Lot Essay
« Le noir a des possibilités insoupçonnées et, attentif à ce que j’ignore, je vais à leur rencontre. »
Pierre Soulages
Depuis cette journée de janvier 1979 où « la couleur noire avait envahi la toile », Soulages travaille l'outrenoir: ce n'est plus la couleur elle-même qui intéresse l'artiste, mais plutôt les textures du noir, tantôt lisses, tantôt fibreuses, quelquefois en creux, quelquefois en relief ; et surtout la lumière qui naît de cette géographie de la toile, et qui varie selon l'exposition, la lumière, la position du regardeur.
Trente ans plus tard, dans les années 2000, Soulages reste toujours fidèle à la poésie de la lumière noire et continue, tel un explorateur, à parcourir systématiquement les territoires encore vierges de son domaine outrenoir. Si le début des années 2010 a été particulièrement intense dans sa carrière, marquée par la monumentale rétrospective au Centre Pompidou en 2010, la préparation de l’ouverture de son musée à Rodez et de nombreuses expositions personnelles, l’année 2011, libre de tout projet d’exposition, lui permet de se livrer enfin tout entier dans son obsession irrésolue de faire surgir la lumière du noir. Il réalise trente-cinq toiles au cours de cette année où, une fois encore, il renouvelle sa peinture.
Appartenant à une « famille » des toiles à traits « gravés » que Soulages développe dès l’année 2000, Peinture 130 x 81 cm, 13 avril 2011 vibre d’une cascade de traits horizontaux, à la fois fins et profonds. Leur rythme ascendant souligne les jeux de lumière et relance constamment le regard de l'observateur. En obligeant à penser autrement la notion même de couleur, l’œuvre apparaît comme une méditation sur les possibilités inattendues de la peinture et de son renouvellement infini. En parlant de cette période de Soulages, Philippe Dagen la rapproche des œuvres de Richard Long, Lee Ufan ou encore Giuseppe Penone, concluant ainsi: «… [Son] œuvre échappe à la solitude où elle paraissait se retirer et entre à nouveau en conversation avec des artistes actuels que l’on ne s’attendait pas à voir apparaître. Elle ne pouvait montrer de meilleure manière combien elle demeure contemporaine et vivante» (P. Dagen, « A 92 ans, Soulages remet du blanc dans son noir » in Le Monde, 11 novembre 2012).
“Black has some unsuspected possibilities and, mindful of what I do not know, I set out to meet them.” Pierre Soulages
Since that day in 1979 when “the black colour invaded the canvas”, Soulages has been working the outrenoir: it is no longer the colour itself that interests the artist, but rather the textures of the black, sometimes smooth, sometimes fibrous, sometimes convex, sometimes concave; and above all the light created by this geography of the canvas, which varies depending on the exposure, the lighting and the position of the spectator.
Thirty years later, in the 2000s, Soulages is still loyal to the poetry of black light and continues, like an explorer, to travel systematically over the yet undiscovered areas of his outrenoir domain. While the years 2009 and 2010 were particularly intense in the artist’s career, marked by an tremendous retrospective at the Centre Pompidou, preparation for the opening of his Museum in Rodez and numerous solo shows; in 2011, free of any planned exhibitions, Soulages can finally devote himself to his obsession with making the light appear out of the black. He makes some thirty-five canvases in the course of that year and succeeds once again in renewing his painting.
Belonging to the “family” of so-called canvases with “engraved lines” that Soulages initiated in 2000, Peinture 130 x 81 cm, 13 avril 2011 vibrates with a stunning cascade of thin and deep horizontal strokes. Their rising cadence emphasises the play of light and constantly stimulates the gaze of the viewer. It obliges him to think differently the very notion of colour and appears as a meditation on the unexpected possibilities of painting and its infinite renewal. Talking about this period of Soulages’ work, Philippe Dagen likens it to the works of Richard Long, Lee Ufan or even Giuseppe Penone, concluding: “… [His] painting escapes the solitude, into which it seemed to withdraw, and enters into conversation with the contemporary artists – something that no one would expect to happen. There couldn’t be a better way for his art to manifest how contemporary and alive it still is” (P. Dagen, “A 92 ans, Soulages remet du blanc dans son noir” in Le Monde, 11 November 2012).
Pierre Soulages
Depuis cette journée de janvier 1979 où « la couleur noire avait envahi la toile », Soulages travaille l'outrenoir: ce n'est plus la couleur elle-même qui intéresse l'artiste, mais plutôt les textures du noir, tantôt lisses, tantôt fibreuses, quelquefois en creux, quelquefois en relief ; et surtout la lumière qui naît de cette géographie de la toile, et qui varie selon l'exposition, la lumière, la position du regardeur.
Trente ans plus tard, dans les années 2000, Soulages reste toujours fidèle à la poésie de la lumière noire et continue, tel un explorateur, à parcourir systématiquement les territoires encore vierges de son domaine outrenoir. Si le début des années 2010 a été particulièrement intense dans sa carrière, marquée par la monumentale rétrospective au Centre Pompidou en 2010, la préparation de l’ouverture de son musée à Rodez et de nombreuses expositions personnelles, l’année 2011, libre de tout projet d’exposition, lui permet de se livrer enfin tout entier dans son obsession irrésolue de faire surgir la lumière du noir. Il réalise trente-cinq toiles au cours de cette année où, une fois encore, il renouvelle sa peinture.
Appartenant à une « famille » des toiles à traits « gravés » que Soulages développe dès l’année 2000, Peinture 130 x 81 cm, 13 avril 2011 vibre d’une cascade de traits horizontaux, à la fois fins et profonds. Leur rythme ascendant souligne les jeux de lumière et relance constamment le regard de l'observateur. En obligeant à penser autrement la notion même de couleur, l’œuvre apparaît comme une méditation sur les possibilités inattendues de la peinture et de son renouvellement infini. En parlant de cette période de Soulages, Philippe Dagen la rapproche des œuvres de Richard Long, Lee Ufan ou encore Giuseppe Penone, concluant ainsi: «… [Son] œuvre échappe à la solitude où elle paraissait se retirer et entre à nouveau en conversation avec des artistes actuels que l’on ne s’attendait pas à voir apparaître. Elle ne pouvait montrer de meilleure manière combien elle demeure contemporaine et vivante» (P. Dagen, « A 92 ans, Soulages remet du blanc dans son noir » in Le Monde, 11 novembre 2012).
“Black has some unsuspected possibilities and, mindful of what I do not know, I set out to meet them.” Pierre Soulages
Since that day in 1979 when “the black colour invaded the canvas”, Soulages has been working the outrenoir: it is no longer the colour itself that interests the artist, but rather the textures of the black, sometimes smooth, sometimes fibrous, sometimes convex, sometimes concave; and above all the light created by this geography of the canvas, which varies depending on the exposure, the lighting and the position of the spectator.
Thirty years later, in the 2000s, Soulages is still loyal to the poetry of black light and continues, like an explorer, to travel systematically over the yet undiscovered areas of his outrenoir domain. While the years 2009 and 2010 were particularly intense in the artist’s career, marked by an tremendous retrospective at the Centre Pompidou, preparation for the opening of his Museum in Rodez and numerous solo shows; in 2011, free of any planned exhibitions, Soulages can finally devote himself to his obsession with making the light appear out of the black. He makes some thirty-five canvases in the course of that year and succeeds once again in renewing his painting.
Belonging to the “family” of so-called canvases with “engraved lines” that Soulages initiated in 2000, Peinture 130 x 81 cm, 13 avril 2011 vibrates with a stunning cascade of thin and deep horizontal strokes. Their rising cadence emphasises the play of light and constantly stimulates the gaze of the viewer. It obliges him to think differently the very notion of colour and appears as a meditation on the unexpected possibilities of painting and its infinite renewal. Talking about this period of Soulages’ work, Philippe Dagen likens it to the works of Richard Long, Lee Ufan or even Giuseppe Penone, concluding: “… [His] painting escapes the solitude, into which it seemed to withdraw, and enters into conversation with the contemporary artists – something that no one would expect to happen. There couldn’t be a better way for his art to manifest how contemporary and alive it still is” (P. Dagen, “A 92 ans, Soulages remet du blanc dans son noir” in Le Monde, 11 November 2012).