choosing to depict Bigouden women in this provocative modern garb, Clovis Trouille confronts the past with the present. The contrast between the traditional headdress, heavy with historical and cultural significance, and the bikini, a symbol of modernity and emancipation, highlights the tensions between tradition and modernity.

The depiction of these female figures, simultaneously rooted in their Celtic past and liberated by modernity, reflects a society in transition, where old values are constantly re-evaluated and challenged, echoing the ideas evoked by André Breton in his poem. The Bigouden headdress, the central element of the show, transcends its role as a simple accessory of dress to become a powerful symbol of resistance and regional identity. Legend has it that the increasing height of the headdress was a reaction to the destruction of Breton church towers ordered by Louis XIV during the Bonnets Rouges revolt of 1675, a tax revolt against the monarchy. This headdress, which grew in size to symbolically defy authority, embodies Breton pride and determination against oppression. Interpreted by some as a phallic symbol, the Bigouden headdress evokes virility and resistance, themes that resonate strongly throughout Clovis Trouille’s work. The tall headdress, by its shape and history, also echoes the menhir in the background of the composition. The peacock, to the right of the female figure in the foreground, is another crucial element in the painting. Often used as a Christian symbol of resurrection and immortality, the peacock is also associated with vanity, due its feathers’ ostentatious splendour. In Clovis Trouille's work, the animal reflects this double meaning: it embodies both superficial beauty, thus criticising the aesthetic values of modernity, and it questions the notion of resurrection, taking it out of the Christian context and placing it within a broader reflection on vanity. The choice of the peacock is not insignificant, reinforcing the opposition between the sacred and the profane, while adding a layer of complexity to the social and religious critique that the artist develops through his painting.

Brought to you by

Valérie Didier
Valérie Didier Head of Department

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