PAIRE DE FAUTEUILS ROYAUX EN CABRIOLET D'ÉPOQUE LOUIS XVI
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PAIRE DE FAUTEUILS ROYAUX EN CABRIOLET D'ÉPOQUE LOUIS XVI

ESTAMPILLE DE GEORGES JACOB, LIVRÉE POUR MADAME, COMTESSE DE PROVENCE A MONTREUIL, 1784

Details
PAIRE DE FAUTEUILS ROYAUX EN CABRIOLET D'ÉPOQUE LOUIS XVI
ESTAMPILLE DE GEORGES JACOB, LIVRÉE POUR MADAME, COMTESSE DE PROVENCE A MONTREUIL, 1784
En bois mouluré, sculpté et doré, le dossier cintré en chapeau de gendarme surmonté d'une double couronne de fleurs et de myrtes appliquée de feuilles de laurier, les accotoirs garnis de manchette rembourée sur des consoles en cavet à cannelures et feuilles d'acanthe, la ceinture à double frise de rais-de-coeur et de feuilles d'eau, les pieds fuselés, cannelés et rudentés surmontés de palmettes, chacun estampillé 'G.JACOB' sous la traverse arrière, couverture de soie rouge à motifs de personnages à l'Antique
H.: 96 cm. (37 ¾ in.) ; L.: 62 cm. (24 ½ in.) ; P.: 54 cm. (21 ½ in.)
Georges Jacob, reçu maître en 1765.
Provenance
Livrée pour Madame, comtesse de Provence, pour le salon du Pavillon de musique de Montreuil à Versailles, 1784.
Literature
Bibliographie :
H. Lefuel, Georges Jacob, ébéniste du XVIIIe siècle, Paris, 1923, pp. 246-248.

Bibliographie comparative :
J. Whitehead et L. King, The French Interior in the Eighteenth Century, Londres, 1992, pp. 86.
Further details
A PAIR OF ROYAL LOUIS XVI GILTWOOD ARMCHAIRS STAMPED BY GEORGES JACOB DELIVERED FOR MADAME COMTESSE DE PROVENCE FOR MONTREUIL, 1784

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Hippolyte de la Féronnière
Hippolyte de la Féronnière Head of European Furniture Department

Lot Essay

Cette exceptionnelle paire de fauteuils en cabriolet estampillée par Georges Jacob fut livrée pour un membre incontournable de la famille royale dans un lieu emblématique : Madame, comtesse de Provence, épouse du frère aîné du Roi et futur Louis XVIII pour sa résidence privée, le Pavillon de Montreuil à Versailles.

MADAME A MONTREUIL

Marie-Joséphine, fille de Victor-Amédée III de Savoie, roi de Sardaigne, et de Marie-Antoinette, infante d'Espagne, naît princesse de Savoie le 2 septembre 1753. Le 14 mai 1771 elle devient comtesse de Provence par son mariage avec le frère du roi Louis-Stanislas-Xavier de France. C’est à l’avènement de Louis XVI en 1774 que la comtesse de Provence deviendra alors la seconde dame de France après la Reine et recevra suivant l'usage l'appellation de Madame.

Arrivée à Versailles à l’âge de 17 ans, c’est isolée et quelque peu délaissée que Madame décide d’installer sa résidence principale à l'écart de la Cour. A l’instar de Marie-Antoinette à Trianon, la comtesse de Provence souhaite avoir son domaine privé à proximité de la résidence royale. En 1780, elle fait l’acquisition à Montreuil d’un pavillon d’habitation, anciennement propriété du prince de Montbarrey. C’est notamment par l'intermédiaire d'Imbert de Lattes, que la princesse fait l'acquisition du domaine pour la somme de 30 000 livres, étendant bientôt celui-ci par l'acquisition de dix-sept jardins et divers bâtiments avec meubles et effets mobiliers. Le parc quant à lui s’étendra bientôt sur plus d’une douzaine d’hectares.

Le pavillon d'habitation initialement construit en 1774 par Vigneux pour Durand de Monville, fut agrandi et transformé par Jean-François-Thérèse Chalgrin (1739-1811), Premier architecte et intendant des bâtiments du comte de Provence. Ce dernier allait faire de Montreuil l’archétype de la résidence princière de la fin du XVIIIème siècle, mêlant deux inspirations majeures : un rigoureux néoclassicisme pour l’architecture, un romantisme anglais pour les jardins.
Des écuries, des remises, une melonnière et un potager furent vite ajoutés. Derrière le Pavillon s’étendait un vaste parc paysagé à l'anglaise. L'eau y était acheminée depuis la butte de Montbauron par une conduite en cuivre. On y trouvait un bois de sycomores, d'ormes et de frênes, une rivière agrémentée de trois îles, une pelouse vallonnée, une montagne, ainsi que de nombreuses fabriques : une chaumière, un hameau, une pagode, un belvédère et le temple de Diane, destinées à rivaliser avec le Hameau de la Reine de Trianon.
Enfin un remarquable pavillon de musique de forme octogonale construit en 1784, toujours par Chalgrin, et une laiterie venaient compléter l’ensemble. C’est d’ailleurs à cette occasion et pour le salon principal de ce pavillon, que notre présente paire de fauteuils fut imaginée et livrée, avec tout un ensemble mobilier particulièrement bien documenté.

Le Vicomte de Resiet dans son œuvre dédiée à la figure de Madame, comtesse de Provence fait d’ailleurs de ce fameux Pavillon de musique une description particulièrement détaillée :
Madame, bientôt ne s’en était pas tenue là, et à ces premiers travaux étaient venues s’ajouter de nombreuses constructions d’agrément dont un pavillon de musique et un hameaux de douze maison, émue de Trianon avec sa laiterie en marbre blanc, sa vacherie recouverte en chaume, son pressoir toujours prêt pour la vendange, et son colombier tout rempli de pigeons et de palombes. […]
Mais la merveille du grand Montreuil était le pavillon de musique. […] Dans le salon qui s’élargit en rotonde, des guirlandes de lauriers et de feuillage d’accrochent et s’enroulent autour des ‘M’ symboliques, se détachant toute blanches sur un fond de couleur rose dans des médaillons d’un gris bleu. Et l’ensemble de cette vaste pièce est resté incomparable avec cette tonalité harmonieuse, avec les voussures de son plafond nuageux, et les fines arabesques de sa frise, qui reflètent à l’infini les 4 portes de glaces faisant faces aux fenêtres. Une salle de billard, une petite bibliothèque, des cabinets de repos et de curieux escaliers, artistement combinés pour conduire aux entresols de l’étage supérieur, complétaient ce coquet ensemble. […] C’est dans ce séduisant décor que Josephine de Savoie, fuyant Versailles et ses splendeurs, vient chaque jour en fichu de gaze, vêtue d’une robe de linon, abritée sous un chapeau de paille, visiter son domaine et joueur à la fermière comme Marie-Antoinette le fait à Trianon (T.-H.-A. de Reiset, op.cit. pp. 75 et 82-84).

Contrainte à quitter la France pour échapper à la Révolution Française, la comtesse de Provence fuira Montreuil. Ses biens seront saisis avec ceux des émigrés et l’ensemble sera mis en vente le 9 juillet 1793 sous la forme de neuf vacations. La propriété, quant à elle, sera partagée en quatre lots et vendue le 6 germinal de l’an II (26 mars 1794) pour 126 200 livres. Aujourd’hui le Pavillon de musique existe toujours. Il conserve ses salons, leurs anciennes boiseries ainsi que la décoration de ses trumeaux et de ses frises. Tout autour du salon ovale restent les fleurs en guirlandes qui s’enroulent de part et d’autre des médaillons bleu Wedgwood contenant le fameux chiffre royal.

La comtesse de Provence parcourut l’Europe avec sa lectrice, et probable amante Marguerite de Gourbillon. Celle qui jusqu’en 1810 resta Reine de France aux yeux des monarchistes, mourut en Angleterre sans avoir jamais revu ni la France ni Montreuil.

LE MOBILIER DU PAVILLON NEUF DU JARDIN PAR GEORGES JACOB

Par l’intelligence de ses lignes, son sens du dessin, le parfait équilibre entre la rigueur des lignes et la générosité de la sculpture, sa qualité d’exécution supérieure, cette élégante paire de fauteuils est caractéristique du meilleur de Georges Jacob au dernier quart du XVIIIe siècle. Le plus célèbre des menuisiers en siège de cette fin du XVIIIe siècle signe ici une réalisation impeccable, emprunte de grandeur, à la hauteur de ses autres livraisons pour les maisons royales. Le décor très naturaliste avec cette double couronne est par ailleurs très représentatif du goût de l’époque et surtout de son commanditaire.

Nous savons aujourd’hui que l’ensemble du meuble commandé à Jacob pour le salon du Pavillon de musique, dont faisait partie notre paire de fauteuils, se composait en outre de huit fauteuils d’angle en forme de tête-à-tête, d’un écran, de trois ottomanes sans dossier ainsi que de six chaises courante faites à l’antique. Nos fauteuils sont d’ailleurs parfaitement identifiables grâce à la description du Mémoire retranscrit par Hector Lefuel dans son ouvrage de 1923 dédié à Georges Jacob :

Mémoire des ouvrages faits et fournis pour Madame à Montreuil, sous les ordres de M. de Bard, par Jacob menuiser en meubles, rue Meslée.
Deux fauteuils en cabriolet ; faits pour des places et en bois de noyer ; ornés et sculptés pareils aux grands meubles ci-dessus ; à 260 livres.
Le meuble en question y est décrit plus haut comme composés de rais-de-cœur et de perles sur le dessus et enrichis de deux couronnes en bandeau, l’une de fleurs et l’autre de myrthe, avec deux branches de laurier nouées d’un ruban ; les assemblages sont ornés de rais de cœur et feuilles-d’eau au bord de la garniture.

Une partie de ce mobilier nous est aujourd’hui parvenue. En effet, concernant les huit ‘fauteuils d’angle’ (ou marquises) nous connaissons aujourd’hui :
- Une marquise acquise en 1938 chez Monsieur Lion, antiquaire à Paris et provenant de l’ancienne collection d’Héli de Talleyrand, duc de Talleyrand. Elle fut présentée à la vente chez Christie’s à Paris le 21 juin 2007, lot 217.
- Une paire de marquises vendue chez Christie’s à New York le 20 avril 2018, lot 24 provenant de l’ancienne collection de John T. Dorrance, Jr (vente Sotheby’s, New York, 21 octobre 1989, lot 808).
- Une paire de marquises vendue chez Christie’s à Londres le 13 novembre 2019, lot 12.
- La marquise qui fut présentée lors de la vente Christie’s, Collection Dalva Brothers II à Paris le 23 novembre 2021, lot 31 faisait très probablement partie de cet ensemble bien que la double couronne du dossier soit différente et probablement restaurée.

Enfin, concernant les trois banquettes ottomanes sans dossier, une paire fut vendue chez Sotheby’s à Paris le 8 octobre 2015, lot 249.



This remarkable pair of cabriolet armchairs bearing the stamp of Georges Jacob was made for a key member of the Royal Family, and was destined for a truly iconic location. It was made for Madame, Countess of Provence – wife of the King’s elder brother, the future Louis XVIII – for her private residence, the Pavillon de Montreuil in Versailles.


MADAME AT MONTREUIL

Marie Joséphine, daughter of Victor Amadeus III of Savoy, King of Sardinia, and Maria Antonia Ferdinanda, Infanta of Spain, was born Princess of Savoy on 2 September 1753. On 14 May 1771, she became Countess of Provence, through her marriage to the brother of King Louis Stanislas Xavier of France. When Louis XVI acceded to the throne in 1774, the Countess of Provence became the second Lady of France after the Queen, and was given the customary title of Madame.

Following her arrival in Versailles at the age of 17, it was in a state of some isolation, having been somewhat put aside, that Madame decided to set up her main residence away from Court. Much like Marie-Antoinette at Trianon, the Countess of Provence wished to have her own private estate, in close proximity to the palace. In 1780, she acquired a private villa in Montreuil, formerly owned by the Prince of Montbarrey. The princess acquired the estate through an intermediary, Imbert de Lattes, for the sum of 30,000 livres, and soon extended it with the purchase of seventeen gardens and various buildings that included furniture and household effects. The estate soon extended over more than a dozen hectares (30 acres).

The private residence, originally built in 1774 by Vigneux for Durand de Monville, was extended and transformed by Jean-François-Thérèse Chalgrin (1739-1811), the Count of Provence’s chief architect and steward of buildings. Chalgrin turned Montreuil into the archetypal princely residence of the late 18th century, the result of a combination of two major sources of inspiration: the architecture was heavily inspired by Neoclassicism; while the gardens were influenced by English Romanticism.
Stables, outbuildings, a melon patch and a kitchen garden were soon added. Behind the villa lay a vast landscaped park in the English style. Water was supplied from the Butte de Montbauron via a copper pipe. There was a wood containing sycamore, elm and ash trees, a river with three islands, an undulating lawn, a hill, as well as a number of buildings, including a thatched cottage, a hamlet, a pagoda, a viewpoint, and the Temple of Diana, all designed to rival the Queen’s Hamlet at Trianon.
Finally, a remarkable octagonal music pavilion was built in 1784, again by Chalgrin, while a dairy completed the ensemble. It was at this time, and for the villa’s main salon, that this pair of armchairs was designed and made, along with a particularly well-documented set of furniture.

In his work dedicated to Madame, Countess of Provence, the Viscount of Resiet gives a detailed description of this famous music pavilion:
Madame did not stop there, and to these initial works were soon added numerous pleasure buildings, including a music pavilion and a hamlet of twelve houses, reminiscent of Trianon, with its white marble dairy, thatched cow shed, wine press that was always ready for the grape harvest, and dovecote full of pigeons and doves. […]
But the true marvel of the great Montreuil was the music pavilion. [...] Within the salon, which widens onto a rotunda, garlands of laurel and foliage hang and wind around symbolic ‘M’s, their whiteness standing out against a pink background within blue-grey medallions. And the whole of this vast room is still beyond compare, with its harmonious tones, the arches of its cloud-filled ceiling, and the fine arabesques of the frieze, which reflect the 4 mirrored doors facing the windows to infinity. A billiards room, a small library, rest areas and a series of curious staircases, artfully combine to lead to mezzanines on the upper floor, completing this delightful ensemble. [...] It was to this charming setting that Josephine of Savoy, fleeing Versailles and its splendours, would come each day, in her gauze headscarf, wearing a lawn cloth dress and shaded by a straw hat, to visit her estate and play the farmer, as Marie-Antoinette did at Trianon (T.-H.-A. de Reiset, op.cit. pp. 75 and 82-84).

Forced to leave France to escape the French Revolution, the Countess of Provence fled Montreuil. Her property was seized, along with that of the other exiles, and the whole estate was put up for sale on 9 July 1793, in the form of nine auction sales. The property was divided into four lots and sold on 6 Germinal Year II (26 March 1794) for 126,200 livres. The music pavilion is still standing to this day. The salons it contained are also still there, with their old wood panelling, as well as the decorative elements on the overmantels and friezes. All around the oval-shaped salon can still be found the garlands of flowers that wind around the Wedgwood blue medallions containing the famous royal cipher.

The Countess of Provence travelled all over Europe with her reader and probable lover, Marguerite de Gourbillon. She remained Queen of France in the eyes of the monarchists, until 1810, when she died in England, without ever having seen France or Montreuil again.


FURNITURE FOR THE NEW GARDEN PAVILION, BY GEORGES JACOB

With the intelligence of its lines, the sense of design, the perfect balance between meticulous lines and ornate carving, and the superior quality of the craftsmanship, this supremely elegant pair of armchairs is characteristic of Georges Jacob’s best work in the late 18th century. The most famous chair maker of the late 18th century produced here a flawless piece of work, imbued with grandeur, that was on a par with the other work that he produced for the royal residences. The extremely naturalistic decoration, with its double coronet, is also very much representative of the prevailing taste of the period, and above all that of his patron.

We now know that the furniture Jacob was commissioned to produce for the salon in the music pavilion, which included this pair of armchairs, also comprised eight tête-à-tête corner armchairs, a screen, three backless ottomans, and six antique-style chairs. These armchairs are clearly identifiable from the description in the Mémoire (records) transcribed by Hector Lefuel in his 1923 book on Georges Jacob:

Memorandum of works made and supplied to Madame in Montreuil, on the orders of M. de Bard, by Jacob, furniture joiner, Rue Meslée.
Two cabriolet armchairs; made as seats, in walnut wood; decorated and carved in the style of the large pieces of furniture mentioned above; at a sum of 260 livres.
The piece of furniture in question is previously described as consisting of rais-de-cœur (a motif of heart-shaped leaves) and beading along the top, embellished with two coronets set within a band, one of flowers and the other of myrtle, with two branches of laurel, tied with a ribbon. The joints are decorated with rais-de-cœur and waterleaf along the edge of the trim.

Some of this furniture has survived to the present day. Of the eight “corner armchairs” (or “marquises”), we know of the following surviving pieces:
- A marquise acquired in 1938 from Monsieur Lion, an antique dealer in Paris, from the former collection of Héli de Talleyrand, Duke of Talleyrand. It was presented for sale at Christie’s Paris on 21 June 2007, under lot 217.
- A pair of marquises, sold at Christie’s New York on 20 April 2018, lot 24, from the former collection of John T. Dorrance, Jr (Sotheby’s sale, New York, 21 October 1989, lot 808).
- A pair of marquises sold at Christie’s London on 13 November 2019, lot 12.
- The marquise presented at the Christie’s sale of the Dalva Brothers II Collection in Paris on 23 November 2021, lot 31, was very likely part of this same set, although the double coronet on the backrest is different and had most likely been restored.

Lastly, in respect of the three backless ottoman benches, a pair was sold at Sotheby’s Paris on 8 October 2015, under lot 249.

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